• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE V : RESULTATS ET DISCUSSIONS V-1 Caractéristiques physiques du sol

V- 4-1 Synthèse du fonctionnement hydrique

Le DFS est caractérisée par une pluviométrie faible et inégalement répartie dans le temps. Seuls les mois d’août et de septembre sont pluvieux. A cela s’ajoute une forte demande évaporatoire avec une ETP moyenne journalière de 10 mm/j. Le potentiel hydrique du DFS est donc dû essentiellement à la présence du fleuve Sénégal qui présente de nombreuses ramifications dont l’axe Gorom Lampsar utilisé pour l’alimentation des nombreuses cuvettes agricoles de la région. La maitrise artificielle du régime du fleuve, avec un débit quasi constant, justifie nettement la pratique de la culture irriguée durant toute l’année malgré les conditions climatiques drastiques.

La riziculture, activité dominante de la culture irriguée dans le DFS, est pratiquée par submersion et dure environ 100 jours (PGE, 1993). Elle peut être pratiquée deux fois dans une même année et sur une même parcelle ; on parle de double riziculture. La riziculture est très consommatrice en eau et se pratique en même temps sur la majeure partie des parcelles mises en valeur dans les aménagements agricoles. Le suivi des parcelles à Ndelle et à Ndiaye a permis de constater que les lames d’eau imposées à la surface des parcelles sont en moyenne

154

de 15 à 20 cm durant toute la période de riziculture, valeurs confirmées par plusieurs études antérieures (Boivin et al., 2002; Diaw, 1996; Diene, 1998).

La conséquence de la mobilisation de cette quantité d’eau importante au niveau du sol est une saturation complète du profil, voire un engorgement. En effet, le suivi des teneurs en eau grâce aux sondes capacitives, montre une saturation complète durant toute la période de riziculture aussi bien à Ndelle qu’à Ndiaye. Le fait que cette saturation soit quasi-instantanée pose le problème de la qualité des sols sur lesquels cette riziculture est pratiquée. En effet, les périmètres agricoles sont généralement aménagés (dans 90% des cas) dans les cuvettes de décantation où les sols, de type hollaldé, sont réputés lourds avec un pourcentage d’argile supérieur à 40%. Ces argiles sont constituées à 60% de smectites, ce qui explique le comportement de gonflement/ retrait au contact de l’eau. Les sols des cuvettes sont aussi caractérisés par une faible perméabilité, de l’ordre de 1mm/j (Diaw, 1996). Cependant, Boivin et al. (1998) soulignent que ces sols présentent une forte instabilité structurale amplifiée par la submersion et la mise en valeur. Ainsi, ces sols présentent un important foisonnement, en saturation pendant l’irrigation et de fortes pentes des courbes de retrait lorsqu’ils se dessèchent après irrigation, provoquant un affaissement de la structure.

Ainsi, les sols des cuvettes fonctionnent suivant un cycle humectation-dessiccation (fig.V-35).

La fissuration apparait lentement dès que le sol commence à se dessécher (environ 15%

d’humidité). C’est cette fissuration du sol à l’état sec qui favorise l’infiltration et la recharge en eau du profil du sol. Cette déstructuration n’excède pas 40 cm de profondeur. En effet, à partir de 50 cm les sols argileux deviennent compacts et ne se dessèchent que très lentement.

Ceci peut expliquer le profil d’humidité observé à Ndelle à la date du 24 février 2012 avant le début de l’irrigation où la teneur en eau est plus élevée à 50 cm qu’à 20 cm.

Le même mécanisme de fissuration du sol pourrait expliquer le fait que, pendant l’hivernage, on note une augmentation de la teneur en eau sur tout le profil. Le sol peut même atteindre l’état de saturation en cas d’événements pluvieux successifs ou d’une pluie importante (>50 mm).

Quant au maraichage, il se fait à l’échelle de la parcelle, une fois durant l’année. Il constitue une activité de substitution et de diversification agricole dans le DFS. Les principales spéculations sont l’oignon et la tomate. Les quantités d’eau mobilisées sont beaucoup moins importantes : le maraichage est pratiqué en billon et les besoins en eau varient entre 6 et 12

155

mm (pour l’oignon par exemple). Ces quantités sont suffisantes pour créer une recharge du profil de sol bien qu’aucun suivi de la teneur en eau n’ait pu être réalisé en maraichage.

Figure V-35 : Photos représentant les différents états hydriques du sol : sol desséché et fissuré en période hors irrigation (à gauche) et sol saturé en irrigation (à droite).

(Photos prises à Ndiaye)

Au niveau de la nappe superficielle, la riziculture provoque un relèvement du niveau piézométrique avec une amplitude de 1 à 1,5 m. Ce relèvement, observé dans tous les piézomètres situés dans les parcelles irriguées, a été également décrit dans l’étude régionale.

Ce relèvement du niveau de la nappe a également été signalé dans les travaux antérieurs et certains considèrent la riziculture comme le principal facteur de recharge de la nappe dans le DFS. La nuance à faire est que la composante locale de cette recharge est prédominante par rapport à son effet régional bien qu’il existe de très nombreux périmètres agricoles pratiquant la riziculture à la même période. Le fait est que, même si les données de suivi piézométrique au niveau du piézomètre témoin installé à Ndiaye (20 cm de relèvement) montrent à cet endroit une remontée de la nappe, aucune recharge n’est effectivement observée dans les piézomètres situés loin des aménagements, en période d’irrigation. De plus, dès l’arrêt de l’irrigation, le niveau de la nappe baisse instantanément et revient progressivement à son niveau de départ.

Pendant l’hivernage, toutes les données piézométriques disponibles mettent en évidence une recharge de la nappe. Le même constat est tiré à l’échelle du DFS où les piézomètres loin de l’influence du fleuve et de l’irrigation, ne montrent une recharge que pendant la période hivernale. Cependant, les calculs effectués avec le modèle du bilan d’eau de Thornthwaite 156

n’aboutissent à une recharge que pour des valeurs de STOMAX du sol inférieures ou égales à 50 mm. Par contre, pour des valeurs comprises entre 100 et 150 mm (mieux adapté aux sols argileux), ces mêmes calculs aboutissent à l’absence de recharge de la nappe. Une première explication peut être fournie par l’état de fissuration du sol en condition sèche décrite par Boivin et al. (1998) qui favorise une infiltration de l’eau de pluie. Rappelons que la teneur en eau du sol augmente au même moment. La seconde explication vient du fait que les sols non cultivés sont caractérisés, selon Favre et al. (1997), par des coefficients de ruissellement très élevés. Ainsi, l’eau de pluie aurait tendance à s’accumuler dans les dépressions et recharger la nappe. La recharge par hivernage a un effet plus régional, puisque ressentie dans tous les piézomètres sauf à la proximité du fleuve où intervient l’effet de la gestion du barrage. Cette recharge par la pluie est toutefois vite suivie d’une baisse de la nappe, ceci pouvant être lié à la reprise évaporatoire.

Le maraichage provoque le même effet que la riziculture sauf que l’amplitude de la remontée de la nappe n’excède pas 50 cm du fait que les quantités d’eau utilisées sont nettement moins importantes.

En définitif, le fonctionnement hydrique de l’ensemble sol-nappe dans le DFS se résume en un cycle humectation-dessiccation pour le sol et remontée-décharge pour la nappe. En effet, le sol nu non cultivé est sec et fissuré du fait de la déstructuration des argiles. Un apport d’eau important crée une recharge du profil de sol et une recharge de la nappe dont l’amplitude et la durée dépendent des quantités d’eau apportées (irrigation, pluie efficace). A l’arrêt de l’apport en eau, on note un retour progressif vers un état sec du sol et la nappe à son niveau de base.

Il se pose dès lors la question de la destinée des volumes d’eau importants utilisés surtout pendant la riziculture pratiquée de manière intensive depuis près de 30 ans. Sont-ils repris par évaporation, comme semble le montrer le bilan d’eau en riziculture qui indique une valeur de 60% d’eau évapotranspirée ? La partie qui alimente la nappe sort elle entièrement par évaporation ? L’aquifère possède-t-il un exutoire ? Si oui, où ? Quelle est le devenir des eaux de drainage évacuées par drainage ?

Toutes ces questions, auxquelles ne pourront répondre dans cette étude, pourraient apporter une meilleure compréhension du fonctionnement hydrique dans les périmètres irrigués du DFS.

157