1.2 Le plasma en laboratoire
1.2.3 Taux de production des quarkonia
En collisions d’ions lourds, de nombreux effets influent sur le taux de production des quarkonia. Ils peuvent ˆetre divis´es en deux grandes cat´egories : les effets froids et les effets chauds.
Les effets froids
Ce sont des effets qui existent mˆeme si un milieu thermalis´e tel que le plasma n’a pas ´et´e form´e. Ces effets sont caus´es par les deux noyaux participant `a la colllision. La m´ethode habituelle pour les quantifier se fait par l’´etude des collisons p-A. La collision contient un noyau, mais ne produit pas suffisamment de particules pour former un plasma. La comparaison se fait de la mˆeme fa¸con que pour les collisions d’ions lourds, par l’interm´ediaire du facteur de modification nucl´eaire RpA.
Absorption par la mati`ere nucl´eaire [61] : Dans une collision d’ions lourds, les quarkonia sont form´es `a l’int´erieur des noyaux, et doivent donc les traverser avant d’atteindre le d´etecteur. Il est alors possible pour un quarkonium de faire une
Figure 1.10 – Facteur de modification nucl´eaire du taux de production des quarkonia pour les diff´erentes exp´eriences du SPS et de RHIC [12]. Les points bleus de PHENIX correspondent `a la grande rapidit´e alors que les points rouges correspondent `a la rapidit´e centrale.
collision in´elastique avec un nucl´eon, et d’ˆetre ainsi absorb´e. La section efficace d’interaction quarkonium-nucl´eon d´epend de la composition et de la r´esonance du quarkonium. Cette distinction est surtout importante au SPS. En effet, `a RHIC et au LHC, le temps de croisement des noyaux est inf´erieur au temps de formation d’un quarkonium. C’est donc une paire pr´er´esonante QQ qui interagit avec les nucl´eons, et la section efficace d’absorption ne d´epend alors plus que du type de quark. Cette effet est g´en´eralement consid´er´e comme dominant au SPS, mais n´egligeable `a RHIC et au LHC.
Shadowing [62] : La section efficace de production des quarkonia d´epend de l’im- pulsion des deux partons impliqu´es dans le processus. L’impulsion des partons dans un noyau est donn´ee par ce que l’on appelle la fonction de distribution des partons : la probabilit´e pour un parton d’avoir une fraction xF de l’impulsion
du noyau. Ces fonctions de distribution sont en g´en´eral obtenues grˆace `a des collisions proton-proton. Cependant, on s’attend `a ce que la pr´esence d’autres nucl´eons dans un noyau modifie cette distribution. Ainsi, le taux de production des quarkonia dans les collisions d’ions lourds ne peut pas ˆetre consid´er´e comme le taux de production dans autant de collisions nucl´eon-nucl´eon ind´ependantes. On s’attend `a ce que cet effet diminue le taux de production des quarkonia. C’est l’effet dominant `a RHIC et au LHC.
Ces deux effets diminuant eux aussi le taux de production des quarkonia, il est es- sentiel de bien les comprendre. En effet, il est n´ecessaire de d´eterminer si l’´eventuelle diminution du taux de production est due soit `a la suppression anormale, impliquant la formation du plasma, soit `a un effet froid, n’impliquant pas la formation du plasma.
Figure 1.11 – Facteur de modification nucl´eaire du taux de production des quarkonia pour les exp´eriences PHENIX et ALICE [13]. Les points bleus de PHENIX corres- pondent `a la grande rapidit´e alors que les points verts correspondent `a la rapidit´e centrale. Les donn´ees d’ALICE sont `a grande rapidit´e.
Les Effets chauds
A l’inverse des effets froids, ce sont les effets dus `a la cr´eation d’un milieu thermalis´e lors de la collision.
La suppresion des quarkonia par le plasma, expliqu´ee plus en d´etail pr´ec´edem- ment. Elle diminue le taux de production des quarkonia.
La recombinaison des paires de Q et Q libres [63] : Dans ce mod`ele, les quarko- nia lourds sont d’abord produits dans la collision initiale, puis dissoci´es par le plasma. Cela conduit `a des paires de quarks et d’antiquarks lourds ´evoluant li- brement dans le milieu. Cette ´evolution peut les amener `a rencontrer un autre quark lourd et `a former un nouveau quarkonia. Ainsi, ce ph´enom`ene va augmenter le taux de production des quarkonia. La probabilit´e de recombinaison augmente avec le carr´e du nombre de paires QQ form´ees initialement. Le faible nombre de paires Q et Q form´ees dans les collisions du SPS rend cette effet n´egligeable `a ces ´energies. En revanche, la recombinaison est parfois utilis´ee `a RHIC pour expli- quer pourquoi le RAuAu des collisons `a rapidit´e centrale est sup´erieur au RAuAu
`a grande rapidit´e. Dans les deux cas, la suppression anormale et le shadowing contribuent `a diminuer le taux de production. En revanche, le nombre de paires QQ produites `a rapidit´e centrale est sup´erieur au nombre de paires produites `a grande rapidit´e. Ainsi, la reocombinaison n’apparaˆıtrait qu’`a rapidit´e centrale. Au LHC, la recombinaison va jouer deux rˆoles diff´erents. En effet, le nombre de paire cc produites est suffisant pour que l’on s’attende `a ce que la recombinaison soit l’effet dominant influant sur le taux de production des J/ψ. En revanche, le
nombre de paire bb produites est de l’ordre de grandeur du nombre de paires cc produites `a RHIC, impliquant que la recombinaison influe moins sur le taux de production des Υ.
Ces deux effets sont ´egalement des sondes du plasma, mais sont en comp´etition, l’une augmentant et l’autre diminuant le taux de production. Cependant, les mod`eles pr´e- voient que la recombinaison soit dominante au LHC, pouvant rendre le RAB sup´erieur
`a 1. De plus, c’est le seul effet connu pouvant augmenter ce taux de production. Une telle observation confirmerait donc la formation du plasma de quarks et de gluons.