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Chapitre 1 : Isolement et identification de la flore bactérienne mésophile cultivable des produits de

III. Comparaison des performances de différentes techniques d’identification bactérienne 70

III.3. Discussion

L’identification bactérienne par la technique MALDI-TOF a montré l’avantage d’être rapide et

simple d’utilisation. Cependant, cette technique est basée sur la comparaison du spectre protéique de la souche à identifier aux spectres de référence présents dans une base de données.

L’identification au genre était bon (81 %) sur le panel étudié par cette technique mais moins

performant (50%) pour l’espèce bactérienne. Les conditions de culture (gélose, température et temps d’incubation) et d’extraction des protéines des isolats influent fortement les spectres protéiques obtenus. C’est pourquoi il est important que les souches à identifier soient préparées dans les mêmes conditions que celles utilisées pour établir les spectres de référence (Bohme et al. 2010, Bohme et al. 2011). Dans ces travaux, la flore bactérienne a été isolée et cultivée à des

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températures variables qui ne sont pas automatiquement celles utilisées pour l’obtention des

spectres de référence (de 25 °C à 37°C). Ces différences ont pu entraîner une perte de précision ou

des erreurs d’identification de certaines souches par la technique MALDI-TOF. Elles peuvent

également expliquer les désaccords d’identification observés lors de la comparaison entre les

résultats obtenus par la technique MALDI-TOF et ceux avec les techniques d’amplification et de

séquençage des gènes de ménage.

L’amplification et le séquençage de gènes de ménage pour l’identification bactérienne est une technique couramment utilisée. Ces gènes sont présents dans le génome de toutes les bactéries et leurs séquences peuvent être spécifiques à une espèce bactérienne (Mollet et al. 1997, Drancourt et al. 2000). Le séquençage du gène de l’ADNr 16S est le plus utilisé. Plusieurs travaux scientifiques sur la flore bactérienne de truites, de baudroies, ou de filets de dorade ont utilisé ce gène pour

l’identification bactérienne (Haygood et al. 1992, Kim et al. 2007, Parlapani et al. 2015). Dans nos travaux, le taux d’identification au genre était bon (91 %) et supérieur à celui obtenus par la

technique MALDI-TOF. Par contre, pour l’identification à l’espèce bactérienne, la technique

d’amplification et de séquençage de l’ADNr 16S était faible (37 %) vs la technique MALDI-TOF. Cependant, des résultats d’identification à l’espèce ou au genre étaient différents entre les deux

techniques. Ces différences peuvent être dues à une imprécision interne à la technique

d’identification utilisée comme des séquences ou de spectres protéiques de différentes espèces trop proches pour être discriminées, erreurs dans les spectres/chromatogrammes de référence, absence de références. De plus, le gène de l’ADNr 16S est présent en plusieurs copies avec des séquences

hétérogènes sur le chromosome bactérien. L’amplification par PCR de ce gène va entraîner

l’apparition de plusieurs amplicons de séquences différentes. Le chromatogramme obtenu par le séquençage donne une séquence compilant les différentes séquences des amplicons. Il en résulte

une perte d’information avec les séquences de l’ADNr 16S des différentes copies du gène. La

comparaison de cette séquence « chimère » avec celles des génomes de référence dans les bases de données peut entraîner une identification moins précise (Wang et Wang 1997).

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De plus, la technique du MALDI-TOF et celle de l’amplification et du séquençage des gènes de

ménage ont des difficultés à discriminer des espèces dans certains genres bactériens. C’était le cas

par exemple pour les genres Bacillus, Pseudomonas et Aeromonas. La faible diversité de spectres de

référence de certaines espèces bactériennes présentes dans la base de données de l’appareil

MALDI-TOF peut entrainer une identification à l’espèce faussement précise. En effet, la technique MALDI

-TOF a permis d’identifier des souches à l’espèce Bacillus altidunis, à la différence du séquençage de

l’ADNr 16s qui ont identifié ces mêmes souches comme B. altidunis, B. xianamensis, B. aerius ou B. stratosphaericus, or les trois dernières espèces bactériennes ne sont pas présentes dans la base de données du MALDI-TOF.

Des discordances d’identification ont également été observées entre les 2 techniques c’est pourquoi nous avons amplifié et séquencé d’autres gènes de ménage comme gyrB, et rpoB qui sont en monocopie et le gène tuf qui est en une ou deux copies (Venkateswaran et al. 1998, Ait Tayeb et al. 2005, Tanaka et al. 2010). L’amplification du gène gyrB n’a pas été efficace pour identifier le genre Vibrio. Pourtant lors d’études préliminaires au laboratoire, nous avions eu une bonne identification des espèces V. parahaemolyticus et V. alginolyticus. Ces différences peuvent s’expliquer par le fait que le genre Vibrio comporte 142 espèces donc potentiellement 142 structures différent du gène qui seront plus ou moins bien ciblés par les amorces que nous avons utilisé. De plus, à l’origine les

amorces ont été dessinées pour pouvoir identifier le genre Aeromonas ou des espèces du groupe

Pseudomonas putida, et il semble que ces amorces ne soient pas utilisables pour identifier toutes les

espèces du genre Vibrio (Yamamoto et Harayama 1995, Yanez et al. 2003). En ce qui concerne le

genre Pseudomonas, Ait Tayeb et al. (2005) ont montré que le séquençage du gène rpoB était plus

efficace que celui du gène de l’ADNr 16S pour identifier les différentes espèces du genre

Pseudomonas. Cependant, même si plus de souches de Pseudomonas ont été identifiées à l’espèce

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d’identification d’espèces entre les gènes ADNr 16S et rpoB ont été observées. Ces différences concernaient principalement les espèces du groupe P. fluorescens. Enfin, les amorces dessinées pour amplifier et séquencer le gène tuf ont été efficaces pour identifier les espèces de Staphylococcus.

L’espèce S. aureus a pu être identifiée grâce aux amorces utilisées pour le gène tuf alors que ni la

technique MALDI-TOF, ni l’amplification et le séquençage de l’ADNr 16S ne les avait identifiées.

Toutefois, la pertinence des identifications par la technique MALDI-TOF et celle de

l’amplification et du séquençage des gènes de ménage est liée aux spectres/séquences de référence, à la taille des bases de données et à leur fiabilité. En effet, l’identification bactérienne par la

technique MALDI-TOF a d’abord été développée pour l’identification de bactéries isolées de patients

dans le milieu médical. La base de données contient donc majoritairement des spectres de référence

d’espèces bactériennes pathogènes pour l’homme, et il y a peu de spectres de souches bactériennes

environnementales et alimentaires. En outre, les chromatogrammes obtenus lors du séquençage sont comparées à des bases de données comme par exemple celle de la collection de nucléotide du

NCBI qui est publique. Des erreurs d’annotations sont possibles, diminuant la fiabilité de ces bases

pour l’identification bactérienne. Il est important que des critères de fiabilité soient définies au

niveau international pour que les bases de données de séquences puissent être curées afin d’avoir

une bonne identification des souches. De plus, la base de données de l’appareil MALDI-TOF est plus

récente et moins développée que celles des séquences de l’ADNr 16S. En effet, il y avait 2 185

espèces dans la base de données du MALDI-TOF, plus de 14 800 séquences d’ADNr 16S d’espèces

différentes et plus de 52 483 génomes de références bactériens dans les bases du NCBI. Par exemple, il y avait une bonne identification des espèces Enterococcus spp. par la technique MALDI-TOF et celle

du séquençage de l’ADNr 16S. Au contraire, la technique MALDI-TOF n’était pas capable d’identifier

les souches Exiguobacterium spp. et le séquençage de l’ADNr 16S l’était. D’ailleurs, seule l’espèce

Exiguobacterium aurantiacum était présente dans la base de données du MALDI-TOF.

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permettrait de donner de la force à cette technique pour l’identification d’isolats bactériens

environnementaux.

Les techniques que nous avons employé, dans ces travaux, pour identifier les souches

bactériennes à l’espèce ont chacune leurs avantages et leur inconvénients. En conclusion, il apparait

que l’utilisation de deux techniques soit le minimum pour une bonne identification de la flore

bactérienne cultivable de l’écosystème marin. En effet, il apparait important d’employer une

technique comme le séquençage de l’ADNr 16S pour identifier un large spectre de genres bactériens

et une technique, comme par exemple MALDI-TOF, autres gènes de ménage rpoB/tuf/gyrB, pour

identifier/confirmer à l’espèce selon le genre bactérien obtenu. Cependant, des difficultés

demeurent pour identifier les espèces bactériennes de certains genres comme Pseudomonas ou

Bacillus et de nombreuses souches n’ont pas pu être identifiées au genre ou à l’espèce bactérienne.

IV. Identification des souches isolées des produits de la pêche et

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