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Techniques d’isolement et d’identification de la flore bactérienne des produits

II. Risques liés à la flore bactérienne présente dans les produits de la pêche

II.4. Techniques d’isolement et d’identification de la flore bactérienne des produits

Les conditions expérimentales des études sur la flore bactérienne des produits aquatiques sont très différentes et dépendent des bactéries recherchées. Pour des études portant sur la flore totale, des géloses non sélectives, comme des géloses trypcase soja (TSA), Plate Count Agar (PCA) ou

de l’eau de mer gélosé (SWA) peuvent être utilisées (Liston 1957, Svanevik et Lunestad 2011, Broekaert et al. 2013). Pour des études portant sur des flores spécifiques (altération, contamination

fécale, pathogène pour l’animal,…) des géloses sélectives peuvent être utilisées pour les cibler. Par

exemple la gélose Iron Agar Lyngby est utilisée pour sélectionner les bactéries productrices de H2S, la gélose de Man Rogosa Sharp (MRS) pour sélectionner la flore lactique, le milieu

thiosulfate-citrate-bile-saccharose (TCBS) pour isoler les bactéries du genre Vibrio ou encore la gélose glutamate starch

red phenol (GSP) pour isoler les bactéries du genre Aeromonas (Heinsz et al. 1988 , Linton et al. 2003, Al-Harbi et Uddin 2005, Svanevik et Lunestad 2011, Broekaert et al. 2013, Dabadé et al. 2016, Baron et al.).

Les températures d’incubation des géloses ont également un rôle dans la sélection des

bactéries. Elles s’échelonnent de 0 à 37 °C (Georgala 1958, Heinsz et al. 1988, Linton et al. 2003, Broekaert et al. 2013, Dabadé et al. 2016). Une étude montre que la flore cultivable des produits

aquatiques est moins importante à 37°C qu’à des températures inférieures à 20°C (Georgala 1958).

En effet, les animaux aquatiques étant des animaux à « sang-froid », leur température corporelle

dépend de la température de l’eau et la flore bactérienne associée à ces animaux est donc également dépendante de cette température. C’est pourquoi, la plupart des études sur la flore des produits

aquatiques se font entre 0°C et 25°C(Liston 1957, Georgala 1958, Kueh et Chan 1985, Austin 2006). En outre, les températures basses, comme par exemple le 8°C, sont utilisées pour étudier la flore

d’altération de ces produits (Leroi et al. 1998). La température de 37°C est utilisée pour sélectionner

les bactéries pouvant se développer chez les animaux à sang-chaud, dont l’Homme. Cette

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contamination fécale. De plus, les temps d’incubation sont impactés par la température utilisée. En

général, plus la température est basse, plus le temps d’incubation est long, de 24 h jusqu’à deux

semaines, selon les études (Liston 1957, Georgala 1958, Kueh et Chan 1985, Austin 2006).

Les premiers travaux réalisés sur l’identification de la flore bactérienne ont utilisé des critères

morphologiques et biochimiques qui sont toujours utilisés (Liston 1957, Georgala 1958, Al-Harbi et Uddin 2005, Hoel et al. 2015). Tout d’abord, la morphologie des colonies sur les géloses, et leur couleur, permet de discriminer des colonies bactériennes selon des caractères biochimiques. Par

exemple sur la gélose GSP, les bactéries du genre Aeromonas sont jaunes et celles du genre

Pseudomonas sont mauves, ou alors les souches produisant du H2S sont noires sur les géloses TCBS

et Iron lyngy Agar. Ensuite, l’identification des souches est confirmée par des examens en

microscopie (coloration de Gram, mobilité, forme, …) et la réalisation des tests biochimiques

(catalase, oxydase, fermentation, utilisation de sucre,….). Ces tests ont été miniaturisés et

commercialisés, les galeries API® étant les plus anciennes (Smith et al. 1972, Janin 1973). Ces

systèmes nécessitent un temps d’incubation pour que les caractères de la bactérie puissent

s’exprimer (Janin 1973). Les techniques biochimiques sont très utilisées dans les laboratoires en routine pour identifier les bactéries, mais elles ne sont utilisables que pour les bactéries dont les caractéristiques biochimiques ont été décrites. Il est donc nécessaire de savoir quelles espèces

bactériennes sont recherchées. Aujourd’hui, il existe des appareils, VITEK® 2 Compact, BD Phoenix™,

permettant l’automatisation de la manipulation et de la lecture (BD , Biomerieux). En parallèle, des

techniques d’identification basées sur l’amplification et le séquençage de gènes de ménage et basées

sur l’analyse de spectres protéiques par spectrométrie ont été développées.

Les méthodes moléculaires s’appuient sur l’amplification et le séquençage de gènes de

ménage et la comparaison des séquences à des bases de données comme celles du National Center

for Biotechnology Information (NCBI) ou European Molecular Biology Laboratory (EMBL). Les gènes de ménage sont présents dans le génome bactérien avec des séquences qui peuvent être spécifiques

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à une espèce bactérienne. C’est le cas par exemple des gènes de l’ARNr16S, gyrA, gyrB, rpoA, rpoB,

rpoC, rpoD (Mollet et al. 1997, Drancourt et al. 2000, Das et al. 2014). Le gène le plus utilisé pour

identifier les espèces bactériennes est celui de l’ARNr16S (Drancourt et al. 2000). Cependant, ce gène est présent en plusieurs copies sur le chromosome bactérien avec des séquences hétérogènes et

l’amplification de ces copies va entrainer l’apparition de séquences chimériques. Ces séquences

seront différentes de celles présentes sur les génomes de référence (Wang et Wang 1997). Cela

entraine une perte de précision dans l’identification bactérienne. L’utilisation de ce gène de ménage

pour l’identification d’une souche à l’espèce bactérienne n’est pas « garantie », notamment pour les souches appartenant à la famille des Enterobacteriaceae ou au genre Bacillus (Fox et al. 1992, Mollet et al. 1997, Das et al. 2014). Le séquençage des autres gènes de ménage a été principalement utilisé

pour discriminer des espèces proches au sein d’un même genre bactérien, comme le gène gyrB qui a

été utilisé pour identifier les espèces du genre Pseudomonas (Yamamoto et Harayama 1995, Das et

al. 2014). Cependant, il n’existe pas d’amorces universelles permettant d’identifier tous les genres et

espèces bactériennes. Il est nécessaire de cibler les genres bactériens que l’on veut identifier pour

savoir quel(s) gène(s) et quelles amorces utiliser pour l’amplification et le séquençage.

Les techniques de spectroscopie sont des techniques d’identification bactérienne récentes.

La plus utilisée pour l’identification bactérienne est le Matrix-Assisted Laser Desorption Ionization Time Of Flight ou MALDI-TOF. Cette technique permet d’obtenir un spectre protéique pour une

souche bactérienne. Ce spectre est comparé à des spectres de référence, cela permet l’identification

au genre ou à l’espèce. Cette technique est plus simple à mettre en place que l’amplification et le

séquençage des gènes de ménage. En effet, pour avoir un spectre protéique, il faut cultiver la souche

bactérienne, en extraire les protéines puis déposer les échantillons pour l’analyse dans l’appareil . De plus, l’interprétation des résultats est automatisée par l’appareil. Cependant, les bases de données

des spectres de référence sont aujourd’hui construites avec des profils de souches cliniques et ceux des souches environnementales et alimentaires sont peu présents. De plus, les spectres sont dépendant des protocoles de préparation des échantillons et donc les comparaisons avec les

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spectres de référence ne peuvent se faire qu’avec un protocole identique (Bohme et al. 2010, Bohme

et al. 2011). D’autres techniques de spectroscopie existent comme la spectroscopie Raman et infrarouge, mais elles sont peu développées et il n’existe ni de standardisation des protocoles, ni de

bases de données de spectres validées (Quintelas et al. 2018).

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