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3 Concepts et champs disciplinaire infirmier

3.3 Mindfulness (pleine conscience)

La méditation en pleine conscience ou « mindfulness » en anglais est issue de plusieurs courants de pratique bouddhiste de la méditation (Bondolfi, 2004). Kabat-Zinn explique que la pleine conscience est le fait de canaliser son attention sur le moment présent sans porter une évaluation ou un jugement sur ledit moment (Kabat-Zinn, 1994, vu dans Bondolfi, 2004). La méditation aura pour objectif d’orienter l’attention sur un phénomène. La notion d’intentionnalité est importante dans ce concept, car la méditation demande un processus mental pour être capable d’identifier les stimuli sur le moment présent (Bondolfi, 2004). Il est nécessaire d’accepter les stimuli ressentis, sans émettre de jugement de valeur sur ces derniers. La définition suivante apporte une explication supplémentaire :

« Les phénomènes qui pendant la pratique de la médication entrent dans le champ de la conscience du sujet, telles que les perceptions, les cognitions, les émotions ou les sensations physiques, sont observées très soigneusement, mais ne sont pas évaluées en tant que phénomènes bons ou mauvais, justes ou faux, sains ou malsains ou encore importants ou insignifiants » (Bondolfi, 2004, p.138).

Plusieurs études empiriques démontrent que le mindfulness permet d’améliorer plusieurs affections, notamment les douleurs chroniques, le stress, l’anxiété, la dépression, les troubles alimentaires, etc. (Bondolfi, 2004).

Christophe André, médecin psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne à Paris, explique également l’importance d’orienter l’attention sur le moment présent, sans filtre, sans jugement et sans attente (C. André, 2010). Il explique que la pleine conscience peut se diviser en trois attitudes fondamentales. La première est l’ouverture maximale du champ attentionnel (C. André, 2010), c’est-à-dire porter son attention sur tous les stimuli que ressent le corps et l’esprit (respiration, sensations corporelles, nos sens en action, les émotions, les pensées, etc.). La seconde est le désengagement des tendances à juger, à contrôler ou à orienter (C. André, 2010), c’est-à-dire que la personne qui observe les phénomènes de la première attitude ne juge pas si ces derniers sont bons ou mauvais, elle n’essaiera pas de les contrôler par d’autres mécanismes (refoulement, déni, etc.). La dernière attitude est la conscience non-élaborative (C. André, 2010), la personne ne doit pas chercher à mettre en mots ce qu’elle ressent, mais elle n’est qu’observatrice.

L’auteur rappelle que le mindfulness ou la pleine conscience existe depuis deux mille ans dans la philosophie bouddhiste. Cependant, le sens de la méditation diffère entre l’Occident et l’Orient. Dans notre culture occidentale, nous voyons dans la méditation une longue et profonde réflexion qui est un mode de pensée exigent et attentif, nous permettant d’avoir une approche

analytique et réflexive (C. André, 2010). Cet aspect de la méditation existe aussi dans la philosophie bouddhiste, mais une seconde manière de méditer, la méditation contemplative, apporte les bases au mindfulness. Cette méditation est une observation simple, mais complexe en même temps. Il s’agit d’avoir une présence simple, mais réveillée et affûtée à ce qui nous entoure. Il s’agit de ce fait de ressentir mais sans intervenir, ne pas déformer ce que nous ressentons (C. André, 2010). C’est cet aspect qui intéresse les sciences de la psychothérapie actuelles et les neurosciences. D’ailleurs le verbe « méditer » vient du latin « meditari », de « mederi » qui signifie « donner des soins à » (C. André, 2010).

André explique également que le mindfulness, comparé à la thérapie par relaxation, démontre une activité cérébrale plus importante des aires paralimbiques, notamment responsables de la perception et des sensations corporelles (C. André, 2010). Il démontre donc plusieurs découvertes d’autres auteurs sur l’impact du mindfulness sur différentes zones corticales. Katya Rubia, psychiatre de l’Université de Londres a démontré que le mindfulness augmente l’activité des zones pariétales et fronto-limbiques, les deux liées aux capacités attentionnelles (C. André, 2010). Antoine Lutz, neuroscientifique à l’Université de Madison a trouvé une augmentation de l’activité des neurotransmetteurs gamma dans le cortex préfrontal gauche qui est une zone associée aux émotions positives (C. André, 2010). Joshua Grant, neuroscientifique à l’Université de Montréal a découvert un épaississement du cortex cingulaire antérieur et du cortex

somatosensoriel qui sont deux zones qui permettent la perception de la douleur (C. André, 2010). André conclut que cela est possible grâce à la neuroplasticité cérébrale, permettant au cerveau de modifier son volume et sa structure, comme quand nous intégrons des nouveaux apprentissages (C. André, 2010). Il est intéressant de voir qu’un entraînement psychique volontaire de la part de la personne qui médite peut avoir une influence sur le fonctionnement du cerveau et donne de surcroit un intérêt particulier du mindfulness comme thérapie alternative dans les cas où les émotions sont en jeux. Ne dit-on pas que l’esprit est plus fort que la matière.

Il existe plusieurs thérapies qui ont pour base la pleine conscience (mindfulness), notamment le Mindfulness-Based Stress Reduction (MBSR), le Mindfulness-Based Cognitive Therapy (MBCT) et l’Acceptance and Commitment Therapy (ACT). Ceci n’est pas une liste exhaustive, mais elles font parties des thérapies les plus répandues (Bondolfi, 2004).

Le MBSR consiste à un entrainement visant à ne pas refouler les moments de stress de la vie par la fuite ou l’action, mais à accueillir et à observer ces moments dans un état d’éveil et de conscience particuliers, permettant d’éviter la chronicité et l’aggravation des agents stressants. Il est particulièrement utilisé pour l’anxiété et la douleur chronique (C. André, 2010).

Le MBCT se pratique avec des exercices de pleine conscience pour que la personne modifie son rapport qu’elle entretient avec les pensées négatives avant des exercices de thérapies cognitives où l’objectif est de modifier le

contenu des pensées négatives. Cette thérapie est indiquée pour diminuer le risque de rechute chez les personnes atteintes de dépression (C. André, 2010).

L’ACT a pour objectif de créer une sorte de flexibilité au niveau psychologique par rapport à un événement difficile et chronique, comme la douleur chronique et de permettre à la personne de s’engager dans cet événement et d’améliorer sa qualité de vie (Cederberg, Cernvall, Dahl, von Essen, & Ljungman, 2016). En reprenant l’exemple de la douleur chronique, la personne apprendra à vivre avec la douleur, sans tenter de l’améliorer, de l’évaluer ou de réagir face à cette douleur. Il ne s’agit pas de se résigner face à la douleur, mais d’avoir une véritable volonté de s’engager dans la vie et des activités malgré la douleur (Cederberg et al., 2016).

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