• Aucun résultat trouvé

Terminologie, domaine interdisciplinaire

Partie I : Étude terminologique

Chapitre 1 : État de l’art de la terminologie

1.2 Terminologie, domaine interdisciplinaire

La terminologie est étroitement liée à d’autres branches de la linguistique :

« Par son aspect linguistique, la terminologie touche à la sémantique lexicale, ou lexicologie, car les termes sont des faits de langue au même titre que les autres unités lexicales ; ils ont cependant leurs caractères propres, qui permettent de distinguer le terme et le non-terme (...)

La terminologie touche également à la syntaxe en ce que les unités terminologiques sont souvent syntagmatiques et peuvent atteindre un degré de complexité considérable ; elle touche enfin à la sémiologie en ce sens que les termes sont de véritables signes dans lesquels le signifie a prépondérance sur le signifiant. » (Rondeau, 1991)80

La terminologie est « une branche de la linguistique, à côté d'autres disciplines, comme la lexicologie et la lexicographie » (Lelubre, 1992)81 et peut être aussi considérée comme un carrefour interdisciplinaire :

« [...] Ainsi, elle (la langue) emprunte des éléments et des concepts à la morphologie, à la lexicologie et à la sémantique. Toutefois, bien que la langue soit le fondement même de la terminologie, il serait difficile de la considérer comme une autre branche de la linguistique, que ce soit la phonologie, la morphologie, la lexicologie ou la syntaxe. La terminologie est un domaine interdisciplinaire dont les mots spécialisés de la langue naturelle constituent l’objet d’étude premier. En plus de la linguistique, d’autres disciplines scientifiques contribuent à la terminologie ». (Cabré, 1998)82

Étant la science qui étudie les termes, la terminologie se voit intervenir dans d’autres domaines de la linguistique, notamment la lexicologie ; mais, elle intervient également dans d’autres

80 Introduction à la terminologie

81 La terminologie arabe contemporaine de l'optique : faits - théories – évaluation

domaines littéraires, comme la sociologie, ainsi que le domaine de l’informatique lors du traitement des termes, comme la linguistique de corpus et l’ontologie.

1.2.1 Terminologie et lexicologie

Certains considèrent la terminologie comme une branche de la linguistique, d’autres la voient comme « une variante de la lexicologie (ou étude du lexique) à laquelle elle emprunte ses méthodes et ses analyses pour les appliquer à un objet constitué par l'ensemble des terminologies » (Gouadec, 1990)83. En effet, l’objet d’étude est différent ; la lexicologie traite les mots de la langue commune alors que la terminologie traite les termes de la langue de spécialité :

« La lexicologie a pour matière le lexique, ensemble dont les éléments sont des lexies ou unités lexicales de la langue commune - c'est-à-dire qui ne sont pas relatifs à un domaine spécialisé - tandis que la terminologie a pour matière des systèmes terminologiques, ensembles dont les éléments sont les termes ou encore les unités terminologiques ». (Lelubre, 1992)84

Le lexicologue utilise le lexique général pour son étude alors que le terminologue se limite au vocabulaire de spécialité (Guilbert, 1973)85. De plus, la méthodologie n’est pas le même ; « la terminologie part du concept, la lexicologie de la désignation » (Cabré, 1998)86. En effet, la terminologie adopte une démarche dite ‘onomasiologique’ qui consiste à trouver le ou les termes utilisés (attestés) ou possibles (néologismes créés) qui désignent un concept connu. Quant à la lexicologie, elle adopte une démarche dite ‘sémasiologique’ qui consiste à partir d’un mot connu pour en déterminer la signification.

Pour notre étude terminologique de la chimie en arabe, nous adoptons les deux démarches ; nous partirons d’abord de l’approche lexicologique, soit la démarche sémasiologique afin de repérer les termes du corpus, puis nous suivrons l’approche terminologique, soit la démarche onomasiologique afin de déterminer quelle(s) dénomination(s) représente(nt) la notion étudiée.

1.2.2 Terminologie et sociologie

La terminologie, comme la linguistique, possède des marques d’usage, des « marques

sociolinguistiques : jargons d’atelier, registre technico-scientifique, registre commercial »

83 Terminologie. Constitution des données, p. 28

84 La terminologie arabe contemporaine de l'optique : faits - théories – évaluation

85 La spécificité du terme scientifique et technique, p. 6

(Dubuc, 2002)87 ; appelée socioterminologie, c’est la science étudiant « l’information scientifique et les termes en relation avec la société, l’action et, plus particulièrement, avec l’identité sociale dans la pluralité de ses manifestations » (Abi Ghanem-Chadarevian, 2016)88

c’est-à-dire, que la socioterminologie fait la relation entre le discours et la pratique (Barna, 2014)89. Cette approche s’est développée progressivement à partir des années 1980 et représente un moyen de récupérer la dimension sociale de la terminologie (Gaudin, 1993)90, qui est peut-être considérée comme partie intégrante de la théorie terminologique (Gambier, 1991)91. Mais la socioterminologie a des limites et cela doit être pris en considération avec modération dans la normalisation des termes :

« Les travaux de terminologie visent alors la mise au point, la normalisation, la diffusion et l'implantation des vocabulaires de spécialité dans la langue nationale. Lorsque la langue est commune à plusieurs pays, par exemple le français, l'anglais, le basque, le néerlandais, on constate que des faits de culture ou de procédure introduisent nécessairement une certaine variation dans les terminologies. De ce fait, la normalisation des terminologies implique un certain compromis entre deux obligations : introduire des variantes mais ne pas s'éloigner inutilement de l'usage commun à tous les spécialistes de la même langue. » (Corbeil, 1999)92

Dans le domaine de la chimie en arabe, des marques socioterminologiques peuvent être identifiées telles que la catégorie sociale (étudiant, professeur, chercheur), la forme de discours (texte écrit, communication orale, cours magistraux, travaux pratiques…), mais aussi l’espace géographique (pays du Maghreb, du Machrek et du Golfe). De ce fait, nous ne pouvons pas ignorer les marques socioterminologiques pour notre étude terminologique.

1.2.3 Terminologie et linguistique de corpus

Suite à l’explosion des corpus numériques et face aux besoins des entreprises qui doivent gérer une documentation considérable, les corpus sont devenus le principal matériau de la linguistique, donnant naissance à la linguistique de corpus, ainsi que de la terminologie. La terminologie basée sur corpus, en opposition à la vision wüsterienne (Wüster, 1981)93,

87 Manuel pratique de terminologie

88 Socioterminologie et interactions langagières en arabe

89 Divergences et convergences dans la terminologie médicale vétérinaire pour les vertébrés domestiques entre le roumain et le français

90 Pour une socioterminologie : des problèmes sémantiques aux pratiques institutionnelles

91 Travail et vocabulaire spécialisé : prolégomènes à une socioterminologie

92 La terminologie : une discipline au service d'objectifs multiples

93 L’étude scientifique générale de la terminologie, zone frontalière entre la linguistique, la logique, l’ontologie, l’informatique et les sciences des choses

permet d’identifier les termes et leurs relations, formant ainsi un réseau terminologique (Condamines, 2005)94. Cette nouvelle approche, appelée terminologie textuelle (Slodzian, 2000)95, possède une relation privilégiée avec l’informatique, puisqu’elle a besoin de plusieurs logiciels pour son exploitation tels que le traitement de texte, la base de données, l’ontologie…, impliquant des compétences informatiques inhérentes à la formation du terminologue.

Pour notre travail, nous avons constitué un corpus à partir duquel nous avons étudié la terminologie de la chimie en arabe à l’aide d’outils informatiques (cf. 3.2 Démarche de la recherche de corpus et 4.2 Analyse des formes).

1.2.4 Terminologie et ontologie

La terminologie et l’ontologie possèdent un rapport privilégié avec le concept, puisque l’essence du terme est concentrée dans le concept, une unité de connaissance ; d’une part, la terminologie étudie les termes et d’autre part, l’ontologie, étudie les concepts. Elles utilisent toutes les deux l’approche de l’objet et l’approche conceptuelle, les relations entre les concepts et les propriétés de concepts, ainsi que l’analyse de la désignation et les méthodes classificatoires (Depecker, 2007)96. De ce fait, une nouvelle approche s’est constituée sous le nom d’ontoterminologie :

« L’ontoterminologie, terminologie dont le système notionnel est une ontologie formelle, insiste d’une part sur l’importance des principes épistémologiques qui président à la conceptualisation du domaine – c’est l’ontologie dans sa définition première –, et d’autre part sur la nécessité d’une approche scientifique de la terminologie où l’expert joue un rôle fondamental – c’est l’ontologie dans ses définitions plus récentes » (Roche, 2008)97.

L’ontoterminologie a l’avantage de fournir la qualité des produits terminologiques, puisque les terminologies sont structurées en schémas conceptuels, à l’aide des principes et des méthodes disponibles pour la structuration des ontologies.

Pour notre travail, nous avons établi l’ébauche d’une ontoterminologie de la chimie en arabe.

94 Linguistique de corpus et terminologie

95 L’émergence d’une terminologie textuelle

96 Linguistique, terminologie et ontologie