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LA SOPHISTIQUE ANCIENNE ET MODERNE

Dans le document Le néosocratisme de Gabriel Marcel (Page 83-170)

Chapitre 2

LA SOPHISTIQUE ANCIENNE ET MODERNE

Les sophistes

Introduction

Π existe un magnifique conte que nos parents nous ont tous

lu:

Le magicien d'Oz

de Frank L. Baum. Cette fable met en scène

la petite Dorothée qui se retrouve, suite à une tornade, au pays du magique d’Oz. Elle y fera plusieurs rencontres fabuleuses dont l’une avec un épouvantail. S’étonnant que ce dernier puisse parler, elle l’interroge:

-Un épouvantail, ça n'a pas de cervelle, alors, comment fais-tu pour parler?

- B me semble qu’il n’est pas besoin de cervelle pour être éloquent!

Voilà qui est bien dit, surtout pour une fable destinée aux enfants. Déjà, Baum sous les traits de l’épouvantail, les met en garde: il existe des personnes qui veulent nous séduire par l’apparence ce qui risque de nous amener à désirer poursuivre une mauvaise fin.

Platon aurait certainement adoré cette réplique de l’épouvantail. En effet, elle décrit parfaitement, du point de vue platonicien du moins, ce qu’est un sophiste: de l’apparence, de l’éloquence et très peu de véritables questions.

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Notons dès maintenant que nous assistons depuis quelques

années à une certaine réhabilitation du mouvement sophistique. En grande partie, nous laisserons de côté cette tentative non pas qu’elle ne nous apparaisse pas favorable, mais bien parce que ce qui nous intéresse d’abord ici, c’est la perspective platonicienne sur les sophistes. D’ailleurs, dans

Pour une sagesse tragique et

son au-delà,

Gabriel Marcel mentionne clairement que pour lui,

«ces hommes n’étaient pas des philosophes.»105 En effet, la

pensée

pensante

en la

pensée pensée

recèle de nombreux dangers car dès

qu’un savoir est réduit en formules, la pensée se pervertit et devient démagogique. Mais voyons d’abord ce qu’il en était à l’époque de Platon.

Difficultés à définir un sophiste

Le tenne «sophiste», on le constate aisément dans toute l’oeuvre de Platon, est extrêmement difficile à définir. Personne ne semble s’entendre sur le terme. Même les sophistes qui se contredisent eux-mêmes sur le sujet lorsqu’ils sont mis à l’épreuve par Platon. D’ailleurs, dans

Le Sophiste

, Platon marque bien cette difficulté.

L’ÉTRANGER: Bien dit; c’est là, d’ailleurs, ton affaire, et tu en décideras au cours de !’argumentation. Mais c’est affaire à nous deux, pour entreprendre cette enquête, de commencer, à mon avis, tout de suite, par le sophiste, en essayant de trouver et clairement définir ce qu’il est. À cette heure, en effet, toi et moi ne sommes d’accord que sur son nom, mais la fonction que vise en lui ce nom pourrait bien n’être, en chacun de nous, qu’une notion toute personnelle. Or ce qui s’impose, toujours et dans toute recherche, c’est plutôt de s’entendre sur la chose même au moyen des raisons qui la définissent que de s’entendre sur le nom seulement sans se préoccuper d’une définition. Quant à la race qui fait l’objet de notre enquête, ce n’est point la tâche la plus facile de comprendre ce que

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c’est que le sophiste!106

La difficulté provient également, on s’en rend bien compte à la lecture des divers commentateurs du fait que l’on assiste à cette époque, à la naissance du mot dont l’usage n’est pas encore entièrement fixé.

À ce sujet, W.K.C. Gutherie nous mentionne107 qu’au début le terme grec

sophos

traduit généralement par «sage», était utilisé afín de désigner une qualité spirituelle ou intellectuelle acquise dans le but d’exercer un métier en particulier. Pour en donner des exemples, il suffit de penser au conducteur de chars, au musicien ou au charpentier de navires, etc.

Du vivant de Socrate, le terme vint à être employé pour désigner plus particulièrement «les éducateurs professionnels qui fournissaient une instruction aux jeunes gens et faisaient montre

à’éloquence

en plublic contre de l’argent.»108 Ce penchant pour les

devises pécuniaires leur sera d’ailleurs longuement reproché par Socrate et Platon. Les sophistes se contentaient souvent d’enseigner à des cercles restreints et lorsqu’ils faisaient des exhibitions en public, ce n’était que pour accroître leur réputation.

Dans le

Protagoras,

Platon, au cours de l’une de ses nombreuses tentatives afín de définir le sophiste, exprime bien

106 PLATON,

Le Sophiste,

traduction de A. Diès, Paris, Éditions «Les Belles Lettres», 1925,218 b-e.

107 GUTHERIE, W.K.C.,

Les sophistes,

Paris, Payot, 1976, page 35.

que l’idée de

sophos

bien qu’elle soit claire dans le cas des «métiers traditionnels», ne l’est pas vraiment pour ce qui est des supposés éducateurs.

-Dis-moi donc, qu’est-ce qu’un sophiste, à ton avis? -Pour ma part, dit-il, comme son nom l’indique, je pense que c’est quelqu’un qui s’y connaît en choses savantes. -Eh bien alors, repris-je, on peut en dire autant des peintres et des charpentiers, puisque eux aussi s’y connaissent en choses savantes; mais imagine que l’on nous demande la chose suivante: «En quel type de choses savantes les peintres s’y connaissent-ils?» Nous répondrions, je pense, qu’ils s’y connaissent dans la réalisation des images, et ainsi de suite. Mais si on nous demandait: «Mais le sophiste, en quel type de choses savantes s’y connaît-il?», que lui répondrions-nous? Dans quel type de réalisation s’y connaît-il? -Que pourrions-nous dire de lui, Socrate, sinon qu’il s’y connaît pour rendre habile à parler? -Peut- être alors, dis-je, dirions-nous vrai, sans en dire assez toutefois; en effet, cette réponse appelle une autre question: sur quel sujet le sophiste rend-il habile à parler [...]10s

«Rendre habile à parler», n’est-ce pas 1

kl’éloquence

dont il était question avec

Le magicien d’Oz

et avec Gutherie dans les pages précédentes? Si nul n’est besoin de cervelle pour être

éloquent,

il convient de se demander si cela, au fond, ne signifie

pas qu’il n’est pas nécessaire de savoir ce qu’est la Vérité et l’importance qu’elle revêt pour apparaître intelligent. Et c’est là le danger dont Platon veut nous préserver.

Pour sa part, Jacqueline De Romilly dans son oeuvre

Les

grands sophistes dans l'Athènes de Périclès

tente de réhabiliter

ces derniers; ce qui, avouons-Ie, n’est pas une tâche facile. Elle mentionne que de vouloir associer les sophistes à la sagesse est une erreur puisque cette dernière n’est pas une profession, mais un état. De plus, selon elle, ils ne sont pas non plus des philosophes car cela «suggère une patiente aspiration au vrai, plutôt qu’une

optimiste confiance en sa propre compétence.»110Ils étaient passés maître dans l’art de parler et leur profession, c’était le savoir. D’ailleurs Platon rend bien cette prétention envers le savoir dans

le

Gorgias:

SOCRATE: [...] Je souhaite lui demander quel est le pouvoir de l’art qu’il exerce, ce qu’il s’engage à faire et ce qu’il enseigne. Le reste, toute sa démonstration, donc, il la fera voir, comme tu le dis, une autre fois.

CALLICLÈS: [...] Tout à l’heure, en tout cas, il priait ses auditeurs de l’interroger sur ce qu’ils voudraient, et il affirmait en outre qu'il aurait réponse à tout. [...]

GORGIAS: [...] Et je déclare ici que personne, jamais personne, depuis bien des années, ne m’a encore posé question qui me prenne au dépourvu.

En fait, comme Platon nous le démontrera dans le reste de ce dialogue, nous remarquons qu’il est parfaitement possible de dissocier l’art de persuader de la recherche de la vérité. En fait, le danger d’être un «spécialiste du savoir», c’est au fond, de n’être spécialiste de rien du tout, si ce n’est de réussir à bien agencer les mots de manière à faire croire ce que l’on souhaite. Tout se déroule alors comme si tout n’était qu’apparence.

Ce n’est pas pour rien que Gilbert Romeyer Dherbey déplore le fait que l’histoire n’a retenu que la version de Platon et d’Aristote111 sur les sophistes. Dherbey souhaiterait tout comme De Romilly que l’on réhabilite les sophistes. Or, c’est là, selon nous, chose difficile voire impossible puisque leurs écrits ne furent pas conservés. Dherbey doit donc se rendre à l’évidence: «Comme il y a des poètes maudits, il y eut des penseurs maudits

110 DE ROMILLY, Jacqueline,

Les grands sophistes dans l ,Athènes de Périclès,

Paris, Éditions Fallois, 1988, page 19.

111 Pour Aristote, se référer principalement à:

Réfutations sophistiques,

1, 165, a21-23;

et ce furent les sophistes.»112

Cependant, pour notre part, ce que nous distinguons ici c’est que comme tout ce qui est maudit et que l’on cherche à éviter, les sophistes eurent malgré eux, une influence marquante ne serait-ce que parce que Platon, sous les traits de Socrate, a constamment cherché à s’opposer à eux. Tout comme la douleur provoquée par le mal pousse vers le Bien, tout comme notre âme se détourne du laid pour rechercher le Beau, les sophistes par leurs dires, amenèrent Platon à affiner ses questions et à aiguiser sa réflexion. Au fond, nous pensons que Platon a subi deux influences majeures: Socrate se présentant comme un but à atteindre et les sophistes, étemel moteur de sa réflexion.

Oui sont-ils?

Concrètement, la sophistique a emprunté plusieurs visages. Le sophiste le plus connu est certainement Protagoras dont Platon prétend qu’il fut le premier à revendiquer ce titre et à demander de l’argent en retour de son enseignement.

Et tu as tant confiance en toi que, toi, tu proclames en pleine lumière, publiquement, devant tous les Grecs, que tu possèdes cet art, alors que d’autres le dissimulent, tu prends le nom de sophiste, tu te déclares ouvertement maître d’éducation et de vertu et le premier, tu estimes mériter un salaire pour cela.113

L’historien Diogène Laërce dresse la liste suivante de ses ouvrages:

L’art de la contreverse, Sur la lutte, Sur les sciences,

Sur l’état des choses à l’origine, Sur ceux qui habitent dans

1,2 ROMEYER DHERBEY, Gilbert,

Les sophistes

, Paris, P.U.F., 1985, page 3. 113 PLATON,

Protagoras

, 348 e - 349 a.

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l’Hadès

et

Sur les méfaits des êtres humains

. À cela, il faut

ajouter

Sur les Dieux

et

Sur la vérité.

Malheureusement, avec seulement les titres, il est impossible de se forger une idée de leur contenu ni même de savoir sous quelle forme ils se présentaient.

Un autre sophiste qui fut important est sans conteste Gorgias auquel Platon consacre P un de ses plus volumineux dialogues. Gorgias venait de Sicile et aurait également composé plusieurs oeuvres dont

Sur le non-être

,

Oraison funèbre

et un

manuel de rhétorique.

D’ailleurs Platon se plaisait à considérer

Gorgias davantage comme un rhéteur qu’un sophiste puisque ce dernier ne prétendait même pas enseigner la vertu, il se contentait d’enseigner à parler.

SOCRATE: Mais que penses-tu alors? D’après toi, les sophistes sont-ils des maîtres de vertu, eux qui sont les seuls qui déclarent !’enseigner?

MENON: Tu sais, ce que j’apprécie le plus chez Gorgias, Socrate, c’est que tu ne T entendrais jamais faire ce genre de promesse, et de plus il se moque des autres, quand il les entend promettre cela; lui, il estime qu’il doit rendre les gens habiles à parler,114

Nous reviendrons plus particulièrement sur la rhétorique dans le présent chapitre, mais ce passage soulève déjà de nombreuses questions. Déjà, il apparaît que les sophistes n’en avait que faire de la vérité puisqu’ils se vantaient de pouvoir transformer l’argument le plus faible en l’argument le plus fort. Nous retrouvons un bel exemple de cela dans

VEuthydème

où Dionysodore ne cherche nullement à cacher la chose à Socrate.

En ce cas, repris-je [...] persuadez ce jeune homme qu’il faut aimer le savoir et pratiquer la vertu [...]

Donc, Euthydème commença à peu près comme cela, je crois:

114

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- Clinias, de deux choses l’une, quels sont les hommes qui apprennent? Les savants ou ceux qui n’apprennent rien? [...]

Pendant ce temps, Dionysodore se pencha un peu vers moi et, le visage fort souriant, à mon oreille:

- Tu sais, Socrate, dit-il, je te préviens: que le garçon réponde une chose ou l’autre, il sera réfuté.115

Ce passage démontre, selon nous, non seulement un mépris de la vérité, mais nous fournit la preuve qu’entre les sophistes, la parole, simple instrument, devient presqu’un dieu. Cette dernière leur permet bien sûr de se jouer des autres, mais surtout, leur donne l’impression de contrôler la réalité, voire le monde matériel qui les entoure.

Gorgias, malgré les apparences, va encore plus loin. Non seulement il mentionne ouvertement qu’il ne formule aucun savoir en particulier sur la vertu, mais il affirme qu’il se contente de rendre «habile à parler». H est vrai que s’il veut être conséquent avec le mépris de la vérité et du savoir qu’il exerce, il n’a d’autre choix que d’affirmer que le contrôle de la parole suffit.

Mais, cela suffit-il vraiment? Socrate ne parvient-il pas dans le

Gorgias

à confondre le sophiste (460a) en l’amenant à se prononcer sur la justice? Se contenter du contrôle du langage n’est-il pas une chose encore plus dangereuse que de se contenter des idées reçues? En effet, si la parole n’est qu’un instrument pour aider à parvenir à la vérité, que devient-elle alors entre les mains de celui qui ne s’en soucie pas? Tout comme le marteau qui peut servir à construire de magnifiques choses, et qui peut, entre de mauvaises mains, servir à tuer, n’en est-il pas de même avec la parole? Prendre le risque de tuer la quête de la vérité, voilà le véritable danger, voilà le véritable abîme devant lequel se place

les sophistes.

Finalement, mentionnons que selon Luc Brisson dans son article sur les sophistes publié dans l’oeuvre

Philosophie grecque

, seuls dix personnages peuvent être reconnus comme des sophistes: Protagoras, Gorgias, Prodicos, Hippias, Antiphon, Thrasymaque, Euthydème et Dionysodore, l’auteur des

Dissoi logoi

et Anonyme le Jamblique.

Quant à Gabriel Marcel, il est clair pour ce dernier que la philosophie se distingue des différentes spécialités par le caractère de liberté qui la caractérise. Ainsi, il est difficile de regarder le philosophe comme ayant rempli certains critères et franchi certaines épreuves. La recherche philosophique, c’est une quête infinie, c’est le défi d’aller au bout de soi-même.

Ce n’est pas pour rien que dans

Pour une sagesse tragique

et son au-delà116

, le philosophe français sent le besoin d’établir

une distinction entre le philosophe chercheur et le philosophe enseignant. Le philosophe enseignant, c’est celui qui a passé avec un certain succès certaines épreuves au bout desquelles on lui délivre un diplôme certifiant qu’il possède un certain bagage et qu’il est en mesure de le transmettre. Le danger qui guette ce philosophe enseignant, c’est justement de tendre à devenir un sophiste, c’est-à-dire d’oublier toute sa tâche d’éveilleur. C’est là, la véritable vocation du philosophe. Malheureusement, comme nous le fait remarquer Marcel, aucune épreuve ne permet de distinguer le philosophe-éveilleur du philosophe-sophiste; ce qui

116 MARCEL, Gabriel,

Pour une sagesse tragique et son au-delà

, Paris, Plon, 1968, pages 39-40

n’est pas sans inquiéter...

L’importance des sophistes

Nous avons déjà mentionné que Socrate avait une très grande préoccupation pour le mouvement sophistique. En effet, toute l’oeuvre de Platon est habitée par un combat perpétuel mené contre les sophistes. Plusieurs des dialogues platoniciens prennent même le nom de certains sophistes importants de la Grèce antique. À l’intérieur de ces dialogues, on voit souvent Socrate au prise avec les propositions que les sophistes formulaient à l’époque et auxquelles le philosophe grec oppose constamment son étemelle et impitoyable quête de la vérité. D’ailleurs, à cet égard, Barbara Gassin note dans

Du faux mensonge à la fiction™

que les nombreuses tentatives de réhabiliter les sophistes auxquelles nous avons assisté consistent principalement à valoriser ce que Platon dévalorise. Tout se passe, on le voit bien, comme si, paradoxalement, Platon ayant voulu s’opposer aux sophistes fut le principal responsable de l’importance qu’ils ont eu au cours de l’histoire.

De même, Gabriel Marcel, dans la préface de son livre

Les

hommes contre l'humain

nous explique que toute son «oeuvre

philosophique se présente toute entière comme une lutte opiniâtre menée sans relâche contre l’esprit d’abstraction.»118 Trop souvent la philosophie actuelle demeure prisonnière des mots, des abstractions. Tout cela nous éloigne de la véritable quête humaine

117 GASSIN, Barbara,

Du faux mensonge à la fiction,

dans

Le plaisir de parler,

Paris, Éditions Minuit, 1986, pages 3 à 29.

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qui est celle de la vérité. De plus, ce nominalisme où on place les

mots entre la personne et la réalité, ouvre toute grande la porte aux charlatans de tout acabit. Marcel ne s’en cache pas, le forfait collectif perpétué par le nazisme fut le point de départ de la majeure partie de son oeuvre.

De plus, à ses yeux, l’avènement de la technique ne se fit pas sans heurts. En effet, cette dernière tend à effacer la démarcation entre mystère et problème. Tout dans notre société est alors traité sous fonne de problème auquel il suffit d’accrocher sa solution. Or, ce qui intéresse le véritable philosophe, c’est le mystère de la vérité, de la beauté, de l’être, etc. Le mystère de l’universel qui nous appelle et nous enveloppe en nous amenant à réfléchir sur nous. Et ce mystère, l’esprit sophistique n’en tient pas compte.

Romain Läufer, pour sa part, mentionne dans

Système de

légitimité, marketing et sophistique

119 que les arguments qui

peuvent permettre une possible réhabilitation des sophistes, sont au nombre de trois. Premièrement, on reproche à Platon d’être l’auteur du récit de sa propre victoire. Ensuite, on effectue une lecture attentive des dialogues reprochant à Platon d’avoir, lui aussi, des procédés s’apparentant grandement à la sophistique. Et finalement, on met en évidence que sur le plan politique, la réussite des sophistes dépassa largement celle de Platon.

Cependant, Romain Läufer ne manque pas d’affirmer que, chemin faisant, s’il est nécessaire de faire tant d’efforts afin de

119 LÄUFER, Romain,

Système de légitimité, marketing et sophistique,

dans

Le plaisir de

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réhabiliter les sophistes, c’est sans doute parce que Platon et

surtout Aristote qui commanda l’assaut final, ont mis «k.O.» le mouvement sophistique. Ce qui fera dire à Barbara Cassin que «Tout se passe comme si la première sophistique avait perdu la guerre philosophique.»120

Malgré tout, comme nous le verrons à l’aide de Gabriel Marcel, il convient de se demander aujourd’hui, avec le recul, si les sophistes ont véritablement perdu la guerre philosophique que lui livrèrent Socrate, Platon et Aristote. Déjà plusieurs questions chatouillent notre esprit: ne vivons-nous pas dans la véritable ère de la sophistique? Le vingtième siècle, avec ses interminables guerres, ne risque-t-il pas de se voir attribuer par les historiens du futur, le titre de «période noire» de la pensée? La politique ne

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