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De la stratégie régionale déconcentrée à la concentration logistique dans la

Chapitre 4 – Insertion différenciée de la logistique dans les métropoles

2.2. Effet des trajectoires politiques d’aménagement sur les dynamiques spatiales et le

2.2.3. La planification logistique dans la région métropolitaine de Göteborg

2.2.3.3. De la stratégie régionale déconcentrée à la concentration logistique dans la

Mais ces dernières années le développement de la métropole de Göteborg vient peser sur le reste de la région. En cherchant à concentrer davantage les activités logistiques sur son territoire, elle ne s’inscrit pas dans la continuité de cette politique régionale qui vise à équilibrer ces activités dans l’hinterland. Cette politique s’inscrit en revanche dans la continuité de la politique portuaire (Maritime Strategy for Västra Götland, 2011) qui cherche à attirer un plus grand nombre d’activités logistiques et à les concentrer sur son territoire. La Ville de Göteborg dispose d’environ 130 000 m² qui peuvent être dédiés à la logistique, de ce fait Prologis s'attend à un important développement logistique à Göteborg et, par le biais de constructions « en

182 blanc »14. Intelligent Logistik, revue commerciale suédoise, évalue chaque année les meilleurs endroits logistiques en Suède sur la base de six critères et Göteborg est régulièrement au sommet de la liste 15. Göteborg est un port important, avec d'énormes flux de marchandises à traiter et bénéficie d'une bonne accessibilité, d'un bon climat des affaires et, surtout, de la disponibilité du foncier, autant de critères déterminant à l’échelle pour attirer ces activités. Tant au niveau régional que local, le prix des terrains reste un facteur important de localisation ce qui explique que certaines entreprises choisissent de se localiser dans les autres pôles urbains de la région du Västra Götaland, pour bénéficier d’un foncier peu cher.

Les entretiens réalisés avec les investisseurs immobiliers et les sociétés 3PL fournissent quelques explications plus spécifiques. Le cas de PostNord est une bonne illustration de la tendance (Entretien n°38, avec PostNord). PostNord TPL (Third Party Logistics) est une filiale du groupe PostNord, la principale société de messagerie et de colis dans les pays nordiques, créée par une fusion des services postaux suédois et danois en 2009. L'activité 3PL a été acquise en 2012 auprès de Green Cargo, une société de transport ferroviaire de marchandises appartenant à l'État suédois, dans le cadre d'une stratégie visant à compenser la baisse des volumes dans le secteur des lettres avec des efforts accrus en matière de logistique. PostNord TPL dispose d’un entrepôt de 20 000 m2 à Göteborg située à 12 km du centre-ville, au nord de la GMA, à proximité du port de Göteborg. La localisation des entrepôts de PostNord peut d'abord être expliquée dans le cadre de l'histoire de l'entreprise. Les changements plus récents dans leur stratégie de localisation sont étroitement liés aux prix de location de l'immobilier. Göteborg et Stockholm se caractérisent par des prix de location élevés pour l'espace logistique : estimés à 70-80 US $ le mètre carré par an pour Göteborg et plus de 80 US $ pour Stockholm. Dans les deux autres emplacements, Norrköping et Helsingborg, coûtent environ 40-50 US $. Ces localisations représentent la majorité de l'espace d'entreposage total actuel de 320 000 m², et selon notre interviewé, cela est directement lié à la baisse des prix de location. PostNord TPL semble ne pas être le seul à considérer le prix de location comme un facteur de localisation premier. Bockasjö, une société de logistique basée à Borås, considère également que le prix du terrain est essentiel (Annexe n°3, entretien n°37). Par exemple, Göteborg semble être plus compétitive que Stockholm parce que le coût du terrain est de 20% inférieur. Schenker logistics est un 3PL et peut travailler pour des entreprises telles que PostNord colis.

La stratégie de Schenker logistics est la « consolidation » (Annexe n°3, entretien n°33). Par exemple, un entrepôt dans le Nord, de 29 000 m², construit dans les années 1960, a été abandonné. La société a préféré développer peu d'entrepôts mais plus grands dans lesquels la

14 Annexe n°3, Entretien n°35 Prologis, Northern Europe, 15 Annexe n°3, Entretien n°30 Business Region Gothenburg (BRG)

183 majeure partie des opérations logistiques sont effectuées. Les économies réalisées grâce à cette réorganisation ont permis de baisser les prix de 15%. Aujourd'hui, il y a deux entrepôts à Göteborg, trois à Jönköping. Prologis y a construit un entrepôt de 82 000 m² pour DHL en 2008. D'après Prologis, la municipalité de Jönköping a pesé sur la localisation de ces entrepôts. Cependant aujourd’hui Jönköping est moins attractive, son marché immobilier a atteint un stade de maturité, et dans une stratégie de consolidation les entreprises préfèrent se localiser à proximité de Göteborg (Annexe n°3, entretien n°35). La stratégie est double : la concentration des opérations régionales dans un seul bâtiment, tout en augmentant la présence dans les régions peuplées de Stockholm et de Göteborg.

Au regard des entretiens menés en 2016, la situation du marché immobilier logistique à Göteborg est sur le point de changer, avec plus d'offres et des prix bas à prévoir dans le court terme. Plusieurs grands investisseurs immobiliers logistiques (par exemple Catena, NCC, Eklandia / Castellum, Bockasjö et Prologis) lancent de nouveaux projets. Ceux-ci sont "en blanc" (les futurs utilisateurs ne sont pas encore connus), ce qui est assez rare pour Göteborg. Si la région du Västra Götaland a été particulièrement marquée par des dynamiques de desserrement des activités logistiques, l’absence d’un étalement logistique semble être davantage le fruit d’une politique régionale qui a incité la déconcentration des activités logistiques mais qui n’a pas infléchi le mode de développement logistique. Le fort pouvoir attractif de la métropole de Göteborg s’est renforcé, du fait notamment des initiatives du port. Les pôles urbains de la région métropolitaine sont encore très attractifs pour la localisation des entrepôts. A l’échelle de la région métropolitaine, les pouvoirs publics ont mis en œuvre une politique de développement des autres pôles urbains que Göteborg expliquant au moins en partie le desserrement logistique dans le VGC, en revanche à l’échelle locale l’attractivité de Göteborg s’est trouvée renforcée par différentes actions publiques et privés locales, favorisant le desserrement logistique dans la métropole de Göteborg et atténuant les efforts entrepris par la région pour développer les autres pôles. La concurrence distordue avec Göteborg ne leur permet pas d’atteindre cette homogénéité spatiale.

En 2016, la région du Västra Götaland a produit pour la première fois un plan régional pour l’aménagement du fret qui soit prescriptif (Godstransportstrategi för Västra Götaland, 2016) qui recherche davantage un développement logistique équilibré sur le territoire, donc une continuité des politiques favorisant la déconcentration d’une partie des activités logistiques. Le cas du VGC nous montre que des politiques publiques proactives pour le développement du territoire régional qui se traduit par des investissements dans une politique de transport et la mise en place d’une gouvernance qui repose sur des partenariats publics/privés,

184 locaux/nationaux ont favorisé le développement de la logistique en dehors de la métropole de Göteborg.

Globalement on remarque que les dynamiques spatiales liées à la logistique, qu’il s’agisse de desserrement ou de concentration, sont très liées à la trajectoire de politiques d’aménagement engagées à l’échelle régionale. Si les documents de planification régionaux permettent de contextualiser le développement des activités logistiques, leur insertion reste in fine liée aux règles d’usage du sol le plus souvent définies au niveau local. Le passage d’une régulation du sol de l’Etat central aux communes a significativement accru leur rôle dans la localisation des activités logistiques. Les modes de développement logistique que nous avons identifiés sont intrinsèquement liés à ces politiques d’aménagement régional.

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Conclusion du chapitre 4

Ce chapitre permet tout d’abord de montrer que la géographie logistique des régions métropolitaines et des métropoles ne se calquent pas nécessairement sur la géographie urbaine. Dans le cas de l’Ile-de-France, les activités logistiques produisent leur propre géographie propre tandis que dans les deux autre régions métropolitaines la proximité avec la géographie urbaine reste forte. Les structures métropolitaines constituent un des principaux facteurs éclairant de cette distinction, à savoir qu’une région monocentrique tend à favoriser un développement logistique périurbain de façon dominante, tandis que les régions polycentriques tendent à favoriser une intensification logistique dans les principaux pôles urbains qui la composent. Il nous semble que ces structures métropolitaines, sont le fruit d’une mise en tension entre des dynamiques spatiales d’une part et des politiques d’aménagement à l’échelle régionale et locale d’autre part, qui tentent d’influer sur cette structure. Ainsi, une réflexion sur ces politiques publiques nous ont permis d’éclairer les trajectoires spatiales de la logistique. Ces trajectoires que l’on considère relativement récentes ne doivent pas nous faire oublier le contexte urbain et réglementaire préexistant qui ont contraint, influencé l’évolution de la localisation des activités logistiques.

Dans ce chapitre l’accent est porté sur les principes d’aménagement qui gouvernent les politiques d’aménagement nationales, régionales et locales. La création de régions polycentriques, garantes d’une intégration européenne, d’une intégration dans la mondialisation et d’une équité dans le développement territorial, a guidé la planification des territoires. Cette politique plutôt issue d’une réflexion allemande et néerlandaise à l’échelle de l’Union Européenne, suppose dans des cas comme la région parisienne, de transformer la structure monocentrique pour en faire une structure polycentrique. Les différentes politiques ont alors favorisé une déconcentration des activités et des populations, et en l’absence de gouvernance régionale efficace, elles ont créé un terrain propice à l’étalement logistique. Les territoires périurbains sont devenus accueillants pour la localisation des entrepôts. Le passage d’un modèle monocentrique à un modèle polycentrique dans la métropole parisienne est donc à relativiser, et à discuter. Au regard de la logistique, nous avons assisté à une décentralisation importante, une inversion du rapport centre-périphérie, qui laisse de nouvelles perspectives et de nouveaux défis en termes de gouvernance aux politiques publiques. Par ailleurs, cet étalement urbain soulève un autre enjeu, celui de la permanence des entrepôts situés dans les zones denses. Ne correspondant pas au modèle dominant, ils nous apparaissent comme plus vulnérables. A l’échelle régionale, les politiques menées dans les régions du Västra Götaland et de la Randstad au cours de ces dernières décennies ont largement influencé les dynamiques spatiales. Que les politiques soient gouvernementales, régionales ou locales, elles ont limité l’étalement

186 logistique, quand bien même dans certains cas elles ont poussé à la déconcentration des activités.

L’aller-retour constant entre l’échelle locale de la métropole et l’échelle régionale permet de mettre en évidence les effets de la planification et des mesures entrepris par les acteurs locaux et régionaux sur l’ensemble des territoires. La géographie logistique reflète les tensions entre des politiques publiques menées à différentes échelles, parfois contradictoires dans le temps (Ile-de-France) ou dans l’espace (VGC).

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Chapitre 5 – La permanence des entrepôts