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CHAPITRE 3. FONCTIONNALISATION DES NANOTUBES DE TITANATE PAR DIVERS AGENTS

I. P RE - FONCTIONNALISATION DES NANOTUBES DE TITANATE PAR DIFFERENTES MOLECULES

I.2. Agents de couplage siloxaniques en vue d’améliorer la stabilité colloïdale

I.2.1. Tentative d’optimisation du greffage de l’APTES sur les TiONts

L’objectif est ici de former une monocouche d’APTES sur les TiONts en optimisant les conditions de synthèse afin de favoriser à la fois une cinétique rapide pour l’hydrolyse de l’APTES (formation des silanols) et une cinétique lente pour l’oligomérisation des silanols (‎Chapitre 2. ‎II.1.1.1.). Ainsi, le taux d’hydrolyse est plus faible à des pH avoisinant 7 pour les alcoxysilanes. Alors que la cinétique d’oligomérisation est minimale pour des pH se situant aux alentours de 4 [132]. Ainsi, la gamme de pH optimale est comprise entre 5 et 6 pour garantir un bon compromis. Toutefois, un pH égal à 5 est préféré pour maximiser l’état de dispersion des TiONts nus (voir Figure 48, ‎Chapitre 2. ‎I.2.3.) afin de favoriser un greffage homogène sur tous les tubes. De plus, la quantité d’APTES engagée doit être contrôlée pour éviter une surabondance d’aminosilane favorisant la formation de multicouches. Enfin, l’influence de la température a un fort impact sur la cinétique de réaction. En effet, une élévation de la température favorise la condensation du polysiloxane et la vitesse de réaction à la surface des TiONts [254]. De ce fait, la température est cette fois-ci apportée au cours de la synthèse (chauffage à reflux) et non plus post-synthèse par évaporateur rotatif (voir ‎Chapitre 2. ‎II.1.1.2.).

I.2.1.1. Optimisation du protocole de synthèse de l’APTES

La suspension de TiONts est dispersée dans un volume eau/éthanol 1 : 1 (V : V) puis le pH est ajusté à 5 à l’aide d’une solution de HCl à 0,1 M. La concentration obtenue est de 3 mg.mL-1. D’après les travaux de Pontón [132], la quantité d’APTES qui doit être engagée pour former une monocouche est estimée à partir de l’Équation 5 :

Avec : X: Quantité d’APTES estimée pour avoir une monocouche à la surface des nanoparticules (g)

A : Surface spécifique des nanoparticules (m2.g-1)

W : Surface de mouillabilité d’un ligand (APTES : 353 m2.g-1) f : Quantité de nanoparticules (ici, les TiONts) à silaniser (g)

Équation 5 : Relation pour estimer la quantité d’APTES à engager pour former une monocouche sur les

nanoparticules. D’après [132].

Dans notre cas, cette équation donne un rapport molaire de 1 APTES pour 1,15 OH à la surface des nanotubes (le taux d’hydroxyles est déterminé par l’ATG, voir ‎Chapitre 2. ‎I.2.). Malgré tout, le facteur choisi pour la nouvelle synthèse est fixé à 3 APTES pour 1 OH tandis que le taux d’APTES était 10 fois supérieur lors de son greffage sur les tubes au cours de la précédente étude (Tableau 16) (voir ‎Chapitre 2. ‎II.1.1.2.). Ce facteur diffère de l’Équation 5 pour compenser les éventuelles

dégradations et les réactions d’hydrolyse dans le flacon commercial d’APTES (ce sont des précautions prises en raison des nombreuses utilisations de l’APTES et des conditions de stockage : réfrigérateur, septum/N2). De plus, ce rapport a pour but d’accélérer la formation de la monocouche d’aminosilane [18]. Le volume d’APTES est ajouté goutte à goutte dans la suspension de TiONts. Après avoir ajusté à nouveau le pH de la suspension à 5, le mélange des TiONts-APTES est ensuite chauffé à reflux (60°C) sous agitation magnétique (400 tr/min) pendant 5 heures.

La suspension est ensuite ultrafiltrée avec de l’eau ultrapure sur une membrane possédant un seuil de coupure de 100 kDa pour éliminer les réactifs n’ayant pas réagi ainsi que l’éthanol. La mesure de la conductivité des eaux de lavages a montré une bonne purification de la suspension après la dernière ultrafiltration (σ < 10 µS.cm-1). Enfin, une partie de la suspension est lyophilisée pour pouvoir réaliser les caractérisations sur poudre. La quantité de groupements amine greffés à la surface des TiONts et la stabilité colloïdale des nanoparticules sont évaluées dans les parties qui suivent.

Rapport molaire (OH : APTES) Rapport volumique des solvants (H2O : EtOH) pH de greffage Température de greffage (°C) Temps de réaction (h) Agitation magnétique (tr/min) Purifications TiONts-APTES (ancien protocole) (1 : 10) 50 : 50 9 - 10 25 24 400 * Évaporateur rotatif (250 mbar ; 80°C) * Ultrafiltration (100 kDa) TiONts-APTES

(nouveau protocole) (1 : 3) 50 : 50 5 60 5 400 * Ultrafiltration (100 kDa)

Tableau 16 : Tableau récapitulatif des deux protocoles de greffage de l’APTES sur les TiONts.

I.2.1.2. Preuve du greffage de l’APTES à la surface des TiONts : mise en évidence d’une quantité moindre greffée… vers la formation d’une monocouche ?

Les TiONts-APTES sont analysés par IR-TF afin de pouvoir comparer les deux protocoles de synthèses. Une nouvelle fois, les bandes de vibrations attribuées aux liaisons caractéristiques de l’APTES sont présentes (bandes de vibrations signalées en orange, Figure 96) : liaisons Si-O-Si à 1000 cm-1, C-NH2 à 1080 cm-1, C-C-N à 1200 cm-1 et NH2 à 3200 cm-1 [124, 132]. Alors que les bandes de vibrations (signalées en rose) confirment la présence d’hydroxyles à 3370 cm-1 et de la chaîne aliphatique de l’APTES entre 1450 - 1300 cm-1 et 3000 - 2800 cm-1. L’augmentation de la bande de vibration correspondant aux hydroxyles traduit une condensation incomplète des oligosiloxanols. L’analyse infrarouge ne permet donc pas de montrer des différences significatives entre les deux greffages.

Pré-fonctionnalisation des nanotubes de titanate par différentes molécules

Le nanohybride issu du nouveau protocole de greffage de l’APTES sur les TiONts est analysé par XPS puis comparé aux TiONts-APTES de l’ancien lot (Tableau 17). Les mêmes éléments chimiques sont observés pour les deux protocoles. Cependant, les concentrations atomiques du carbone, de l’oxygène, de l’azote et du silicium sont en légère baisse pour cette nouvelle synthèse de TiONts-APTES.

Concentration atomique (%) C1s O1s NaKLL Ti2p N1s Si2p

TiONts 7,3 58,7 13,5 20,5 - -

% atomique (TiONts) / Ti 0,3 2,9 0,7 1,0 - -

TiONts-APTES 13,1 53,4 8,3 19,2 3,0 3,0

% atomique (TiONts-APTES) / Ti 0,7 2,8 0,4 1,0 0,2 0,2

TiONts-APTES (nouveau protocole) 11,2 56,8 5,7 21,5 2,3 2,5

% atomique (TiONts-APTES) / Ti 0,5 2,6 0,3 1,0 0,1 0,1

Tableau 17 : Analyses XPS des concentrations atomiques en surface des TiONts et des TiONts-APTES selon les deux

protocoles de synthèse étudiés.

La décomposition des seuils O1s, C1s et N1s des TiONts-APTES est réalisée (Figure 97). Le seuil O1s

montre une élévation du taux d’hydroxyles à la surface des nanotubes, ce qui tend à prouver que le taux de condensation des silanols serait encore plus incomplet (Figure 97(O1s)). Tandis que les observations des niveaux C1s et N1s permettent de confirmer l’analyse quantitative (Figure 97(C1s ; N1s)) avec un taux plus faible en fonctions amine.

Le niveau C1s montre en effet la diminution de la contribution de la liaison C-NH2 à 286,2 eV: passage de 44% pour l’ancien protocole des TiONts-APTES à 25% pour le nouveau greffage de l’APTES. Tandis que la décomposition du niveau N1s favorise légèrement la liaison C-NH3+ (passage de 56% à 59,3%) au détriment de la liaison C-NH2, ceci car le milieu réactionnel est plus acide (passage d’un pH 9 - 10 à 5) [148, 258].

Toutes ces observations peuvent être dues à la diminution de la quantité d’APTES greffée à la surface des nanotubes lors de la synthèse en favorisant la création d’une monocouche.

Figure 97 : Analyses XPS : décomposition des niveaux O1s, C1s et N1s de (a) l’ancien protocole et (b) du nouveau protocole de synthèse des TiONts-APTES.

I.2.1.3. Évaluation de la stabilité colloïdale des TiONts-APTES issus des deux protocoles Les résultats obtenus pour le nouveau protocole de synthèse de l’APTES à la surface des TiONts sont similaires à ceux de l’ancien greffage concernant la zêtamétrie et l’étude de stabilité colloïdale, dans le temps, par spectroscopie UV-visible. Le nouveau greffage a lui aussi permis de décaler le PIE vers un pH plus élevé (PIETiONts-APTES = 6,9) par rapport à celui des TiONts nus (PIETiONts = 3,3) (Figure 98a). Cependant, ce décalage du PIE est moins prononcé que pour l’ancienne synthèse (PIETiONts-APTES = 8,5). Ainsi, la faible quantité d’APTES engagée à la surface des nanotubes laisse à penser qu’un plus grand nombre d’hydroxyles n’est pas fonctionnalisé. L’hypothèse d’une condensation incomplète des silanols n’est toujours pas exclue. Ceci expliquerait l’augmentation du potentiel zêta (en valeur absolue) à des valeurs de pH plus élevées en raison d’une plus grande quantité d’hydroxyles. Par ailleurs, il est intéressant de remarquer que l’augmentation des charges positives à des pH faibles semble due à une plus forte contribution des liaisons C-NH3+. Enfin, le potentiel zêta est faiblement négatif (-6 mV) au pH physiologique (pH 7,4) au lieu de (+10 mV) pour le premier protocole, rendant le nouveau protocole plus attrayant pour privilégier les interactions des nanotubes avec les membranes cellulaires (voir ‎Chapitre 1. ‎I.3.4.).

La stabilité colloïdale des nanohybrides issus de ces deux protocoles de greffage est observée en suivant leur absorbance en fonction du temps pendant 150 min à  = 600 nm dans du PBS (0,1 M ; pH 7,4) (Figure 98b). Les deux greffages montrent des résultats assez proches et une mauvaise stabilité dans ces conditions au-delà de 40 min, en raison des potentiels trouvés par zêtamétrie proches

Pré-fonctionnalisation des nanotubes de titanate par différentes molécules

de zéro. Notons que les agents de répulsion de type électrostatique sont peu efficaces dans des milieux ionisés (dans notre cas [NaCl] = 10-2 M). Ainsi, le nouveau protocole de greffage de l’APTES sur les TiONts ne permet pas d’améliorer leur stabilité colloïdale au pH physiologique mais semble former une monocouche d’alcoxysilane à la surface des TiONts.

Figure 98 : (a) Évolution des potentiels zêta en fonction du pH (la ligne verticale en pointillé représente le pH

physiologique) dans du NaCl (10-2 M) et (b) courbes d’absorbance en fonction du temps dans du PBS (0,1 M ; pH 7,4) à = 600 nm pour les TiONts et les différentes synthèses de TiONts-APTES afin d’évaluer leur stabilité

colloïdale.

I.2.1.4. Estimation de la quantité d’APTES greffée sur les TiONts

Les nouvelles synthèses des TiONts et des TiONts-APTES sont analysées par ATG sous air de 50°C à 800°C (Tableau 18 et Figure 99). La perte de masse due au nouveau greffage des TiONts-APTES est moins conséquente qu’avec l’ancien échantillon (Figure 99a). Le taux de silane à la surface des nanotubes (Équation 3) varie de 5,3 NH2.nm-2 à 2,6 NH2.nm-2 d’un protocole à l’autre. L’analyse ATG corrobore les autres caractérisations déjà réalisées en prouvant une quantité réduite d’APTES à la surface des nanotubes. Par conséquent, ce résultat conforte l’idée d’avoir réduit le nombre de couches à la surface des nanotubes.

Température de début de dégradation (°C) Perte de masse (%) Masse moléculaire dégradée (g.mol-1) Molécule.nm-2 (moyenne) Reproductibilité (n) Nombre de molécules greffées par TiONt(*) TiONts 175 2,8 18 10,6 (1,5) OH 10 - TiONts-APTES 160 10,3 58 5,3 (0,4) NH2 7 29 000 TiONts (nouvelle synthèse) 190 2,6 18 10,2 (1,5) OH 10 - TiONts-APTES (nouveau protocole) 175 6,3 58 2,6 (0,2) NH2 9 14 230

Tableau 18 : Estimation des taux de greffage des différentes synthèses de TiONts et de TiONts-APTES par ATG.

(*) Estimation du nombre de molécules par nanotube par un calcul géométrique en ne tenant compte que de la surface extérieure des tubes.

Figure 99 : Comparaison des courbes (a) ATG et (b) DTG des différentes synthèses de TiONts nus et de

TiONts-APTES sous air (25 mL.min-1) avec une rampe de 5°C.min-1. L’écart symbolisé par la ligne continue représente la différence de perte de masse correspondant à la fonctionnalisation par l’APTES avec l’ancien protocole tandis que l’écart symbolisé par la ligne en pointillés représente la différence de perte de masse

correspondant à la fonctionnalisation par l’APTES avec le nouveau protocole.

I.2.1.5. Conclusions

La nouvelle stratégie de greffage de l’APTES à la surface des TiONts tend à limiter la formation d’une multicouche d’aminosilane. L’objectif est ici de libérer au mieux la fonction amine, au détriment d’un taux de greffage élevé. Ce point sera vérifié par la suite lors du greffage du PEG (voir paragraphe ‎II.1.2.1.). Ceci a pour conséquence d’optimiser l’effet électrostatique avec un potentiel zêta plus élevé en valeur absolue pour des pH faibles et élevés. Cependant, au pH physiologique, les TiONts-APTES s’agglomèrent fortement et ne sont pas stables. Ceci est un frein en vue des applications biologiques, d’où la nécessité de réaliser d’autres greffages pour pallier à cet inconvénient majeur. D’ailleurs, la diminution de l’encombrement autour de la fonction amine peut favoriser l’approche d’autres molécules, telles qu’un polymère, lors des fonctionnalisations. Dans la suite du manuscrit, les TiONts-APTES utilisés sont synthétisés à partir du protocole décrit dans cette partie. Un autre choix d’alcoxysilane, le N-(6-aminohexyl)aminomethyltriethoxysilane (AHAMTES), est présenté dans la partie suivante afin de le comparer au greffage de l’APTES sur les TiONts.