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II.1.a - Réaction à l'état solide

Les précurseurs, sous forme d'oxydes et/ou carbonates, sont mélangés et finement broyés afin d'obtenir un mélange homogène de particules de faible taille, qui faciliteront la cinétique de la réaction. La poudre compactée est ensuite soumise à des traitements thermiques successifs jusqu'à l'obtention d'une seule phase. En général, la température retenue pour les frittages correspond aux trois quarts de la température de fusion (quand celle-ci est connue) L'avantage de cette technique est qu'elle assez facile et rapide à maître en œuvre, car elle ne nécessite aucune préparation antérieure des précurseurs. La granulométrie des particules joue un role très important sur la vitesse de la réaction et sur l'homogénéité du composé obtenu, car la diffusion à l'état solide est lente. On peut compenser ceci en faisant plusieurs frittages successifs avec des broyages intermédiaires.

Afin d'avoir un contrôle plus précis de la quantité d'oxygène présente dans le milieu réactionnel on utilise la technique des ampoules scellées. Le mélange des précurseurs est introduit dans un tube en quartz, de volume limité, dans lequel on fait le vide avant de le sceller. Ce tube est chauffé à des températures qui peuvent aller jusqu'à 1000°C. De cette manière on peut, soit faire une synthèse, soit fixer le contenu d'oxygène d'un composé déjà formé, en le chauffant avec une certaine quantité d'un matériau qui fixe irréversiblement l'oxygène dans les conditions de réaction. Les matériaux les plus utilisés sont le titane métallique et l'alliage Ti-Zr.

II.1.b - Réaction en solution

a) Afin d'obtenir des composés chimiquement homogènes, il est souhaitable d'utiliser un mélange initial le plus homogène possible. Ceci peut être réalisé en dissolvant les précurseurs dans une solution aqueuse acide, et le plus souvent on utilise de l'acide nitrique car la température de décomposition des nitrates est relativement basse. Cette solution est agitée pendant un certain temps puis le solvant et l'excès d'acide nitrique sont évaporés. Il précipite alors un mélange de nitrates qui seront ensuite décomposés thermiquement pour former une poudre très homogène d'oxydes métalliques.

Section II.1: - Synthèse des échantillons

b) En 1967 Pechini [Pechini67] a proposé une méthode de préparation de niobates et titanates dans laquelle les cations, en général sous forme de nitrates, préparés comme indiqué au point a), sont dispersés dans une solution contenant un agent chélatant (acide citrique) et un agent polymérisant (éthylène glycol). L'acide citrique forme des complexes stables avec les cations et ensuite, par polyestérification entre les groupements hydroxyle et carboxyle, l'éthylène glycol, par chauffage et agitation continue, forme un sol polymérique et homogène qui maintient les cations en suspension et empêche leur précipitation. Par chauffage ultérieur du sol ainsi obtenu, destiné à éliminer l'excès de solvant, on obtient un gel intermédiaire, qui par traitement à 400°C perd la charpente organique et conduit à une poudre très fine et très homogène.

L'avantage de la technique b) par rapport à a) est que la charpente organique maintient les cations en solution par des liaisons chimiques et les amène à précipiter tous en même temps, alors que pour a), la précipitation des cations dépend du produit de solubilité des nitrates, et qu'ainsi le mélange obtenu n'est pas aussi homogène que pour b). Par rapport à la méthode 1), ces deux méthodes donnent des mélanges précurseurs plus homogènes, même si le temps de préparation est plus long.

Cette méthode a par la suite également été aussi utilisée pour synthétiser des manganites, soit dans sa variante originale [Gaudon02] soit avec des modifications consistant à utiliser d'autres agents chélatants et polymérisants [Dezanneau02], [Bilger92].

II.1.c - Synthèse des perovskites RBaMn2O5

Choix des précurseurs et des conditions de synthèse En 1996, en essayant de synthétiser l'analogue au manganèse du composé supraconducteur YBa2Cu3O7-x, Chapman et al. [Chapman96] ont observé, en fait la formation d'une autre phase perovskite, le composé YBaMn2O5. Par la suite, ces auteurs ont synthétisé ce composé à partir d'un mélange YMnO3, BaO et MnO chauffé à 1000°C dans une ampoule scellée pendant 12 jours. En raison de la température de synthèse, relativement basse, des traces importantes de phases secondaires, YMnO3 et MnO, ont été trouvées.

Par la suite, plusieurs autres équipes ont fait la synthèse de ce composé à partir d'autres précurseurs en utilisant d'autres conditions réactionnelles. Beales et al. [Beales97a] [Beales97b] sont partis des composés BaMnO3 et YMnO3 (préparés à partir de Y2O3, BaCO3 et MnCO3), chauffés sous Ar statique (avec pO2 < 2ppm) à 1000°C en présence de copeaux de zirconium. Cette méthode s'avère être moins efficace puisque le taux d'impuretés trouvé était plus important. Plus tard, Millange et al. ont synthétisé YBaMn2O5+x [Millange99] et LaBaMn2O5+x [Millange98], en chauffant

Y2O3 ou La2O3 avec Mn2O3 et BaCO3, sous Ar à 1500°C. Les échantillons ont été ensuite réduits afin d'obtenir les phases RBaMn2O5 grâce à un traitement thermique à 600°C, en ampoule scellée, en présence d'un alliage Ti-Zr.

Les échantillons utilisés dans ce travail ont été synthétisés par réaction à l'état solide, en partant de précurseurs oxydes (du type R2O3 où R = Y, Dy, Gd, Eu, Sm, Nd, La, excepté MnO2, Tb4O7 et Pr6O11) et carbonates (BaCO3, MnCO3). Une partie des oxydes des terres rares ont été d'abord chauffés à 900°C pour éliminer l'eau d'hydratation et les carbonates formés avec le CO2

atmosphérique. Les oxydes et les carbonates, en proportions stœchiométriques, ont été broyés et intimement mélangés à l'aide d'une mélangeuse mécanique, pendant plusieurs heures. Le mélange ainsi obtenu, a été compacté sous forme de pastilles cylindriques et chauffé à 1250°C pendant 20 heures. Après chaque traitement thermique, la pureté des produits obtenus est vérifiée par diffraction X.

Le degré d'oxydation du manganèse dans les composés RBaMn2O5, synthétisés dans un premier temps, est de +2,5, ce qui est une valeur inférieure à celle habituellement rencontrée dans les manganites, qui est de +3 et +4. La nature des précurseurs est donc importante, et particulièrement le degré d'oxydation dans lequel s'y trouve le manganèse. Dans un premier temps, des essais ont été réalisés en partant, soit de MnO2, soit de MnCO3. La Figure 2.1 représente les diffractogrammes des deux composés YBaMn2O5 obtenus en partant de ces deux précurseurs. Dans les deux cas le composé YBaMn2O5 a bien été obtenu; on constate cependant que celui synthétisé à partir d'un précurseur contenant du manganèse à un degré d'oxydation plus élevé, MnO2, contient une quantité d'impuretés plus importante que celle obtenue à partir du carbonate de manganèse, dans lequel le degré d'oxydation du manganèse est plus bas. Ceci peut s'expliquer par le fait que, dans MnCO3, le degré d'oxydation du manganèse est plus proche de celui du composé YBaMn2O5, et aussi que la poudre utilisée est plus fine dans le cas du carbonate. Nous avons donc, choisi de travailler avec le carbonate de manganèse.

Un autre facteur qui joue un rôle très important lors de la synthèse est l'atmosphère autour de l'échantillon. Toujours en tenant compte du fait que le manganèse se trouve à un degré d'oxydation relativement bas, l'atmosphère choisie doit permettre, soit une oxydation légère, dans le cas de l'utilisation du précurseur MnCO3, soit une réduction dans le cas de l'utilisation du précurseur MnO2. Les premiers tests ont été réalisés avec une atmosphère inerte, constituée d'Argon Arcal (correspondant à une pression partielle d'oxygène PO2~5x10-5 atm); mais celle-ci s'est avérée ne pas être assez réductrice, dans les conditions de température utilisées (T=1250°C), le produit final

Section II.1: - Synthèse des échantillons

contenant des proportions importantes de YMnO3 et BaMnO3. Par la suite, nous avons essayé une atmosphère plus réductrice, constituée d'un mélange Ar-H2 en différentes proportions (99:1 et 9:1, rapports molaires). Cette fois, les quantités importantes de MnO trouvées dans le produit final indiquent que les conditions sont trop réductrices. On en conclut que l'atmosphère la plus appropriée devrait avoir un caractère oxydo-réducteur intermédiaire. Nous avons réalisé de telles conditions en purifiant l'Argon Arcal, par un passage sur un ''oxygen-getter'' formé d'un alliage Ti-Zr qui, chauffé à ~800-850°C, forme des oxydes très stables, en conformité avec les réactions:

Ti/Zr+2O2 ⇒ TiO2/ZrO2

fixant une grande partie de l'oxygène présent dans le gaz. Ces conditions de synthèse ont permis l'obtention du composé YBaMn2O5, avec un très faible taux d'impuretés, ainsi que d'autres composés de la série RBaMn2O5, avec R= Dy, Tb, Gd, Eu, Sm, Nd, Pr et La.

Comme on l'a vu précédemment, d'autres équipes ont réalisé la synthèse de ce composé, sous argon (sans en préciser exactement la pureté) mais à des températures plus élevées. Le fait que la synthèse ait été réussie avec cette atmosphère est du à ce que, typiquement, dans les diagrammes de phases de ce type de composés, pour une même pression partielle d'oxygène, plus on élève la température, plus on favorise la formation des phases dans lesquelles le manganèse a un faible degré

2 θ (°) In te n s ity (a .u .)

Figure 2.1 - Diffractogrames X du composé YBaMn2O5, synthétisé à partir des précurseurs MnO2

(haut), et MnCO3 (bas).

d'oxydation. Dans notre cas l'équipement disponible nous limitait en température (1250°C était le maximum disponible), et alors la seule possibilité pour nous a consisté à varier la pression partielle d'oxygène.

Cependant, malgré tous nos efforts et malgré le choix approprié des précurseurs et des conditions de synthèse, il nous a été impossible d'éliminer complètement les traces d'impuretés. Ainsi, dans les clichés de diffraction un seul pic caractéristique de l'impureté est visible (d'autres pics éventuels sont probablement cachés par les réflexions de la phase principale), et il est donc difficile d'en faire l'identification.