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Protocole expérimental spécifique à ce chapitre

Chapitre IV Etude paramétrique du transfert de bactéries déformables au temps initial

A.1. Protocole expérimental spécifique à ce chapitre

Le transfert de microorganismes à travers la membrane de filtration, ou plus précisément le nombre de cellules bactériennes qui traversent la membrane par unité de temps ou de volume filtré, n’est pas un phénomène stable ou constant. Au cours d’une filtration membranaire, la quantité de bactéries qui parvient à se déformer et à atteindre le compartiment perméat est susceptible d'évoluer en fonction du temps suite au colmatage de la membrane.

Dans ce chapitre, nous nous sommes intéressés au transfert de bactéries aux premiers instants d’une filtration. Dans ce cas d’étude, la membrane n’est pas (ou peu) colmatée et pourrait être définie comme "neuve" ou encore vierge de toute contamination. L'objectif de cette partie du projet doctoral est alors de déterminer l'influence de différents paramètres opératoires sur le transfert de bactéries déformables au contact direct de l'interface membranaire.

L’évolution de la concentration bactérienne dans le perméat au cours d’une filtration de longue durée ainsi que l’impact des paramètres opératoires sur la dynamique du transfert et du flux de perméat seront étudiés dans le Chapitre V.

Un protocole expérimental de filtration a été développé pour permettre de quantifier le transfert de cellules bactériennes pendant les premières minutes d’une filtration frontale. Pour cela, deux points sont à souligner :

 le volume de suspension bactérienne filtré doit être relativement faible afin d’éviter la formation d’un dépôt de cellules à la surface de la membrane. Nous avons fixé ce volume à 50 mL pour trois raisons. Premièrement, la filtration de ce volume de suspension à une concentration élevée de 107 UFC/mL permet de réaliser un test de rétention avec une charge (≈5.107 UFC/cm²) légèrement supérieure à la valeur préconisée pour les tests standardisés qui est de 107 cellules par cm² de surface filtrante effective. Deuxièmement, pour ce volume, aucune diminution du transfert n'est observée pour les trois souches modèles, diminution qui pourrait représenter l'amorce de l'impact d'un colmatage sur le transfert des bactéries (vérification expérimentale dans le chapitre suivant). Enfin, ce volume est suffisamment faible pour correspondre au volume de remplissage de la cellule de filtration Amicon et

119 permet ainsi d'éviter l'utilisation de l'enceinte pressurisée comme réservoir d'alimentation.

 La totalité des 50 mL de la suspension présents dans la cellule Amicon est filtrée et récupérée intégralement dans un tube stérile. L’évaluation de la concentration bactérienne dans la phase perméat est donc une valeur du transfert moyen pour un volume filtré total de 50 mL.

Les résultats obtenus pour les différents tests seront représentés en concentration bactérienne dans le perméat (Cp en UFC/mL), pour un volume filtré de 50 mL, en fonction des paramètres opératoires étudiés (concentration bactérienne de l’alimentation, PTM, présence antibiotique) et cela pour chacune des trois souches modèles (E. coli, P. aeruginosa, S. aureus). Ces trois souches ont été sélectionnées pour leurs différentes caractéristiques morphologiques et structurales (cf. Figure IV.1) comme nous l’avons détaillé dans le chapitre II puis vérifié dans le Chapitre III, et nous permettront d’affiner l’étude du rôle des différents paramètres biologiques (forme, taille, gram, élasticité de la paroi) sur le transfert de cellules vivantes au travers de pores submicrométriques.

Les suspensions étant préparées dans de l'eau physiologique stérile (9g/L NaCl), les microorganismes sont placés dans un milieu non nutritif, c’est à dire sans substrat carboné, dans lequel les cellules vivantes sont en phase de latence diminuant ainsi leur capacité à démarrer un cycle de croissance par division cellulaire. Ceci nous permet de considérer le fait que les paramètres géométriques mesurés dans le chapitre III sur les cellules bactériennes en suspension correspondent aux caractéristiques des bactéries qui se présentent à l’entrée du pore lors de l’expérience de filtration. L'ajout de l'antibiotique dans le milieu de filtration est réalisé comme décrit dans le chapitre II.

La valeur du paramètre λ est obtenue en calculant le rapport entre le diamètre moyen de pores des membranes et le diamètre de la bactérie. Dans le cas des deux bacilles, la plus petite dimension du microorganisme est employée pour évaluer le paramètre λ car il représente le cas le plus défavorable vis-à-vis de la rétention par un mécanisme d’exclusion stérique.

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Souche Forme Gram Dimension (µm) Volume cellulaire (µm3) Module de Young (kPa) Epaisseur du peptidoglycane (nm) Potentiel zêta (mV) E. coli bacille - 0,91x2,04 1,1 539 6,41 -16,233 P. aeruginosa bacille - 0,79x1,63 0,67 521 2,41 -17,43 S. aureus coque + 0,74 0,21 748 15-302 -21,53

Figure IV.1 : Rappel des principales caractéristiques morphologiques et nanomécaniques des souches modèles sélectionnées.

Références : 1Matias 2003, 2Volmer 2008, 3Lebleu 2007.

Il est important de noter qu’un des aspects critiques de la filtration (stérilisante) n’est pas pris en compte dans notre étude : la déformation de cellules à l’entrée d’un pore entraine potentiellement une altération ou un déchirement de la paroi cellulaire du fait des fortes contraintes de cisaillement locales générées par la filtration (Franken 1990). Une rupture de la paroi cellulaire peut selon les cas provoquer la mort du microorganisme, avoir pour conséquences de relarguer l’ensemble des composés cytoplasmiques dans le perméat ou encore de diminuer les capacités de croissance des cellules endommagées (Ghayeni 1999). Une diminution des capacités de croissance d’un microorganisme ne signifie pas nécessairement qu’il est mort ou inactivé de manière irréversible. Il a été démontré que la chloration de l’eau destinée à la consommation entraine une incapacité à croitre des bactéries coliformes sur certains milieux de croissance et que différents pathogènes peuvent retrouver la capacité de se multiplier après leur transport jusqu’aux points de distribution (McFeters 1986). Le protocole employé dans notre étude sous-estime donc potentiellement le nombre de cellules présentes dans le perméat après une filtration puisque nous avons uniquement dénombré les cellules revivifiables par culture sur milieu nutritif à 37°C. L’analyse de composés toxiques (endotoxines et exotoxines) présents dans le perméat et issus d’une rupture de la paroi et de la libération du cytoplasme des cellules pourrait être envisagée mais s’avère potentiellement complexe du fait des faibles concentrations à doser.

Pour rappel, les échantillons de perméat sont collectés après la filtration de 50 mL de suspension bactérienne et sont ensuite dilués puis ensemencés. Enfin, le nombre d’Unité Formant Colonie (UFC) est évalué, en duplicat, après 24 h d’incubation à

121 37 °C pour mesurer les concentrations bactériennes dans l'alimentation et le perméat produit. Pour chaque condition testée, les résultats sont présentés sous la forme d'une concentration moyenne calculée à partir des résultats obtenus lors de trois expériences indépendantes.