• Aucun résultat trouvé

Influence sur la mousson d’Afrique de l’ouest

4.3 Résultats des simulations couplées à l’Holocène

4.3.2 Influence sur la mousson d’Afrique de l’ouest

Ayant mis en évidence la subsidence renforcée à 9.5 ka autour de la Méditerranée et la rel- ative faible intensité de la mousson africaine à 9.5 ka, la question se pose de savoir si l’un est influencé par l’autre. Marzin and Braconnot (2009b) montre que l’intensification entre les trois périodes est proportionnelle à l’insolation et à l’intensité de la mousson indienne, tandis que la mousson africaine n’est pas plus amplifiée à 9.5 qu’à 6 ka. L’hypothèse proposée suite à cette étude était que la forte amplification de la mousson indienne et le renforcement de la subsi- dence sur la Méditerranée pourrait limiter le développement de la mousson africaine à 9.5 ka et ainsi apporter un mécanisme supplémentaire pour expliquer les différences de réponse entre les sous-systèmes.

Peu d’études ont analysé les relations entre la mousson indienne et africaine et encore moins ont pu mettre en évidence un mécanisme de téléconnection robuste. Le mécanisme de Rodwell et Hoskins est souvent invoqué mais sans test de sensibilité à l’aide d’un GCM. Ziv et al. (2004) a calculé dans les réanalyses une corrélation de 0.33 entre les vitesses verticales au-dessus des deux systèmes de mousson à l’échelle inter-journalière, avec un délai de 2 jours. Ward (1998) et Raicich et al. (2003) trouvent une corrélation positive entre les précipitations JAS sur l’Inde et le Sahel à l’échelle interannuelle. La corrélation négative concomitante des deux moussons avec la circulation de surface sur l’est de la Méditerranée suggère le rôle primordial des vents étésiens (harmattans) sur le développement de la mousson au Sahel. Janicot et al. (2009) sug- gère une relation entre les deux systèmes de mousson à l’échelle intrasaisonnière, cette étude

évidence l’influence d’une phase active de la mousson indienne sur le Sahel, avec un déphasage de deux semaines. Une corrélation est aussi mise en évidence à l’échelle interannuelle et intra- saisonnière entre les précipitations en Inde et sur l’est de l’Afrique (Camberlin, 1995, 1997). Cependant, des études plus récentes montrent que ce lien est plus complexe (Camberlin et al., 2010; Vizy and Cook, 2003).

Ce lien entre les deux systèmes de mousson n’est pas bien représenté dans la simulation de référence, comme en témoigne les composites d’OLR sur les figures 4.4 a et b. Le signe des différences d’OLR est opposé sur le Sahel entre les observations et la simulation. Nous savons déjà que la variabilité interannuelle de la mousson africaine est mal représentée dans le mod- èle de l’IPSL-CM4, aussi bien en terme de téléconnection avec ENSO (partie 3.3, Joly et al. (2007)) qu’entre les SSTs du Golfe de Guinée et le dipôle de précipitation entre la côte et le Sahel (Cook and Vizy, 2006). Ce biais présente un limite considérable à l’analyse de l’interac- tion entre les deux systèmes de mousson. Cependant, le signal sur le Sahel semble s’inverser à 9.5 ka indiquant peut-être une meilleure représentation de ce lien suite à la progression de la mousson indienne sur le continent réduisant le biais de la simulation de référence. Le pro- jet IRCAAM (IRCAAM, compte-rendu de fin de projet, Bielli et al. (2010)), dirigé par Hervé Douville, a quantifié l’importance de la bonne représentation du climat tropical et des climats de mousson pour améliorer la variabilité extratropicale, à l’aide d’analyses d’observations et de ré- analyses, mais aussi de simulations utilisant la technique de nudging. Ce projet a aussi confirmé le lien entre la mousson africaine et indienne à l’échelle intra-saisonnière via la Madden-Julian Oscillation (MJO). Cependant, un lien statistique entre les systèmes de mousson et le bassin méditerranéen à l’échelle interannuelle tel que mis en évidence par Raicich et al. (2003) n’est pas présent de façon robuste dans les simulations des modèles CMIP3, soulignant la complexité de l’analyses de ces téléconnections.

Il est difficile d’évaluer si les variations de la mousson africaine entre 0, 6 et 9.5 ka sont influencées par la subsidence sur la Méditerranée, beaucoup d’autres phénomènes entrant en jeu. D’après la bibliographie discutée ci-dessus, s’il y avait un lien, cette subsidence devrait

à de nombreux facteurs qui sont résumés dans les études Hall and Peyrille (2006), et Janicot et al. (2010) et Lafore et al. (2010) suite au projet AMMA. Ainsi la climatologie de la mousson africaine peut être influencée par, entre autre, les SSTs de la Mer Méditerranée (Rowell, 2003; Fontaine et al., 2010), les SSTs du Golfe de Guinée et l’upwelling équatorial (Okumura and Xie, 2004) qui contrôlent l’advection d’humidité sur le Sahel, la dépression thermique saharienne (Lavaysse et al., 2009), l’albédo et l’humidité des sols Douville et al. (2001). Roca et al. (2005) a aussi mis en évidence le rôle d’intrusion d’air sec en altitude provenant des moyennes latitudes et favorisant les systèmes convectifs sur l’Afrique de l’ouest.

a) b)

FIGURE 4.5: Différences JJAS de température (couleurs), de pression (contours, interval de 0.5 hPa)

et de vents de surface (vecteurs) entre (a) 9.5 et 0 ka, (b) 9.5 et 6 ka.

De façon à déterminer le facteur limitant l’amplification de la mousson africaine, les dif- férences de température de surface, de circulation de surface et de pression sont tracées sur la figure 4.5 entre 9.5 et 0 ka et entre 9.5 et 6 ka. A 9.5 ka, le flux de mousson et le front inter- tropical sont intensifiés ainsi que la dépression thermique sur le Sahara. Les vents étésiens sont augmentés sur l’Afrique du nord-est, intensifiant le phénomène de ventilation de la Méditer- ranée. Les SSTs de la Méditerranée sont plus élevées. Toutes ces caractéristiques sont aussi présentes pour les différences entre 9.5 et 6 ka, mais d’amplitude moindre. En particulier, le front inter-tropical et le flux de mousson sur la côte du Golfe de Guinée sont très faiblement amplifiés. Entre 9.5 et 6 ka, on remarque un réchauffement de l’Atlantique tropical. Ceci pour- rait expliquer la faible amplification de la mousson africaine à 9.5 par rapport à 6 ka. Cette hypothèse sera analysée plus en détail dans la partie 5.2.

a) b)

c) d)

FIGURE 4.6: Différences JJAS des vents, de la composante horizontale u (couleur) et d’humidité

spécifique (contours) moyenné de 10◦O à 15E entre (a) 9.5 et 0 ka et (b) 9.5 et 6 ka, puis moyenné de 15◦E à 35E entre (c) 9.5 et 0 ka et (d) 9.5 et 6 ka.

de l’humidité de l’Atlantique sont fortement renforcés, le jet d’est africain est lui diminiué ainsi que le jet d’ouest suptropical tandis que le jet d’est à 200 hPa est accéléré. La plus forte subsidence entre 30 et 40◦N est observée dans les deux régions. On retrouve l’intensification des harmattans sur la partie est. Entre 9.5 et 6 ka, le jet d’est africain et le flux de mousson sont par contre très faiblement modifiés. Il est difficile de conclure sur ce qui peut principalement causer les variations de la mousson africaine entre 6 et 9. ka, si ce n’est l’effet de la précession sur le cycle saisonnier de la mousson africaine (Marzin and Braconnot, 2009b). Aussi bien pour analyser ces téléconnections à l’échelle interannuelle ou paléoclimatique, la plus grande difficulté réside dans le fait que les variations des systèmes de mousson résultent de multiples forçages et interactions du système climatique. La partie suivante présente une tentative d’isoler

Sahel.