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CHAPITRE 4 : L’AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE L’IMPULSION LASER

4.2. Amélioration du contraste laser

4.2.2. Technique XPW

Une autre technique de filtrage temporel d’une impulsion expérimentée au cours de cette thèse est l’utilisation d’un effet non-linéaire basé sur la différence d’intensité entre l’impulsion principale femtoseconde et le bruit de fond (l’ESA) nanoseconde moins intense. Le problème qui se pose pour un tel filtre est que l’impulsion doit être comprimée avant l’interaction non-linéaire. Le filtre est placé après l’étage de pré-amplification au niveau mJ. Si après le filtrage on cherche à ré-amplifier l’impulsion pour obtenir des énergies de l’ordre du joule, il faut l’injecter dans une deuxième chaîne CPA (figure 4.7).

Figure 4.7 : Schéma de principe d’un double CPA avec un filtre non-linéaire.

Le premier double CPA expérimental a été réalisé par Kalashnikov et al. (2005). Le filtre non-linéaire dans ce système utilise la rotation de polarisation elliptique dans l’air.

Un filtre non linéaire peut être défini par une dépendance de l’intensité de l’onde transmise par rapport à l’intensité incidente selon

𝐼

𝑜𝑢𝑡

= 𝑓(𝐼

𝑖𝑛𝑛

)

, avec n ≥ 2, ce qui permet d’améliorer le contraste significativement. Si on prend, par exemple, un effet non linéaire du 2ème ordre (n = 2) et une impulsion de départ qui a un niveau d’ESA d’intensité relative 10-6.

L’intensité de l’impulsion après l’interaction est élevée au carré, alors le piédestal d’ESA peut être diminué jusqu’à une intensité relative de 10-12. Donc l’augmentation du contraste peut être

considérable.

En plus, le filtre doit assurer une discrimination entre l’onde incidente et l’onde transmise grâce à une ou plusieurs modifications non-négligeables de l’impulsion lors de l’interaction. Ces modifications peuvent concerner la polarisation, la phase, la direction de propagation, la longueur d’onde. Le filtre doit également avoir un taux de transmission assez haut pour injecter l’impulsion nettoyée dans un amplificateur à gain modéré. En plus, les caractéristiques spatiales et spectrales de l’impulsion ne doivent pas changer.

La génération d’une onde à polarisation croisée (cross-polarized wave ou XPW en anglais) est un processus non-linéaire du 3ème ordre qui induit la rotation de la polarisation de

l’impulsion laser; l’intensité de l’impulsion à polarisation tournée est cubique avec l’intensité d’entrée. Ainsi, la génération de XPW est une bonne technique pour l’augmentation du contraste laser d’une impulsion femtoseconde. Si elle est générée entre deux polariseurs croisés, l’onde XPW permet de bloquer les parties de l’impulsion de basse intensité pour améliorer le contraste laser. Bien qu’il existe différents cristaux non-linéaires utilisés pour la génération de XPW (YVO4, CaF2,CdF2,LiF, NaCl, MgO, C, SrF2), le fluorure de barium (BaF2)

est le plus souvent utilisé pour la génération de XPW. Les détails de la technique XPW et les expériences relatives à sa possible implémentation sur des systèmes laser de haute puissance sont évoqués dans plusieurs publications (Jullien et al., 2004; Cotel et al., 2006; Ramirez et al., 2011).

Plusieurs systèmes laser de la classe 10 TW ont utilisé la technique XPW appliquée dans une géométrie de double CPA : la « salle jaune » du Laboratoire d’Optique Appliquée (10 Hz, 1.5 J, 30 fs) (Flacco et al., 2010) et le système LOASIS (10 Hz, 500 mJ, 40 fs) au LBNL (Plateau et al., 2009) mais dans les deux cas seulement les mesures du contraste picoseconde sont présentées.

Le laboratoire CUOS aux États-Unis a implémenté la technique XPW sur un système avec un seul CPA. Dans ce but, une énergie d’injection plus haute (1 mJ) est utilisée pour la génération de XPW dans deux cristaux BaF2 montés en séries avec un filtre acousto-optique

dispersif programmable pour compenser la dispersion dans les optiques. Le système laser génère 1.5 J d’énergie en impulsions de 30 fs après compression à la fréquence de 0.1 Hz (Chvykov et al., 2006). L’amélioration du contraste laser à quelques centaines de ps avant l’intensité pic est de trois ordres de grandeur, ce qui donne un contraste de 1011. Toutefois,

comme dans les autres travaux, il n’y a pas de caractérisation détaillée à l’échelle nanoseconde et le taux de répétition bas permet d’avoir une puissance moyenne de seulement 0.15 W, ce qui est insuffisant pour des expériences laser à haute brillance. Ce niveau de contraste est assez haut pour travailler avec une impulsion laser focalisée à l’intensité de 1022 W/cm2 et éviter la

génération d’un pré-plasma.

La technique XPW a été implémentée sur le système laser 200 TW du ALLS; dans ce but un étage d’amplification supplémentaire a été rajouté (super booster) avec la géométrie de double CPA. Dans cette configuration, on n’utilise pas d’absorbant saturable après l’amplificateur régénératif mais un absorbant saturable est inséré dans le booster XPW.

L’énergie injectée dans le deuxième amplificateur régénératif est 100 fois plus haute qu’au premier étage donc cela prend moins d’allers-retours pour atteindre l’énergie de saturation. En plus, l’impulsion injectée est plus propre avec un contraste plus haut, donc le niveau de l’ESA générée est plus bas. Le contraste nanoseconde d’une impulsion laser est d’environ 5 × 10-7 en

énergie (7 × 10-8 en intensité). À l’échelle de picoseconde, le contraste laser est 10-11 jusqu’à 20

ps avant l’impulsion principale. Sur la figure 4.8 on voit le contraste picoseconde d’une impulsion laser mesuré sans et avec le XPW.

Figure 4.8 : Mesures du contraste picoseconde d’une impulsion laser avec un auto-corrélateur du 3ème ordre avec et sans XPW.

Nous avons pu constater l’amélioration du contraste picoseconde et nanoseconde mais il y a toujours un problème du front de montée de l’impulsion juste avant le pic d’intensité. Un autre problème rencontré lors de l’exploitation de cette technique était le noircissement du cristal non-linéaire de BaF2 qui menait à la dégradation du signal et la perte de transmission.

Ainsi, le cristal devait être remplacé au bout de quelques jours avec l’éventuel réalignement du nouveau cristal. Probablement, l’intensité laser était trop élevée à ce stade.