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CHAPITRE I : Introduction

1.2 Physiopathologie de la SLA

1.2.3 Non-autonomie cellulaire : la contribution des autres types cellulaires

1.2.3.4 Le système immunitaire périphérique

Outre les cellules gliales, les neurones et les fibres musculaires, les cellules immunitaires périphériques peuvent également interagir avec les motoneurones et contribuer à la SLA. Plusieurs études suggèrent que le système immunitaire périphérique contribue au processus de neuroinflamation engendré par les astrocytes et la microglie. Plus particulièrement, les macrophages/monocytes et les lymphocytes T et B ont retenu l’attention de la communauté scientifique.

Les monocytes/macrophages sont un des types de cellules issues de la lignée myéloïde participant à l’immunité innée, notamment en phagocytant des pathogènes ou débris cellulaires, en présentant des antigènes aux cellules de l’immunité adaptative et en régulant le processus d’inflammation. Un premier indice de la contribution des monocytes/macrophages à la SLA vient des études ayant étudié le rôle de la SOD1 mutée dans la microglie dans la SLA. En effet, les techniques génétiques utilisées pour que la microglie n’exprime pas la mutation ciblaient également les monocytes/macrophages (Boillee et al., 2006b) ou l’entièreté de la lignée myéloïde (monocytes, neutrophiles, basophiles, etc.) ainsi que les lymphocytes B (Beers et al., 2006). L’effet observé pourrait donc être en partie attribuable aux monocytes/macrophages. De plus, les niveaux de monocytes circulants sont diminués chez des patients atteints de la SLAs, suggérant un recrutement vers les tissus (le parenchyme) (Mantovani et al., 2009; Hooten et al., 2015). Une question importante découlant de ces observations a donc été de déterminer si des monocytes infiltrent le SNC et s’intègrent à la population microgliale durant la SLA. En effet, peu de marqueurs permettent de différencier la microglie résidente du SNC de monocyte/macrophages (Bennett et al., 2016). Une étude élégante utilisant la parabiose (liaison chirurgicale entre la circulation sanguine de deux souris) entre des souris SOD1G93A et des souris exprimant la GFP (« green fluorescent protein ») dans toutes leurs cellules immunitaires montra qu’ils n’infiltrent pas la moelle épinière (Ajami et al., 2007). Cependant, les macrophages

infiltrent progressivement les nerfs périphériques et les muscles durant la progression de la maladie chez des souris SOD1 (Chiu et al., 2009; Graber et al., 2010; Wang et al., 2017). Il est connu que l’infiltration de monocytes/macrophages dans les nerfs périphériques est essentielle afin de faciliter le processus de régénérescence suite à une lésion axonale (Rotshenker, 2011). De plus, la prévention de l’infiltration des macrophages au niveau des muscles ralenti légèrement la perte de JNMs et améliore la force musculaire chez des souris SOD1G93A (Wang et al., 2017). Ainsi, bien que leur contribution spécifique demeure hypothétique, il est possible que les monocytes/macrophages jouent un rôle dans la progression de la SLA, notamment au niveau des nerfs périphériques, des muscles ou des JNMs.

Les lymphocytes sont une grande famille de cellules immunitaires issues de la lignée lymphoïde. Il est possible de distinguer les lymphocytes T et B, responsables de l’immunité adaptative, et les cellules NK (« Natural Killer »), participant à l’immunité innée contre les cellules du soi altéré. Un rôle des lymphocytes dans la SLA fut initialement suggéré par plusieurs études montrant une infiltration de lymphocytes T, mais pas de lymphocytes B ou de cellules NK, au niveau de la moelle épinière de patients SLA (Kawamata et al., 1992; Appel et al., 1993; Engelhardt et al., 1993; Barbeito et al., 2010) ou de souris SOD1 (Alexianu et al., 2001). Cependant, c’est une étude clé par Beers et al. (2008) qui, en transplantant de la moelle osseuse de souris saines ou SOD1 dans des souris SOD1 n’ayant pas de lymphocytes T ou B fonctionnels (SOD1G93A / RAG2 -/-), montra que les lymphocytes exercent un effet neuroprotecteur, indépendamment de leur expression de SOD1 (Beers et al., 2008). De plus, le croisement de souris SOD1 à des souris déficientes pour le corécepteur CD4 (« cluster of differentiation 4 ») ou pour le TCRβ (« T-cell receptor β ») montra que le sous-groupe de lymphocytes T CD4+ est responsable de cet effet (Beers et al., 2008; Chiu et al., 2008). Les lymphocytes T CD4+ sont une famille hétérogène des cellules de l’immunité adaptative responsable de la coordination de la réponse immunitaire. Plusieurs sous-types peuvent être identifiés dont, de manière générale, les Th1 et Th17, ayant un rôle pro-inflammatoire et généralement neurotoxique, et les Th2 et les T-régulateurs (Tregs), ayant un rôle plutôt neuroprotecteur dans la SLA (Hooten et al., 2015). Des études subséquentes ont permis d’identifier que, similairement à la microglie, la contribution des lymphocytes T dans la SLA est caractérisée par une prédominance de Tregs anti-inflammatoires et par la production d’IL4

par les Th2, favorisant un phénotype microglial anti-inflammatoire durant les stades précoces de la maladie (Beers et al., 2011; Chiu et al., 2008; Hooten et al., 2015). Durant les stades tardifs cependant, la réponse immunitaire est caractérisée par une infiltration de Th1 et Th17 neurotoxiques (Beers et al., 2011; Hooten et al., 2015). De manière intéressante, des études récentes ont montré que les Tregs semblent dysfonctionnels chez les patients atteints de la SLA, particulièrement chez les patients ayant une progression rapide, et que les niveaux sanguins de Tregs sont inversement proportionnels au rythme de progression de la maladie (Henkel et al., 2013; Beers et al., 2017). Cependant, à l’instar des monocytes/macrophages, le site d’action des lymphocytes demeure méconnu. Bien qu’ils infiltrent le SNC, une action au niveau du SNP ou des JNMs ne peut être exclue.

Dans l’ensemble, bien que la SLA ne soit pas une maladie auto-immune, il semble clair que le système immunitaire périphérique contribue à la maladie. Ce rôle semble initialement neuroprotecteur, mais devient graduellement délétère avec la progression de la maladie. Plusieurs études sont cependant encore nécessaires afin de mieux caractériser où et à quel moment chaque type cellulaire agit, notamment afin de déterminer le rôle potentiel des macrophages/monocytes et des lymphocytes T au niveau du SNP (Chiu et al., 2009).