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Le système sanitaire ivoirien est-il adapté pour mener la politique d’éradication ? On définit couramment le système de santé par l’ensemble des moyens et des

d’ « éradication du paludisme » en Côte d’ivoire.

III. Le système sanitaire ivoirien est-il adapté pour mener la politique d’éradication ? On définit couramment le système de santé par l’ensemble des moyens et des

activités mis en œuvre pour la production de la santé à visée curative, préventive et éducative. Considérée comme telle, la lutte contre le paludisme doit reposer sur un système sanitaire capable de faire face à toutes les exigences que requiert une telle entreprise. Mais à l’épreuve des faits, certaines composantes du système sanitaire ivoirien ne lui ont permis de se montrer à la hauteur et de jouer pleinement son rôle : celui de combattre efficacement les endémies. Il ne s’agira pas dans ces lignes d’exposer tous les moyens de ce système qui, à des degrés divers, ont constitué un frein à l’application des programmes d’éradication. Mais, plutôt de se limiter à deux éléments fondamentaux constitutifs –formations sanitaires et personnel médical - de ce système pour tenter de répondre à la problématique formulée dans ce chapitre : cette analyse veut montrer en quoi les infrastructures sanitaires et la question de la formation du personnel médicale ont constitué un obstacle à la mise en application de la "politique d’éradication".

La réussite d’un programme d’ « éradication du paludisme » est tributaire de plusieurs conditions ; ceci vaut particulièrement pour les pays : « Où l’administration générale et les services de santé n’ont pas encore atteint un niveau suffisant pour qu’ils puissent entreprendre un programme d’éradication du paludisme et où, par conséquent, on doit d’abord créer les bases nécessaires »370. L’une d’elles fait appel à des opérations consistant à : « Favoriser un développement synchronisé de services de santé ruraux afin d’assurer l’exécution convenable des phases de consolidation et d’entretien que requiert tout programme d’éradication »371. S’il est fait expressément référence aux services de santé ruraux, cela sous-entend que le développement des services de santé dans les pays en

370

OMS, Série de rapports techniques, n°243. Comité d’experts du paludisme, 9e rapport, Genève, OMS, 1962, p. 3

157 développement s’est essentiellement concentré dans les zones urbaines et principalement dans les grandes villes, laissant ainsi les zones rurales dans un désert médical entraînant de graves conséquences pour la santé des populations.

Cette situation est particulièrement réelle pour les pays ayant subi la colonisation, période au cours laquelle, les questions de santé et de maladie relevaient du bon vouloir du colonisateur. Toutefois, pour les besoins de cette analyse, une étude des infrastructures de santé dans leur globalité est indispensable pour essayer de ressortir les faiblesses de cet ensemble sur lequel il faut s’appuyer pour mettre en œuvre un programme d’éradication dans un pays donné. Cet ensemble s’étend des services de santé centraux aux services périphériques jusqu’aux services urbains et ruraux.

Des infrastructures sanitaires inadaptées

Il ne serait pas exagéré d’établir un lien entre la politique de réalisation des infrastructures sanitaires en Côte d’Ivoire et l’interrogation du médecin général Bernard P.- M, lorsqu’il déclare dans une contribution sur l’éradication du paludisme en Afrique intertropicale, au sujet du développement de l’infrastructure sanitaire ce qui suit :

La question pourrait alors se poser dans certains cas de savoir si, au lieu de poursuivre la mise en place forcément lente et onéreuse de centres sanitaires, il ne serait pas préférable de consacrer une partie des crédits disponibles à une action chimioprophylactique visant à toucher le plus grand nombre d’enfants, le plus régulièrement possible, ou encore de les affecter à des mesures d’assainissement surtout justifiées et bénéfiques dans les zones suburbaines où elles contribuent à protéger d’importants groupements de populations particulièrement vulnérables372.

Sur la base de ces propos, il semble clair que pour le service de santé, on a fait le choix de privilégier la lutte antipaludique proprement dite au lieu de consacrer les maigres fonds disponibles à la création de centres de santé pour soutenir la politique d’éradication. Les propos de ce général font écho à ceux tenus par un autre médecin à une autre période, en 1915 cette fois-ci, au sujet des équipements sanitaires de la colonie. Pour ce médecin, la création des formations sanitaires assez importantes qualitativement ne fait pas partie du plan de développement des autorités de ce territoire : « Le besoin d’une formation sanitaire assez

372

Bernard (médecin-général P-.M.), Réflexions sur l’éradication du paludisme en Afrique intertropicale,

158 développée pour mériter d’̵tre organisée en hôpital, ne se fera pas de longtemps sentir en Côte d’Ivoire »373. En comparant les affirmations des deux responsables du service de santé à des dates différentes, on ne peut s’emp̵cher de dire que le souci du colonisateur n’a jamais été de doter la Côte d’Ivoire de structures sanitaires en quantité et en qualité. Cette stratégie qui consiste à se limiter au strict minimum pourrait ̵tre un élément explicatif de l’insuffisance des équipements sanitaires de la colonie dans la période considérée.

De façon générale, les formations sanitaires en Côte d’Ivoire souffrent de deux faiblesses majeures : elles sont en nombre insuffisant et leur répartition laisse apparaître un déséquilibre que les efforts entrepris au fil des ans n’ont jamais pu résorber. Le déficit des structures sanitaires autant que leur sous-équipement ne datent donc pas des premières années d’indépendance, ils trouvent leur origine dès la période coloniale par la volonté de l’occupant. Avant de comprendre la suite de l’analyse, il convient d’opérer un retour en arrière.

La réalisation des infrastructures a suivi de très près l’installation progressive des colons en Côte d’Ivoire. Au début de la pénétration coloniale, ce sont des installations de fortune érigées auprès de la Résidence du commandant de poste qui constituent les premiers pas de l’action sanitaire de la France en Côte d’Ivoire. Ces installations mises à la disposition des officiers de santé sont destinées à faire des consultations et prodiguer des soins374.

Au demeurant, le premier acte significatif dans le déploiement de l’action sanitaire est la mise en place dans la colonie de l’Assistance médicale indigène (AMI)375, en 1905, avec le début effectif des activités en 1906376. Ainsi de façon progressive, la colonie de Côte d’Ivoire va se doter d’un réseau d’infrastructures sanitaires regroupées en structures fixes et mobiles. Les premières capitales de la colonie Grand-Bassam, Bingerville et surtout Abidjan vont bénéficier de leur position centrale pour la création des services sanitaires de l’AMI. La localisation des premières infrastructures sanitaires indiquent une préférence pour les lieux

373Ces propos ont été prononcés par le médecin major Couvy, voir Amichia (F),

Op. Cit., p. 87

374 En 1843, la fondation d’Assinie consacre l’installation définitive des Français en Côte d’Ivoire. Dès ce moment, la présence d’un service de santé se manifeste par la construction de baraques en planche autour de la maison du commandant de poste. Ainsi, nait le premier poste d’assistance médicale française sur le territoire, voir ANS : Rapport du service de santé colonial, 1952

375A ce service incombe des tâches essentielles qui se résument à donner des consultations gratuites journalières

avec pansements et distribution de médicaments, à assurer les visites à domicile pour les malades ne pouvant pas se déplacer ainsi que les tournées périodiques dans les circonscriptions et enfin à effectuer les vaccinations essentielles comme celles contre la variole, voir Domergue-Cloarec D., Op. Cit., p. 74

159 centraux fréquentés par les colons ou les militaires, de sorte que l’idée de mieux desservir la population autochtone n’apparaît donc pas tout à fait comme un consensus acquis et collectif. Pour tout dire, la répartition des infrastructures de santé est donc fortement liée à l’organisation administrative de la colonie tournée vers des places stratégiques comme les chefs-lieux de cercles et de subdivisions.

Entre 1912 et 1915, l’infrastructure sanitaire est à peu près constituée et la pyramide hospitalière se dessine avec au sommet un hôpital à Abidjan -achevé en 1918-, des ambulances, des postes médicaux dans les chefs-lieux et des infirmeries dans les villages377. L’année 1924 marque un tournant majeur dans l’action sanitaire de la France dans la colonie avec une nouvelle politique définie par le ministre Daladier dans des instructions en date du 30 décembre 1924378. Elles inaugurent une assistance médicale de masse reposant sur la prévention, le développement de l’hygiène et l’éducation sanitaire de la population.

A partir de 1932, le développement de l’AMI entraine une série de constructions de formations sanitaires très simples à un rythme beaucoup plus soutenu jusqu’à l’éclatement de la guerre. A la fin de celle-ci, en 1945, la Côte d’Ivoire dispose d’un parc hospitalier assez modeste : mis à part l’hôpital d’Abidjan et son annexe de Treichville et quelques ambulances de première et seconde catégorie, les formations sanitaires du territoire sont constituées de constructions rudimentaires "en dure" avec quelques médicaments et instruments. Au total, on dénombre deux-cent-quinze formations sanitaires fixes, au nombre desquelles les formations sanitaires privées et religieuses. Un nombre qui tombe à cent-cinquante-un pour une population évaluée à environ 2.500.000 d’habitants, dès 1948, après le rattachement administratif de la Haute Côte d’Ivoire à la nouvelle colonie de Haute-Volta379.

Quant à leur répartition, les plus importants sont installés dans les grandes villes, à savoir : deux hôpitaux à Abidjan-Plateau et Treichville, une ambulance de 1ere catégorie à Bouaké, sept ambulances de 2eme catégorie sur le littoral (Grand-Bassam, Grand-Lahou, Sassandra et Tabou), au Centre (Dimbokro), à l’Est (Abengourou) et au Centre-Ouest (Gagnoa). S’y ajoutent trente-six centres médicaux, deux infirmeries, quarante-quatre dispensaires dépourvus de local d’hospitalisation, quarante-huit maternités rattachées aux

377Au total, en 1915 la colonie dispose de 13 postes médicaux, 3 dispensaires et 5 ambulances auxquels s’ajoute

l’hôpital d’Abidjan alors en construction.

378 Instructions relatives au développement des services de médecine préventive, hygiène et assistance dans les colonies, Paris 30 décembre 1924. Ministre des Colonies Daladier, JOCI, 1925, p.72-78

160 formations sanitaires380. Ces quelques chiffres montrent la lenteur et les limites de l’effort de l’administration coloniale en matière de réalisations sanitaires. On ne peut s’emp̵cher de supposer que l’action des services mobiles en expansion à partir du milieu des années 1940 se présente comme un modèle alternatif au déficit infrastructurel.

Malgré les efforts réalisés dans la construction des équipements sanitaires, ceux-ci demeurent insuffisants et hétéroclites au lendemain de la guerre dans toute la colonie. C’est ainsi que lors du Congrès constitutif du Rassemblement Démocratique Africain (RDA) à Bamako, un vaste programme de santé381 est élaboré avec en projet une multiplication des formations sanitaires bien équipées pour mettre à la disposition de la population des moyens de traitement adaptés à ses besoins, principalement dans les chefs-lieux de cercles et de subdivisions. L’Assemblée territoriale de la Côte d’Ivoire approuve ce programme et en fait son idée directrice. C’est pour appuyer ce projet, approuvé par le directeur local de la santé, le médecin-colonel DAVID, qu’un plan quinquennal d’un montant global de 500 millions de francs est proposé et voté382.

Cette opération vise à réduire progressivement le déséquilibre dans la répartition des infrastructures sanitaires du territoire. Ce plan est destiné à la construction de deux dispensaires modernes dans les quartiers africains d‘Abidjan et à l’agrandissement des deux hôpitaux d’Abidjan de m̵me que la construction de dix autres dans les cercles. Le programme de renforcement et d’extension de l’équipement sanitaire se poursuit avec la dotation des chefs-lieux de subdivisions de formations sanitaires mieux équipées et la modernisation des infrastructures sanitaires existantes. Entre 1949 et 1953383, un important programme de construction d’infrastructures est lancé pour doter la Côte d’Ivoire d’un réseau hospitalier pour ̵tre en phase avec l’évolution économique et sociale. Toutes ces constructions ont

380Ibid., p. 92

381 Ce programme de santé voté prévoit une gratuité des soins médicaux, la création d’une formation sanitaire

par canton, d’un dispensaire partout où il y aura une école, la création dans chaque territoire d’un laboratoire et d’une école d’herboristes pour l’utilisation de la pharmacopée indigène, voir Amichia (F), Op. Cit. 236 p

382Amichia (F),

Op. Cit. p. 92 et suivantes

383 On enregistre à ce titre, pour l’année 1950-1951, la construction de 3 nouveaux centres médicaux ; pour l’année 1953, on notre l’ouverture des centres médicaux de Grand-Bassam et de Man. La mise en service de nouvelles formations est attendue pour la même année : il s’agit de 4 formations sanitaires à 3 pavillons dans les subdivisions de Bouaflé, Boundiali, Bongouanou et Adzopé ; de 9 maternités à Oumé, Touba, Odienné, Korhogo, Mankono, Vavoua, Adjamé, Tiébissou et M’Bahiakro ; 4 dispensaires à Bingerville, Bondoukou, Treichville et Vavoua, voir Amichia (F), Op. Cit., p. 93

161 permis à la colonie de disposer, en 1953, de cent-cinquante-hui formations sanitaires fixes en progression de sept formations par rapport au chiffre de 1948.

Ces investissements sans précédent, dans la multiplication des infrastructures de santé sur toute l’étendue du territoire, visent à mettre à la disposition des professionnels de santé et des malades un réseau sanitaire proche de la population. Cependant, cette tendance à l’extension des dispensaires sur le territoire ne se fait pas sans difficulté : elle suscite au contraire les réticences des autorités médicales, en raison des difficultés financières et techniques qu’elle engendre. Du point de vue financier, chaque dispensaire est doté d’un budget de 800.000 frs et cette somme représente une charge dans le budget local si la tendance à la multiplication des dispensaires doit se poursuivre. Au plan technique, l’ouverture de nombreux dispensaires est source de dispersion du personnel infirmier, au détriment des formations sanitaires des centres et des équipes de médecine prophylactique384. De plus, l’ouverture de nombreux dispensaires entraîne à la longue des incidences sur le rendement sanitaire des formations existantes. A ce propos, un rapport présenté à la commission pour l’étude et la coordination des plans de modernisation et d’équipement des territoires d’Outre-mer, dénonce l’existence m̵me de dispensaires dans le dispositif sanitaire au profit de l’hôpital de ville :

Ces dispensaires sont, par la force des choses, confiés à des infirmiers. Ceux-ci, il faut le constater, y font un travail médiocre. De leur incapacité à poser un diagnostic découlent les thérapeutiques les plus inadéquates. Il en résulte une énorme consommation de médicaments dont les malades ne tirent pratiquement aucun bénéfice. Vouloir multiplier à l’infini les petits dispensaires de Brousse n’aboutirait qu’à investir des crédits importants et supporter des dépenses de fonctionnement considérables. La base réelle de la médecine de soins est l’hôpital de chef-lieu ou de ville importante, seul établissement où peuvent se trouver réunis le personnel qualifié et les moyens techniques385.

En dépit de cette réticence, on note la poursuite des travaux doublée d’une volonté de décentralisation des formations sanitaires vers l’intérieur du pays. En 1955, c’est au tour de certaines villes comme Bongouanou et Adzopé de bénéficier de formations sanitaires comprenant un dispensaire et une maternité. En outre, huit dispensaires sont installés dans les

384 Amichia (F),

Op. Cit., p. 94-95 385Ibid., 94-95

162 villes secondaires386. Par ailleurs, des centres fixes de traitement commencent à gagner les zones rurales avec neuf postes installés387. Ainsi, pour offrir aux habitants du Centre et du Nord de la Côte d’Ivoire les facilités trouvées à Abidjan par les populations des zones forestières, le service de santé lance la construction d’un hôpital moderne à Bouaké qui abrite auparavant un camp militaire et un secteur du SGHMP. Sa construction prévoir à terme trois- cent-vingt lits et des services de chirurgie, médecine, radiologie, pédiatrie et stomatologie388. Au total, les réticences du service de santé ajoutée au choix stratégique d’implantation des infrastructures en zones urbaines ont certes permis de doter la Côte d’Ivoire de formations sanitaires importantes. Mais, elles demeurent insuffisantes et essentiellement concentrées dans les agglomérations. Cette situation est fort bien résumée par Danielle Domergue-Cloarec dans l’analyse qu’elle fait de l’évolution numérique des infrastructures sanitaires en Côte d’Ivoire :

Si on compare les données de la colonie avec celles de l’AOF, on constate globalement qu’au niveau de la fédération, le nombre des établissements sanitaires triple entre 1949 et 1956, ce qui n’est le cas pour la colonie où le chiffre diminue. La part que représentent les formations sanitaires de la Côte d’Ivoire, en comparaison avec celle de l’AOF est en baisse, passant de 20.50% en 1949 à 8% en 1956. En conséquence, l’effort de construction sanitaire a été plus important ailleurs que dans la colonie. Dans cette dernière, on a surtout aménagé l’existant389. En somme, en 1956, l’équipement sanitaire proprement dit est constitué de 2 grands hôpitaux situés à Abidjan, un hôpital secondaire à Bouaké auxquels s’ajoute un réseau de centres médicaux et d’infirmeries, de dispensaires tous du public et de quatre-vingt-onze formations sanitaires relevant du privé390. Au nombre des formations fixes qui complètent le tableau dressé plus haut figure également le service d’hygiène qui joue un rôle majeur dans la médecine préventive et sociale de l’époque. Par ailleurs, les efforts entrepris dans le cadre du renforcement des infrastructures sanitaires appuyés par le Fonds d’investissement pour le développement économique et social des territoires d’Outre-mer (FIDES)391ont permis à la

386 Ce sont les localités de Man, Alépé, Rubino, Guesseguié, Transua, Tienko, Etueboué, Languédougou, voir Amichia (F), Op. Cit., p. 95

387 Les centres fixes de traitement sont situés dans les localités suivantes : Kouibly, Yassap, Aboudé, Yakassé, Yaou, N’Dakro, Tabagne, Toyiébli, Guéléban, voir Amichia (F), Op. Cit., 1980, p. 95

388 Amichia (F),

Op. Cit., p. 96

389Domergue-Cloarec (D), O

p. Cit., p. 895 390 Grah-Bialé (T), Op. Cit., p. 54

163 colonie de disposer à la veille de l’indépendance d’un réseau de formations sanitaires non négligeables.

Au total, à partir de 1957, l’organisation d’ensemble des services de santé publique en ce qui concerne la médecine des soins et l’Assistance médicale comportent essentiellement une infrastructure allant de l’hôpital au dispensaire avec un certain nombre d’organismes annexes et d’activités diverses destinés à compléter l’action des formations de base392. En définitive, le service de santé du territoire se caractérise par la coexistence de deux types de médecine : l’une curative et l’autre préventive portées par des formations sanitaires fixes d’une part et mobile d’autre part. Plus grave encore, les infrastructures sanitaires sont nettement insuffisantes par rapport aux besoins de la population. Pour preuve, en 1960, sur les 4 départements créés par la loi du 3 septembre 1960, seule Abidjan possède un hôpital important. L’équipement hospitalier des trois autres départements (Bouaké, Daloa et Korhogo) est encore rudimentaire. Quant aux dix-neuf chefs-lieux de cercles et cinquante subdivisions, ils sont dotés chacun d’un petit établissement d’hospitalisation, sorte de centre médical dirigé par un médecin, pourvu d’une maternité et d’un pavillon d’hébergement. A ces établissements sanitaires sont rattachés 180 dispensaires tenus par des infirmiers auxquels s’ajoutent de nombreux centres de consultations hebdomadaires393.

C’est dans cette configuration qu’interviennent les changements politiques au sein de l’AOF et par ricochet dans les différents territoires qui la composent. Ces changements coïncident aussi avec le premier bilan de la campagne d’éradication du paludisme riche en enseignements. Que peut-on retenir ? L’existence des difficultés techniques, jointe à l’insuffisance générale de l’infrastructure des services de santé publique, ont amené l’OMS à proposer l’arr̵t des campagnes d’éradication du paludisme encore en cours en Afrique tropicale. Au constat, il revient que le déroulement des programmes d’éradication du paludisme a été rapide dans les pays qui possédaient une armature administrative générale et des services de santé publique bien organisés. Il a même été satisfaisant dans les pays dont les

392 ANS : Rapport sur l’activité générale du Conseil de Gouvernement et sur la marche es services publics territoriaux pour l’année 1957

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Ngami Dja (E), La politique de santé dans le processus de développement en Côte d’Ivoire, mémoire de