• Aucun résultat trouvé

Synthèse de la pyrrothine

III.3. Synthèse chimique de la pyrrothine

La synthèse de l’hydrochlorure de la 6-amino-4-méthyl-[1,2]-dithiolo-[4,3-b]-pyrrol- 5-one, ou pyrrothine, a été réalisée, par adaptation du protocole décrit par Hjelmgaard et al. (2007) pour la synthèse de l’holothine et de ses dérivés dithiolopyrrolones, suivant le schéma présenté sur la Figure II-2. Le groupement méthyle porté par l’azote cyclique est introduit lors de l’étape (b) en remplaçant la p-méthoxybenzylamine par de la méthylamine (Li et al., 2007). Finalement, le groupement amide de la trifluoroacétyl-pyrrothine 5 est hydrolysé à reflux dans le méthanol en présence d’HCl aqueux concentré (f) pour permettre l’obtention de la pyrrothine 6 qui est récupérée par filtration sous forme d’une poudre de couleur orangé- brun. Le rendement global est de 3,53%. Le spectre RMN 1H du produit obtenu est cohérent

avec la structure de la pyrrothine. δH (DMSO-d6): 7,41 (1H, s, C=CH), 3,9-5,3 (1H, s large,

NH3+), 3,27 (3H, s, CH3) (Annexe 4). Par ailleurs l’analyse HPLC de la pyrrothine indique

que le pic majoritaire possède le spectre UV suivant : λmax (absorbance relative) 225 (0,39), 305 (0,55), 385 (1) qui correspond à celui décrit dans la littérature pour la pyrrothine (Pfizer and Co 1956, Celmer et al. 1952). La pyrrothine ainsi obtenue (90 mg) possède donc les critères requis (quantité supérieure à 10 mg, pureté et structure validée par RMN) pour son usage pour un test d’activité enzymatique.

III.4. Discussion

La pyrrothine a d’abord été obtenue par hydrolyse acide des dithiolopyrrolones obtenues lors d’une culture de Sa. algeriensis (voie semi-biologique).

La production des dithiolopyrrolones a alors été menée sur milieu SS supplémenté en acide humique à 1 g L-1 car il a été montré précédemment que la présence d’acide humique

dans le milieu de culture stimule la production de l’ensemble des dithiolopyrrolones (Bouras et al. 2006b). Cependant la concentration en thiolutine obtenue, 12 mg L-1, et l’absence de détection des autres dithiolopyrrolones, indique une production des dérivés dithiolopyrrolones beaucoup plus faible que celle rapportée par Bouras et al. (2006b). Ces auteurs avaient en effet observés des productions volumiques de 210 ; 0,1 ; 4,13 ; 18 ; et 13,2 mg L-1 pour la

102 thiolutine, ISP, BUP, TIP et SEP respectivement sur milieu SS supplémenté en acide humique à 1 g L-1 à 72 h.

La faible production en dithiolopyrrolones pourrait être le résultat de l’évolution génétique de la souche de Sa. algeriensis utilisée. Elle aurait pu perdre en partie sa capacité à produire les dithiolopyrrolones suite à plusieurs repiquages. L’instabilité génétique des actinomycètes a été largement rapportée dans la littérature notamment pour des souches du genre Streptomyces. Elle se manifeste par un très fort taux de mutations affectant certains traits spécifiques des espèces. Les phénotypes instables peuvent ainsi être perdus à des fréquences pouvant atteindre 0,1 %. (Dyson and Schrempf 1987, Birch et al. 1990). Ainsi, par la suite, une nouvelle banque de travail de la souche (stock de spores) a été réalisée à partir de Sa. algeriensis NRRL B-24137 obtenue de l’Institut Pasteur d’Alger. La production des dithiolopyrrolones sur milieu SS est plus importante lorsque la souche provient de ce nouveau stock. Une production biologique des dithiolopyrrolones avec la souche stockée dans cette nouvelle banque de travail permettrait donc vraisemblablement d’obtenir une meilleure production volumique en dithiolopyrrolones sur milieu SS et acide humique.

Lors de l’hydrolyse acide ménagée des dithiolopyrrolones, la précipitation de la pyrrothine décrite dans la littérature n’a pas eu lieu. La précipitation a lieu si des proportions adaptées en thiolutine, acide chlorhydrique et dioxane sont utilisées (Pfizer and Co 1955). Il est possible que les quantités introduites dans le milieu réactionnel lors de notre étude, calculées sur la base de la quantité d’extrait sec totale, ne permettent pas cette précipitation. Plusieurs éléments ont pu fausser le calcul des proportions d’HCl et de dioxane à utiliser :

- L’extrait sec ne contient pas que des dithiolopyrrolones

- L’extrait pesé n’est pas assez sec

Un élément vient appuyer cette hypothèse: la quantité de thiolutine quantifiée par HPLC dans le milieu de production (170 mg) est bien inférieure à la quantité d’extrait total obtenue (510 mg). Pour un meilleur contrôle des quantités d’HCl, de dioxane et de dithiolopyrrolones ajoutées dans le milieu réactionnel, l’extrait obtenu devrait être séché dans un dessicateur sous pression réduite en présence d’un dessicant tel que l’anhydride de phosphate P2O5. Si la masse sèche de l’extrait s’avère trop différente de la quantité de

dithiolopyrrolones dans l’extrait alors ces dérivés devraient être purifiés avant de réaliser l’hydrolyse si l’on souhaite récupérer la pyrrothine par précipitation. Cette purification pourrait être réalisée par recristallisation de l’extrait dans l’acétate d’éthyle (Annexe 2).

103 Par ailleurs, le temps d’hydrolyse préconisé dans la littérature (30 min) n’a pas permis d’obtenir le rendement attendu en pyrrothine (60 %). Ce résultat pourrait être attribué au système de chauffage à reflux utilisé qui ne permet ni le contrôle de la température dans le milieu réactionnel, ni l’agitation du mélange. Cependant l’augmentation du temps d’hydrolyse à 60 min a permis d’obtenir un rendement moyen de 49 % qui tend vers le rendement de référence de 60 %.

Enfin, aucune méthode n’a pu être trouvée pour la purification de la pyrrothine présente dans l’hydrolysat. La pyrrothine n’a pas pu être isolée du composé appelé COP2, présent à la fois dans le milieu d’hydrolyse et dans les fractions de pyrrothine purifiée. Par ailleurs le rendement des différentes méthodes utilisées s’est avéré inférieur à 10 %. Cette difficulté à purifier la pyrrothine avec un rendement satisfaisant pourrait être due à sa transformation en COP2 comme le montre les tests de stabilité effectués sur les fractions purifiées de la pyrrothine. L’instabilité de la pyrrothine sous sa forme neutre est d’ailleurs mentionnée par Li et al. (2007) bien que ces auteurs ne décrivent aucun mécanisme ou produit de transformation. Une purification de la pyrrothine par recristallisation dans du chloroforme pourrait toutefois être testée. En effet dans ce solvant, les dithiolopyrrolones et les co-produits d’hydrolyse sont solubles au contraire de la pyrrothine (non montré).

En conclusion la synthèse de la pyrrothine par voie semi-biologique, telle qu’elle a été réalisée dans notre étude n’a pas permis in fine d’obtenir une quantité de pyrrothine présentant les critères de pureté requis pour son usage dans un test biologique. Bien que le protocole d’hydrolyse des dithioloyprrolones soit breveté, il s’est avéré difficile à mettre en œuvre à l’échelle du laboratoire, sur de petites quantités de dithiolopyrrolones obtenues par voie biologique et peu purifiées. En outre, l’étape de production biologique a été rendue plus laborieuse par l’usage d’une souche qui ne produisait pas les dithiolopyrrolones de manière optimale. Un certain nombre de méthodes et de propositions d’amélioration des protocoles sont toutefois rapportées dans ce chapitre pour pouvoir réaliser ultérieurement la production semi-biologique de la pyrrothine au laboratoire.

Un autre protocole de synthèse de la pyrrothine a donc été mis en œuvre avec l’intention d’utiliser cette molécule comme substrat de la réaction enzymatique pyrrothine N- acyltransférase. Une synthèse chimique totale de la pyrrothine a été réalisée par adaptation du

protocole de Hjelmgaard et al. (2007). Le rendement global de la synthèse de la pyrrothine,

104 al. (2007), 17,8 %. Pour améliorer le rendement global, le rendement de l’étape (d) (54 % au lieu de 86 %) pourrait être potentiellement amélioré an réalisant la réaction avec du butanoate d’ammonium à 100 °C (Li et al. 2007) car son utilisation limite la formation de co-produits.

Il faut cependant noter que, lors de la synthèse réalisée, les étapes de purification des produits (2) et (3) ont été considérablement simplifiées par rapport à celles rapportées par Hjelmgaard et al. (2007) pour la synthèse de l’holothine. Par ailleurs, la pyrrothine est directement utilisable pour des tests biologiques sans purification supplémentaire alors que dans la publication de référence son pendant, l’holothine, n’est pas purifié car ce n’est qu’un intermédiaire de synthèse. Ce protocole fournit donc une méthode rapide de synthèse de la pyrrothine pour l’utilisation de ce produit dans des tests biologiques.

105

CHAPITRE IV

Expression des activités pyrrothine N-acyltransférases