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Théorie des jeux et domaine fiscal : une revue de la littérature

Section 1 : Théorie des jeux : modélisation du comportement de l’administration fiscale et de l’entreprise à l’égard du risque

1. Théorie des jeux et domaine fiscal : une revue de la littérature

en matière fiscale, il convient tout d’abord de donner un éclairage sur cette théorie ainsi que sur ses domaines d’application.

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1.1. Eclairage sur la théorie des jeux

La théorie des jeux constitue un out il d’analyse des comportements humains. Elle permet de décrire et d’analyser de nombreuses relations économiques et sociales sous la forme de jeux stratégiques. Un jeu stratégique se caractérise par un ensemble de règles de jeu spécifiant les joueurs (deux joueurs ou plus), les choix ou les stratégies pouvant être adoptés par chacun d’eux, la séquence des décisions prises et enfin l’utilité que chaque joueur retirera à la fin du jeu pour chaque combinaison de choix possibles (Pénard, 2007). Le jeu est défini par Thepot (1998, p. 7) comme « toute situation dans laquelle plusieurs décideurs autonomes sont amenés à prendre des décisions débouchant sur des résultats. A chaque décideur est affecté un résultat mais ce résultat dépend de l’ensemble des décisions prises par tous ».

La stratégie d’un joueur est définie, par Umbhauer (2002, p. 16) comme «un plan d’actions qui spécifie l’action de ce joueur à chacun de ses éventuels tours de jeu ». Thepot (1998, p. 8) donne aussi la définition suivante : « une stratégie d’un joueur est une liste de décisions qu’il envisage de prendre en fonction de toutes les situations observables qui pourront se présenter dans l’arbre du jeu ».

Les règles du jeu peuvent être représentées sous la forme d’un arbre (forme extensive du jeu) ou d’une matrice (forme normale du jeu). Selon Umbhauer (2002, p. 16), « un jeu sous forme normale (ou stratégique) est la donnée de 3 éléments :

- N est l’ensemble des joueurs, n étant le cardinal de N ; - S= Xn

i=1 Si où Si, i= 1, 2 est l’ensemble des stratégies du joueur i (2) ;

- n relations de préférences, une par joueur, définies sur S= Xn

i=1 Si supposées de type

Von Neuman Morgenstern (ces n relations peuvent être remplacées par n fonctions Ui : S  R, i de 1 à n, où Ui désigne la fonction d’utilité Von Neuman Morgenstern

définie sur S et R l’ensemble des réels) ».

Lorsque N=2, c'est-à-dire que le jeu est à deux joueurs, la forme normale est une matrice. Dans cette matrice sont représentées les stratégies jouées par chaque joueur (les lignes et les colonnes) ainsi que les utilités réalisées suite à ces stratégies jouées.

La deuxième représentation du jeu prend la forme extensive. Celle-ci « a été popularisée par Selten (1975). Elle consiste à représenter, à l’aide d’un arbre, les différents enchaînements décisionnels possibles » (Umbhauer, 2002, p. 17).

La théorie des jeux trouve son fondement dans le travail de Von Neumann et Morgenstern (1944) dans leur livre intitulé « Theory of Games and Economic Behavior ».

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Schmidt (2001, p. 32) signale, dans ce cadre, que « ce n’est pas tout à fait un hasard si Von Neumann s’associa à l’économiste Morgenstern pour rédiger le volumineux ouvrage theory of Games and Economic Behavior qui, publié immédiatement à la fin de la seconde guerre mondiale, a marqué la naissance officielle de la théorie des jeux ». Ce livre englobe pour sa majorité des développements mathématiques présentant les solutions de jeux à somme nulle. Après un certain nombre d’années, d’autres développements de cette théorie viennent s’ajouter par Nash (entre 1950 et 1953). Selon Schmidt (2001, p. 32), « il a donc fallu attendre Nash, ses jeux non coopératifs à somme variable, son célèbre équilibre, et son modèle de négociation, pour que les économistes professionnels commencent à prendre au sérieux la théorie des jeux. En quelques pages denses, Nash résolvait plusieurs des casse-tête qui avaient occupé des générations d’économistes ». Cette théorie peut être définie comme « un cadre conceptuel d'analyse de la décision où cette interaction stratégique entre les décideurs est centrale pour la compréhension de l'issue finale » (Gliz, 2010, p.7). Cette définition permet de constater que la théorie des jeux se base sur l’interaction entre les joueurs, c'est-à-dire que l’utilité d’un joueur ne dépend pas seulement de ses propres décisions mais dépend aussi des décisions prises par les autres joueurs. Cette théorie suppose aussi que les joueurs sont rationnels c'est-à-dire que chaque joueur cherche à m aximiser sa propre utilité. Selon Guerrien (2002, p. 7 ), « l’hypothèse fondamentale de la théorie des jeux est celle qui stipule que chacun cherche à maximiser ses gains quelle que soit la façon dont ils sont mesurés. Souvent, on parle de rationalité à propos de cette hypothèse ».

Thepot (1998, p. 11) considère que la théorie des jeux n’est pas une théorie normative. Selon ce m ême auteur, « la théorie des jeux n’est pas une théorie normative que l’on pourrait appliquer sans vergogne, puisqu’il faut être normatif en lieu et place de l’ensemble des acteurs du jeu. Elle ne prétend être rien d’autre qu’une manipulation de faits stylisés, destinée à nourrir la réflexion du décideur en l’aidant à prendre en compte les interactions stratégiques avec ses protagonistes ».

Selon Gregory (2002, p. 2), « la théorie des jeux a deux fonctions essentielles :

- Elle définit les solutions des différents jeux, par la notion d’équilibre et donc prédit le comportement des joueurs ;

- Elle décrit les propriétés de ces solutions : nature des allocations, stabilité des stratégies d’équilibre, … ».

Selon Yildizoglu (2003, p. 4), « la théorie des jeux propose des modèles qui sont des représentations très abstraites des situations réelles ».

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Donc, le fait de pratiquer la théorie des jeux à n’importe quel contexte conduit souvent à une situation d’équilibre où c hacun des joueurs n’a pas intérêt à dévier de sa stratégie. Dans ce sens, Thepot (1998, p. 8 ) définit l’équilibre comme «un ensemble de stratégies (une par joueur), chaque joueur individuellement doit s’en tenir à sa stratégie d’équilibre dont il n’aura jamais intérêt à s’écarter, s’il admet que les autres en font autant. Schmidt (2001, p. 33 ) ajoute que « l’expérimentation et la simulation enrichissent ses représentations ».

Une revue de la littérature sur cette théorie a permis de ressortir plusieurs typologies de jeux. Une première typologie subdivise les jeux en deux types : jeux coopératifs contre jeux non coopératifs. Une deuxième typologie classe les jeux en deux autres types : jeux statiques contre jeux dynamiques alors qu’une troisième typologie différencie les jeux simultanés des jeux séquentiels. Les jeux statiques se déroulent en une seule fois ignorant ainsi la dimension temps alors que les jeux dynamiques tiennent compte de cette dimension et peuvent être soit des jeux répétés soit des jeux séquentiels (Gliz, 2010).

Les jeux non coopératifs sont définis, par Yildizoglu (2010, p. 35), comme suit : « les jeux non-coopératifs correspondent à des situations d’interactions entre individus libres dans leurs choix et poursuivant des objectifs propres et indépendants. Ces individus ne communiquent pas avant le jeu et n’ont pas nécessairement le moyen de s’engager à poursuivre une stratégie particulière. Dans ce contexte, l’équilibre de Nash cherche les résultats qui sont stables par rapport aux déviations individuelles, donc unilatérales. L’absence de communication implique une absence de coordination explicite et des déviations multilatérales ». Cet équilibre de Nash, déterminé dans le cadre des jeux non coopératifs, est défini par Umbhauer (2002, p. 61- 62) comme « un profil de stratégies qui présentent une stabilité minimale, à savoir la stabilité aux déviations unilatérales. Ainsi, un profil de stratégies constitue un équilibre de Nash, si et seulement si aucun acteur ne peut améliorer son utilité s’il est le seul à s’écarter de la stratégie prévue par le profil ».

Les jeux sont considérés comme coopératifs « lorsque des joueurs peuvent passer entre eux des accords qui les lient de manière contraignante (par exemple, sous la forme d’un contrat qui prévoit une sanction légale dans le cas du non-respect de l’accord). On dit alors qu’ils forment une coalition dont les membres agissent de concert » (Thisse, 2008).

L’information tient une place fondamentale dans la théorie des jeux. En effet, cette dernière privilégie « le rôle de l’information et de la connaissance des décideurs dans l’analyse des processus d’interaction économique » (Schmidt, 2001, p. 33). Les jeux peuvent être à information partielle ou totale. L’information partielle peut se manifester

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soit à travers une information imparfaite ou une information incomplète. L’information imparfaite a t rait aux actions choisies par les acteurs en jeu. Dans ce cadre, Umbhauer (2002, p. 25 ) considère qu’ « un jeu est à information imparfaite si l’information d’au moins un joueur est imparfaite, c'est-à-dire si, à l’un au moins de ses tours de jeu, il ne connait pas certaines des actions jouées en amont ». Il y donc méconnaissance de l’histoire du jeu par l’un des joueurs.

Quant à l’information incomplète, elle porte sur la structure du jeu. En effet, « un acteur peut ignorer les gains de certains joueurs faisant suite à des enchaînements d’action, auquel cas il ne connaît pas certaines coordonnées des vecteurs d’utilité associés aux issues du jeu. Il peut douter de l’ensemble de stratégies dont disposent certains acteurs à certains de leurs ensembles d’information, et donc méconnaître le nombre de branches issues de certains sommets » (Umbhauer, 2002, p. 25).

Par contre, un j eu est à information complète si « chaque joueur connait les caractéristiques du jeu (issues et gains dans toutes les éventualités possibles) et de tous les participants (leur ensemble de choix et la fonction d’utilité, de profit ou d’autre chose qu’ils cherchent à maximiser) » (Guerrien, 2002, p.8).

Les stratégies adoptées par les joueurs peuvent être des stratégies pures ou mixtes. Les stratégies mixtes constituent des stratégies pures auxquelles on a ttribue des probabilités. Une stratégie pure désigne « un plan d’actions qui spécifie une action de ce joueur à chacun de ses éventuels tours de jeu. On note Si l’ensemble des stratégies pures du joueur i

et si un élément de cet ensemble » (Umbhauer, 2002, p. 38).

Les domaines d’application de la théorie des jeux sont multiples (l’économie, la science politique, le marketing, la finance, la comptabilité…). Plus spécifiquement, cette théorie a été utilisée dans l’évaluation du risque d’audit (Fellingham et Neuman, 1985).

1.2. Théorie des jeux et discipline des sciences de gestion

L’application de la théorie des jeux dans le domaine des sciences de gestion a ét é soulevée par plusieurs chercheurs. Dans ce cadre, Umbhauer (2002), dans son ouvrage intitulé « Théorie des jeux appliquée à la gestion », a cherché à convaincre les gestionnaires de l’utilité de cette théorie dans l’éclairage de nombreux contextes de gestion. Selon ce même auteur, « la théorie des jeux n’est d’aucune utilité au gestionnaire s’il ne peut saisir le pourquoi des différents résultats qu’elle met en avant. Aussi l’accent est mis sur le raisonnement stratégique qui fonde chaque résultat… ; la théorie des jeux n’a pas pour ambition de remplacer le décideur en lui fournissant la solution à son problème

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d’interactions. Par des jeux de structure simple, elle s’attache à souligner pourquoi certaines propriétés d’un contexte, contrairement à d’autres, sont susceptibles d’avoir un impact sur les résultats, et précise la nature de cet impact… En bref, son but est d’enrichir la réflexion qui guide la décision » (Umbhauer, 2002, p. 8).

Selon Thepot (1998, p. 7 ), deux questions fondamentales sont posées pour évaluer l’apport de la théorie des jeux dans le domaine des sciences de gestion, la première est « comment modéliser la situation ou le jeu ? » alors que la deuxième question est « comment en tirer des règles de décision applicables dans les entreprises et les organisations ? ». Selon ce même auteur, pour pouvoir bénéficier des développements réalisés en théorie des jeux dans le domaine des sciences de gestion, trois conditions doivent être respectées : accepter une démarche en termes de faits stylisés (où le décideur prend en compte les interactions stratégiques avec d’autres acteurs), chercher à pratiquer la théorie des jeux plutôt qu’à l’appliquer (la théorie des jeux est une démarche dans laquelle le modélisateur engage un dialogue avec le décideur, à partir de modélisations simples nécessitant des connaissances techniques minimales, et discute par la suite les résultats obtenus), recentrer les sciences de gestion autour des thèmes susceptibles d’être traités par la théorie des jeux.

1.3. Théorie des jeux et impôt: une analyse des comportements de l’entreprise et de l’administration fiscale

Les domaines d’application de la théorie des jeux couvrent aussi la fiscalité. Plus spécifiquement, la relation entre les deux acteurs mis en jeu dans le cadre de notre étude, à savoir l’entreprise et l’administration fiscale, a été examinée par plusieurs chercheurs sous l’angle de la théorie des jeux. Ces recherches se sont focalisées sur l’analyse du comportement de contrôle des autorités fiscales en réponse au comportement de divulgation de l’entreprise. Les premières études reposent dans leur analyse sur la décision de divulgation du seul résultat fiscal par le contribuable (Rhoades, 1999 ; Reinganun et Wilde, 1986…), alors que des études plus récentes intègrent la décision de divulgation d’autres informations en plus du résultat fiscal (Zheng, 2002 ; Mills et Sansing, 2000…).

1.3.1. Déclaration du seul résultat fiscal par le contribuable

Le premier modèle de la théorie des jeux qui traite la relation entre l’administration fiscale et les entreprises a été suivie par d’autres modèles plus améliorés, dans lesquels les auteurs ont essayé de tenir compte de nouveaux facteurs susceptibles d’influencer le comportement des deux acteurs.

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1.3.1.1. Administration fiscale comme un élément interactif : un jeu simple en

information incomplète

Graetz et al. (1986) sont les premiers à introduire la théorie des jeux dans l’étude des comportements du c ontribuable et de l’administration fiscale. Les auteurs proposent un nouveau cadre théorique pour l’analyse du p roblème de non-conformité fiscale en le considérant comme un système interactif. Ils incluent ainsi dans leur modèle théorique l’autorité fiscale comme un élément interactif important (dans les travaux antérieurs, les actions et politiques des autorités fiscales sont traitées comme des paramètres exogènes).

L’autorité fiscale est en effet considérée comme un acteur stratégique dans le modèle de la théorie des jeux. Sa décision de contrôle repose sur les déclarations faites par les contribuables. Les niveaux de non-conformité, de contrôle et de pénalités sont par conséquent les résultats de l’interaction entre les contribuables et l’administration fiscale.

Le modèle suit la séquence naturelle et temporelle des décisions. Le contribuable déclare son résultat, puis l’administration fiscale décide, sur la base du résultat déclaré, si elle exerce ou non un contrôle. Si le contribuable n’est pas contrôlé, la déclaration détermine sa charge fiscale finale. Si le contribuable subi un c ontrôle fiscal, sa charge fiscale est calculée sur la base de son ‘vrai’ résultat (qui sera découvert au cours du processus de contrôle), plus des amendes, pénalités et/ou intérêts.

Dans leur modèle de base, les auteurs supposent que l’administration fiscale cherche à maximiser le revenu total du gouvernement, y compris les impôts et pénalités nets des coûts de contrôle. Leur modèle inclut aussi deux types de contribuables : les contribuables stratégiques (strategic noncompliers) qui font rationnellement l’équilibre entre les coûts potentiels et les bénéfices de la réduction de la charge fiscale et les contribuables honnêtes (habitual compliers) qui déclarent leur résultat fiscal correctement sans regarder les coûts et bénéfices du jeu de la « loterie de contrôle ».

Le modèle traite les niveaux de résultats, les taux d’impôt et les amendes comme étant exogènes. Pour les besoins mathématiques du modèle, le résultat peut avoir l’une des deux valeurs : élevé ou faible. Les auteurs supposent aussi dans leur modèle que les revenus associés au contrôle d’un contribuable stratégique doivent excéder le coût de contrôle. Donc, même si un contribuable stratégique a été identifié a priori par l’administration fiscale, cette dernière ne va pas nécessairement le contrôler et collecter des impôts supplémentaires (et des amendes) si les coûts de contrôle dépassent les revenus espérés.

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Les auteurs supposent aussi que l’administration fiscale a de l’incertitude quant aux revenus réels des contribuables.

Le modèle est considéré comme étant résolu lorsque l’équilibre de Nash est atteint. Cet équilibre inclut une probabilité de contrôle choisie par l’administration fiscale et une probabilité de non-conformité choisie par les contribuables stratégiques. Dans cet équilibre, ni l’administration fiscale ni le contribuable n’ont la motivation (unilatéralement) de changer leurs stratégies. A travers l’analyse de cet équilibre, les auteurs trouvent que l’augmentation des pénalités entraîne une diminution de la probabilité de non-conformité ainsi qu’une diminution de la probabilité de contrôle. Aussi, une augmentation des coûts de contrôle supportés par l’administration fiscale entraîne une augmentation de la probabilité de non-conformité.

Les auteurs ont par la suite étudié les effets d’introduire dans le modèle l’impôt et les amendes proportionnelles, les coûts de contrôle pour le contribuable et les contraintes budgétaires de l’administration fiscale. Les résultats montrent que les amendes proportionnelles jouent aussi un r ôle dissuasif en diminuant la non-conformité et la vérification à l ’équilibre. Les coûts liés à l a procédure de contrôle et supportés par le contribuable englobent la perte de temps et les honoraires éventuels des conseils fiscaux. Ces coûts ne sont pas en mesure d’avoir un impact sur le comportement de contrôle de l’administration fiscale ainsi que sur la non-conformité à l’équilibre. La contrainte budgétaire de l’administration fiscale empêche cette dernière de mener tous les contrôles souhaités, ce qui est de nature à accroitre la non-conformité des contribuables stratégiques.

1.3.1.2. Introduction de l’incertitude dans le jeu fiscal

En s’appuyant sur la théorie des jeux, Beck et Jung (1989) développent un m odèle d’interaction entre les décisions de déclaration des contribuables et les politiques de contrôle de l’administration fiscale dans un environnement caractérisé par l’incertitude et l’asymétrie d’information. Les études antérieures ont été étendues en incorporant l’incertitude des contribuables sur les coûts de contrôle de l’administration fiscale ainsi que sur leurs charges fiscales et en examinant les effets des pénalités transférables et non transférables sur la sous-déclaration des bénéfices. Les pénalités transférables à l’administration fiscale sont celles payées après la découverte du résultat fiscal réel de l’entreprise et donc après l’opération de vérification effectuée par l’administration fiscale ; elles sont proportionnelles à la défaillance fiscale détectée. Les pénalités non transférables représentent les coûts fixes supportés par le contribuable en cas de contrôle fiscal et

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englobent le coût d’opportunité du temps passé pour se préparer au contrôle ainsi que les honoraires payés aux conseils fiscaux (Beck et Jung, 1989).

Les auteurs supposent que les contribuables disposent de l’information privée sur les transactions qui sous-tendent le calcul du résultat fiscal, mais sont incertains quant à leurs charges fiscales ainsi qu’au coût de contrôle supporté par l’administration fiscale. Cette dernière est supposée aussi être incertaine quant à la charge fiscale du contribuable et au bénéfice potentiel obtenu suite à son contrôle. Cette incertitude résulte notamment de la complexité de la réglementation fiscale.

Le modèle de Beck et jung (1989) suit la séquence suivante : les contribuables prennent la décision de divulgation du r ésultat fiscal (qui prend deux valeurs : élevée ou faible). L’autorité fiscale essaie de retirer de l’information privée à t ravers les déclarations de résultat pour réviser ses prévisions concernant les bénéfices de contrôle. A l’équilibre, les contribuables doivent reconnaitre comment leurs déclarations peuvent affecter le niveau prévu du bénéfice de contrôle évalué par l’autorité fiscale et le prendre en considération lors de la prise de décision de déclaration.

Les conclusions majeures sont les suivantes : les augmentations des pénalités, du taux d’imposition et de l’incertitude de la charge fiscale diminuent l’agressivité des déclarations des contribuables lorsque les pénalités sont proportionnelles à l a défaillance fiscale et transférables à l’administration fiscale. Par contre, lorsque les pénalités ne sont pas transférables et indépendantes de la défaillance fiscale, les croissances du taux d’imposition et de l’incertitude des contribuables sur leurs charges fiscales peuvent encourager ou d écourager l’agressivité de déclaration par les contribuables. Les auteurs montrent aussi que l’incertitude sur les coûts de la procédure de contrôle de l’administration fiscale peut encourager et décourager l’agressivité des déclarations ; tout dépend du bé néfice de contrôle, de l’équilibre initial et de la probabilité de contrôle anticipée. L’effet de l’incertitude de la charge fiscale dépend par conséquent de la structure des pénalités alors que l’effet de l’incertitude des coûts de contrôle est le même sous les