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CHAPITRE 1 : INTERACTION LASER DE PUISSANCE FEUILLE ULTRA MINCE

1.7. Accélération d’ions par laser

1.7.1. Régime Target Normal Sheath Acceleration (TNSA)

Comme tous les mécanismes d’accélération d’ions en dessous de l’intensité laser 1024 W/cm2, le mécanisme TNSA est un mécanisme indirect. L’énergie laser est transférée vers

l’énergie cinétique des électrons du plasma qui, à leur tour, accélèrent les ions.

Les premières expériences ont été réalisées par différents groupes au début des années 2000 (Snavely et al., 2000; Hatchett et al., 2000; Maksimchuk et al., 2000). Il a été identifié par la suite que les protons dans le spectre ionique proviennent des couches d’impuretés d’hydrocarbures et de l’eau sur la surface de la cible (Allen et al., 2004). Ces faisceaux d’ions accélérés par laser ont des caractéristiques très intéressantes : la longueur de paquets est très faible, l’accélération ayant lieu sur ~10 µm; le spectre d’énergies est continu jusqu’à l’énergie de coupure; la taille de la source étant de l’ordre de quelques µm; le faisceau est laminaire (avec une correspondance parfaite entre l’angle d’émission et la position des particules lorsqu’elles sont émises : dans l’espace des phases angle-position le faisceau se retrouve suivant une droite parfaite), son émittance1 est 10-100 fois plus faible que dans des accélérateurs

conventionnels (Borghesi et al., 2004; Sokollik et al., 2008). Le taux de conversion de l’énergie laser vers l’énergie cinétique d’ions est ≤ 1% (Fuchs et al., 2006). Wilks et al. ont présenté un scénario (Wilks et al., 2001) à partir duquel les lois d’échelle ont été déduites. Elles décrivent l’accélération comme une expansion isotherme d’un plasma non-collisionnel (Mora, 2003; Albright et al., 2006) dépendant de plusieurs paramètres (Fuchs et al., 2006; Schreiber et al., 2006). Ils ont trouvé que l’accélération des ions est effectuée perpendiculairement aux faces de

1

L’émittance transverse normalisée se calcule de la manière suivante : εN = (|p|/mc) [<x2><x’2> - <xx’>2]1/2 où m est la masse des ions, c est la vitesse de la lumière, x indique la position des particules dans l’enveloppe du faisceau et

la cible avec un petit angle de divergence, qui peut être expliqué par la courbure de la gaine accélératrice (Brambrink et al., 2006). On peut distinguer deux régimes TNSA différents par le contraste d’une impulsion laser, c'est-à-dire la relation entre l’intensité pic de l’impulsion principale et l’intensité du piédestal. Comme le mécanisme TNSA est basé sur l’absorption de l’impulsion laser dans le plasma sous-dense sur la face avant de la cible, le piédestal de l’impulsion doit être assez intense pour ioniser les atomes et, d’autre part, assez faible pour ne pas endommager la cible avant l’arrivée de l’impulsion principale. Ainsi, le contraste d’une impulsion laser nécessaire pour la réalisation de ce mécanisme reste dans la gamme 10-5-10-9

en fonction du système laser utilisé.

Le piédestal d’une impulsion laser crée un plasma sous-dense sur la face avant de la cible, et l’impulsion principale interagit avec ce pré-plasma qui a un profil de densité

exponentiel. La longueur caractéristique où la densité diminue de solide à critique est

L = csτp, où cs est la vitesse du son et τp est la durée d’impulsion laser. L est de l’ordre de

quelques microns. Le taux de transfert de l’énergie laser vers l’énergie cinétique des électrons est donné par la loi d’échelle suivante :

𝜂 ≈ 𝑎(𝐼

𝐿

𝜆

2

)

3/4

≈ 1.68 × 10

−15

× 𝐼

𝐿3/4

[𝑊/𝑐𝑚

2

],

(33)

les valeurs typiques sont 10-50% (Snavely et al., 2000; Malka et al., 1997; Amiranoff , 2001). Initialement, les ions restent immobiles alors que les électrons sont accélérés dans la direction du gradient de densité du pré-plasma. Lors de leur propagation dans la cible, les électrons chauds sont déviés par des électrons froids ou les ions. En sortant de la cible sur la face arrière, une grande partie des électrons retourne dans la cible sous la force de leur champ auto-induit car leur énergie n’est pas suffisante pour s’échapper. Nous avons un équilibre avec un nombre constant d’électrons sortis de la feuille. La distance de l’écart des électrons de la cible est définie par une longueur caractéristique égale à la longueur de Debye

𝜆

𝐷

= √

𝜖0𝑘𝐵𝑇𝑒

𝑒2𝑛 𝑒

,

(34) avec la température des électrons chauds Te qui est donnée par le potentiel pondéromoteur. La

densité électronique ne derrière la cible peut être estimée par le nombre d’électrons chauds à

partir de l’efficacité 𝜂, le volume qu’ils occupent et l’angle de divergence. Le champ électrique quasi électrostatique établi est défini par

𝐹

0

𝑘𝐵𝑇𝑒

𝑒𝜆𝐷

qui atteint les valeurs de l’ordre de TV/m pour l’intensité laser de 1019 W/cm2. Les atomes à

proximité de la face arrière sont immédiatement ionisés par le champ.

L’accélération des ions peut être modélisée comme une expansion isotherme qui donne un spectre de forme maxwellienne et une énergie de coupure raide (Mora, 2003)

𝐸

𝑚𝑎𝑥

≈ 2𝑍𝑘

𝐵

𝑇

𝑒

(𝑙𝑛

2𝜔𝑝𝑖𝑡 √2𝑒𝐸

)

2, (36)

avec le nombre d’Euler eE et la fréquence ionique du plasma

𝜔

𝑝𝑖

= √𝑍𝑛

𝑒0

𝑒

2

/𝜖

0

𝑚

𝑖 , où

𝑍𝑛

𝑒0

est la densité ionique initiale et mi est la masse d’un ion. Le temps d’accélération t est de l’ordre

de la durée d’impulsion laser τL. La meilleure approximation du temps d’accélération des

résultats expérimentaux, t ≈ 1.3τL a été trouvée par Fuchs et al. Les lois d’échelle déduites par

ce groupe montrent que l’énergie de coupure des faisceaux de protons augmente avec l’intensité laser selon une loi en racine carrée de l’intensité pour des impulsions longues (≥ 300 fs) et proportionnellement à l’intensité pour des impulsions courtes. Le mécanisme principal impliqué dans la génération de ces faisceaux de protons est l’accélération électrostatique de protons sur la face arrière (non-irradiée) de la cible (Fuchs et al., 2006).

Pour privilégier l’accélération des ions plus lourds que les protons, la couche contaminante peut être enlevée de la cible par chauffage résistif ou par ablation laser (Zepf et al., 2003; Hegelich et al., 2006, 2002). La géométrie de la cible peut être modifiée pour atteindre un spectre d’ions quasi-monoénergétique avec un écart d’énergie ˂ 20%. Des cibles à masse limitée ont été l’objet d’études théoriques (Psikal et al., 2006) et expérimentales (Henig et al., 2009a) grâce à une augmentation anticipée de l’efficacité et de l’énergie d’ions maximum comparé à l’utilisation des cibles de feuilles d’épaisseur similaire. Il a été démontré dans plusieurs publications (McKenna et al., 2007; Sokollik et al., 2008) que la gaine électronique sur la face arrière de la cible s’étend latéralement en diminuant le champ accélérateur. Le but d’utiliser des cibles à masse réduite est de réduire cette étendue électronique en réduisant la surface de la cible. Dans ce cas, les électrons sont confinés plus longtemps et sur une plus petite surface, les champs accélérateurs étant ainsi plus forts. Une autre modification à faire est une application d’un point enrichi d’hydrogène sur la face arrière de la feuille pour augmenter la quantité de protons dans la partie centrale (Schwoerer et al., 2006; Pfotenhauer et al., 2008).

Le mécanisme TNSA fonctionne pour certaines limites du contraste de l’impulsion laser et peut être modélisé par une expansion isotherme d’un plasma quasi neutre pour une durée de temps de l’ordre d’une impulsion laser (Albright et al., 2006; Schreiber et al., 2006). Ce modèle

n’est plus approprié pour un très haut contraste (˂ 10-11) et une impulsion courte, car la

longueur caractéristique du plasma est de l’ordre de la longueur de Debye des électrons chauds. Le modèle d’une expansion adiabatique est plus pertinent pour décrire cette situation (Murakami and Basko, 2006; Andreev et al., 2008, 2009). Les électrons recirculent entre la cible et les gaines de Debye, d’une part sur la face avant irradiée par le laser et d’autre part sur la face arrière (Sentoku et al., 1999). Si on suppose que le nombre d’électrons chauds qui restent à l’extérieur de la cible (comme dans le cas de TNSA standard) est constant, cela donne la dépendance de l’énergie ionique maximum en fonction de l’épaisseur de la cible.

Pour les épaisseurs de cible de l’ordre de quelques 100 nm, l’étape principale de l’accélération d’ions dans le plasma en détente commence après l’impulsion laser. L’accélération continue presque de façon symétrique de deux côtés de la cible et diminue après le refroidissement adiabatique des électrons rapides.