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Structures à symétrie cyclique

Les roues aubagées présentent la particularité d’être réparties circulairement autour de l’axe de rotation grâce à une répétition de sous-structures identiques, désignées comme secteurs, se refermant sur elles-même pour constituer la structure complète : cette propriété géométrique est nommée symétrie cyclique [83,213,234] et illustrée en figureI.12.

(a) Soufflante complète (b) Secteur de référence Figure I.12 – Géométrie du modèle numérique de la soufflante

Cette propriété de symétrie permet d’étudier ces structures à l’aide d’un formalisme particulier, reposant sur une modélisation mixte physique et ondulatoire, qui autorise l’exploitation de modèles numériques largement réduits par rapport au modèle numérique représentant la roue aubagée complète. Ce formalisme particulier permet une restriction de la modélisation à un seul et unique secteur de la structure, appelé secteur de référence,

24 Chapitre I. Dynamique des roues aubagées auquel sont appliquées des conditions aux limites représentatives du type d’onde étudié. Grâce à ce formalisme, il est possible de reconstruire de façon exacte la réponse de la structure toute entière.

2.3.1 Définition des composantes cycliques

Une roue aubagée, constituée de N secteurs distribués cycliquement selon un angle

α = /N et numérotés en débutant par zéro, est définie en vue des développements de cette sous-section. La condition de périodicité de la structure cyclique peut être écrite telle que

uj+N = uj, ∀j ∈J0, N − 1K (I.40)

dans laquelle uj est le champ de déplacement du secteur j.

Selon la théorie de représentation linéaire des groupes cycliques introduite par Valid et Ohayon [227], il est possible de représenter le champ de déplacement du secteur j comme une superposition finie de fonctions harmoniques d’expression

uj = N −1

X

k=0

˜ukeijkα (I.41)

où ˜uk représente les composantes complexes harmoniques d’ordre k, aussi nommées com-posantes cycliques. La relation inverse, permettant d’exprimer ces comcom-posantes cycliques en fonction du champ de déplacement physique uj, s’écrit

˜uk= 1 N N −1 X j=0 uje−ijkα (I.42)

Les relations (I.41) et (I.42) liant champ de déplacement et composantes cycliques sont au final des transformées de Fourier discrètes. Par ailleurs, il est possible d’utiliser un formalisme mathématique réel pour ces transformations ce qui permet alors d’exprimer le champ de déplacement uj ainsi

uj = ˜u0+ K X

k=1 

˜uc,kcos(jkα) + ˜us,ksin(jkα)

+ (−1)j˜uN/2 (I.43) avec la valeur du paramètre K dépendant de la parité du nombre de secteurs N

K = ( N

2 1 si N est pair (N−1)

2 si N est impair (I.44)

2. Modélisation des roues aubagées 25 La réciproque reliant les composantes cycliques réelles au champ de déplacement uj est donnée par

˜u0 = 1 N N −1 X j=0 uj (I.45a) ˜uc,k = 2 N N −1 X j=0 ujcos(jkα) (I.45b) ˜us,k = 2 N N −1 X j=0 ujsin(jkα) (I.45c) ˜uN/2 = 1 N N −1 X j=0 (−1)juj (I.45d)

L’équation (I.43) peut aussi s’énoncer sous une forme matricielle plus compacte

u= F˜u (I.46)

où les vecteurs u et ˜u, composés respectivement du champ de déplacement et des compo-santes cycliques de chaque secteur, ont pour expression

u=h

u0 u1 · · · uj · · · uN −1 iT

(I.47) ˜u =h

˜u0 ˜uc,1 ˜us,1 · · · ˜uc,k ˜us,k · · · ˜uN/2iT

(I.48) et la matrice réelle de transformée de Fourier discrète

F= 1 1 0 1 · · · 0 1

1 cos(α) sin(α) cos(2α) · · · sin(Kα) −1

1 cos(2α) sin(2α) cos(4α) · · · sin(2Kα) 1

... ... ... ... ... ... ...

1 cos ((N − 1)α) sin ((N − 1)α) cos ((N − 1)2α) · · · sin ((N − 1)Kα) −1 (I.49) Toute grandeur physique, notamment le champ de déplacement uj, d’une structure cyclique peut donc être décrite exactement par l’intermédiaire des composantes cycliques ˜uk, définies sur un secteur de référence, et par un indice harmonique k. Contrairement à un système cyclique décrit en base physique pour lequel la structure entière est repré-sentée, une modélisation en base cyclique permet de ne traiter que des sous-problèmes du problème intégral, indépendants les uns des autres. Chacun de ces sous-problèmes est associé à un indice harmonique k et donc à un type d’onde se propageant dans la structure cyclique ce qui permet de ne résoudre que les types d’onde d’intérêt pour l’étude de la structure. Le problème à résoudre se trouve alors être de taille significativement réduite par comparaison à celui exprimé en base physique.

2.3.2 Formulation d’un problème en symétrie cyclique

La formulation d’un problème en symétrie cyclique revient à exprimer le problème, à savoir les matrices structurales en plus des vecteurs solutions, en base cyclique et à com-pléter chaque sous-problème par des conditions aux limites. Ces dernières traduisent la

26 Chapitre I. Dynamique des roues aubagées fermeture de la structure sur elle-même et le déphasage spatial qui caractérisent l’onde correspondant à l’indice harmonique k considéré.

Dans un premier temps, chaque matrice structurale s’exprime en base cyclique par l’intermédiaire de la matrice de transformée de Fourier discrète F ainsi

˜Z = FTZF (I.50)

avec Z, une matrice générique représentant les matrices structurales de masse, de raideur ou d’amortissement et ˜Z, cette même matrice exprimée en base cyclique.

La forme de la matrice de transformée de Fourier discrète F et les relations d’ortho-gonalité des fonctions trigonométriques [99] impliquent une matrice ˜Z diagonale par blocs telle que ˜Z = diag(˜Zk) avec ˜Zk= NZ0 pour k ∈ {0,N/2} ˜Zk= N 2 Z0 0 0 Z0 ! pour k ∈J1, K K (I.51) La forme de la matrice ˜Z, diagonale par blocs, équivaut à un ensemble de sous-problèmes indépendants correspondant à chaque indice harmonique k comme écrit plus haut. De plus, il est possible de remarquer que, pour les harmoniques 0 et N/2, la taille du problème est équivalente au nombre de degrés de liberté du secteur, tandis que, pour les autres harmoniques, la taille du système matriciel est doublée en raison des termes en cosinus et en sinus caractérisant l’onde considérée.

Figure I.13 – Représentation de la partition d’un secteur d’un système cyclique Dans un second temps, afin d’appliquer les conditions aux limites appropriées, il est primordial de partitionner le vecteur du champ de déplacement du secteur de référence u0 ainsi

u0 =h

gu0 du0 iu0iT

2. Modélisation des roues aubagées 27 dans laquelle les exposantg,deticorrespondent respectivement aux degrés de liberté de frontière à gauche et à droite ainsi qu’aux degrés de liberté internes de chaque secteur. Ces notations sont illustrées en figure I.13.

En base physique, les conditions aux limites traduisent la continuité du champ de déplacement u aux interfaces entre les différents secteurs. Le couple équation (I.53) traduit cette condition appliquée au secteur de référence et ses secteurs adjacents.

gu

0=du1 (I.53a)

du

0=guN −1 (I.53b)

En insérant la relation (I.41) dans le couple équation (I.53), les conditions de continuité à l’interface s’expriment en base cyclique pour chaque harmonique k

g˜uk 0 =d˜uk 0eikα (I.54a) d˜uk 0 =g˜uk 0ei(N−1)kα (I.54b)

Ces deux relations de propagation, exprimées en base cyclique, permettent de relier les degrés de liberté des deux frontières du secteur de référence. Ces expressions sont équivalentes, par conséquent une seule de ces équations suffit à formuler le problème en base cyclique. Par souci de concision, la relation (I.54a) est généralement conservée. Il est aussi possible d’écrire cette relation en employant un formalisme réel pour aboutir aux expressions

— pour k = 0

g˜u0 = d˜u0 (I.55)

— pour k ∈J1, K K

"g˜uc,k g˜us,k #

= cos(kα)sin(kα) cos(kα)sin(kα)

! "d˜uc,k d˜us,k #

(I.56) — pour k =N/2

g˜uN/2= −d˜uN/2 (I.57) Les sous-problèmes, définis dans un premier temps puis complétés de ces conditions aux limites cycliques, permettent de formuler le problème en base cyclique et autorisent ainsi la modélisation d’un système possédant des propriétés géométriques de symétrie cy-clique à partir d’un seul et unique secteur de référence.

La section suivante traite de la résolution de problèmes structuraux classiques en em-ployant ce formalisme cyclique à savoir l’analyse modale et la réponse forcée.

2.3.3 Problèmes structuraux en base cyclique

L’équation régissant la dynamique d’un solide, définie en sous-section I.2.1, peut être reformulée en base cyclique grâce aux développements présentés dans cette sous-section de la manière suivante

˜

Mku¨˜k(t) + ˜Ck˙k(t) + ˜Kk˜uk(t) = ˜gk(t) ∀k ∈J0,N/2K (I.58) où les notations employées sont identiques à celles de la sous-sectionI.2.1. Afin d’alléger les équations, les termes dépendant de la rotation du solide ne sont pas explicitement écrits mais peuvent être ajoutés simplement à l’équation (I.58). Chacun de ces sous-problèmes est augmenté d’équations de contrainte correspondant aux relations de continuité entre les secteurs définis par les expressions (I.55), (I.56) et (I.57).

28 Chapitre I. Dynamique des roues aubagées

Analyse modale. L’analyse modale linéaire d’une structure converge vers l’obtention des fréquences propres et de la déformée des modes propres de la structure étudiée (plus de détails sur l’analyse modale linéaire sont fournis dans le chapitreII). En base physique, cette analyse modale linéaire nécessite la résolution du problème aux valeurs propres sui-vant

(K − Ω2M)Φi = 0 (I.59)

où Φi est la déformée du ième mode linéaire du système qui en comporte n et Ω est la pulsation propre associée au ième mode normal linéaire.

La formulation de ce problème aux valeurs propres en base cyclique mène à la résolution des sous-problèmes aux valeurs propres associés à chaque indice harmonique k et contenus dans l’équation

( ˜Kk−Ω2M˜k) ˜Φki = 0 (I.60) Les solutions de ces sous-problèmes peuvent être réparties en deux catégories. La pre-mière est constituée des solutions définies comme non-dégénérées pour lesquelles la valeur propre Ω2est simple. Ces solutions sont associées aux indices harmoniques k = 0 et k =N/2 (lorsque N est pair pour ce dernier cas). La seconde catégorie est formée par les solutions dites dégénérées et dont la valeur propre Ω2 est double. Cette dégénérescence de certains modes propres permet de reconstruire, à partir des deux vecteurs propres linéairement in-dépendants, associés à la même fréquence propre Ω, une onde dite tournante. Cette onde se propage dans la structure dans l’une ou l’autre des directions : une onde se propageant dans le sens de rotation de la roue aubagée est dite co-rotative tandis qu’une onde se déplaçant dans le sens opposé est dite contra-rotative. Une combinaison linéaire entre une onde co-rotative et une autre contra-rotative dans des proportions identiques aboutit à une onde dite stationnaire.

Les déformées ˜Φki des modes propres comportent des diamètres nodaux se rapportant aux lignes le long desquelles le champ de déplacement de la structure est nul. Le nombre de diamètres nodaux de la déformée est égal à l’indice harmonique k du mode exprimé en base cyclique. Grâce au formalisme cyclique employé, il est possible d’évaluer uniquement les modes possédant le nombre de diamètres nodaux souhaités puisque ce formalisme per-met de découpler les différents sous-problèmes aux valeurs propres correspondant à des indices harmoniques k différents.

La figure I.14 illustre les modes non-dégénérés de la soufflante composite à dix-huit secteurs étudiée dans les travaux de ce mémoire. Il est possible de remarquer sur la fi-gure I.14a que la totalité des secteurs du mode à zéro diamètre nodal vibrent en phase. Tandis que sur la figure I.14b, les secteurs adjacents du mode à neuf diamètres nodaux (N/2 diamètres) vibrent en opposition de phase.

Les modes dégénérés à deux diamètres nodaux, représentés sur la figure I.15, per-mettent d’identifier clairement les positions des diamètres. Il est alors possible de remar-quer que ces deux modes propres dégénérés sont orthogonaux. La représentation de la déformée du mode à deux diamètres comme illustrée sur la figure I.15 ne permet d’iden-tifier le type d’onde (stationnaire, co-rotative ou contra-rotative) se propageant dans la structure cyclique. D’autres représentations, proposées dans le chapitreVI, peuvent alors mettre en évidence graphiquement le type de l’onde.

2. Modélisation des roues aubagées 29

(a) Zéro diamètre nodal (b) Neuf diamètres nodaux Figure I.14 – Déformées modales non-dégénérées du premier mode de flexion (déplacements minimum et maximum )

Figure I.15 – Déformées du premier mode de flexion dégénéré à deux diamètres nodaux (déplacements minimum et maximum )

Réponse forcée. À partir de l’équation du mouvement formulée en base cyclique (I.58), la réponse forcée linéaire du système peut être évaluée. Les sous-problèmes associés à chaque indice harmonique k restant toujours indépendants, les équations d’intérêt, à savoir celles possédant un terme d’excitation ˜gk(t) non nul, peuvent être résolues indépendam-ment les unes des autres ce qui permet de réduire la taille du système à résoudre.

Cette sous-section, en plus de développer la formulation d’un problème en symétrie cyclique, a principalement permis d’introduire les notions de modes à diamètres (dégénérés et non-dégénérés) et de propagation de l’onde (stationnaire, co-rotative et contra-rotative) dans la structure cyclique. Ces notions seront amplement exploitées dans le chapitre VI

consacré aux essais en rotation de la soufflante dans le module structure PHARE#1. Néanmoins, l’hypothèse de symétrie cyclique de la structure implique l’uniformité de tous les secteurs. Or, des imperfections liées à la fabrication ou à l’usure des différents secteurs et en particulier des aubes sont inévitables. Par conséquent, cette méthode de

30 Chapitre I. Dynamique des roues aubagées symétrie cyclique n’est pas adaptée lorsque la roue aubagée doit être modélisée le plus fidèlement possible à la réalité. Ce phénomène de disparité entre les secteurs est nommé désaccordage et sera développé plus en détails dans la sous-section suivante.

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