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CHAPITRE 3 : LA MUCOVISCIDOSE

II. Structure et fonctions de la protéine CFTR

II.1. Structure et fonctions

CFTR est une protéine membranaire de 170 kDa codée par un gène de 250 kb d’ADN (figure 9), situé sur le bras long du chromosome 7 (Riordan et al., 1989). CFTR est un canal chlore appartenant à la famille des protéines transporteuses ABC (ATP Binding Cassette). CFTR est constitué de 1480 acides aminés comportant deux domaines transmembranaires à six hélices hydrophobes, ainsi qu’une partie cytosolique formée de deux domaines hydrophiles NBD1 et NBD2 (Nucleotide Binding Domain) qui sont les sites de fixation de l’ATP, et d’un domaine régulateur R. Ce domaine R est constitué de 241 acides aminés et contient les sites potentiels de phosphorylation des protéines kinases A et C (Ostedgaard et al., 2001) (figure 10).

Figure 9 : Gène CFTR et protéine correspondante (d’après Gibson et al., 2003)

Le gène CFTR humain est localisé sur le bras long du chromosome 7 et il est constitué de 27 exons qui codent les 1 480 acides aminés de la protéine CFTR.

Figure 10 : Structure de CFTR (d’après Rowe et al., 2005)

La protéine CFTR contient deux domaines de liaison aux nucléotides (NBD) qui lient et hydrolysent l’ATP, deux domaines transmembranaires qui forment le canal et un domaine régulateur (R) central. Le domaine R, propre à CFTR, contient de nombreux sites de phosphorylation pour les kinases A ou C. L’extrémité C terminale est ancrée au cytosquelette via une interaction de type PDZ.

∆F508 Milieu extracellulaire

Milieu intracellulaire

TRL

Cytosquelette Protéines de

transduction de signal Autres

canaux ioniques

Membrane plasmique apicale

Domaine régulateur Domaine

transmembranaire 1

Domaine transmembranaire 2

Nucleotide-binding domain 1

Nucleotide-binding domain 2 Segments

transmembranaires

NBD Domaine R

Les protéines ABC fonctionnent comme médiateurs de transports de solutés organiques et incluent entre autres les protéines MDR (Multi Drug Resistance proteins) et les protéines MRP (Multi drug Resistance associated Proteins), ces dernières étant des protéines de détoxification cellulaire (Lallemand et al., 1997).

CFTR conduit le chlore à travers la membrane cellulaire et est régulée par les protéines kinases A (PKA) de façon AMPc-dépendante. Les sites PKA de la protéine servent de cible pour la phosphorylation. L’hydrolyse de l’ATP est médiée par NBD1 et 2 dans l’intégralité du canal ionique. De nombreuses autres fonctions ont été attribuées à CFTR comme la régulation négative du transport sodique transépithélial et la régulation des canaux chlore et potassium activés par le calcium (Knowles et al., 1983). CFTR a également un rôle important dans les fonctions d’exocytose et la formation de complexes moléculaires dans la membrane plasmique (Bertrand et al., 2003).

Au niveau de la membrane apicale, CFTR fait partie d’un assemblage de plusieurs protéines.

Les trois acides aminés terminaux ancrent CFTR aux récepteurs de type PDZ (PSD-95/SAP-90, Discs-large, ZO-1 homologous domain), à proximité de nombreux récepteurs membranaires, canaux ioniques et du cytosquelette (Short et al., 1998). Le rôle de CFTR dans les cellules épithéliales ne se restreint donc pas à la seule perméabilité du chlore. Chez les patients mucoviscidosiques, l’absence de CFTR influence l’expression d’autres molécules telles que les protéines ayant un rôle important dans la réponse inflammatoire, les processus de maturation, les transports ioniques et la signalisation cellulaire. Ces différents gènes (sens modificateurs) et protéines vont potentiellement modifier le phénotype CF ce qui peut expliquer les différences de sévérité clinique observées chez les patients porteurs de la même mutation de CFTR.

II.2. Mutations du gène CFTR

Le gène CFTR comporte environ 180 000 paires de bases et 1523 mutations ont été décrites à ce jour (le 27/09/2006) (http://www3.genet.sickkids.on.ca/cftr/StatisticsPage.html) dans la séquence codante, les signaux d’épissage des ARN messagers, et d’autres régions. Ces mutations peuvent être répertoriées en six classes selon le mécanisme par lequel elles vont provoquer la maladie (figure 11). Les mutations de classe I affectent la production de la protéine. Il y a alors absence totale ou partielle de la protéine liée à des mutations non-sens (G542X), des mutations d’épissage (1717 :1G→1A) et des mutations entrainant un déphasage

Les mutations de classe II affectent la maturation cellulaire de la protéine CFTR comme pour la mutation ∆F508, où les anomalies de glycosylation conduisent à un défaut du trafic intracellulaire et à une absence ou à un faible taux d’expression de la protéine au niveau du pôle apical de la cellule. Les mutations de classe III affectent la régulation du canal chlore. Ce sont des mutations faux-sens au niveau des sites de liaison de l’ATP (NBD1 et 2) ou dans le domaine R qui aboutissent à une altération de la fonction de la protéine CFTR, régulée par la concentration en ATP cytosolique. Les mutations de classe IV perturbent la perméabilité du canal chlore en affectant la sélectivité de ce dernier. Elles incluent les mutations dans les domaines transmembranaires. Les mutations de classe V réduisent le nombre de transcrits de CFTR. Les mutations de classe VI affectent la stabilité de CFTR à la surface cellulaire.

Les différentes classes de mutations du gène cftr sont l’absence de synthèse (classe I) ; un défaut de maturation et une dégradation prématurée (classe II) ; une mauvaise régulation telle qu’une diminution de la liaison et de l’hydrolyse de l’ATP (classe III) ; un défaut de la conductance du chlore ou une fermeture du canal (classe IV) ; une diminution du nombre de transcrits due à une anomalie du promoteur ou de l’épissage (classe V) ; et un turnover accéléré de la surface cellulaire (classe VI).

Dans la population caucasienne, la mutation la plus répandue est la mutation ∆F508 (70% de chromosome muté) : 50% des malades sont homozygotes pour cette mutation. Elle consiste en une délétion de trois paires de bases dans l’exon 10 du gène, entraînant l’absence d’une Figure 11 : Différentes classes de mutations de CFTR (d’après Rowe et al., 2005)

Cl -Appareil de

Golgi

Protéosome Réticulum endoplasmique

Noyau

CFTR CFTR

Classe I

Classe VI Classe IV

Classe III

Classe V Classe II

Turnover accéléré

phénylalanine en position 508 de la protéine. Cette protéine possède encore une fonction de canal chlore dans les membranes lipidiques libres. Lorsqu’elle est synthétisée au niveau de la cellule, cette protéine est rapidement reconnue comme étant anormale, elle est alors dégradée rapidement après sa synthèse avant même d’atteindre son site d’action à la membrane apicale de la cellule. Sermet-Gaudelus et al., ont montré qu’il existe une activité résiduelle de conductivité des anions régulée par la voie de l’AMP cyclique (AMPc), chez les cellules épithéliales ciliées nasales ∆F508, similaire à celle décrite chez les cellules exprimant le canal CFTR normal et chez les sujets sains. Ceci suggère que les phénotypes peu sévères observés chez certains patients homozygotes pour la mutation ∆F508 pourraient être liés à une fonction résiduelle de CFTR dans les tissus respiratoires (Sermet-Gaudelus et al., 2002).