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CHAPITRE V : RESULTATS ET DISCUSSIONS V-1 Caractéristiques physiques du sol

V- 3-1-2 Comportement hydrochimique des eaux de surface

L’eau du Lampsar, utilisée pour irriguer les périmètres de Ndelle et de Ndiaye, a été échantillonnée à différentes dates au cours de la première campagne de suivi à Ndelle. Les résultats des analyses chimiques sont consignés au tableau V-8. Ils montrent une composition stable au cours de la période. Le pH est légèrement basique et la minéralisation globale faible.

Le SAR (Sodium Absorption Rate) permet d’évaluer l’aptitude d’une eau à l’irrigation et le risque potentiel de sodisation et de salinisation lié à son utilisation. Il fait intervenir les concentrations en sodium, en calcium et en magnésium et se calcule à l’aide de la formule :

𝑆𝑆𝐴𝐴𝐸𝐸 =

[𝑁𝑁𝑇𝑇]

[𝐶𝐶𝑎𝑎]+[𝑀𝑀𝑀𝑀]

2

(V.4)

Les concentrations sont exprimées en meq/l.

L’eau du Lampsar constitue une eau de bonne qualité pour l’irrigation avec un SAR < 1.

Cependant, certains auteurs comme Boivin et al. (1995) et Hammecker et al. (2009) attirent l’attention sur le fait que ces eaux, malgré une faible minéralisation et un SAR < 1, peuvent être source d’alcalinisation ou de sodisation des sols. Selon ces auteurs, les eaux du fleuve Sénégal présentent de manière générale une alcalinité résiduelle calcite positive. Ainsi, lorsqu’elles se concentrent sous l’effet de l’évaporation, le Ca et le Mg tendent à précipiter et provoquer une augmentation considérable de l’alcalinité et du SAR. Ceci pourrait provoquer une alcalinisation ou une sodisation des sols comme signalé par Ndiaye (1987) au Niger. Ceci confirme la nécessité d’un lessivage et d’un drainage de ces eaux pour éviter toute concentration de l’eau.

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Tableau V-8 : Composition chimique de l’eau d’irrigation (site de Ndelle) Echantillon 11/03/2012 11/04/2012 13/06/2012 Moyenne

pH 7,66 7,56 7,68 7,63

Les mécanismes d’acquisition des caractéristiques chimiques des eaux au cours de la concentration sont classiquement étudiés à travers les diagrammes de concentration dont le but est de montrer que la salinisation des eaux résulte de la concentration par évaporation (Barbiero, 1999). Cette méthode a été utilisée par Valles (1987) en Tunisie, par Gueddari (1984) en Tanzanie et en Tunisie, par Barbièro (1994) dans la vallée du fleuve Niger et par Boivin et al. (1995), Barbiero (1999) et Hammecker et al. (2009). L’estimation de la concentration des eaux se fait à l’aide d’un traceur chimique. D'une manière générale, un traceur conservatif est une substance ou une grandeur calculée qui marque les flux d'eau sans interagir avec son environnement. Seuls des processus tels que la concentration par évaporation ou le mélange d'eau font varier leur concentration proportionnellement aux variations de volume. Ceci peut se traduire par la relation simple de proportionnalité entre la molalité d'un traceur [Ti] à l'état initial et [Tf] sa molalité après évaporation d'une fraction d'eau :

�𝐸𝐸

𝑓𝑓

� = 𝐹𝐹𝐶𝐶 × [𝐸𝐸

𝑖𝑖

]

(V.5)

où FC est le facteur de concentration, c'est-à-dire le rapport du volume d'eau initial sur le volume final. L’ion chlorure est un bon indicateur de l’état de concentration d’une eau puisqu’il est considéré comme un élément chimique très conservatif entrant rarement dans les précipitations salines. Le facteur de concentration (FC) a estimé à partir du rapport entre la concentration en Cl de l’eau du canal de drainage principal et celle de l’eau du fleuve.

Sur cette base, Gourlez de la Motte (2012), considérant les résultats du tableau V-4, a effectué une simulation de l’évolution de la salinité et de l’alcalinité de l’eau du Lampsar sous l’effet 128

de la concentration par évaporation. Les simulations ont été réalisées avec le logiciel PhreeqC (Parkkurst et Appelo, 1999). La pression partielle de C02 (PCO2) a été déterminée telle que log PC02= -3,5 atm. Elle a été également mise en équilibre avec le gypse, la Mg-calcite, le quartz, la sépiolite et la kaolinite.

Les résultats de cette simulation montrent que la CE augmente très peu et reste inférieure à 1000 µS/cm avec un facteur de concentration de 0,94 (fig.V-19a). Le pH quant à lui, augmente et atteint la valeur de 8,4 avec un facteur de concentration de 0,6 (fig.V-19b). Cette augmentation du pH est ensuite ralentie par le fait que la calcite commence à précipiter à partir de cette valeur (fig.V-19b). La concentration en Mg2+ augmente avec le facteur de concentration et la précipitation de la calcite est trop faible pour atténuer cette augmentation.

Seule la précipitation de la sépiolite qui intervient à partir d’un facteur de concentration de 0,8 provoque une diminution des concentrations en Mg qui reste malgré tout présent en solution.

La concentration en Na+ augmente de façon exponentielle (fig.V-19c); cette augmentation combinée avec une diminution des concentrations en Ca et Mg entraine une augmentation du pouvoir alcalinisant (SAR). Cependant, il faut un facteur de concentration de 0,94 pour que l’eau du Lampsar présente des risques pour l’irrigation avec un SAR égal à 7 (fig.V-19f). Ces valeurs de CE et de SAR, n’ont été mesurées qu’au niveau du canal de drainage principal.

Ces simulations montrent qu’il peut y avoir des risques quant à l’utilisation de l’eau du fleuve mais surtout l’importance de la mise en place d’un système de drainage adéquat. Ainsi, on comprend nettement les risques d’alcalinisation et de sodisation des sols au niveau des PIP (Périmètres Irrigués Privés) où les aménagements, généralement sommaires, sont caractérisés par une absence de système de drainage (Ceuppens et Wopereis, 1999; Wopereis et al., 1998).

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Figure V-20 : Evolution calculée à l’aide de PhreeqC de la composition de l’eau du Lampsar sous l’effet de la concentration (Gourlez de la Motte, 2012)

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L’eau de submersion de la parcelle ainsi que les eaux de drainage au niveau du canal secondaire et primaire ont été échantillonnées durant cette campagne à différentes dates. Les résultats des analyses sont représentés au tableau V-9.

Pour l’eau de submersions de la parcelle, on note, entre les deux campagnes d’échantillonnage une augmentation du pH tandis que la minéralisation globale diminue conformément aux résultats du suivi de la salinité. On note également une augmentation des concentrations en Na tandis que les teneurs en Ca et Mg baissent. Le pH et la minéralisation globale de l’eau du canal de drainage secondaire augmentent entre les deux campagnes ; augmentation notée au niveau de tous les éléments. Il faut noter que le canal de drainage secondaire reçoit l’eau de plusieurs parcelles appartenant à la même maille. Ces résultats sont conformes aux simulations réalisées sur l’évolution de l’eau du Lampsar suite aux effets de concentration par évaporation.

Tableau V-9 : Résultats des analyses chimiques des eaux de submersion et de drainage

Echantillon Parcelle Drainage secondaire Drainage principal 11/03/2012 13/06/2012 11/03/2012 13/06/2012 13/06/2012

pH 7,15 7,34 6,9 7,23 6,86

Les résultats des analyses des eaux du Lampsar, de la parcelle et de drainage ont été représentés sur un diagramme de Piper (fig.V-21). L’eau du Lampsar présente un faciès bicarbonaté calcique qui est le faciès type des eaux douces. Par contre, l’eau de submersion de la parcelle passe progressivement vers un faciès chloruré sodique suite à un enrichissement en Na et Cl. Cet enrichissement en ions Na et Cl explique l’augmentation de la CE décrite plus haut et est dû à la dissolution des sels présents à la surface du sol. Les eaux de drainage ont

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également un faciès chloruré sodique confirmant la concentration de plus en plus importante de l’eau du Lampsar.

Figure V-21 : Diagramme de Piper des eaux du Lampsar, de submersion et de drainage (site de Ndelle)