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Sollicitation combinée de traction et de compression

Organisation du manuscrit

1.4. Comportement à l’échelle du matériau

1.4.2.4. Sollicitation combinée de traction et de compression

Il est courant de rencontrer, dans des structures réelles, des zones sollicitées de manière concomitante en traction et en compression. On peut, par exemple, citer le cas des âmes de poutres en I, en π ou en Té. Ce type de sollicitation peut également se rencontrer dans la table d’une poutre en Té (dans le haut de la table par exemple, la flexion transversale implique typiquement une sollicitation de traction et la flexion longitudinale une sollicitation de compression).

Cette combinaison de sollicitations peut être étudiée grâce à deux types d’essais :

- Des essais similaires à ceux qui ont été présentés pour les combinaisons de compression biaxiale ou de traction biaxiale (Kupfer et al., 1969), (Nelissen, 1972), (Elser et al., 1996), (Hussein, 1998), (Hampel et al., 2009), (Swanepoel, 2011).

- Des essais sur des panneaux armés destinés à représenter le comportement d’âmes de poutres (Robinson et Demorieux, 1977), (Vecchio et Collins, 1986), (Miyahara et al., 1987), (Mikame et al., 1991), (Belarbi et Hsu, 1995), (Fehling et al., 2011), (Lee et al., 2016).

Nous présentons les résultats de ces deux types d’essais indépendamment. Dans cette partie, on considère que la direction 1 est la direction comprimée et que la direction 2 est la direction tendue. Le coefficient de proportionnalité entre les deux directions de sollicitation est toujours considéré comme étant égal à σ12.

Compte tenu du fort écart entre la résistance en compression et la résistance en traction, une subtilité intervient dans l’exploitation des essais réalisés de manière proportionnelle. En effet, il est nécessaire d’avoir un coefficient de proportionnalité très grand pour obtenir une rupture en compression avec la présence de traction concomitante. Il peut également être difficile de déterminer le mode de rupture pour certains ratios de sollicitation.

1.4.2.4.1. Comportement des matériaux non fibrés

1.4.2.4.1.1. Essais réalisés à l’échelle du matériau

Impact d’une traction transversale sur la résistance en compression

(Kupfer, 1969) et (Nelissen, 1972) ont sollicité de manière concomitante en traction et en compression des BO. L’ensemble des essais ont été réalisés en appliquant une sollicitation proportionnelle entre les deux directions de sollicitation. Les auteurs décrivent un comportement similaire des corps d’épreuve testés : le module (dans la direction de compression) n’est pas modifié par la présence de l’effort transversal de traction mais la résistance est fortement impactée (voir Figure 86).

Page 136 sur 443 Figure 86: Gain de résistance BO sous sollicitation combinée de traction et de compression (Kupfer et al, 1969), (Nelissen,

1972)

Les résultats des campagnes expérimentales réalisées par (Hussein, 1998) et (Hampel et al., 2009) sur des BHP sont également reportés dans la Figure 86. Les études réalisées par ces auteurs permettent de mieux appréhender l’effet de la variation de la résistance en compression sur la perte de résistance en compression induite par la présence d’une sollicitation transversale de traction. Il reste cependant complexe de conclure sur l’impact de la résistance en compression sur la perte de résistance : les essais semblent montrer un comportement similaire mais le coefficient de proportionnalité entre les directions de sollicitation reste faible pour tous les essais ce qui ne permet pas de conclure de façon générale.

Lors des sollicitations combinées de traction et de compression, il est intéressant de noter que le mode de rupture (et donc le comportement général) varie fortement entre le cas où c’est la compression qui constitue la sollicitation qui mène à la rupture et celui où c’est la sollicitation de traction qui mène à la rupture. En effet, lorsque la présence de la traction concomitante est faible, le comportement peut être considéré comme un comportement de compression légèrement modifié par la présence de traction alors que lorsque l’intensité de la sollicitation de traction augmente, le comportement s’apparente à un comportement en traction modifié par la sollicitation de compression. Dans l’ensemble des essais réalisés lors des deux campagnes expérimentales, la rupture est intervenue par fissuration parallèle à la direction de compression et perpendiculaire à la direction de traction. Ce résultat est logique puisque ce profil de fissuration correspond à la fois à la rupture correspondant à l’effort de traction seul et à l’effort de compression seul. Cependant, il semble que lorsque la sollicitation de traction est importante, la rupture intervienne par l’ouverture d’une unique fissure alors que lorsque la sollicitation de traction est très faible, la rupture intervient par une multifissuration du matériau.

Impact de la compression transversale sur la résistance à la traction

Peu d’auteurs ont réalisé une étude permettant de déduire l’impact de la sollicitation de compression sur le comportement en traction (il est nécessaire d’avoir réalisé un essai mettant en œuvre uniquement la sollicitation de traction). Nous présentons ici les résultats

Page 137 sur 443 de (Hampel, 2009). Ces résultats restent cependant difficiles à exploiter puisqu’ils ont été réalisés avec un chemin de chargement proportionnel ce qui rend difficile la différentiation entre une rupture en compression impactée par la sollicitation de traction ou une rupture en traction impactée par la sollicitation de compression.

La Figure 87 présente les résultats obtenus.

Figure 87: Gain de résistance en traction (Hampel 2009)

Au regard de la Figure 87, nous ne sommes pas en mesure de conclure sur l’impact de la présence d’une sollicitation transversale de compression sur la résistance en traction d’un béton. En effet, il nous est impossible de déterminer à partir de quel coefficient de proportionnalité la rupture intervient en compression : il faut alors raisonner en compression impactée par la traction plutôt que l’inverse.

1.4.2.4.1.2. Essais réalisés sur panneaux armés

Dans le but de modéliser le comportement des âmes de poutres, des essais de sollicitations combinées compression-traction ont été menés sur des panneaux armés.

Pour l’ensemble des essais que l’on peut trouver dans la littérature, les panneaux sont armés dans la direction de traction et l’effort de traction est appliqué via ces armatures qui sont laissées en attente. Un exemple de géométrie (celle des panneaux testés par [Fehling et al., 2011]) est présenté sur la Figure 88.

Page 138 sur 443 L’effort de compression est appliqué via des appuis classiques. Certains auteurs (Robinson et Demorieux, 1977) ont placé des plaques de néoprène sur l’appui inférieur afin de libérer, dans une certaine mesure, les déplacements horizontaux en partie inférieure des corps d’épreuve et d’être plus représentatif d’une âme de poutre.

Certains auteurs chargent les panneaux de façon séquentielle en appliquant d’abord la sollicitation de traction puis la sollicitation de compression afin d’éviter la présence d’un frottement (et donc d’un frettage) trop important. D’autres auteurs préfèrent utiliser une sollicitation proportionnelle entre les deux directions de sollicitation.

La Figure 89 présente les différentes modélisations de perte de résistance en compression en fonction de la déformation concomitante de traction. Seuls (Belarbi et Hsu, 1995) distinguent les chemins de chargement (séquentiel ou proportionnel). L’ensemble des essais dont il est question ici ont été réalisés sur des panneaux constitués de BO (résistance en compression inférieure à 50 MPa). Cependant, (Fehling et al., 2008) sont les seuls à prendre en compte la résistance en compression du béton dans la détermination de la perte de résistance (sur la Figure 89, un exemple est pris pour fc = 35 MPa).

Figure 89: proposition de prise en compte de l'effet de la sollicitation transversale de traction sur la résisance en compression

Comme dans le cas des éprouvettes en béton non armé, les auteurs constatent une forte perte de résistance lorsque la déformation transversale de traction est suffisamment importante. Néanmoins, compte tenu de la présence des armatures parallèles à la direction de traction dans l’ensemble des corps d’épreuve, la perte de résistance est moins importante que dans le cas des bétons non armés (voir Figure 86). En effet, l’ensemble des auteurs s’accordent sur le fait que la perte de résistance atteint une asymptote.

Aucun des auteurs n’a étudié l’impact des caractéristiques du matériau (et notamment de la résistance en compression) sur le comportement des panneaux. Il est difficile de fournir une analyse sur cette question suite aux essais des différents auteurs : les valeurs de résistance en compression sont variables en fonction des panneaux dans les études de (Vecchio et Collins, 1986), (Miyahara et al., 1987) et (Mikame et al., 1991). Les essais de (Belarbu et Hsu, 1995) ont été menés avec un matériau ayant une résistance en compression comprise entre 55 et 60 MPa et ceux de (Fehling et al., 2008) ont une résistance d’environ 35 MPa. Ainsi, au vu de l’allure des modélisations proposées par chacun des auteurs, l’influence de la résistance en compression sur les résultats de la Figure 89 n’est pas évidente à distinguer.

Page 139 sur 443 1.4.2.4.2. Comportement des matériaux fibrés

1.4.2.4.2.1. Essais réalisés à l’échelle du matériau

Très peu d’essais mettent en œuvre une sollicitation combinée de compression et de traction sur des matériaux fibrés. Nous pouvons citer les travaux de (Elser et al., 1996) et de (Swanepoel, 2011).

Ces campagnes ont été réalisées sur des matériaux renforcés de fibres synthétiques ce qui ne facilite pas leur extrapolation aux BFUP. De plus, les conditions d’appuis des essais de (Swanepoel, 2011) ne semblent pas permettre de limiter suffisamment les effets de frettage pour que les résultats puissent être pris en compte de manière qualitative et quantitative. Aucun résultat n’est donc présenté dans cette section.

1.4.2.4.2.2. Essais réalisés sur panneaux armés

Deux campagnes expérimentales ont été menées sur des panneaux en BFUP armé soumis à une sollicitation concomitante de compression et de traction (Fehling et al., 2008), (Lee et al., 2016).

(Fehling et al, 2008) ont testé des plaques sous sollicitations concomitantes de traction et de compression. Leurs corps d’épreuve sont des plaques de dimensions 50 cm x 35 cm x 7 cm renforcées dans les deux sens de sollicitation par des armatures passives.

Les essais ont été menés sur plusieurs matériaux : un BO (C35/45 sans fibres), un BFM (C35/45 avec fibres), un BUHP (BFUP sans fibres) et un BFUP (avec 1% de fibres en volume).

Les résultats présentés dans (Fehling et al., 2008) concernent l’impact de la présence d’une déformation de traction transversale sur la résistance en compression (voir Figure 90).

Page 140 sur 443 La diminution de résistance en compression constatée lors des essais de compression simple (sans traction concomitante) est notamment due à la présence des armatures et des ancrages de traction qui impliquent une fissuration de retrait. Cette réduction est moins importante dans le cas des bétons fibrés car les fibres permettent de diminuer la fissuration qui apparait sous l’effet du retrait.

Les essais menés par (Lee et al., 2016) sont complémentaires de ceux réalisés par (Fehling et al., 2008). Les auteurs ont ainsi testé des plaques de dimensions 19 cm x 24 cm x 9 cm renforcées par armatures passives et par fibres métalliques (certaines plaques sont renforcées par armatures dans les deux directions, d’autres uniquement dans la direction de traction). Deux formulations sont testées : une première avec une résistance en compression uniaxiale d’environ 150 MPa et un volume de fibres de 1,5 % (deux tailles de fibres), et une seconde avec une résistance en compression uniaxiale de 120 MPa et un volume de fibre de 1%. Le protocole de chargement est en tout point identique à ce qui a été réalisé par (Fehling et al., 2008). Les résultats obtenus par (Fehling et al., 2008) et par (Lee et al., 2016) sont présentés sur la Figure 91.

Figure 91: Impact de la présence d'une déformation de traction sur la résistance en compression (Lee et al., 2016) (Fehling et al., 2008) proposent d’appliquer un coefficient multiplicatif dépendant de la déformation de traction transversale (exprimée en m/m) à la résistance en compression mesurée sur cylindre pour prendre en compte l’effet du caractère biaxial de la sollicitation sur la résistance en compression. Ils proposent de prendre ce coefficient égal à :

0,7 ≤ 0,9 − 80

(Lee et al., 2016) propose une modification de ce coefficient en le prenant égal à :

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