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Chapitre II. : Quelle réactivité attendue pour l’hydrogène ?

II.4. Synthèse et définition du programme expérimental

La revue bibliographique et la discussion thermodynamique présentées dans ce chapitre montrent que certaines espèces oxydées présentes dans la formation du Callovo-Oxfordien sont susceptibles d’être réduites par l’hydrogène dans les conditions du stockage.

Des réactions d’oxydoréduction impliquant l’hydrogène comme donneur d’électrons sont thermodynamiquement possibles et conduiraient in fine à la génération d’espèces sulfurées et ferreuses ainsi que d’ammonium et de méthane. En contre partie, les sulfates, les minéraux ferrifères, les nitrates et les carbonates seraient déstabilisés et une perturbation alcaline, liée à la remonté du pH, serait à attendre.

Toutefois, un certain nombre de considérations cinétiques relatives à l’énergie d’activation et à la catalyse notamment, permettent un juste retour à la réalité :

1) la déstabilisation des carbonates par l’hydrogène ou d’autres agents réducteurs (matière organique en particulier) n’a jamais été observée à moins de 200°C dans les environnements naturels;

2) la réduction abiotique des sulfates par la matière organique, déjà bien étudiée dans le domaine pétrolier (TSR : Thermal Sulphate Reduction), est extrêmement lente à base température avec des temps de demi-vie pour les sulfates de l’ordre de la centaine de milliers d’années à 100°C ;

3) la réduction du Fer(III) en Fer(II) par l’hydrogène semble possible à basse température mais limitée du fait de la très faible abondance de cette espèce dans le milieu. En champ proche le problème de la réduction du Fer(III) par les produits de corrosion est déjà bien connu ;

4) la réduction des nitrates nécessite la présence de catalyseurs bien particuliers.

La réduction des carbonates par l’hydrogène peut donc être écartée avec un très bon degré de confiance étant donné la bonne connaissance que l’on a de cette réaction.

Par contre, il est beaucoup plus difficile d’être aussi catégorique pour les autres espèces (sulfates, pyrite, fer, nitrate) car aucune étude dédiée les mettant en présence d’hydrogène n’a jamais été réalisée. Certes, il est possible, en croisant différentes sources d’informations d’évaluer leur réactivité et d’envisager un contrôle cinétique, mais en aucun cas de la quantifier. Le champ d’investigation est donc très vaste, du fait du nombre de conditions à tester (pression, température, pH…), du nombre de réactions envisageables et de la nécessité de tenir compte des nombreux minéraux du Callovo-Oxfordien pouvant avoir un effet catalytique (argile, pyrite, magnétite et Fe(0) en champ proche).

Deux approches expérimentales sont envisagées pour déterminer la nature des réactions induites par l’hydrogène et quantifier leurs vitesses dans le contexte du stockage. Les

pressions d’hydrogène attendues dans le stockage sont de l’ordre de plusieurs dizaines de

bars. Pour cette raison, les pressions partielles d’H2 utilisées expérimentalement varient entre

0 et 18 bars. Les expériences sans hydrogène constituent des blancs et les expériences avec hydrogène sont réalisées entre 4 et 18 bars. Des valeurs plus élevées ne sont pas utilisées pour des raisons techniques et de sécurité. Le recours à des expériences de hautes température, de 90°C juqu’à 300°C est lié au fortes contraintes cinétiques s’exerçant sur les réactions redox impliquant l’hydrogène.

Une première approche permettra de tester la réactivité de l’assemblage H2/fluide/argilite du

Callovo-Oxfordien à deux températures (250°C et 90°C) en vu de dégager les principales transformations induites par l’hydrogène.

Les températures élevées permettront d’accélérer des éventuelles réactions impliquant l’hydrogène tandis que les expériences à 90°C auront pour objectif de reproduire le plus fidèlement possible les conditions de stockage. L’idée principale est d’obtenir une vision globale de la réactivité de l’hydrogène dans le Callovo-Oxfordien.

Une deuxième approche permettra d’acquérir une connaissance plus détaillée des réactions mises en évidence par les expériences intégratrices. Il s’agit notamment de la réactivité du système soufre du Callovo-Oxfordien, sulfate et pyrite, en présence d’hydrogène. La compréhension et la quantification cinétique de la réactivité de l’hydrogène avec les sulfates ou la pyrite passera donc par une étude paramétrique de systèmes modèles simplifiés.

A ce sujet une attention particulière sera portée aux sulfates aqueux, d’abord par l’étude de

leur réactivité en milieu homogène (fluide/H2 dissous) puis en milieu hétérogène (catalyse par

l’argile ou la magnétite). En milieu homogène, la réduction des sulfates a été étudiée entre 250 et 300°C pour permettre de mesurer de la cinétique de la réaction à des échelles de temps accessibles à l’expérience. Les expériences ont été menées avec des concentrations en sulfate aqueux représentatives de celles de l’eau de formation, sous une pression d’hydrogène variant entre 0 et 16 bars et dans une gamme de pH de 1,5 à 6 favorable à la réaction. En milieu hétérogène, deux minéraux ont été sélectionnés pour tester l’éventuel effet catalytique des

surfaces minérales sur la réduction des sulfates par H2 : une argile (la montmorillonite) et un

oxyde de fer (la magnétite). Les argiles sont des composants majeurs du Callovo-Oxfordien et la magnétite est un produit de corrosion des aciers.

La transformation de la pyrite en pyrrhotite fera l’objet d’une étude détaillée dans des conditions expérimentales proche du Callovo-Oxfordien à 90°C. Les expériences ont été

menées dans une gamme de température allant de 90°C à 180°C et à des pH légèrement alcalins tamponnés par la calcite.

L’interprétation croisée de l’ensemble des expériences du programme expérimental, permettra de mieux cerner la réactivité de l’hydrogène dans le Callovo-Oxfordien et de fournir les premières données cinétiques permettant d’envisager des simulations numériques tenant compte de la réactivité géochimique de l’hydrogène.

Une étude préliminaire, réalisée à titre de perspective, présentera une première série de résultats sur la réduction des nitrates par l’hydrogène en ammonium.

Chapitre III.