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Conception et dimensionnement du module de conversion

3.7 Thermographie infrarouge et bilan thermique

3.7.1 Objectifs

L’objectif des essais menés sur le banc thermique avec la caméra infrarouge est de mieux cerner la capacité de fonctionnement à haute température de la puce IGBT au sein de son assemblage. Concrètement, il s’agit de déterminer comment varie la température de jonction et la résistance thermique jonction/boîtier en fonction du flux thermique et de la température de semelle du composant. Lors de ces essais, plusieurs paramètres seront observés comme le gradient de température à la surface d’une puce IGBT, le gradient entre la température maximale pour une puce et la température de boîtier … A l’issus de ces essais, il nous sera possible de calibrer le paramètre “température” pour nos essais de fiabilité accélérés, sans tomber en régime extrême (emballement thermique d’une puce).

3.7.2 Protocole des essais

Ces essais se sont déroulés sur le banc thermique défini au paragraphe 3.3.2.1. Comme précédemment, un module IGBT est ouvert et l’intérieur du module est peint. Durant la première campagne, le flux thermique au niveau des puces IGBT sera maintenu constant (75w/puce) et la température de socle des modules augmentera au fur et à mesure. A chaque fois, une image sera prélevée et permettra de mesurer différentes grandeurs :

- La température moyenne sur la puce ainsi que la température maximale,

- La résistance thermique entre la surface d’une puce IGBT et le socle (par rapport à la température moyenne et maximale).

La température de socle des modules IGBT est obtenue grâce à une sonde thermocouple calibrée et placée au milieu du socle, entre la puce IGBT et la puce diode, dans une rainure faite sur le radiateur.

La deuxième campagne est faite en fixant le débit de ventilation afin d’obtenir une température de semelle modérée (entre 60 et 70°C) et en faisant varier le flux de perte. Les pertes pour une puce sont obtenues en ajustant la tension aux bornes de la puce par le potentiomètre, à courant donné (cf. figure III.25).

3.7.3 Résultats principaux

3.7.3.1 Pour un flux constant (75W/puce)

La figure III.46 nous donne l’évolution de la température de jonction ainsi que de la résistance thermique (moyenne et maximale) en fonction de la température de semelle du module IGBT.

(a) (b)

Figure III.46 : évolution de la température de jonction (a) et de la résistance thermique (b)(moyenne et maximale) en fonction de la température de semelle

On constate que Tjmax et Tjmoy suivent la température de socle avec une loi quasi-proportionnelle sur

toute la plage de test (tsocle entre 100°C et 300°C). Ce comportement se traduit également par une résistance

thermique moyenne de puce assez peu variable (0,37°C/W < Rthmoy < 0,44°C/W) tout à fait conforme à la

valeur donnée dans la datasheet du module IGBT (0,43°C/W). La résistance thermique moyenne (Rthmoy)

augmente de 13% sur l'intervalle 200°C < Tsocle < 300°C, Ceci est dû au fait que la conductivité thermique du

λsilicium = 150.(T/300) -4/3

les calculs montrent ainsi que λsilicium décroît de 23% sur l'intervalle considéré ; de même la

conductivité thermique de l'AlN décroît selon une loi en T-1,5 au delà de 200°C. Pour les brasures nous n'avons aucune information précise. Cependant, ces phénomènes conductifs sont atténués par la présence d'un flux de convection entre la puce et l'ambiant qui ne peut pas être négligé ici compte tenu de la haute température de puce d'une part, et de la configuration module ouvert sans gel d'autre part. Par conséquent, un module fermé utilisé dans les mêmes conditions serait sujet à une augmentation de Rth beaucoup plus élevée, de 20 à 30% sans doute. Le même essais serait envisageable en utilisant un module fermé et Vge comme paramètre thermo-sensible.

On constate aussi que Rthmax augmente selon la même tendance ce qui montre bien que le gradient de

température reste bien maîtrisé et de faible valeur : de 15°C à 20°C pour la plage de température. Ceci tient du fait que le flux thermique appliqué sur la puce est modéré. Une formule empirique nous permet de calculer ce gradient sur la puce [Kraus] :

∆T = P/(8 λsilicium L)

P : flux total appliqué uniformément,

λ : conductivité à la température moyenne de la puce, L : longueur équivalente au côté de la puce.

En appliquant cette formule sur les puces du module (6mm de longueur et 9mm de largeur) et pour une température de 250°C, on obtient un gradient de 17,2°C.

3.7.3.2 Pour un débit de ventilation constant

La figure suivante nous donne l’évolution de la température de jonction moyenne et maximale ainsi que de la résistance thermique maximale en fonction du flux thermique injecté sur une puce IGBT.

Figure III.47 : évolution de la température de jonction (moyenne et maximale) (a) et de la résistance thermique maximale (b) en fonction du flux thermique

On constate que le gradient de température est nettement croissant avec le flux, en raison d'une part de la géométrie initiale de la puce (volume fini avec effet de bord) et d'autre part en raison d'un flux appliqué non totalement homogène au niveau des métallisations, même si la densité de courant est ici très faible (≅13A/cm²). Le gradient mesuré suit ainsi une évolution pratiquement linéaire de 0,55%/W jusqu'à 142°C. La résistance thermique calculée entre le point le plus chaud et le socle présente une dérivée relativement modeste de 0,003°C/W².

Ce gradient croissant provoque l'apparition une zone chaude autour de b4 de 1,2 mm de côté environ. Le relevé de température présenté sur la figure III.48 le montre bien.

Ilot Collecteur Collecteur Ilot Grille Ilot Emetteur Ilot “ relais ” Ilot Emetteur Commande Zone chaude miroir RTC

localisation du point chaud

Relevé infrarouge

Figure III.48 : relevé de température pour un flux de 146 W/cm² et une température de semelle de 67°C (point avant la défaillance)

A haute température, la résistivité du cristal semi-conducteur (Si) cesse de croître : la concentration intrinsèque de porteurs générés par effet thermique n'est plus négligeable par rapport aux concentrations extrinsèques présentes dans les différentes couches semi-conductrices (P+, N-, ..) du composant. La température critique correspond à une génération thermique de porteurs prépondérante dans les bandes de conductions, les porteurs sont largement en excès, et par conséquent une forte réduction de la résistivité du cristal semi-conducteur apparaît : c'est l'effet de "résistance négative". Selon la littérature, cette température est véritablement une donnée intrinsèque au dispositif et repose sur les valeurs de concentration en impuretés de type P et de type N. La tension étant imposée aux bornes de l'ensemble des cellules en parallèle constituant l'IGBT, les cellules concernées par cette "résistance négative" vont subir un flux thermique encore plus élevé que les autres cellules avec un resserrement des lignes de courant au niveau de ces cellules, conduisant à l'emballement thermique et à la fusion locale de la métallisation à 600°C puis du cristal selon un chemin vertical vers 1300°C.

La lecture des courbes montrent que ce gradient croit fortement à partir de 155°C, 142W avec une évolution de 1,7%/W, la résistance thermique présente quant à elle une dérivée multipliée par 10, très forte, de 0,03°C/w², ce qui annonce l'emballement thermique local qui a été mesuré et visualisé à 185°C. Pour nos essai de fiabilité, nous allons bien entendu nous placer en deçà de cette température et donc imposer une température de jonction inférieure à 155°C. Conformément à ce résultat, la figure III.49 nous donne le relevé thermo-graphique obtenu pour une température de jonction moyenne de 150°C et un flux de perte de 75W.

Figure III.49 : image thermique des deux puces IGBT d’un module, obtenu pour une température de socle de 124°C et 75W de perte

On constate que pour ces conditions, la température maximale à la surface des puces IGBT avoisine les 165°C, avec une température moyenne de 155°C. Le gradient de température à la surface de ces puces est faible (15°C soit 9,6% de Tjmoy) et sur cette image, il est possible de voir les bonding et les contours de la

puce car ces contours, n’étant pas une surface active de la puce, sont moins chaud (150°C).

Lors de cet essai, nous avons quasiment atteint la température limite admissible pour nos essais de fiabilité. En effet, la température de fonctionnement maximale pour une puce IGBT placée dans un module est définie par la température de fusion des brasures puce/substrat. Ces brasures sont constituées, en général d’étain avec des températures de fusion relativement basses (180 à 200°C). Lors de nos essais, il serait préférable de rester en deçà de cette température afin de ne pas provoquer la fusion de ces brasures. De plus, ce relevé a été réalisé sur un module IGBT ouvert. Dans la réalité, avec un module fermé, la température à l’intérieur sera légèrement plus élevée (avec un module ouvert, le phénomène de convection naturel est présent).

La conclusion de ces essais est que le module IGBT se comporte correctement à haute température. Le gradient reste maîtrisé sur une large plage de température (200 à 300°C) Ceci tient du fait que le flux thermique appliqué sur la puce est modéré.

3.7.4 Bilan thermique

Tout au long de ce paragraphe consacré aux aspects thermiques du module de conversion, nous avons essayé de fixer et de déterminer de manière précise la température maximale admissible pour une puce IGBT qui sera soumise à nos essais de fiabilité. Cette détermination a nécessité de s’intéresser à tous les éléments de la chaîne de transfert thermique : du système de refroidissement (dimensionnement), au packaging du module IGBT, jusqu’à la puce IGBT. A partir de ces travaux, il est possible de dresser le bilan suivant :

Valeur minimale … Valeur maximale

T puce IGBT 93°C … 140°C T boîtier 65°C … 110°C Résistance thermique 0,37 … 0,4 Résistance thermique du radiateur 0,065 … 0,131

Pertes 75W/puce IGBT …. >75W/puce IGBT

(à mesurer)

Tableau III.8 : bilan thermique

Enfin, il est possible de déterminer les conditions thermiques que nous adopterons pour les futurs essais de fiabilité :

T jonction IGBT max = 150°C T jonction IGBT moyen = 140°C