4.3.1 Utilité de l’asservissement
Afin d’avoir une traçabilité par rapport à l’étalon primaire de longueur, la longueur
d’onde du laser doit être connue et stable à long terme ce qui permet d’avoir une grande
répétabilité sur les mesures de position et de vitesse. L’instabilité naturelle de la source verte
utilisée est très bonne sur le court terme, mais doit être améliorée sur le moyen et long terme
pour garantir l’exactitude des mesures. Plusieurs méthodes peuvent servir pour contrôler la
fréquence des lasers monomodes : l’asservissement sur la résonance d’un interféromètre
Fabry Pérot et l’asservissement sur la transition atomique ou moléculaire.
Un résonateur optique du type interféromètre de Fabry-Pérot de longueur « L0 » peut
être utilisée comme référence pour la stabilisation de fréquence d’un laser. L’asservissement
se fait sur les pics de transmission Fabry-Pérot de la cavité. Cette méthode souffre de deux
problèmes. Elle ne peut pas servir pour calibrer d’une manière absolue la fréquence et elle
n’est pas stable intrinsèquement car la longueur de la cavité qui est un facteur principal dans
cette méthode peut varier au court du temps, par exemple par dilatation. Des précautions
peuvent être prises lors de la fabrication afin de limiter les dérives thermiques du matériau
constituant la cavité mais sont en règle générale insuffisantes pour les performances requises.
Les transitions atomiques ou moléculaires constituent des références de fréquence
idéales car elles permettent une instabilité long-terme excellente. De plus ces références
donnent une information sur la valeur absolue de la fréquence car de nombreux atomes ont
fait l’objet d’études spectroscopiques poussées en métrologie. Cela nécessite néanmoins la
réalisation d’une chaîne de mesure pour raccorder la région spectrale considérée à un étalon
primaire de fréquence.
Dans notre cas la vitesse de la bobine et par suite la longueur d’onde du laser doivent
rester stable durant toute la durée de vie de la balance du watt, un asservissement sur un pic de
transmission d’une cavité Fabry-Pérot ne peut pas être envisagé et l’asservissement sur une
transition atomique paraît indispensable.
La région spectrale du laser de type Nd :YAG doublé émettant une radiation verte à
532 nm est classiquement associée à un asservissement sur des transitions moléculaires de
l’iode 127I2 qui présente une forte absorption dans le domaine visible.
4.3.2 Asservissement en fréquence
Le laser INNOLIGHT utilisé est accordable en fréquence en agissant sur la
température de la cavité ou en alimentant un actionneur piézoélectrique qui influe sur la
longueur de la cavité laser. Nous avons mesuré la sensibilité du réglage en agissant sur la
température seule, -6 GHz par degrés Celsius, et en agissant sur l’actionneur piézoélectrique,
2 MHz/volt.
Cet ordre de grandeur de sensibilité permet d’envisager l’asservissement sur les raies
d’absorption de l’iode avec une méthode classique d’absorption saturée, présentée Figure 4-3.
Le faisceau laser est polarisé à l’aide d’une lame demi-onde parallèle à l’axe de transmission
d’un cube séparateur de polarisation. Le faisceau passe dans la cellule d’iode puis est réfléchi
par un miroir plan. Le faisceau réfléchi est superposé au faisceau incident. Dans ce cas, la
cellule d’iode est éclairée par deux faisceaux contre-propageant issus du même laser dont le
faisceau le plus intense est appelé faisceau pompe et le second faisceau sonde. La lame
demi-onde règle la puissance des faisceaux laser pompe et sdemi-onde dans la cellule d’iode. La lame
quart d’onde adapte l’intensité du signal laser sur le photo-détecteur.
DS
G
Laser
3f
~
I2
λ/2 λ/4 M
CSP
P
PD
PID
+
(a)
isolant
Cellule d’Iode
Circulation d’eau
Module thermoélectrique
à effet Peltier
(b)
Figure 4-3 : Principe de l’asservissement de la fréquence du laser (a), refroidissement de la
cellule d’iode (b)
G un générateur de fonction, DS détection synchrone, P actionneur piézoélectrique, 2λ une
lame demi-onde, 4λ lame quart d’onde, I2 cellule d’iode, M miroir, CSP cube séparateur de
polarisation. PID module Proportionnel, Intégral, Dérivée.
La cellule d’iode est un cylindre de 20 mm de diamètre et de 100 mm de longueur
munie d’un queusot de 3 mm de diamètre contenant de l’iode « 127I2 ». A l’équilibre
thermique, le profil de la distribution de vitesse des atomes dans la cellule est gaussien. La
largeur de raie minimale observable est limitée par la durée de vie du phénomène qui dépend
très fortement des chocs avec les autres molécules. Les raies spectrales ne sont pas infiniment
fines et de nombreux effets contribuent à leurs largeurs observées. Une excitation laser élargit
la largeur de raie d’absorption par effet Doppler. Ce phénomène important en phase gazeuse
est dû à la distribution des vitesses des molécules. La raie infiniment fine s’élargit alors en
une gaussienne dont la largeur augmente avec la température. Pour diminuer la fréquence des
collisions dans la cellule et pour affaiblir l’élargissement de la raie dû à l’effet Doppler, un
refroidissement de la cellule jusqu'à -15°C est réaliséce qui permet de diminuer la pression de
la vapeur à 0,8 Pa dans la cellule [Picard2003]. Le schéma de principe du système de
refroidissement est illustré dans la Figure 4-3 (b). On utilise deux modules thermoélectriques
à effet Peltier montés en série. La première face refroidit le queusot de la cellule d’iode et la
deuxième face est refroidie par un système de circulation d’eau distillée. Un isolant englobe
tout le système pour éviter la condensation. Une sonde PT100 mesure la température du
queusot et un module PID traite cette information et contrôle le courant injecté dans les deux
modules thermoélectriques afin d’avoir une température fixe de –15°C. L’eau circulant dans
le serpentin est refroidie dans un système de circulation d’eau fabriqué par la compagnie
MELCOR (MRC150DH2-HT-DVA) de 150 watts de puissance.
La fréquence centrale de l’émission laser est choisie en réglant la température du
cristal laser. Le balayage de la fréquence du laser est assuré en variant le courant
d’alimentation du cristal piézoélectrique permettant ensuite de balayer la longueur d’onde
émise en accord avec le spectre de l’iode.
Le faisceau sonde contient les signaux de la structure hyperfine sur un fond Doppler et
il est détecté par le photo-détecteur PD. Une détection synchrone (SR830DSP de chez
Stanford Research Systems) démodule le signal. La détection par rapport à l’harmonique 3
permet d’éliminer le fond Doppler qui pourrait perturber d’une manière résiduelle si l’on
effectuait une détection sur l’harmonique 1. Cela diminue l’amplitude du signal démodulé,
mais dans notre cas, le rapport signal à bruit reste amplement suffisant pour avoir une qualité
d’asservissement convenable. Le signal sonde démodulé avec une harmonique d’ordre 3 est
montré Figure 4-4. Ce signal constitue l’entrée d’un module PID qui asservit la fréquence
laser autour du point zéro. Les deux signaux (signal de modulation et signal de correction)
sont additionnés à l’aide d’un circuit sommateur pour alimenter l’actionneur piézoélectrique
qui porte un des miroirs constituant la cavité laser.
-1200 -1000 -800 -600 -400 -200 0 200 400 600
-100
0
100
Te
ns
ion
(
m
V
)
Temps (ms)
Dans le document
Contrôle de la position et de la vitesse d'une masse à l'échelle nanométrique : application à la balance du watt du LNE
(Page 94-97)