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M ise au point d’un outil moléculaire diagnostic de l’infection par LbFV

I. Analyse transcriptomique de l’infection par LbFV

I.1. La technique de SSH : hybridation soustractive et suppressive (Suppression

Subtractive Hybridization)

I.1.1. Principe de la SSH

La SSH permet, en comparant deux populations d’ARNm, d’identifier les gènes différentiellement exprimés entre deux modalités expérimentales en éliminant spécifiquement ceux qui montrent un même niveau d’expression. Dans nos expériences, les deux populations d’ADNc de L. boulardi correspondaient aux modalités I (infectée) et NI (non infectée). Elles ont été construites à partir des ovaires des lignées de référence iso-géniques de L. boulardi, respectivement Sréf et NSréf (lors des observations par MET, les particules virales ont été observées dans les tissus ovariens ; Varaldi et al. 2003).

La technique consiste à mélanger une population d’ADNc obtenue à partir d’une population d’ARNm d’intérêt (tester), avec un excès d’ADNc obtenus à partir d’une population d’ARNm témoin (driver). L’objectif est de supprimer les ARNm de la population

driver qui sont également exprimés dans la population tester, ceci afin de créer des

sous-populations simplifiées ne contenant que les ARNm différentiellement exprimés dans l’échantillon tester. La soustraction d’ADNc permet donc d’isoler des séquences présentes dans une population d’ARNm, mais absentes ou très faiblement représentées dans une autre.

Il est ainsi obtenu une banque SSH qui est une banque soustraite et normalisée contenant les gènes différentiellement exprimés dans la condition d’intérêt. Le principe de la SSH s’appuyant sur deux hybridations successives est schématisé dans la figure II.1 et les étapes sont détaillées dans la légende.

La SSH associe une étape de normalisation entre les séquences abondantes et celles au contraire très rares ce qui a pour but de favoriser la détection des ARNm peu abondants, et une étape de soustraction qui exclut les séquences communes entre la population cible (tester) et la population témoin (driver). Cette méthode est fondée à la fois sur la cinétique de réassociation des brins d’ADN (les fragments abondants s’hybrideront plus vite que les fragments rares, la vitesse d’association étant proportionnelle à la quantité de séquences) et sur l’existence de l’effet suppresseur de la PCR (les brins portant les mêmes adaptateurs forment des structures en épingle à cheveux non amplifiables ; seules les séquences portant deux adaptateurs différents à leurs extrémités sont amplifiées exponentiellement). Les séquences amplifiées par PCR et clonées constitueront la banque soustraite.

La soustraction peut être menée dans deux directions pour chacune des deux populations d’ADNc (modalités I et NI) l’une et l’autre jouant alternativement le rôle de

tester ou driver: dans notre cas, la soustraction forward permet l’enrichissement en séquences

sur-exprimées dans l’échantillon I par rapport à l’échantillon NI. Dans une soustraction

reverse, l’échantillon NI devient la population cible et on recherche les gènes sur-exprimés

dans cette population NI. Le résultat est l’obtention de deux populations d’ADNc soustraits : les ADNc soustraits forward contenant les séquences spécifiques à l’échantillon I et les ADNc soustraits reverse contenant les séquences spécifiques à l’échantillon NI. L’objectif de cette partie de la thèse étant l’identification de séquences virales, les efforts ont été portés sur la soustraction forward (Figure II.2).

ADNc tester avec adaptateur 1 ADNc driver ADNc tester avec adaptateur 2 1. Hybridation 1 (normalisation et soustraction) 2. Hybridation 2 a1 b1 c1 d1 d2 c2 b2 a2 b1, c1, d1, b2, c2, d2

issues de la 1èrehybridation +

3. Elongation des extrémités

a a b b c d c e e

4. Amplification par PCR avec les amorces et

a, b, d: pas d’amplification c: amplification linéaire e: amplification exponentielle

a a

b b

ADNc tester avec adaptateur 1 ADNc driver ADNc tester avec adaptateur 2

1. Hybridation 1 (normalisation et soustraction) 2. Hybridation 2 a1 b1 c1 d1 d2 c2 b2 a2 b1, c1, d1, b2, c2, d2

issues de la 1èrehybridation +

3. Elongation des extrémités

a a b b c d c e e

4. Amplification par PCR avec les amorces et

a, b, d: pas d’amplification c: amplification linéaire e: amplification exponentielle

a a

b b

Figure II.1 : Principe de la technique de SSH (d’après Diatchenko et al 1996).

Après extraction et rétro-transcription des ARNm issus des deux échantillons à comparer, l’ADNc d’intérêt ou cible (tester) est séparé en deux fractions égales liguées en 5’ à des adaptateurs différents (adaptateurs 1 et 2). Aucun adaptateur n’est ligué à l’ADNc témoin (driver) auquel sont comparés les pools tester. La soustraction proprement dite est réalisée par deux hybridations successives.

1. Pour la première hybridation, les ADNc à soustraire (driver) sont ajoutés en excès à chaque fraction d’ADNc

tester. Après dénaturation et renaturation, plusieurs possibilités se présentent: les brins complémentaires des

gènes présents dans les deux conditions (tester et driver) peuvent s’hybrider ensemble (formes c1 et c2), reformer les homoduplex initiaux (formes b1, b2, d1a et d2a) ou rester en simplex (formes a1, a2, d1b et d2b). Selon l’origine du brin d’ADNc, chacune des formes possède ou non des adaptateurs aux extrémités. Les simplex de forme a1 ou a2 sont particulièrement intéressants: ils sont enrichis en séquences différentiellement exprimées (les gènes communs aux deux conditions créant des hétéroduplex de forme c) et ils sont présents à la même concentration pour des gènes plus ou moins exprimés.

2. Au cours de la seconde hybridation, les deux fractions de tester sont mélangées sans dénaturation préalable.

Le mélange des deux échantillons permet la formation d’un nouvel hybride (forme e) portant un adaptateur différent à chaque extrémité.

3. et 4. Après élongation des extrémités de chaque complexe, une PCR est effectuée à l’aide d’amorces

spécifiques des adaptateurs. A l’issue de cette PCR, seules les séquences qui portent deux adaptateurs différents à leurs extrémités (forme e), correspondant aux séquences préférentiellement exprimées dans la condition d’intérêt, sont amplifiées de façon exponentielle contrairement à celles portant les mêmes adaptateurs. Les brins portant les mêmes adaptateurs aux deux extrémités (forme b) forment des structures en épingle à cheveux non amplifiables (structures pan).

Criblage différentiel Séquençage Hybridation soustractive forward (FW) (SSH + MOS) Sonde FW Clonage

Banque d’ADNc soustraite FW

Hybridation soustractive reverse (RV) (SSH + MOS)

Sonde RV

-ADNc I ADNc NI ADNc I ADNc NI

Criblage différentiel Séquençage Hybridation soustractive forward (FW) (SSH + MOS) Sonde FW Clonage

Banque d’ADNc soustraite FW

Hybridation soustractive reverse (RV) (SSH + MOS)

Sonde RV

-ADNc I ADNc NI ADNc I ADNc NI

Figure II.2 : Etapes de construction de la banque soustraite dans le sens forward.

En rouge, modalité « infectée » (I). En bleu, modalité « non infectée » (NI). L’objectif ici est l’identification de gènes sur-exprimés dans la modalité I.

I.1.2. Avantages et inconvénients de la SSH

La SSH est une technique d'hybridation soustractive performante car elle combine une grande efficacité de soustraction avec une représentation égalisée des ADNc exprimés à des niveaux différents dans la banque soustraite. Dans les meilleures conditions, la SSH permet un enrichissement d'un facteur 1 000 à 5 000 de rares molécules d'ADNc (quelques molécules par cellules) (Diatchenko et al. 1996).

Il existe cependant un certain nombre de biais inhérents aux modes opératoires pouvant expliquer un manque de reproductibilité des expériences. Cela est tout d'abord lié à la sélection initiale. Selon la technique des kits utilisés, tous les ARNm peuvent ne pas être rétrotranscrits avec la même efficacité et des séquences d'intérêt peuvent être d'emblée exclues de la sélection. La soustraction peut aussi varier en efficacité d'un cycle à l'autre et les résultats peuvent être pollués par des séquences d'ADNc communes aux deux modalités (faux positifs). Une manière d'éliminer ce bruit de fond produit dans les expériences de SSH est connu sous le terme de Mirror Orientation Selection (MOS) (Rebrikov et al. 2000) (cf. partie

suivante). Enfin, la sélection des colonies bactériennes peut introduire un troisième biais lors de l'étape de clonage selon l’effort d’échantillonnage effectué.

Cette technique d’hybridation soustractive est apparue adéquate dans le cadre de notre travail permettant d’accéder, sur un organisme non modèle (L. boulardi) hébergeant un virus non identifié, donc sans connaissance génomique a priori, à des séquences de gènes candidats (gènes viraux ou gènes de l’insecte exprimés en conditions d’infection). Si l’approche SSH constitue la première étape vers une caractérisation du transcriptome de l’insecte infecté, les résultats obtenus devront être confirmés et complétés par une analyse du niveau d’expression génique appliquée à un plus grand nombre de gènes. Elle a eu dans notre cas l’avantage de pouvoir acquérir de l’information encore non explorée.