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Techniques d'observation d'un dépôt bactérien par microscopie

Chapitre I Contexte et problématique

B.5. Techniques d’observation et de caractérisation à l’échelle individuelle

B.5.6. Techniques d'observation d'un dépôt bactérien par microscopie

Dans cette partie nous allons brièvement décrire les méthodes de caractérisation du colmatage bactérien formé pendant une filtration sur membrane. Ces méthodes ont pour objectif d’observer les propriétés du dépôt particulaire, au cours de la filtration, si possible sans perturber sa formation et son organisation du dépôt (techniques non destructives). Pour l’étude des dépôts biologiques, elles reposent majoritairement sur les techniques de microscopies décrites dans le paragraphe précédent. A noter que d’autres méthodes sont utilisées pour étudier les caractéristiques des dépôts colmatants (Hassan, 2014) comme par exemple la réflectométrie ultrasonique ou l’imagerie par résonnance nucléaire magnétique mais celles-ci ne permettent pas la révélation, à l’échelle individuelle, des particules biologiques présentes à la surface d’une membrane de filtration.

Microscopie optique

Les méthodes optiques classiques permettent l'observation en temps réel de la formation d'un dépôt à la surface d'une membrane. Par exemple, l’équipe de Li et al., (1998) a utilisé un microscope dont l'objectif est placé du côte permeat de la membrane qui est transparente afin de relier la chute du flux de permeat au pourcentage de surface membranaire recouvert par le dépôt. Selon le même principe, il est possible d'observer la formation et le décrochement d'un dépôt de particules sur la face perméat de la membrane (Mores and Davis, 2001).

Microscopie confocale à balayage laser

La microscopie confocale à balayage laser (CLSM pour Confocal Laser Scanning Microscopie) permet de réaliser des images avec une très faible profondeur de champ (environ 600 nm) appelées sections optiques. En positionnant le plan focal de l'objectif à différents niveaux de profondeur, il est possible de réaliser une série d'images et ainsi d'obtenir une reconstruction tridimensionnelle du dépôt. Le principe général de la CLSM est de faire pénétrer un faisceau laser dans l'échantillon préalablement marqué par des fluorochromes, ce qui provoquera

57 l’émission d’un rayon lumineux détecté par les photomultiplicateurs. Le signal reçu, dont l'intensité est dépendante du nombre de photons excités, est converti en signal numérique et permet la reconstruction d'une image. L'avantage de cette technique est l'élimination du bruit de fond du fait de la focalisation sur la zone analysée. Cette technique a été utilisée pour l'étude de l'adsorption de protéines (Ferrando et al., 2005) et l'organisation des dépôts particulaires complexes (Beaufort et al., 2011; Hassan et al., 2013a; Vanysacker et al., 2013).

Microscopie électronique à balayage

Cette technique d’observation est destructive, elle ne permet pas l’observation in situ du dépôt bactérien puisqu’elle requiert des étapes de fixation de l’échantillon vivant. Néanmoins, la microscopie SEM demeure employée pour comparer la morphologie de la surface d’un dépôt bactérien présent sur une membrane de filtration (Hassan et al., 2013a, 2013b; Hwang et al., 2012; Lee et al., 2013; Rosas et al., 2014; Vanysacker et al., 2013) mais elle représente surtout une technique de choix pour observer les structures des matériaux membranaires à l’état vierge.

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Problématique

La production d’eau potable ou de fluide stérile emploie les procédés membranaires pour éliminer l’intégralité des microorganismes potentiellement pathogènes présents en suspension. Néanmoins, les capacités d’adaptation et de déformation des cellules vivantes sous l’action de contraintes environnementales semblent mettre en défaut les mécanismes de sélectivité basés sur la taille des particules puisque de nombreux travaux font état d’un transfert de bactéries à travers des filtres qui présentent des pores de dimensions inférieures à la plus petite dimension des cellules. Ce point particulièrement sensible amène les opérateurs à diminuer la taille de pore utilisée pour réaliser une filtration qui garantira l’absence de contamination dans la phase de perméat. C’est pourquoi, il est nécessaire de mieux comprendre les mécanismes qui permettent et favorisent le transfert des bactéries par déformation à travers les pores d'une membrane filtrante afin d’apporter les connaissances scientifiques suffisantes qui permettront de limiter ce phénomène afin de garantir et sécuriser la sélectivité des procédés membranaires.

Afin d’observer le transfert de bactéries à travers une membrane, nous nous placerons dans le cas de la microfiltration à des tailles de pore similaire à celles préconisées pour la production d’un fluide stérile (0,22 µm), tailles de pore qui devront être inférieures aux dimensions des bactéries modèles sélectionnées. Il sera nécessaire de réaliser l’étape de filtration en condition stérile afin de pouvoir mesurer les concentrations bactériennes dans les différents compartiments (phase rétentat et phase perméat). Le dispositif de filtration devra également résister à des étapes de stérilisation en amont des expériences de filtration. La membrane sélectionnée devra posséder des caractéristiques intrinsèques spécifiques - reproductibles d’un échantillon à l’autre - afin d’assurer la pertinence de ce projet (taille de pore et géométrie calibrée, surface plane).

Ce projet ayant pour objectif premier d’évaluer l’influence de différentes variables opératoires appliquées aux procédés de filtration sur leur sélectivité, nous avons donc mis en place une démarche expérimentale pour répondre aux questions suivantes :

 Comment le transfert de bactéries déformables évolue t’il pendant une filtration membranaire ? Quels sont les effets des paramètres opératoires tels

59 que la pression transmembranaire ou la concentration de l’alimentation sur l’amplitude de ce transfert ?

 En présence de bactéries déformables, existe-t-il une corrélation entre sélectivité et productivité ? Quel est le rôle du colmatage sur le transfert ?

 Est-il possible de traduire le comportement collectif des cellules déformables à partir d’informations mesurées à l’échelle individuelle?

 Quel est l’effet d’une altération des propriétés pariétales des cellules bactériennes induites par une exposition à un agent chimique dans le fluide filtré sur l’amplitude et la dynamique du transfert par déformation ?

Concernant le dernier point, la présence dans l’eau de polluants organiques sous forme dissoute n’est plus à démontrer et constitue une problématique nouvelle pour les producteurs d’eau potable. Il apparait comme essentiel de chercher à déterminer si ces polluants (résidus pharmaceutiques, perturbateurs endocriniens, tensioactifs, dérivés chlorés, pesticides, HAP…) qui peuvent altérer la structure pariétale des microorganismes favorisent ou non leur rétention par une membrane filtrante, diminuant ainsi les capacités épuratrices des procédés de filtration.

Cette étude cherche à apporter des réponses aux questions posées dans le cadre de la filtration frontale de suspensions bactériennes, pour cela la démarche suivante a été envisagée :

 dans un premier temps, les caractéristiques des membranes sélectionnées ont été déterminées et les propriétés morphologiques des trois souches bactériennes modèles ont été mesurées,

 dans une seconde étape, le transfert de bactéries a été évalué au premier instant d’une filtration frontale – en l’absence de colmatage,

 enfin, dans une troisième partie, la sélectivité et la productivité de la filtration ont été suivies afin d’observer leurs évolutions sur des temps longs.

La gamme couverte pour les différents paramètres opératoires testés a été sélectionnée au regard des conditions rencontrées dans les applications industrielles et les variables seront étudiées une à une afin de quantifier leur influence respective.