• Aucun résultat trouvé

1714 Guillemette Bellongle

A. Aux sources de la vocation religieuse

1. L’appel de Dieu ou la pluralité des manifestations divines

« Toute vocation est un appel » disait l’écrivain Georges Bernanos, et certaines entrées en religion des religieuses de Vannes relèvent bien d’un appel, soit de Dieu, soit de la Vierge Marie, soit pour le cas d’une sœur, de l’Esprit Saint106. Il nous est sans doute bien difficile de

comprendre ce que recouvre ce mot "appel". Nos esprits contemporains, nourris de rationalité107, imaginent mal cette forme de communication divine. Ne dit-on pas que les voies 105 L’histoire de cette vocation n’émane pas de la religieuse elle-même mais est rapportée par une rédactrice ayant côtoyé, sans nul doute, la défunte (au moins un temps). Cependant, cette proximité semble peu à même de fournir tous les détails notés par écrit, par moment assez précis. Mais les sources utilisées pour alimenter ces récits de vie nous sont, malheureusement, inconnues.

de Dieu sont impénétrables ? Il faut néanmoins replacer cette forme de vocation dans le contexte de l’époque. Bernard Dompnier, à propos des Capucins, parle de l’atmosphère mentale dans laquelle ces derniers baignent. L’exemple des religieuses de Notre-Dame de Charité est du même ordre. Vivant dans des familles croyantes - voire dévotes pour certaines -, élevées dans une foi présente au quotidien, ces jeunes filles sont sans doute "mieux" disposées mentalement et psychologiquement à entendre la voix de Dieu. Elles sont disponibles, en quelque sorte. L’étrangeté de cette situation - notamment pour ceux qui en sont témoins - doit sans doute se retrouver, de nos jours, chez des femmes se faisant religieuses et répondant à cet appel divin.

Au fil des années, plusieurs religieuses du couvent vannetais ont ainsi entendu l’appel de Dieu. C’est ce le cas de sœur Marie du Verbe-Incarné Bourgeois : « elle entendit la voix de son bien-aimé qui l’invitait à se donner à lui dans la religion108 », de sœur Marie de Saint-Paul

Le Vandeur : « il l’appela donc a la religion109 », de sœur Marie de Saint-Pierre Giquel :

« environ quatorze ans, notre Seigneur lui fist entendre sa voix, l’appelant interieurement a la vocation religieuse110 » , de sœur Marie de Sainte-Claire Le Gouvello de Keriaval : « dans ce

108 Abrégé de sœur Marie du Verbe-Incarné Bourgeois, f° 381.

109 Abrégé de Marie de Saint-Paul Le Vandeur, f° 491.

genre de vie retirée, uniforme et réglée, notre chere sœur eut tout le loisir et la facilite d’entendre et d’écouter la voix de l’époux sacré qui l’appeloit à un état plus saint et plus parfait encore111 », de sœur Marie des Séraphins de Chalon de Fosse : « elle commença donc à

travailler pour obtenir les permissions de se retirer et obeir à la voix de Dieu qui l’appeloit depuis si longtems112 », de sœur Marie de Saint-Pierre de Bonnecamps : « notre chere sœur fut

du nombre de celle que Dieu choisit et appela a notre saint estat113 », de sœur Marie de Saint-

Stanislas Dondel114 : « le céleste epoux commença, de bonne heure, a frapper a la porte de ce

111 Abrégé de sœur Marie de Sainte-Claire Le Gouvello de Keriaval f° 830.

112 Abrégé de sœur Marie des Séraphins de Chalon de Fosse, f° 111.

113 Abrégé de sœur Marie de Saint-Pierre de Bonnecamps, f° 999.

114 L’origine de la vocation de cette sœur, issue d’une grande maison vannetaise, est multiple. Elle entend non seulement le murmure de Dieu à son cœur mais elle est également en proie à un dégoût du monde progressif. Par ailleurs, elle entre dès son plus jeune au couvent de Vannes, y recevant l’enseignement de sa tante, soeur de son père. La perte de cette parente lui causera une profonde douleur.

mesme cœur dont il vouloit, seul, faire la conquête115 » ou encore de sœur Marie des Anges

Trogoff: « sollicita fortement son retour chez nous où elle sentoit que Dieu l’appeloit116 ».

Le cas de sœur Marie de Sainte-Marthe Le Tessier est à noter. En effet, c’est dès sa prime enfance qu’elle conçoit l’appel de Dieu : « des son bas age, lequel lui donnoit, ce semble, assez de raison pour consentir desja à cette vocation et pour croire que le choix que son pere faisoit d’elle pour le cloistre fut un apêl de Dieu sy toutefois on peut croire qu’elle en eut eu assez de lumière à l’age de 9 à 10 ans pour savoir que c’est Dieu qui est l’arbitre de notre sort117 ». Remarquons au passage, la précocité de cet appel et le doute affleurant sous la

plume de la rédactrice. Mais, pour une petite fille dont le père « se plaisoit a destiner selon ces conjectures bonnes et simples l’etablissement de ces enfans, destinant en particulier sa fille cadette a estre religieuse sans sçavoir pour quoy il luy pronostiquoit ce destin sy ce n’eut été par les heureuses qualitez qui se trouvoient en elle118 », prendre le voile paraît évident.

A la voix de Dieu instillant le désir du cloître à une jeune fille s’ajoute la voix du Saint Esprit. Cette mention de l’action de la troisième personne de la Trinité se retrouve dans l’abrégé de sœur Marie de la Sainte-Résurrection Autheuil : « elle aimoit le monde et y avoit 115 Abrégé de sœur Marie de Saint-Stanislas Dondel, f° 1141.

116 Abrégé de sœur Marie des Anges Trogoff, f° 1204.

117 Abrégé de sœur Marie de Sainte-Marthe le Tessier, f° 555.

beaucoup d’agrement mais sensible a la voix du saint esprit, elle oublia son pays et ne songea plus qu’a la prendre pour son epouse119 ».

Avec sœur Marie de la Trinité Heurtaut, figure majeure de l’ordre de Notre-Dame de Charité,120 ce n’est pas la voix de Dieu qu’entend une petite fille mais la figure de la Vierge

Marie « une dame d’une grande beaute et majeste » qu’une petite fille voit. Pour avoir négligé de dire son chapelet et d’honorer cette « mere de bonté »121, elle implore son pardon et lui

promet de le dire tous les jours pour elle. A cette occasion, la Vierge Marie lui apprend comment dire son chapelet. Cette vision, marquante pour une petite fille de moins de dix ans, lui inspira « un grand desir d’estre a Dieu122 ».

Si Dieu interpelle les futures religieuses par la parole, il peut également le faire par des actes nimbés d’un profond mystère comme c’est le cas pour sœur Marie du Saint-Cœur de Jésus Bedault. Déjà consciente de la présence de Dieu dans sa vie suite à « des graces et des

119 Nous ne savons pas à quel âge elle prononce ses vœux. Abrégé de sœur Marie de Sainte-Résurrection Autheuil, f° 270.

120 Elle a fondé les trois couvents de l’ordre en Bretagne : celui de Guingamp, de Rennes et de Vannes.

121 La Vierge Marie qui l’a sauvée d’une mort par étouffement dans les premières années de sa vie, la traite alors de « petite ingrate ». Abrégé de sœur Marie de la Trinité Heurtaut, f° 62.

communications de Dieu tres particulieres123 », elle se tourne définitivement vers la

religion après une rencontre bien étrange:

« Un jour allant l’église, et passant sur le pont saint michel, elle entendit une voix qui luy dit : repare mon image. Elle regarda autour d’elle et aperçoit au bout du pont une image de la tres sainte Vierge à laquelle elle avoit une speciale devotion, l’ayant prise pour sa mere et, la voyant ainsy rompüe et dégradée, prit le dessein de la faire racommoder suivant ce qui lui avoit esté dit et de la mettre dans un endroit plus convenable à ce qu’elle representoit pour la faire honorer. Elle y fit tout son possible et, sans, vouloir y paroistre, chargea quelque personne dy faire cette reparation, luy mettant en main l’argent necessaire pour cela. Mais comme Dieu l’avoit destinée pour reparer aussy son image dans les ames ou le peché l’avoit effacée, il luy donna la vocation religieuse et elle entra au monastere de Renne124 ».

En dehors de sœur Marie de Saint-Pierre Giquel et de sœur de Sainte-Marthe Le Tessier, nous ne savons jamais à quel âge ces jeunes filles entendent cet appel. Celui-ci survient soit avant l’entrée au couvent - sœur Marie de la Trinité Heurtaut125, sœur Marie de la Sainte-

Résurrection Autheuil, sœur Marie de Saint Paul-Le Vandeur126, sœur Marie des Séraphins du

123 Ibid., f° 62.

124 Abrégé de sœur Marie de la Trinité Heurtaut, f° 63.

125 Son désir de se consacrer apparaît avant sa première communion qu’elle « fit à l’âge de dix ou onze ans ».

Chalon de Fosse127, sœur Marie de Sainte-Claire Le Gouvello de Keriaval128, sœur Marie de

Saint-Pierre de Bonnecamps129 -, soit pendant le séjour au couvent (sœur Marie du Verbe-

Incarné Bourgeois130, sœur Marie de Saint-Pierre Giquel131, sœur Marie de Saint-Stanislas

Dondel132).

Toutes les religieuses qui ont entendu cette voix divine sont des sœurs de chœurs - au nombre de dix -, en dehors de sœur Sainte-Marthe Le Tessier, sœur converse :

127 Elle prononce ses vœux à 42 ans. Cette sœur est décédée le 25 janvier 1705.

128 Elle prononce ses vœux à 16 ans. Cette sœur est décédée le 4 septembre 1782.

129 Elle prononce ses vœux à 21 ans. Cette sœur est décédée en décembre 1764 à Paris.

130 Elle prononce ses vœux à 18 ans. Cette sœur est décédée le 3 mai 1701.

Nom Date des vœux Rang Origine sociale

Sœur Marie du Saint-Cœur de Jésus Bedault133

( 20 mai 1713)

1683 (au couvent de

Vannes)

Choriste et également 1ère

supérieure du couvent de Vannes (1683-1686)

« Depourvue de biens de fortune134 »

Sœur Marie de la Trinité Heurtaut135 ( 25 février 1709) 1683 (au couvent de Vannes) Supérieure (1689-1695) « Honneste famille136 »

Sœur Marie des Séraphins du Chalon de Fosse ( 25 janvier 1705)

1687 Choriste Noblesse

Nom Date des vœux Rang Origine sociale

132 Elle prononce ses vœux à 19 ans. Cette sœur est décédée le 22 mars 1772.

133 Cette sœur a été professe au couvent de Rennes.

134 Abrégé de sœur Marie de Jésus Bedault, f° 4.

135 Nous ne connaissons pas la date de ses vœux. Nous savons tout au plus qu’elle passa 25 ans à Vannes et y décéda à 75 ans.

Sœur Marie de la Sainte- Résurrection Autheuil

( 16 avril 1730)

1689 15 ans conseillère, sans autre mention du rang qu’elle a

occupé dans ce couvent

« Bonne et ancienne famille,

aussi distinguee pour sa vertu que

pour ses alliances137 »

Sœur Marie du Verbe- Incarné Bourgeois

( 3 mai 1701)

1691 Choriste Père, charge

d’alloué Sœur Marie de Saint-Paul

Le Vandeur ( 11 avril 1710)

1699 Sœur de choeur « Meilleure

famille de cette ville138 »

137 Abrégé de Sœur Marie de la Sainte-Résurrection Autheuil, f° 270.

Sœur de Sainte-Marthe Le Tessier

( 25 février 1711)

1702 Sœur converse « Pere, fort

honneste de bien139 »

Sœur Marie de Saint-Pierre Giquel

( 20 septembre 1709)

1706 Choriste Noblesse

Sœur Marie de Sainte- Claire Le Gouvello de

Keriaval ( 4 septembre 1782)

1716 Choriste « Famille tres

distinguee dans la province par son

ancienneté140 »

Sœur Marie de Saint-Pierre 1732 Choriste « Honorable

139 Abrégé de Sœur Marie de la Sainte-Marthe Le Tessier, f° 556.

de Bonnecamps ( ? décembre 1764)

famille et bien alliée141 »

Sœur Marie de Saint- Stanislas Dondel ( 22 mars 1772)

1733 Choriste Née « d’une

famille distinguée par sa naissance,

sa fortune et sur tout par les

charges héréditaires dans leur maison, tant dans l’Eglise que

dans la magistrature et

dans le service142 »

Comme le laissent entendre les informations et le tableau ci-dessus, entendre l’appel divin semble être le propre de jeunes filles issues de milieux aisés, voire nobles. Toutefois, ce constat doit toujours être rattaché à la forte proportion de sœurs appartenant à un tel groupe social. Peu d’entre elles en effet appartiennent à un milieu très modeste. Entrer au couvent exige une dot que ces familles, peu avantagées « des biens qu’on appelle la fortune143 » ne

peuvent pas fournir à moins d’en être dispensé. Cette intervention divine n’est pas non plus le fait d’une époque puisque nous retrouvons cette mention sur plusieurs années.

Comment expliquer alors que certaines religieuses discernent la voix incitative de Dieu et pas d’autres ? Nous ne pouvons le dire. Des facteurs psychologiques se cachent, peut-être 141 Abrégé de Sœur Marie de Saint-Pierre de Bonnecamps, f° 1099.

142 Abrégé de sœur Marie de Saint-Stanislas Dondel, f° 1141.

derrière la naissance de cette vocation religieuse ou, plus simplement, un certain climat familial propice à une telle réceptivité sensorielle.

11 sœurs, en définitive, entendent la voix de Dieu les appelant au couvent (11 sur 144 sœurs dont nous possédons les abrégés, soit 7,97 %). Peu d’entre elles sont donc ces "kletos", ces appelées dont parle la Bible. Cette entrée au couvent, sous les auspices de Dieu, ne revêt pas toujours une démarche "positive", née d’un profond « désir de closture144 ». Elle peut

naître, en effet, de « solides reflexions sur le danger de se perdre dans le monde145 ».

2. Le dégoût du monde

Le dégoût du monde revient à de multiples reprises sous la plume des rédactrices des différents abrégés. Il apparaît même dans les pages préliminaires du livre du couvent. Ainsi, dans la partie intitulée "souhaits et prières pour les religieuses de Notre-Dame de Charité", il est écrit :

« Que tous leurs cœurs soient autant d’images vivantes de l’amour tres pur de la charite tres excellente, de l’humilite tres profonde, de l’obeissance tres exacte, de la purete plus qu’angélique, de la patience invincible, de la mansuetude enfantine, de la simplicite colombine, de la soumission entiere à sa volonté de Dieu, de l’abnegation totale de soi mesme, du parfait mepris du monde, du zelle tres ardent pour le salut des ames …146».

144 NOBECOURT Lorette, La clôture des merveilles, Paris, Grasset, 2013, p.10.

145 Abrégé de sœur Marie Joseph Hervé, f° 1336.

Le retrait d’un monde dont « la grandeur n’est que pure chimere147 », dont « les

maximes perverses [sont] si opposées à celles de jesus christ et aux saints et pieux penchants de son cœur droit148 » est une véritable constante, une antienne répétée à l’envie, avec plus ou

moins de grandiloquence. Le monde d’ici-bas est celui de la perdition, ce « tabernacle des pecheurs149 » dont parle l’abrégé de sœur Marie des Séraphins de Chalon de Fosse. Tout est

faux dans celui-ci et les êtres humains qui le peuplent se laissent facilement étourdir par ses « maximes perverses150 », ses « jeux et [ses] divertissements151 » et ses « vaines et flatteuses

147 Abrégé de sœur Marie de Saint-Charles Le Rebours du Vaumadeuc, f° 434.

148 Abrégé de sœur Marie de Saint-Hyacinthe Soreau, f° 419.

149 Abrégé de sœur Marie des Séraphins du Chalon de Fosse, f° 111.

150 Abrégé de sœur Marie de Saint-Hyacinthe Soreau, f° 419.

esperances152 ». Il est le lieu « ou tant de gens font de si triste naufrage153 », un lieu où les

parures, les ornements et les habits magnifiant les corps comptent plus que la beauté de l’âme. Il n’y a pourtant rien à sauver dans ce monde où l’on se perd, corps et âme. A « la puerilite des biens qu’il promet154 » s’opposent les « richesses du ciel155 ». A plusieurs reprises, le mot

"vanité" s’invite sous la plume des rédactrices, rappelant une phrase ouvrant et clôturant l’Ecclésiaste : « vanité des vanités ; vanité des vanités, tout est vanité156 ». Ainsi que le dit ce

livre de l’Ancien Testament, toutes les phrases du livre du couvent de Vannes portraiturant négativement un monde rempli de perversions en appellent à un détachement des biens terrestres, vains et inutiles.

152 Abrégé de sœur Marie de Saint-Vincent Pennel, f° 976.

153 Abrégé de sœur Marie de Saint-Dominique Richer, f° 1294.

154 Abrégé de sœur Marie de Saint-Paul Le Boudoul du Baudory, f° 1088.

155 Abrégé de sœur Marie de Saint-Charles Didrou, f°,1280.

Un extrait de la notice nécrologique de sœur Marie de Saint-Paul Le Boudoul du Baudory situe bien l’atmosphère dans laquelle devait évoluer ces jeunes filles, avant d’entrer au couvent :

« J’ay considéré, dit-elle, qu’ayant reconnüe par la grace de Dieu la corruption dont le monde est infecté et le mauvais air que l’on y respire, nous avons cru venir en religion nous en préserver, ce qui ne seroit pas, continüe telle, si on procuroit ou sy on ne faisoit pas son possible pour éviter les entrez des gens du monde dans son monastere puisque leur esprit et leurs maximes sonts aussi pernicieuse à une ame que la peste l’est au corps157 ».

Comme le laissent entendre ces quelques lignes, le couvent est conçu comme un refuge, l’arche de la religion où la religieuse - désignée sous le terme de colombe dans plusieurs abrégés - se pose pour éviter « les dangers et ecueils ou elle [est exposée]158 ». Si cette

défiance du monde s’impose peu à peu dans l’esprit des futures postulantes à l’ordre de Notre- Dame de Charité, elle n’en est pas moins absente sitôt passé la porte du cloître. En effet, cette dichotomie entre cette contrée hors du monde et le monde lui-même se poursuit à l’intérieur des murs du couvent. Ainsi, sœur Marie du Saint-Cœur de Jésus Bedault n’hésite pas à inculquer à « ces jeunes plantes le mepris du monde159 ». Sœur Marie de Saint-Benoît

Bonnard, alors qu’elle a la charge du pensionnaire, inspire « a ces jeunes personnes beaucoup de mépris pour le monde, surtout pour les modes et les ajustes, leur en faisant voir la folie et

157 Abrégé de sœur Marie de Saint-Paul Le Boudoul du Baudory, f° 1089.

158 Abrégé de sœur Marie de Saint-François de Sales Le Milloch,, f° 453.

la vanité, la difficulté d’y operer son salut et leur [rapporte] plusieurs exemples fort a propos et puissants pour les convaincre160 ».

Il est loisible de penser que l’enseignement reçu par les pensionnaires du couvent vannetais insistait sur « les plaisirs empoisonnés que le monde présente à ses sectateurs, au milieu à l’espêce d’yvresse qui l’endormoit161 ».

Toutefois, aussi prégnant que soit ce contemptus mundi - mépris du monde162 - dans les

pensées de ces jeunes filles, toutes ne l’ont pas ressenti avec autant de force. En effet, certaines, issues de nobles familles, ont eu bien du mal à quitter un monde dont elles auraient certainement fait « l’ornement et les delices163 ». C’est notamment le cas de sœur Marie de

Saint-Stanislas Dondel. Cette religieuse, originaire de Vannes, est née « d’une famille distinguée par sa naissance, sa fortune et sur tout par les charges hereditaires dans leur maison, tant dans l’Eglise que dans la magistrature et dans le service164 ». Bien qu’arrivée en

160 Abrégé de Sœur-Benoît Bonnard, f° 566.

161 Abrégé de sœur Marie de Saint-Stanislas Dondel, f° 1141.

162 Ce mépris du monde apparait dans le Nouveau Testament, dans l’Evangile de saint Jean, 2, 15 : « N’aimez point le monde, ni ce qui est dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui. »

bas-âge au couvent de la cité épiscopale et donc, éduquée dans l’amour de Dieu165, cette

« jeune amante combatit longtems entre Dieu et le monde. Ce dernier avoit des attraits pour