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Taxes incitatives et développement durable :

Chapitre III : La fiscalité environnementale :

Section 1 : Fondement théorique, définition et objectif de la fiscalité de l’environnement:

3. Taxes incitatives et développement durable :

Au-delà de la stricte internalisation des coûts externes, des taxes peuvent influencer les comportements dans la direction d’un développement durable. Ces taxes peuvent être considérées comme un cas particulier des taxes pigouviennes, par exemple lorsqu’on est en présence d’externalités cumulatives.

3.1 Définition et fonctionnement :

Il y a un problème dès que l’on dépasse l’horizon-temps de notre génération. Si les pollutions ont des effets à long terme et s’accumulent, alors on se trouve face à un dilemme : d’une part, le calcul économique conduit à une accumulation de plus en plus grande de polluants, pour la raison que, comme ceux-ci exercent des effets à long terme, les coûts seront perçus comme étant faibles car subis dans de nombreuses années, alors que les bénéfices sont réalisés aujourd’hui, et donc l’économie aura tendance à en émettre plus ; d’autre part, il faudrait réduire les émissions si l’on veut s’approcher de la définition du développement durable. Plus généralement, le calcul économique ne tient pas compte de contraintes physiques, chimiques, biologiques ou climatiques qui ne s’expriment pas à travers lui.

On voit donc la nécessité, du point de vue de l’environnement, de mettre en œuvre des politiques allant au-delà de la taxe pigouvienne. En fait, le développement durable impose des contraintes supplémentaires à la rationalité économique, qui s’expriment par exemple sous la forme d’un stock de captal naturel contant, ou de contraintes physiques que le milieu naturel impose à long terme, et qui se matérialisent sous la forme de la conservation des grands équilibres bio-géo-chimiques.

Comme le concept de développement durable est relativement récent, les moyens de le mettre en œuvre sont à l’heure actuelle encore assez flou. Un des moyens serait de modifier les rapports de prix entre les biens mettant en danger la survie de l’environnement à long terme, et les autres biens, par exemple par le biais d’une taxe. Il s’agit ici d’influencer les comportements de manière à prendre en compte les effets cumulatifs, lorsqu’on n’a aucune idée du montant des coûts externes à long terme des activités polluantes ou de la manière de les prendre en considération (c’est le cas des déchets radioactifs par exemple), donc par précaution. Il peut aussi arriver qu’on en ait une idée approximative, mais que les motifs dictant une taxe n’entrent pas dans le cadre d’analyse habituel des projets au niveau national. On peut exprimer par exemple

polluant ; dans ce sens, elle se rapproche de l’objectif d’approximation de la taxe pigouvienne. Un problème identique se pose pour ce qui concerne les ressources non renouvelables.

On sait que pour toutes les ressources, les meilleurs gisements (ceux qui ont les coûts d’exploitation les plus faibles) sont exploités en premier. On peut donc dire qu’en général, les coûts d’exploitation sont croissants10. On peut résumer la situation par la formule suivante, qu’on retrouve chez Pearce et al. (1989). Pour une ressource naturelle non-renouvelable, on a :

Prix actualisé = Cm + Cm externe + Cm d’une utilisation actuelle Ce qui revient à

Prix = Cm + royalty + Cm externe + Cm d’une utilisation actuelle

En définissant la royalty comme (prix – prix actualisé). Le coût marginal externe reflète les déchets accompagnant l’utilisation de la ressource (BARBIER, MARKANDYA, & PEARCE, 1989).

En revenant à la question de la taxe, on peut se baser sur la formule ci-dessus et écrire que, pour une ressource naturelle non-renouvelable avec coûts d’exploitation croissants :

Prix = prix du marché + taxe pigouvienne + taxe incitative de durabilité

Pour une situation optimale, la taxe a donc deux composantes. L’imposition d’une taxe vise à renchérir la ressource de manière à prendre en compte le coût externe et à promouvoir une situation rationnelle tenant compte des générations futures (BÜRGENMEIER, HARAYAMA, & WALLART, 1997).

3.2 Une taxe incitative peut-elle favoriser un développement durable :

Nous avons défini dans le premier chapitre les conditions de base d’un développement durable. • La substitution entre les biens. Il existe des biens « non durables » et des biens

« durables », se caractérisant par un impact environnemental différent. L’utilisation de taxes incitatives permet d’influencer les décisions des agents économiques en faveur des

10 Il peut arriver que l’évolution inverse se produise, lorsque de nouvelles techniques permettent de diminuer le coût d’extraction d’une ressource.

derniers. Elles visent à changer à long terme le rapport des prix, afin d’engendrer un effet de substitution.

• L’encouragement du changement technique. On a vu avec la taxe pigouvienne que l’imposition d’une taxe sur les externalités encourage le progrès technique en vue d’une réduction de la pollution. Or le progrès technique est une des conditions d’un développement durable.

• La métrise de la croissance démographique. A partir de l’équation d’Ehrlich, l’impact total sur l’environnement est donné par : I = P * C * T

où P est la population, C la consommation par habitant et T l’impact environnemental par unité de consommation. Si P et C croissent, alors T doit décroitre de manière très importante pour que la population globale diminue. Or, si P croit, c’est-à-dire si le taux de natalité est supérieur au taux de mortalité, il y a – du point de vue de l’environnement – une forme d’externalité négative à la naissance de chaque individu. A partir de ce constat, Mohr (1976) étudie une taxe sur les naissances. Il conclut qu’elle est difficilement praticable, principalement pour des raisons de justice et de rationalité politique mais aussi pour des raisons d’efficacité insuffisante. Des moyens de contrôle démographique doivent être utilisés, mais la taxe ne semble pas appropriée dans ce cas. De plus, les problèmes de croissance démographique concernent plutôt les pays du Tiers-Monde, alors que les pays développés sont plutôt confrontés à des problèmes de vieillissement de la population (BÜRGENMEIER, HARAYAMA, & WALLART, 1997).

• Le développement durable passe par un ménagement dans l’extraction des ressources naturelles, ainsi que dans la production de déchets. La tarification des ressources est un des moyens pour mener à une gestion de la demande qui tienne compte des générations futures. La tarification des ressources naturelles, par exemple par l’imposition d’une taxe, est un moyen efficace pour amener une utilisation rationnelle des ressources, ainsi que des moyens de recyclage, sont à même d’amener une économie dans la production de déchets.