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3 Concepts et champs disciplinaire infirmier

3.4 Théorie de soins infirmière

La théorie choisie est la « theory of the unpleasunt symptoms (TOUS) », en français « la théorie des symptômes désagréables ». Elle a été développée par quatre infirmières : Audrey Gift, Elisabeth Lenz, Renee Milligan, Linda Pugh en 1995.

La théorie se situe dans les « middle range theory » car elle a été conçue en partant des observations cliniques concrètes faites par ces théoriciennes sur leur lieu de pratique. En 1997, la théorie des symptômes désagréables a été améliorée par les auteurs pour qu’elle reflète davantage la complexité et le dynamisme des situations cliniques. Toutefois, l’explication de la théorie

reste basée sur le modèle primaire. Pour aborder cette théorie, nous nous sommes aidés des ouvrages de Peterson & Bredow (Peterson & Bredow, 2013) et Smith & Liehr (Smith & Liehr, 2013).

La théorie des symptômes désagréables est centrée sur les symptômes et tient compte de plusieurs groupes de symptômes. Dans ce travail, nous traitons de deux pathologies qui sont la dépression et les douleurs chroniques.

La théorie est constituée de trois concepts majeurs : les symptômes, les facteurs influençant et les résultats de performances. Les symptômes, point de départ de la conceptualisation de cette théorie, représentent le concept principal. Ils sont définis comme « des indicateurs perçus du changement dans le fonctionnement normal vécu par le patient » (Smith & Liehr, 2013, pp.170).

Ils peuvent se manifester seuls ou interagir avec d’autres symptômes. Dans certains cas, un symptôme peut aussi induire l’apparition d’un autre. Les douleurs chroniques et la dépression sont étroitement liées, ainsi l’un peut intensifier l’autre (Peterson & Bredow, 2013 ; Smith & Liehr, 2013).

Les symptômes, prédicateurs importants des résultats de performance, comprennent quatre dimensions reliées entre elles qui sont importantes à connaître et à prendre en compte pour gérer les symptômes (Smith & Liehr, 2014). La première est l’intensité qui « est la dimension qui quantifie le degré, la force et la sévérité du symptôme » (Smith & Liehr, 2013, p.172). C’est généralement la caractéristique la plus simple à évaluer pour les patients. La seconde est la détresse qui désigne « l’aspect affectif de l’expérience des symptômes » (Smith & Liehr, 2013, p.174). Le degré de détresse en lien avec le vécu d’un symptôme est lié à son intensification mais également à d’autres aspects tels que la culture, le seuil de tolérance, le niveau d’attention accordé à ces symptômes et particulièrement le sens donné à cette expérience. La troisième est le temps qui est la durée pendant laquelle se manifeste un symptôme. Il comprend également sa fréquence d’apparition, le motif avec lequel il varie ou réapparait. La dimension « temps » permet de différencier les symptômes aigues des symptômes chroniques, à savoir que les approches ne sont pas les mêmes. La dernière est la qualité des symptômes qui se réfère à la nature des symptômes, la manière dont ils se manifestent et sont vécus (Smith & Liehr, 2013). Chaque symptôme a ses propres caractéristiques et sera décrit par la personne de

manière spécifique. Par exemple la douleur peut se manifester par différents types de sensations, tels que des coups de couteau, brûlures ou piqûres. Si la nature du symptôme change, cela peut traduire une évolution de la maladie. « La dramatisation induit des attentes négatives du devenir de la douleur ; associée aux symptômes dépressifs elle peut être un indicateur prédictif de l’évolution de la douleur chronique » (O’Reilly, 2011, p.128) Le deuxième concept est les « facteurs influençant » qui comprend trois facteurs (Peterson & Bredow, 2013). Ceux-ci peuvent avoir une influence sur l’expérience d’un symptôme comme ce dernier peut aussi avoir une influence sur ces trois facteurs (Smith & Liehr, 2013).

Le premier facteur est les facteurs psychologiques qui comportent l’état cognitif et l’humeur. L’affect ou l’humeur de l’individu avant ou pendant le vécu de l’expérience des symptômes peut intensifier les symptômes. L’état cognitif inclut le niveau de connaissance que la personne a sur la maladie ou les symptômes qu’elle présente, la signification qu’elle leur donne, ses expériences antérieures, les ressources dont elle dispose pour faire face et ses stratégies d’adaptation (Peterson & Bredow, 2013 ; Smith & Liehr, 2013). Certains auteurs stipulent que la dépression qui résulte de la douleur chronique peut causer des distorsions cognitives comme le catastrophisme ou la dramatisation. Elle va générer des croyances associées à la douleur, qui vont inhiber le fonctionnement optimal de l’individu (Brown GK., 1990 dans O’Reilly, 2011).

Le second facteur est les facteurs physiologiques qui comprennent les variables anatomiques, génétiques, physiologiques, y compris la présence de comorbidités, la durée, le stade d’une pathologie ainsi que le type et la durée des traitements. Tous peuvent influencer l’apparition et le vécu des symptômes (Peterson & Bredow, 2013 ; Smith & Liehr, 2013). L’interaction entre les différents facteurs d’influence physiologique peut être assez complexe. Nous avons relevé que la douleur chronique et la dépression sont étroitement associées, les liens qui les unissent sont complexes. Les patients atteints de dépression présentent des plaintes douloureuses plus nombreuses, de plus forte intensité et de plus longue durée que les personnes ne souffrant pas de dépression. L’inverse est aussi valable, la pénibilité et le sentiment de perte de contrôle qu’engendre la douleur chronique mènent à la dépression (Rentsch et al., 2009).

Les facteurs situationnels, troisième facteur, sont contextuels et donc externes à la personne. Ils comprennent l’environnement physique et social de l’individu. Par exemple, la culture peut impacter l’intégration et l’expression des symptômes. Il y a notamment d’autres facteurs tels que l’accès à une aide financière, le statut professionnel, le statut familial, l’accès aux soins et à l’hygiène, ainsi que le niveau de soutien social, y compris les caractéristiques du contexte dans lequel la personne reçoit les soins (Smith & Liehr, 2013).

Le dernier concept est « les résultats de performance ». La théorie le définit comme « les conséquences de l’expérience des symptômes ». Ces

derniers peuvent avoir un impact sur la capacité de l’individu à fonctionner ou à exercer des rôles physiques, cognitifs et sociaux. Typiquement, les personnes atteintes de douleur chronique, qui expérimente le phénomène douloureux au quotidien, finissent par craindre certaines activités qui nécessitent des mouvements qui peuvent devenir algiques. Ce phénomène se voit souvent chez les personnes qui finissent par diminuer leur pourcentage d’occupation au travail, ne supportant plus certains mouvements ou positions. La diminution de l’activité chez les personnes souffrant de douleur chronique peut amener, au fil du temps, à un retrait social car la crainte d’avoir mal durant les activités de groupe prédomine les pensées de ces personnes (Marchand, 2009).

Le but de cette théorie est de permettre au soignant d’avoir une meilleure compréhension de l’expérience des symptômes vécus par la personne et de fournir des informations utiles pour concevoir des interventions efficaces pour prévenir, améliorer les symptômes désagréables et leurs effets négatifs. Choisir cette théorie était plus que pertinent pour nous car son concept principal comprend les symptômes. Premièrement, elle se concentre principalement sur les symptômes subjectifs perçus décrit par le patient, plutôt que sur les signes observés. Pour nous, cela permet d’autonomiser le patient en l’accompagnant à mettre des mots sur ce qu’il ressent. Deuxièmement, elle comporte plusieurs concepts, tous pertinents, qui permettent de recueillir auprès du patient des informations sur le plan biopsychosocial notamment ses stratégies d’adaptation habituelles, ses

ressources, ses connaissances sur ses symptômes, comment il les expérimente. Un autre point clé dans les facteurs psychologiques est l’état affectif. Nous savons que la dépression induit une perturbation négative de l’humeur, un ralentissement psychique et physique. Il est donc important de tenir compte de l’influence que peuvent avoir les symptômes sur les facteurs d’influence ainsi que l’effet inverse que par exemple un état dépressif associé à des douleurs chroniques peut avoir sur le fonctionnement de l’individu dans son environnement social (P. André, 2013).

La prise en compte de l’expérience des symptômes vécus par les personnes s’avère être une piste intéressante à suivre par toutes les professions de la santé afin de choisir les interventions les plus adaptées pour diminuer les symptômes et ainsi améliorer leur qualité de vie (Eicher, Delmas, Cohen, Baeriswyl, & Viens Python, 2013). Proposer une intervention basée sur la pleine conscience offre un soulagement, plus qu’une guérison des symptômes et « peut déclencher un changement positif radical dans la vision de la santé et de la maladie » (Weber, Jermann, Lutz, Bizzini, & Bondolfi, 2012, p. 1396).

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