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4.3. Synthèse sur la dynamique des MES et les paramètres de contrôle des processus

4.3.2. A l’échelle saisonnière : le contenu en MO

4.3.2.4. Les TEP : paramètre Rubiks’s Cube

Dans le cadre de cette thèse, les concentrations en TEP sont relativement fortes avec des valeurs comprises entre 0,87 et 12,4 mgXGeq.l-1 (Fig. 4-22). Les filtres ayant été rincés à l’eau distillée, la validité des valeurs plus fortes (jusqu’à 44,4 mgXGeq.l-1) mesurées en janvier et en mars posent question. La biomasse phytoplanctonique à cette période est assez faible et la libération d’une telle quantité de TEP ne serait pas uniquement expliquée par l’éclatement des cellules (Claquin, comm. personnelle). De plus, les concentrations en TEP restent dans les gammes de valeurs rencontrées dans la littérature : jusqu’à 98,20 mgXGeq.l-1 en estuaire de Seine (Morelle et al., 2017). Les concentrations en MES à LC et en particulier à BS1 n’étant pas relativement fortes, le colmatage des filtres pouvant entraîner une rétention des précurseurs de TEP (Villacorte et al., 2015) ne permet pas d’expliquer ces quantités importantes de TEP. Nos

mesures actuelles ne nous permettant pas de conclure sur ces valeurs fortes de TEP obtenues sur la période de janvier à mars inclus, le choix a été fait de ne pas les inclure dans l’analyse des résultats.

De nombreuses études ont montré que les TEP ont principalement une origine biologique, et sont produites en grande partie par le phytoplancton (Hong, 1997 ; Beauvais et al., 2003 ; Radić et al. 2005 ; Wurl et Holmes, 2008 ; Klein et al., 2011).Néanmoins, à l’exception de quelques points, nos mesures ne montrent pas de relation significative entre TEP et chl a (Fig. 4-30) : les concentrations en TEP les plus fortes sont mesurées en décembre quand la concentration en chl a est faible, et à l’inverse, malgré les valeurs fortes de biomasse chlorophyllienne au printemps, la concentration en TEP ne dépasse pas les 2mgXGeq.l-1 (Fig. 4-22). D’autres études ont également observé qu’il n’y avait pas de corrélation directe entre les TEP et la dynamique du phytoplancton (Garcia, 2002 ; Corzo et al., 2005). Certains auteurs ont même trouvé une corrélation négative montrant que les TEP sont produites en grande partie lors de la sénescence du phytoplancton et non au cours de sa croissance (Chowdburry et al., 2016 ; Klein et al. 2011).

Figure 4-30 : Concentration en TEP en fonction de la concentration en chl a. Les échantillons des stations de mesure LC et BS1 sont représentés en rouge et en bleu, respectivement avec des cercles pour identifier les échantillons de surface et des triangles pour ceux du fond.

Une relation positive, évidente à LC et moins flagrante à BS1, est observée entre la concentration en TEP et la concentration en MES, en particulier quand la concentration en chl a est faible en hiver (Fig. 4-31). Ces mesures suggèrent qu’une partie de la dynamique des TEP pourrait être liée à celle des MES. Morelle et al. (2017) ont notamment observé que la concentration en TEP était étroitement reliée aux processus de remise en suspension avec des valeurs plus fortes au fond et en hiver qu’en sub-surface et en été. Dans le cadre de nos campagnes, les mesures de TEP en hiver à LC ont en effet été acquises au cours d’une VE (15 décembre) : les conditions hydrodynamiques du milieu seraient susceptibles de remettre en suspension des substances exopolymériques telles que les TEP.

Une partie des échantillons caractérisés par des valeurs fortes de concentration en chl a (entre 8 et 10 µg.l-1) s’écartent significativement de la relation linéaire hivernale, allant vers de plus fortes valeurs de concentration en TEP. Ces résultats suggèrent qu’une partie des TEP en

mai sont sécrétés au cours du bloom printanier, probablement par le phytoplancton (Fig. 4-31). Les tailles médianes les plus larges sont également observées pour ce cycle de marée (Fig. 4-24). Les TEP, caractérisées par des propriétés de nature collante, sont susceptibles de s’associer aux particules en suspension, contribuant à favoriser les processus de floculation (Kiorboe et al., 1990).

Figure 4-31 : Concentration en TEP en fonction de la concentration en MES (b). Sur le graphique les échantillons des stations de mesure LC et BS1 sont représentés par des cercles et des triangles, respectivement. La couleur indique la concentration en chl a.

D’autres organismes présents dans le milieu sont également susceptibles de contribuer à la production de TEP. Le ratio TEP:chl a est très élevé par rapport aux valeurs trouvées dans la littérature (Klein et al., 2012), en particulier en décembre au fond avec des valeurs atteignant jusqu’à 4500 mgXGeq/mgchl a pour la station de mesure BS1, voire jusqu’à 3,1x104 mgXGeq/mgchl a pour la station de mesure LC (Fig. 4-32). Morelle et al. (2017) ont également mesuré des ratios du même ordre de grandeur à la station LC à proximité de l’estuaire de Seine, suggérant que les TEP ne sont pas uniquement produites par le phytoplancton. D’autres espèces présentes en Baie de Seine peuvent en effet produire des quantités très importantes de TEP par unité de Chl a (Claquin, comm. personnelle). Heip et al. (1995) ont notamment montré que des quantités significatives de TEP peuvent provenir d’apports allochtones de MO comprenant des concentrations importantes de bactéries et de matériel détritique.

Figure 4-32 : Ratio TEP:chl a en surface et au fond pour chaque cycle de marée pour la station de mesure BS1 (a) et LC (b).

L’ensemble des résultats de cette section mettent en avant une variabilité saisonnière des sources potentielles de TEP :

(i) En mai, le bloom printanier induit la sécrétion de TEP, susceptibles de s’associer aux particules en suspension, contribuant à favoriser la floculation à l’origine de la formation de flocs de taille plus larges.

(ii) Pour le cycle de marée en période hivernale, la distribution des TEP est étroitement liée à la dynamique des MES. Les conditions hydrodynamiques observées pour ce cycle de marée peuvent être favorables à la remise en suspension de substances exopolymériques. La distribution des TEP dépendrait des conditions hydrodynamiques à l’embouchure de l’estuaire, ce qui serait en accord avec les observations réalisées à LC par Morelle et al. (2017) et par d’autres auteurs dans d’autres environnements très dynamiques comme les estuaires (Malpezzi et el. 2013). D’autres organismes sont également susceptibles de produire des quantités importantes de TEP en dehors du bloom phytoplanctonique. Pour rappel, à coefficient de marée équivalent, les flocs en hiver sont plus petits qu’en mai et juillet (Fig. 4-24), ce qui signifie que la présence de TEP ne veut pas dire floculation plus favorisée.

À partir de nos mesures actuelles, contrairement à la MOP et à la chl a, le lien entre la concentration en TEP et les caractéristiques physiques des MES est complexe, expliqué en partie par les nombreuses sources qui peuvent contribuer au pool de TEP. Nos observations montrent qu’à quantité équivalente pour deux saisons différentes, la relation entre taille médiane des MES et TEP diverge, suggérant soit que les TEP ne sont pas un paramètre majeur dans les processus de floculation, ce qui contraste avec les études antérieures, soit qu’il existe une diversité de TEP caractérisées par des propriétés différentes dont nous ne pouvons avoir connaissance avec les mesures actuelles.

4.4. Dynamique saisonnière des MES : analyse de la