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CHAPITRE III : CONTEXTE DE L’ÉTUDE

III. 4.2 Système de santé

Les succès rencontrés par la Tanzanie dans la lutte contre la mortalité maternelle et infanto-juvénile peuvent être attribués à l’efficacité de son système de santé (Masanja et al. 2008). Comme les trois autres pays de notre étude, l’organisation du système de santé est de type pyramidal et regroupe les hôpitaux au niveau national, les hôpitaux de référence au niveau régional, les centres de santé et les hôpitaux de premier niveau dans les districts ainsi que les dispensaires au niveau des councils. En 1999, la Tanzanie compte 4679 dispensaires, 481 centres de santé, 18 hôpitaux régionaux, 13 hôpitaux confessionnels (Musau et al. July 2011).

La Tanzanie a mis en place plusieurs programmes de lutte contre la mortalité maternelle et infantile ainsi que plusieurs systèmes d’assurance. Elle a été le premier pays en Afrique Sub-saharienne à endosser et adopter l’initiative Safe Motherhood en 1989, dont le but était de réduire la mortalité maternelle dans les pays en développement. D’autres programmes ont par la suite été lancés et ciblent plus spécifiquement le système de santé. Parmi ceux-ci, le Primary Health Service Development Programme 2007-2017 dont les objectifs principaux sont le renforcement du système de santé, la réhabilitation des infrastructures, le développement des ressources humaines, le renforcement du système de transfert, l’augmentation des équipements et des produits (Shija et al. 2011). En 1996, la Community Health Fund (CHF) est mis en place pour les communautés rurales et les acteurs du secteur informel. En 2001, le gouvernement établit le système d’assurance National Insurance Health Fund (NIHF) pour renforcer l’utilisation des services de santé (Mtei and Mulligan January 2007). Toutefois, l’élargissement de la

Community Health Fund à l’ensemble du pays est lent et l’adhésion reste faible, en

particulier chez les personnes les plus pauvres.

En dépit de ces efforts et de la relative accessibilité du système de santé (90% des ménages vivent à moins de 5 km d’un centre de santé20), les défis sont toujours énormes pour la Tanzanie afin d’atteindre les OMD. Ces défis concernent la dotation des structures en équipement adéquats car il est estimé que seules 65% des structures de santé disposent d’un service obstétrique d’urgence - EMOC, la stabilité du budget de la santé

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alloué aux soins maternels et infantiles21, le manque de communication entre les différents niveaux du système de santé, et bien évidemment la rareté de la main-d’œuvre qualifiée et son inégale répartition sur le territoire (Shija et al. 2011; Musau et al. July 2011). Selon un rapport du Ministère de la Santé et du Bien-être Social, le déficit en termes d’infirmière s’élève à environ 50% (Ministry of Health and Social Welfare - MOHSW October 2009, p. 41) avec moins de 5 professionnels pour 10 000 habitants (Human Development Department -Africa Region September 2011). À ces défis doivent s’ajouter, comme en Ouganda, une pression démographique supplémentaire.

III.5- Considérations sur les quatre pays à l’étude : similarités

et différences

La situation dans les quatre pays retenus pour nos analyses varie énormément, même s’ils sont tous classés comme des pays à fort ou à très fort niveau de mortalité maternelle et rencontrent les mêmes défis en termes d’offre de soins. Certains ont connu une amélioration continue et soutenue de la santé maternelle (Tanzanie) alors que d’autres ont expérimenté des retournements de situations comme le Kenya. On peut également distinguer ces pays quant au niveau actuel de leurs indicateurs. Le Ghana et le Kenya se démarquent par leurs niveaux relativement faibles de la mortalité maternelle et infantile comparativement à la situation en Ouganda et en Tanzanie. Dans l’ensemble de ces pays, beaucoup d’efforts restent encore à faire pour aboutir à une baisse substantielle des niveaux de mortalité maternelle et infantile.

Les défis en matière d’offre de services sont énormes pour tous ces pays en termes de recrutement et de maintien de la main-d’œuvre qualifiée, de disponibilité et d’accessibilité des services, de qualité des soins et de financement. Plusieurs mécanismes de financement à travers les polices d’assurance privée ou communautaire ont été mis en place au Ghana, en Tanzanie et au Kenya avec des résultats contrastés. De fait, les politiques nationales de santé sont largement appuyées par les bailleurs internationaux dont les actions ne sont pas toujours coordonnées. L’évolution irrégulière de certains indicateurs peut ainsi s’interpréter comme un sous financement extérieur et un

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changement des priorités au niveau national. Ces évolutions dépendent aussi en grande partie de la situation politique dans chaque pays. Depuis les années 90, le Ghana offre une exceptionnelle stabilité politique qui entraine une croissance économique de plus en plus soutenue. À l’inverse, l’Ouganda fait face à une rébellion depuis les années 80 qui a des répercussions sur les indicateurs macroéconomiques de ce pays (International Monetary Fund 2005).

En ce qui concerne le contexte de genre dans lequel les femmes vivent, le rapport publié par OECD (2010) fait ressortir que les quatre pays de cette étude partagent les mêmes situations mais aussi certaines différences. Ils sont tous classés dans les 50% des pays les plus inégalitaires pour les femmes dans le monde même si les normes relatives à la préférence pour un garçon ou celles relatives à la limitation des libertés civiles, deux des dimensions de l’index de discrimination de genre, sont quasi inexistantes. Pour ce qui est des normes liées aux codes de la famille, le Ghana et le Kenya présentent une meilleure situation que la Tanzanie et l’Ouganda. Par contre, les normes sociales relatives à la violence physique sont moins présentes en Tanzanie ou le pays est classé 22e sur 114 pays qu’en Ouganda classée défavorablement 81e sur 114 pays. Enfin, le Kenya (111e sur 122 pays) se distingue clairement des autres pays par le niveau défavorable des normes sociales régissant les droits de propriété (terres, immeubles et crédits) des femmes alors que l’Ouganda (84e sur 123 pays classés) émerge pour sa part comme le seul pays ou les libertés civiles sont restreintes. Ces considérations au niveau national comportent de notables différences au niveau local avec des normes présentes dans une communauté et pas dans d’autres au sein d’un même pays. De ce fait, une analyse multiniveau qui considère à la fois la situation au niveau local qu’individuel est nécessaire pour comprendre la manière dont les inégalités de genre limitent la santé de reproduction des femmes dans les pays en développement.

D’autres statistiques portant sur les différentiels d’éducation et de revenu entre les femmes et les hommes dans les quatre pays témoignent aussi des inégalités dont font face les femmes (UNDP 2008). Les informations compilées dans le tableau 3.3 de l’annexe de ce chapitre montrent ainsi que le ratio Femme/Homme du niveau d’alphabétisation des adultes varie de 75% au Ghana à 90% au Kenya et celui du taux brut de scolarisation (au primaire, secondaire et tertiaire) de 91% au Ghana à 97% en Ouganda. Enfin, dans les

quatre pays, les femmes gagnent en moyenne moins des trois quarts des revenus des hommes. Cette disparité est la plus grande en Ouganda (70%) et au Ghana (71%) qu’en Tanzanie (73%) et au Kenya (83%). Cette tendance cache néanmoins le fait que le revenu est largement plus élevé au Ghana que dans les trois autres pays.

Au demeurant, dans toutes les statistiques présentées, on observe que le milieu rural présente un réel handicap qui commande de s’intéresser plus activement à la situation des femmes pour comprendre les freins à l’utilisation des services de santé. Les rapports pays du département d’État Américain révèlent aussi l’inégale situation des femmes en milieu rural par rapport au milieu urbain dans les quatre pays (US Department of State 2005).

SOURCES DE DONNÉES ET MÉTHODES

D’ANALYSE

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