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PARTIE 3 : Du PNRU au NPNRU, l’évolution du dispositif de participation des habitants

II. Le territoire de la Villeneuve face à la politique de renouvellement urbain

1. Un territoire singulier

Il s’agit tout d’abord, à sa création comme aujourd’hui, d’un quartier à fort enjeu politique. Envisagé par la municipalité DUBEDOUT, qui a été à l’origine du projet, comme « le symbole du socialisme flamboyant », il représente toujours un territoire à part politiquement parlant, du fait de son importance dans la ville en terme de population (avec ses 18550 habitants sur un total de 158 346 habitants pour la ville de Grenoble) et en terme d’image (c’est un symbole des « quartiers sud » de la ville), et du fait de son caractère médiatique.96

La Villeneuve se caractérise par une histoire « complexe et chargée d’idéologies de toutes

natures ».97

Le quartier, qui a vu le jour en 197298, a été conçu par la municipalité DUBEDOUT avec un cabinet d’urbanisme et d’architecture comme un projet utopique. Jean-François PARENT, urbaniste de l’équipe Villeneuve de 1966 à 1983, présente la conception du quartier comme « une tentative de renouvellement prenant en compte les erreurs de la construction des

grands ensembles dans les années précédentes ».99

Les axes forts du projet étaient :

- Un centre de service intégré au quartier avec un rayonnement sur tout le sud de l’agglomération (Grand-Place),

- des sous-quartiers de taille modérée permettant théoriquement le développement de commerces de quartier et une zone de recrutement pour le collège,

- « des orientations politiques claires : priorité à la mixité, HLM et copropriétés, dans

les logements ; variétés des fonctions (autant d’emplois que de logements) ; ensemble

96 Et ce au niveau national depuis les « évènements de 2010 » : pendant l’été 2010, un habitant du quartier a été

tué au cours d’une fusillade avec les policiers après avoir commis un braquage dans un casino, générant des émeutes urbaines, avec une présence policière très forte sur le quartier pendant l’été.

Cf. article : LE DAUPHINÉ. Karim Boudouda, 27 ans et dix condamnations au casier, dont trois pour braquages [en ligne]. 2010. LAIME Vanessa. Disponible sur : <http://www.ledauphine.com/isere- sud/2010/07/23/karim-boudouda-27-ans-et-dix-condamnations-au-casier-dont-trois-pour-braquages>.

97 JOLY, Jacques. PARENT, Jean-François. Paysage et politique de la ville : Grenoble de 1965 à 1985.

Grenoble : Presses Universitaires de Grenoble, 1988. 195 p.

98 N.B. construction en 1968 pour le Village Olympique, potentiellement concerné à la marge par le futur projet

NPNRU, mais exclu du projet ANRU.

99 Cf. Compte-rendu de conférence du Mardi 30 Octobre 2012 de Jean-François Parent, urbaniste de l’équipe

Villeneuve de 1966 à 1983, conseiller municipal et président de l’office HLM de 1995-2001, habitant de la Villeneuve depuis 1972.

VIVRE A LA VILLENEUVE - Collectif d’habitants de la Villeneuve de Grenoble. La Villeneuve, hier,

aujourd’hui, demain [en ligne]. 2012. PARENT, Jean-François. Disponible sur :

d’équipements collectifs couvrant une gamme très large de « besoins » et ouverts aux « expérimentations » (écoles Freinet…) ; excellente desserte en transports en commun ». Par

ailleurs, « une place a été reconnue aux associations et aux futurs gestionnaires des

équipements dans l’élaboration de ceux-ci »100.

La forme urbaine particulière du quartier, aujourd’hui présentée dans un diagnostic de territoire comme « un effet muraille de la barre de l’Arlequin », et une « configuration

anxiogène du quartier»101, avait été pensée comme permettant une « continuité entre les

quartiers et (…) entre les bâtiments doublée par celle des galeries, dans le souci de créer des liens de solidarité et des occasions de rencontres ». La séparation entre piétons et voitures,

voulue pour le quartier était également un choix pensé pour améliorer le cadre de vie.

La mixité sociale s’impose comme un support fondamental du fonctionnement du quartier, dans sa conception. L’évolution du quartier, notamment suite à la crise économique et à ses conséquences sociales, conduit à une transformation profonde de sa population.

Les ménages en situation de précarité et de pauvreté sont fortement représentés : il y a un taux de chômage important (23% de chômeurs parmi les actifs de 15-64 ans (au sens de l’INSEE) et 33% de chômeurs parmi les actifs de 15-24 ans). Les ménages d’une personne représentent 38% de l’ensemble des ménages, il y a 22% de familles monoparentales dans l’ensemble des familles, et 16% de familles nombreuses dans l’ensemble des familles. 58% des 0-16 ans vivent dans un foyer à bas revenus, et 32% des 15 ans et plus sont sans diplôme ou avec un très faible niveau de diplôme.

Sur le Quartier Prioritaire de la politique de la ville, entre 35% et 40% d’allocataires CAF ont un revenu constitué à au moins 50% de prestations sociales, entre 20% et 25% d’allocataires CAF ont un revenu constitué à 100% de prestations sociales et entre 25% et 30% d’allocataires CAF sont bénéficiaires du RSA socle. Il y a entre 70% et 75% d’allocataires logement.

100 Les éléments présentés dans ce paragraphe et le suivant sont issus du compte rendu de conférence de

PARENT Jean-François. Op. cit.

101 Ces deux éléments sont issus du Diagnostic « contrat de ville »

Cf. Service Observation Sociale Ville - CCAS Grenoble. Diagnostic « contrat de ville » : Villeneuve - Village

Il s’agit d’un quartier à la population assez jeune (27% de moins de 20 ans), mais qui est touché par ailleurs par une problématique de vieillissement (11% de 65 ans et plus).

Le peuplement du territoire se caractérise par une mixité sociale faible. Sur le quartier prioritaire de la Politique de la Ville, qui est concerné par l’opération ANRU, il y a entre 70 et 80% de logements sociaux et 65 à 75% de logements en location.

Le taux de rotation est élevé : 42% des ménages ont emménagé dans leur logement depuis moins de 4 ans et le taux de vacances est important, entre 7 et 10%, reflétant la faible attractivité du quartier. Le constat d’une possibilité de mobilité résidentielle limitée pour les locataires et les propriétaires est fait, avec des personnes qui souhaitent partir mais n’y parviennent pas (logement social à coût très faible dans le quartier Arlequin, empêchant la mobilité de locataires à très bas revenus, et valeur immobilière faible des logements pour les propriétaires : le coût au m² de 1694 euros en moyenne est bas par rapport à la moyenne communale et de l’agglomération).

Au vu de ces caractéristiques, la politique de rénovation urbaine prend un sens particulier dans le territoire.

2. Le sens de la rénovation urbaine face aux spécificités du