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Suite à un recours gracieux et une saisine de la Commission départementale d’aide sociale, la

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cpam a finalement délivré l’AME à Madame L.

avant l’audience contentieuse et la facture hospitalière a ainsi pu être honorée. »

[Paris, 2015]

Cette complexité constitue un frein majeur dans l’ouverture des droits, elle augmente les délais de traitement des dossiers, les risques de rupture de droits et de renoncements aux droits des potentiels bénéficiaires, ce qui signifie également des risques de retard ou de renoncement aux soins.

À ces différents obstacles s’ajoute, pour les étrangers sans titre de séjour, la peur d’être arrêtés ou interpellés alors qu’ils sont en situation irrégulière. Ainsi, plus du tiers (35 %) d’entre eux indiquent limiter leurs activité et leurs déplacements de peur d’être interpellés. Cette attitude peut également générer des retards ou des renoncements de recours aux droits et aux soins.

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TABLEAU 20 : PRINCIPAUX OBSTACLES À L’ACCÈS AUX SOINS CITÉS PAR LES PATIENTS REÇUS DANS LES CASO, 2015

(Plusieurs réponses possibles) % n Difficultés administratives 29,8 5 012 Méconnaissance des droits et des structures 25,7 4 320

Barrière linguistique 19,0 3 191

Difficultés financières 18,1 3 045

Aucun droit possible 16,0 2 692

Délais d’instruction trop longs 4,9 824 Droits ouverts dans un autre pays européen 2,1 350 Mauvaise expérience dans le système

d’accès aux droits 1,9 326

Peur d’être dénoncé(e) et/ou arrêté(e) 1,2 207 Autre raison exprimée (refus officine, Pass

non fonctionnelle…) 4,1 681

Taux de réponse : 55 %.

La domiciliation constitue à ce titre un exemple embléma-tique de la complexité des démarches et des dysfonction-nements qui peuvent en découler. Disposer d’une adresse où recevoir son courrier constitue un prérequis indispensable à l’ouverture des droits notamment pour l’accès à l’assurance maladie sur critère de résidence (CMU) ou à l’Aide médicale d’État (AME). À ce titre, la loi prévoit un principe déclaratif en matière de domicile, selon lequel la déclaration d’une adresse permet d’ouvrir des droits sans avoir à produire de pièces jus-tificatives. Toutefois, il est courant que les Caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) exigent des pièces justificatives de domicile, alors même que la personne est en mesure de déclarer une adresse. Les publics précaires ne peuvent pas, pour la plupart, produire les justificatifs demandés, ce qui les empêche ainsi d’accéder à une couverture maladie.

En 2015, près d’un quart des personnes de plus de 16 ans ayant fréquenté les Caso ont besoin d’une domiciliation, parmi elles 36 % sont hébergées par de la famille ou des proches. Il est probable que ces personnes se soient vues refuser leur adresse déclarative ou n’aient pas souhaité ou pu communiquer les coordonnées des personnes les hébergeant par peur d’un éventuel contrôle. Ces pratiques, en plus d’être abusives, augmentent le nombre de personnes en demande de domiciliation alors même que les organismes domiciliataires sont saturés. En effet, les personnes sans domicile stable ne pouvant déclarer une adresse ou produire les justificatifs exigés abusivement doivent faire appel à la procédure d’élection de domicile, auprès d’un Centre communal d’action sociale (CCAS) ou d’un organisme agréé. Les organismes domiciliataires, qui exercent leur mission sans financements, sont saturés.

Afin de limiter leur charge, certains appliquent même une politique restrictive d’accès à la domiciliation, excluant ainsi de nombreuses personnes de l’accès aux droits. C’est

ainsi que les CCAS limitent l’accès à la domiciliation en exigeant la production de pièces justificatives pour établir le lien avec la commune. Pour de nombreuses personnes sans domicile stable, il est impossible de produire ces pièces et ainsi faire valoir leur droit à l’élection de domicile.

MdM milite depuis de nombreuses années pour obtenir la simplification du droit à la domiciliation. Si la loi ALUR du 24 mars 2014 aligne la domiciliation AME sur la domiciliation de droit commun, elle exclut de cette simplification la domiciliation pour l’admission au séjour des demandeurs d’asile qui reste spécifique. Cette simplification a minima laisse aussi perdurer un dispositif qui discrimine les étrangers en situation irrégulière qui n’auraient accès à la domiciliation que pour l’exercice de certains droits (dont l’AME).

Parce qu’il est la première étape pour accéder à ses droits, le droit à la domiciliation doit être garanti à toute personne. MdM, au sein d’un collectif inter-associatif, porte des propositions auprès de la Direction de la sécurité sociale (DSS) et de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) pour l’amélioration de l’accès à la domiciliation et est associé aux travaux en cours quant à l’élaboration des décrets d’application de la loi ALUR, veillant à la défense du droit à la domiciliation pour les publics les plus précaires.

TABLEAU 21 : SITUATION DES PATIENTS DE 16 ANS ET PLUS REÇUS DANS LES CASO VIS-À-VIS DE LA DOMICILIATION, 2015

% n

Dispose d’une adresse

(adresse personnelle ou chez des proches)

48,3 8 513 Dispose d’une domiciliation 27,5 4 846 A besoin d’une domiciliation 24,4 4 253 Taux de réponse : 74,8 %.

LA BARRIÈRE DE LA LANGUE : 3E OBSTACLE À L’ACCÈS AUX DROITS ET AUX SOINS

Près d’un patient sur cinq évoque la barrière linguistique comme principal obstacle à l’accès aux soins. Ce résultat souligne, une fois encore, les besoins en matière d’interprète professionnel dans l’ensemble des institutions (administrations et structures médico-sociales) mais également en médecine de ville afin de permettre une prise en charge optimale. En effet, pour les migrants s’ajoutent souvent des conditions d’isolement, d’incompréhension et de différences culturelles qui, face à la maladie, revêtent une grande importance [Tabouri 2013]. En favorisant la communication entre le patient et le personnel

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soignant, l’adhésion au traitement et au suivi médical, la prévention, l’information des proches éventuellement concernés par la pathologie et l’orientation vers les spécialistes appropriés sont facilités. Non seulement l’interprétariat favorise l’égalité de traitement des personnes, mais il permet aussi d’éviter les malentendus. Ainsi des solutions adaptées aux attentes et aux besoins des usagers et des professionnels peuvent plus facilement être trouvées43.

L’interprétariat est un véritable outil d’intégration des individus et doit être réalisé par des professionnels afin d’assurer le respect des principes suivants : la restitution objective, complète et fidèle du message, la non-intervention, l’impartialité et le devoir de confidentialité [Schwarzinger 2012 ; Chambon 2016]. Il est reconnu que le recours à l’interprétariat professionnel améliore le dialogue entre le soignant et le soigné, évite la multiplication des consultations, voire les errances ou les erreurs de diagnostics [Schwarzinger 2012] et par conséquent réduit les risques de retard de recours aux soins et de complications médicales dont les coûts humains et financiers sont sans aucune mesure avec le coût même de la traduction.

Les médiateurs sanitaires constituent également une ressource face à des publics migrants, peu franco-phones et ne connaissant pas les dispositifs français.

La mise en place d'un médiateur, tierce personne neutre avec des connaissances à la fois du système de santé, de la langue et des codes culturels des per-sonnes, simplifie les premiers contacts entre patient et institution médico-sociale.

La Loi de santé adoptée en janvier 201644 a permis une avancée en la matière en proposant un travail sur un référentiel de compétence des médiateurs.

La reconnaissance du métier de médiateur socio- sanitaire reste nécessaire.

Ces constats conduisent à suggérer « le développement d’un système plus accompagnant » avec un recours facilité aux interprètes et aux médiateurs. Ils peuvent permettre un moyen efficace d’améliorer l’accès aux services de santé.

Ainsi, les patients bénéficient d’une meilleure connaissance des parcours de santé.

LES DIFFICULTÉS FINANCIÈRES TOUJOURS PLUS IMPORTANTES

Enfin, 18 % des patients évoquent les difficultés financières dans l’accès aux soins. Celles-ci sont en augmentation par rapport aux années précédentes (18 % en 2015 contre 6 % en 2012). Ces difficultés concernent en général l’impossibilité d’avancer les frais ou de souscrire à une complémentaire santé. En effet, malgré un

fort développement des couvertures complémentaires, il reste une frange non négligeable de la population qui en est dépourvue, et ce en dépit de la création de la CMUc ou de l’ACS.

L’avance de frais constitue un facteur majeur de non-recours aux soins et donc de retard de soins.

La généralisation du tiers payant, proposée dans la Loi de santé adoptée en janvier 2016 et réclamée depuis plus de 20 ans par MdM, constitue de ce fait un outil efficace pour l’accès à la médecine de ville, la lutte contre les retards de soins et le re-noncement aux soins. Par ailleurs, elle va permettre de lutter contre la stigmatisation des titulaires de la CMU et de l’AME et devrait limiter les refus de soins de certains professionnels. Elle permettra aussi de mettre fin à un discours qui fait des plus pauvres des « profiteurs » au prétexte qu’ils n’ont pas à effectuer l’avance de frais, alors même qu’ils sont les premières victimes des inégalités de santé et d’accès aux soins.

Enfin, MdM continue de demander l’augmentation du seuil d’attribution de la CMUc45 au niveau du seuil de pauvreté dans le but d’améliorer l’accès aux soins des personnes en situation de grande précarité.

(43) Migrations Santé Alsace – Note d’opportunité pour un interprétariat médical et social professionnel, avril 2009.

(44) Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

(45) Le seuil d’attribution était fixé à 723€/mois pour une personne seule au 1er avril 2016 (en métropole).

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(46) Loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle.

(47) La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (LFSS) adoptée le 21 décembre 2015, entrée en vigueur le 1er janvier 2016 instaure la PUMa.

->

En 2015, deux patients sur

cinq présentent un retard de recours aux soins et un sur trois nécessite une prise en charge urgente ou assez urgente.

->

16 % des patients déclarent avoir renoncé à des

soins au cours des 12 derniers mois.

->

Le retard de recours aux soins est plus

fré-quent avec l’avancée en âge des patients, chez ceux vivant dans des conditions précaires (SDF et squats) et chez les étrangers présents en France depuis moins d’un an.

LES POINTS ESSENTIEL S

LE RETARD ET LE RENONCEMENT

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