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Spécification des variables et de leurs indicateurs

CHAPITRE 3 : CADRE OPÉRATOIRE ET STRATÉGIE VÉRIFICATION

3.1 Spécification des variables et de leurs indicateurs

Le but de la recherche est de vérifier si l’alignement de l’aide alimentaire canadienne vers des intérêts économiques et politiques, plutôt que des considérations humanitaires, signifierait un changement dans la façon dont celle-ci est allouée. Il faut donc porter notre attention à l’endroit où elle est distribuée. C’est de cette façon qu’il est possible d’examiner quels déterminants influencent cette distribution. Dans cette optique, la variable dépendante de la recherche est la quantité d’aide alimentaire envoyée par le Canada vers un pays j en milliers de tonnes de grains. Les données collectées de cette variable, qui couvrent la période de 1988 à 2012, proviennent de la base de données du programme FAIS du PAM. Cette variable a été utilisée dans plusieurs recherches effectuées précédemment (Ball et Johnson 1996; Neumayer, 2005; Young et Abbott, 2008; Langlois, 2011). Le fait que les données du PAM couvrent la période de 1988 à 2012 est

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idéal puisque, comme nous l’avons vu, le dernier ouvrage important sur l’aide alimentaire canadienne est celui de Charlton qui remonte à 1992.

3.1.2 Variables de contrôle

Modèle gravitationnel

Comme nous l’avons vu, les deux premières hypothèses se rapportent au modèle gravitationnel. Le modèle stipule que les pays géographiquement proches vont engendrer davantage de flux commerciaux (dans le présent cas, davantage de flux d’aide). La première variable testée (Distance) est donc la distance entre le Canada et les différents pays récipiendaires. Comme indicateur, on utilise le log de la distance harmonique entre le Canada et le pays récipiendaire pour chaque dyade (Head et Mayer, 2002). Pour cette variable, on s’attend à retrouver un signe négatif puisqu’une plus grande distance devrait signifier moins de flux d’aide. En outre, le modèle avance aussi que les flux sont supérieurs entre pays plus populeux. La deuxième variable (Population) est donc la population du pays récipiendaire selon le site de la Banque mondiale. Comme pour la distance, on utilise le log des populations dans l’analyse statistique. Puisque la recherche étudie les flux d’aide d’un seul donneur (le Canada) et que l’évolution de la population canadienne entre 1988 et 2012 est négligeable, seule la population des pays récipiendaires est testée. Cette fois, le signe devrait être positif.

Besoins des pays récipiendaires

La troisième hypothèse se penche sur les besoins des pays récipiendaires en général. Deux indicateurs se rapportent à cette variable de besoin. En premier lieu, les besoins nutritionnels (Calories) sont représentés par la quantité totale de nourriture disponible pour la consommation humaine en Kcal/par habitant/par jour qui, comme la variable dépendante, est disponible à travers le programme FAIS. Plusieurs autres études utilisent cet indicateur (Eggleston, 1987; Hermann et al, 1992; Neumayer, 2005; Young et Abbott,

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2008; Langlois 2011) puisqu’il représente bien les besoins en nourriture à un niveau macro. En second lieu, pour vérifier les besoins plus généralement dans les pays récipiendaires, l’indicateur habituel du PIB par habitant (PIB récipiendaire) est lui aussi utilisé. Le signe pour ces indicateurs devrait être négatif. Plus un pays est riche et bien doté en nourriture, moins il devrait recevoir d’aide. Pour la variable (Réfugiés) qui est testée à la quatrième hypothèse, on se rapporte à la liste du nombre de réfugiés proposée par la Banque mondiale. Dans ce cas, on s’attend à un signe positif.

Finalement, en ce qui concerne la variable sur les catastrophes naturelles (Catastrophes naturelles), l’indicateur utilisé est le nombre de personnes affectées par une catastrophe naturelle dans le pays selon la base de données International Disaster

Database du Centre for Research on the Epidemiology of Disasters (CRED) utilisée dans

plusieurs études (Strömberg, 2007; Peduzzi et al., 2009; Andrade Da Silva et Cernat, 2012). Pour n’étudier que les catastrophes pertinentes à la recherche, seulement les catastrophes de type « sécheresse », « tremblements de terre », « inondation », « glissement de terrain» ou « tempête » ont été sélectionnées. Comme il est le cas dans l’étude de Andrade Da Silva et Cernat (2012), on utilise le nombre de personnes affectées par 100 000 habitants pour éviter la multicolinéarité avec la variable ayant trait à la population. De plus, pour cet indicateur, ainsi que pour les trois autres utilisés dans cette catégorie, on utilise le log des valeurs récoltées dans le but d’éviter des problèmes d’hétéroscédasticité dont nous allons faire part dans la prochaine partie de ce chapitre.

Intérêts économiques du Canada

La sixième hypothèse traite de l’interdépendance économique et vérifie donc l’influence des flux commerciaux sur l’allocation de l’aide alimentaire canadienne. L’indicateur de cette variable (Flux commerciaux) est le log de la somme des importations et des exportations entre le Canada et chaque pays récipiendaire9. Cette information est

9 Un modèle avec un lag (Flux commerciaux t-1) pour cette variable est proposé en Annexe II. Il est

logique de penser que les décideurs canadiens regarderaient les exportations et les importations de l’année précédente avant d’allouer l’aide. Cependant, puisque les résultats de la variable (Flux

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disponible sur la base de données du Correlates of War. Le signe de cet indicateur devrait être positif. Pour continuer, la deuxième variable utilisée pour tester l’influence des intérêts économiques est les surplus engendrés par les producteurs canadiens (Production

canadienne). L’indicateur de cette variable est le log de la production annuelle de grain

par habitant du Canada que l’on peut trouver dans la base de données du FAIS. Comme mentionné précédemment, l’aide alimentaire a été utilisée par le Canada comme un canal pour se débarrasser des surplus agricoles. L’aide alimentaire devrait être plus importante lorsque la production est plus grande. Le signe de cet indicateur devrait donc lui aussi être positif, principalement en ce qui concerne les transferts directs. La dernière variable d’intérêt économique est celle de l’ouverture du pays récipiendaire (Ouverture

récipiendaire). L’indicateur utilisé pour calculer celle-ci est le log de la somme de ses

importations et exportations divisée par son PIB. Si cette somme est petite lorsque comparée au PIB, cela devrait signifier que l’économie est plutôt fermée. Comme nous l’avons vu, on fait l’hypothèse que l’aide alimentaire est utilisée pour ouvrir les marchés. Ainsi, l’aide devrait être envoyée vers les marchés plus fermés et l’indicateur engendrerait donc un signe négatif.

Intérêts politiques du Canada

En ce qui concerne les intérêts politiques, la première variable est, on se rappelle, l’affinité politique (Affinité politique) du Canada avec les différents pays récipiendaires. L’indicateur représentant celle-ci est l’Index de similarité du vote aux Nations Unies développé par Erik Gartzke (2006) et mis à jour par Strezhnev et Voeten (2013). Cet index mesure la similarité du vote entre le Canada et le pays récipiendaire à l’Assemblée générale des Nations Unies, un bon indicateur de la convergence politique selon plusieurs auteurs (Neumayer, 2005). Les hypothèses dix et onze vérifient l’influence de l’appartenance à deux organisations chères aux yeux du Canada : le Commonwealth et l’Organisation internationale de la francophonie. Dans les deux cas (Commonwealth) (OIF), on utilise

commerciaux t-1) sont sensiblement les mêmes que pour (Flux commerciaux), nous avons préféré garder cette dernière dans le modèle puisqu’elle nous permet de maintenir l’année 2012 dans notre échantillon.

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une variable dichotomique (oui ou non) de la présence du pays récipiendaire à ces organisations. Le signe pour celles-ci devrait être positif. Pour ce qui est de l’hypothèse continentaliste, la variable est l’alignement à l’aide alimentaire américaine (Alignement

É-U) dont l’indicateur est la distribution de l’aide alimentaire américaine. Pour vérifier

cette hypothèse, il faut regarder non seulement la distribution de l’aide américaine selon le même indicateur que la variable dépendante de la recherche (la quantité en tonnes de grains), mais aussi celle des autres pays donateurs importants. Il est essentiel de vérifier la distribution des autres dans le but de contrôler pour des explications alternatives qui créeraient cet alignement. Par exemple, les grands besoins d’un pays récipiendaire pourraient amener les donneurs à tous se concentrer sur celui-ci. Par contre, si la distribution canadienne est toujours liée à la distribution américaine, sans que ce soit le cas des autres pays donateurs, on peut en déduire que cela serait bel et bien le résultant d’un intérêt canadien. La méthodologie entourant la vérification de cette variable sera davantage expliquée dans les chapitres suivants. Pour continuer, dans le but de tester l’hypothèse douze, la variable de religion (Religion) développée par Helpman, Melitz et Rubinstein (2008) est utilisée. Elle est définie comme suit:

Religionij = (%Protestants dans le pays i · %Protestants dans le pays j) + (%Catholiques dans le pays i · %Catholiques dans le pays j)

+ (%Musulmans dans le pays i · %Musulmans dans le pays j).

Gouvernance dans le pays récipiendaire

Finalement, en ce qui a trait à la variable de la bonne gouvernance (Droits civils et

politiques), il existe de nombreux indicateurs qui évaluent l’impact de celle-ci. Afin

d’éviter les problèmes de multicolinéarité, nous allons porter attention à seulement deux d’entre eux pour former la variable soit le résultat combiné pour les « droits civils» et les « droits politiques » du Freedom House. La façon dont l’indicateur est construit fait que l’on s’attend à un signe négatif. C’est-à-dire que si le Canada envoie plus d’aide à un pays récipiendaire avec une bonne gouvernance, le résultat de l’analyse statistique pour cette

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variable va être négatif. C’est le cas puisque l’indice du Freedom House accorde un 1 aux meilleurs élèves et un 7 aux pays les moins respectueux.

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