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Synth`ese

Dans le document Étude de la structure interne de la Lune (Page 159-162)

Lors des chapitres pr´ec´edents, nous avons vu sous diff´erents aspects que la croˆute

´etait au centre des plus importantes questions de la science lunaire. Que ce soit dans la mod´elisation de sa formation ou dans la compr´ehension des grandes phases de son ´evolution, la croˆute contrˆole une grande partie des informations. La probl´ematique prin-

cipale est li´ee `a l’´episode de l’oc´ean magmatique global dont la croˆute anorthositique

est le fruit primitif. Certains ´el´ements comme l’Aluminium, le Calcium, le Potassium ou

l’Uranium, sont effectivement beaucoup plus abondants dans la croˆute que dans les zones

plus profondes. Ainsi, la quantit´e de ces ´el´ements dans toute la croˆute repr´esente une part importante de la quantit´e totale et la caract´erisation de son ´epaisseur est primordiale

dans l’estimation de sa composition globale. Pour former une croˆute anorthositique, une

diff´erenciation globale importante est n´ecessaire ; la quantit´e d’´el´ements comme l’Alumi-

nium contenue dans la croˆute est ainsi li´ee `a la profondeur jusqu’`a laquelle le manteau

de la Lune devait ˆetre fondu pour permettre une telle diff´erenciation. Cette profondeur d´epend notamment des conditions de formation de la Lune, dont on a vu qu’elle ´etait li´ee selon toute vraisemblance, `a un impact g´eant impliquant la proto-Terre. Parmi ces condi- tions, le type de collision (rasante/frontale) d´etermine l’´energie d´egag´ee par l’impact, et

son ˆage d´etermine le temps pendant lequel la Lune a dˆu rester partiellement fondue.

On voit ainsi que la compr´ehension de la formation du syst`eme Terre-Lune, repose en partie sur la connaissance de la croˆute lunaire, qui a la particularit´e d’ˆetre le premier r´esultat de la diff´erenciation primitive, non remani´e depuis. Les diff´erentes parties de l’´etude que l’on conclut ici, se sont attach´ees `a caract´eriser l’´epaisseur crustale du point de vue de la sismologie, grˆace aux donn´ees des missions Apollo.

1JAXA : Japan Aerospace Exploration Agency. Since October 1, 2003, ISAS, NAL and NASDA are merged into one independent administrative institution : JAXA.

8.1. SYNTH `ESE 159

8.1.1

Une croˆute deux fois moins ´epaisse

Les premi`eres ´etudes des donn´ees sismologiques des missions Apollo ont conduit `a proposer une ´epaisseur crustale de l’ordre de 60 km autour des stations 12 et 14. Ce r´esultat a ´et´e admis, et utilis´e comme incontestable pendant les ann´ees 70 et 80. Jusqu’`a r´ecemment, cette valeur n’avait jamais ´et´e remise en cause, malgr´e les relatives faiblesses et lacunes des arguments qui en sont `a l’origine, et l’importance que revˆet un tel param`etre sur la connaissance de la Lune.

Nous avons entrepris une nouvelle investigation du jeu de donn´ees sismologiques Apollo, avec des moyens m´ethodologiques et techniques de 20-30 ans plus perfectionn´es, afin de confirmer et d’approfondir les anciens r´esultats.

Tous les ´ev´enements ont ´et´e retrait´es et les temps d’arriv´ees r´eestim´es par le mˆeme membre de notre ´equipe (Jeannine Gagnepain-Beyneix) afin de conf´erer une plus grande coh´erence au jeu de donn´ees. L’inversion de ces temps d’arriv´ees par une m´ethode quasi- syst´ematique plus rigoureuse, a conduit `a r´eestimer l’´epaisseur de la croˆute. En effet, la principale information mise en ´evidence dans cette ´etude est qu’aucune discontinuit´e des vitesses sismiques n’est pr´esente autour de 60 km de profondeur, alors les vitesses man- telliques sont atteintes d`es la profondeur de 30 km. Nous n’observons pas de discontinuit´e marqu´ee entre les vitesses crustales et celles du manteau.

Un autre caract`ere tr`es important qui ressort de cette ´etude est que la mauvaise qualit´e des donn´ees, au sens de l’identification des arriv´ees, et le faible nombre de donn´ees disponibles relativement `a cette qualit´e, ne permettent pas d’avoir une vision tr`es pr´ecise de la structure interne. En respectant les informations des barres d’erreur des diff´erents mod`eles, les tendances de chacun se confondent avec les autres, et la pr´esence de certaines caract´eristiques comme une discontinuit´e vers 500 km de profondeur, est difficilement irr´efutable. Il suffit en effet de ne pas consid´erer un ´ev´enement dans les donn´ees pour changer notablement les r´esultats.

Le d´eveloppement de la m´ethode des fonctions r´ecepteur pour les donn´ees sismo- logiques lunaires, a permis de mettre en ´evidence des phases converties sous la station Apollo 12. C’est la premi`ere fois que cette technique est utilis´ee sur les donn´ees lunaires. Cette ´etude nous a permis d’identifier des conversions d’ondes S en ondes P `a la base de la croˆute ainsi qu’`a la base de la couche `a faible vitesse. Ces conversions sont coh´erentes

avec notre mod`ele de croˆute de 30 km d’´epaisseur. Notons que les vitesses relatives `a

cette croˆute fine sont n´ecessairement plus grandes que celles des mod`eles plus ´epais. La figure 8.1 montre les mod`eles de vitesse P tels qu’ils sont repr´esent´es sur la figure 4.11, superpos´es `a la distribution des vitesses d’´echantillons crustaux issue de Toks¨oz et al. [1974]. En s’appuyant sur cette figure, les auteurs n’´ecartent pas la pr´esence de basaltes pour les 20 premiers kilom`etres, ce qui est en forte contradiction avec les estimations ac- tuelles de l’´epaisseur des ´epanchements magmatiques, typiquement plus faible d’un ordre de grandeur [Williams et Zuber, 1998]. Alors que le mod`ele de Toks¨oz et al. [1974] n’est coh´erent qu’avec les ´echantillons lab´elis´es “basaltes”, caract´eris´es par les vitesses les plus ´elev´ees, notre mod`ele, plus lent, est compatible avec des caract´eristiques de roches moins extrˆemes. Toutefois, la nature remani´ee et fractur´ee de la croˆute rend la classification basaltes/br`eches de Toks¨oz et al. [1974] un peu brutale, puisque il est tr`es peu probable que des basaltes non transform´es/m´elang´es soient pr´esent. Toute roche lunaire de plus de quelques centim`etres peut ainsi vraisemblablement ˆetre classifi´ee comme une br`eche...

Par ailleurs, l’analyse des conditions qui ont permis l’identification des phases Sp, et les contraintes sur la couche superficielle `a faible vitesse qu’apporte la mod´elisation, nous permettent de proposer que la nature diffractante de cette couche de surface est

Fig. 8.1 – Superposition des mod`eles de vitesses crustale P pr´esent´es dans les cha- pitres 4.2.2 et 5.2.2, et des vitesses des ´echantillons lunaires mesur´ees en laboratoire (Toks¨oz et al., 1974)

8.2. PERSPECTIVES 161

Dans le document Étude de la structure interne de la Lune (Page 159-162)