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Téléconnection Inde-Méditerranée

4.3 Résultats des simulations couplées à l’Holocène

4.3.1 Téléconnection Inde-Méditerranée

L’analyse des simulations couplées à 0, 6 et 9.5 ka permet de mettre en évidence ce lien entre la convection sur l’Inde et la subsidence autour de la Méditerranée. De plus, j’ai vérifié que ce lien persiste dans les simulations atmosphériques forcées par les SST du modèle couplé de référence (0fk, 6fk, 9.5fk, le détail de ces simulations est décrit dans la partie 5.2), pour illustrer le caractère atmosphérique de cette téléconnection. Les différences de climatologie de

FIGURE 4.2: Différences JJAS d’OLR (W.m−2, couleurs) et de vitesse verticale à 500 hPa (m.s−1, contours) dans les simulations couplées entre (a) 9.5 et 0 ka et (b) 9.5 et 6 ka, et dans les simulations forcées entre (c) 9.5 et 0 ka et (d) 9.5 et 6 ka.

figure 4.2 pour les simulations couplées et forcées. Il faut tout d’abord rappeler que le modèle de l’IPSL-CM4 représente le positionnement et l’intensité des zones de subsidence au nord-est de l’Inde et sur l’est de la Méditerranée (Fig. 2.3) dans la simulation de référence, bien que trop intenses. Ces zones de subsidence sont renforcées à 6 et 9.5 ka, d’autant plus à 9.5 ka dans les deux types de simulation, de même que la couverture nuageuse et l’ascendance au dessus de l’Inde sont amplifiées. Marzin and Braconnot (2009b) ont montré dans les simulations couplées que le renforcement de cette subsidence et de la convection en Inde varient de façon propor- tionnelle entre les trois périodes, indiquant peut-être une téléconnection entre ces deux zones. De plus, les caractéristiques spatiales du signal de vitesse verticale à 500 hPa sont similaires aux expériences de Rodwell et Hoskins mettant en évidence l’impact de la convection en Inde sur les zones désertiques de la Méditerranée par propagation d’ondes de Rossby vers l’ouest. Le fait que ces mêmes résultats soient visibles dans les simulations "paléo" forcées par les SST actuelles rendent l’hypothèse de la téléconnection par la circulation atmosphérique seule plau- sible.

a) b)

FIGURE 4.3: Différences JJAS de vent zonal et de vent vertical (multiplié par 100), de température

(couleurs) et d’humidité spécifique (contours), moyennés entre 30 et 40◦N, entre (a) 9.5 et 0k et (b) 9.5 et 6k.

La figure 4.3 représente la coupe zonale des anomalies de circulation atmosphérique, de température et d’humidité spécifique de l’Inde à la Méditerranée, entre 9.5 et 0k, et entre 9.5 et 6k. Les différences de forçage par l’insolation engendre un large réchauffement de la tro- poshère, avec un maximum en haut de la troposphère au-dessus de l’Asie ainsi qu’un important ralentissement du jet d’ouest subtropical. Des anomalies de vents d’est dans les plus basses couches sont aussi observées entre 9.5 et 0 ka, et de façon moindre entre 9.5 et 6 ka et relient la plus forte ascendance au-dessus de l’Inde et de l’Asie de l’est au renforcement des zones de subsidences autour de 20 et 50◦nord, en accord avec la notion de mousson transverse de Web- ster et al. (1998), et l’interprétation des réanalyses NCEP de Ziv et al. (2004).

La subsidence renforcée à l’est de la Méditerranée et à l’est de la Mer Caspienne inhibe le développement de systèmes convectifs, rendant ces zones plus arides en été en terme de pré- cipitations (Fig. 3.8). Ceci reflète que le résultat de ces simulations est conforme à plusieurs enregistrements paléoclimatiques qui indiquent une période estivale plus aride sur ces régions au début de l’Holocène. En effet, Tzedakis (2007) et Tzedakis et al. (2009) montrent à l’aide d’enregistrements palynologiques que les conditions arides du sud de l’Europe sont associées à des périodes de déplacement maximum de la ZCIT vers le nord. D’autres indicateurs de végéta- tion et de niveau des lacs établissent des conditions estivales très arides sur le Moyen Orient au début de l’Holocène (Zeist and Bottema, 1991; Wick et al., 2003). De plus, Goni et al. (2008)

ont analysé l’extension méridionale des forêts de l’Europe de l’ouest pendant la dernière péri- ode glaciaire, et suggèrent aussi une corrélation entre l’extension des forêts en Méditerranée et l’amplification de la mousson asiatique (pics d’émission de méthane). Djamali et al. (2010) propose que le retardement de la colonisation postglaciaire des forêts au Moyen-Orient pourrait être dû à l’influence de la mousson indienne. Il suggère que le déplacement vers le nord-est de l’influence de la mousson indienne au début de l’Holocène aurait défavorisé les précipitations de fin de printemps et de début d’été sur le Moyen-Orient, essentielles au développement de ces forêts. Le désert en Asie centrale est aussi influencé par la forte convection sur l’Inde lors de la mousson. Chen et al. (2008) ont montré que l’aridité de ce désert évolue de façon opposée à l’intensité de la mousson indienne, pendant le maximum d’humidité sur le flan du Plateau Tibétain au début de l’Holocène, le désert atteignait son maximum d’aridité.

   

a) Composites OLR JJAS, NOAA b) Composites OLR JJAS, 0k c) Composites OLR JJAS, 9.5k

FIGURE4.4: Différences JJAS d’OLR entre les composites des années de mousson indienne plus forte

et celles de mousson indienne plus faible, pour (a) les observations NOAA (29 ans), (b) 0k (100 ans) et (c) 9.5k (100 ans).

Cependant, le renforcement du flux infrarouge sortant est aussi simplement une réponse à la plus forte insolation qui réchauffe les continents, de façon à contrebalancer ce forçage radiatif. Il est impossible dans ces simulations de découpler cet effet de l’influence de la téléconnection avec l’Inde. Une manière de mettre à part l’impact de l’insolation sur cette subsidence est de regarder la variabilité interannuelle de la mousson indienne pour vérifier si celle-ci est bien as- sociée aux zones de subsidence, sans différence de forçage par l’insolation. J’ai ainsi calculé des composites d’années de moussons indiennes fortes et d’années de moussons faibles en me basant sur 100 ans de série temporelle d’OLR (supérieure ou inférieure à l’écart-type) pour

la mousson indienne est amplifiée, plus l’anomalie d’OLR est importante à l’est de la Méditer- ranée et de la Mer Caspienne. Cette relation est observée dans les composites des données NOAA mais d’amplitude moindre. Ces différences de composite indiquent aussi la possible téléconnection Inde/Méditerranée-Asie centrale à l’échelle interannuelle. De plus, l’amplitude des variations entre les deux climats 0, 6 et 9.5 ka est supérieure à celle de la variabilité inter- annuelle seule.