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E-   Bref état du débat sur le pluralisme juridique 67

3.   La sociologie du droit 89

Avançant toujours dans la perspective de la recherche d’un cadre théorique, nous laisserons de côté les apports des sociologues d’inspiration fonctionnaliste, de la sociologie des organisations ainsi que les approches de la sociologie marxiste pour nous centrer sur les travaux les plus prometteurs ou les plus importants dans le débat sur le pluralisme juridique. Nous retenons une théorie sociologique qui nous apparaît un apport fondamental pour notre démarche, la proposition de sociologie des ordres juridiques de Guy Rocher (a). Nous considérerons également le systémisme de Luhmann et de Teubner et ses liens avec la théorie des ordres juridiques (b).

a) La « sociologie des ordres juridiques »

Nous avons déjà présenté la conception wébérienne de l’ordre juridique et la théorie de Santi Romano. Guy Rocher propose « comme objet d’étude élargi de la sociologie juridique » l’ordre juridique qu’il définit216 de la manière suivante :

1o un ensemble de règles, de normes sont acceptées comme au moins théoriquement contraignantes par les membres d’une unité sociale particulière, qu’il s’agisse d’une nation, d’une société, d’une organisation, d’un groupe, etc.;

2o des agents ou des appareils sont reconnus dans l’unité sociale comme étant spécialisés pour :

• élaborer de nouvelles règles ou modifier celles qui existent; • interpréter les règles existantes;

• les appliquer et les faire respecter;

215 É. LE ROY, préc., note 151, p. 14.

216 Guy Rocher prend la peine de préciser « à l’intention du lecteur juriste qui serait peu familier avec la

méthodologie sociologique que la définition en sociologie est de caractère conventionnel et opératoire et l’usage qui en est fait est explicatif plutôt que normatif. […] La définition sociologique ressemble davantage à la construction de type pur de Max Weber ».

3o l’intervention des appareils ou agents est fondée sur une légitimité, c’est-à-dire que les membres de l’unité sociale considèrent que l’action de ces agents ou appareils est justifiée parce qu’ils leur reconnaissent l’autorité nécessaire pour faire ou interpréter ou appliquer les règles; concrètement cela signifie que les membres de l’unité sociale ont une conscience des rapports entre les règles et les appareils ou agents;

4o les trois fonctions énumérées en 2o peuvent être remplies par des agents ou des appareils différents ou par les mêmes. Ce qui est important cependant pour reconnaître l’existence d’un ordre juridique, c’est que ces trois fonctions – et non seulement une ou deux – soient exercées;

5o les règles et les agents ou appareils doivent faire preuve de stabilité dans le temps, d’une relative permanence. Ces règles ne doivent pas varier sans cesse et les agents être constamment relayés.217

Guy Rocher considère comme fondamentale la conception de la juridicité qui se dégage de cette définition et il écrit :

Du point de vue sociologique, ce n’est pas dans l’univers des règles elles-mêmes qu’on peut déceler ce qui distingue le juridique du non-juridique, le droit du non-droit. Ce qui fait qu’un ensemble de règles appartiennent au droit c’est qu’elles s’intègrent à un ordre juridique. Plus précisément c’est qu’elles émanent d’un agent ou organisme autorisé, qu’elles peuvent être soumises à un agent ou organisme habilité à les interpréter, qu’elles peuvent être mises en œuvre par des agents revêtus de l’autorité nécessaire pour le faire. La singularité des règles que l’on peut appeler juridiques, c’est donc qu’elles sont dotées d’un pouvoir [...] qui leur vient de l’appareil qui légitime et actualise leur potentiel normatif. La puissance normative du discours juridique repose essentiellement dans ce rapport à cet appareil qui le crée et le gère, plus particulièrement dans l’autorité reconnue à cet appareil à l’intérieur d’une unité sociale donnée.218

À la question, quelle est la source de cette autorité, Guy Rocher répond en se référant aux trois fondements de l’autorité légitime analysés par Weber : tradition, charisme et dispositions positives, à savoir « une légalité qu’on accepte de reconnaître et de respecter, par exemple, la constitution d’un État ou la charte d’une entreprise ou d’une association »219.

217 G. ROCHER, préc. note 3, p. 134-135. 218 Id., p. 136.

Guy Rocher souligne que « l’ordre juridique étatique occupe [...] une place et un statut prépondérants dans les sociétés modernes. Prenant en quelque sorte la position inverse de Griffiths, il écrit : « On peut reconnaître en lui l’archétype de tout ordre juridique. Le droit de l’État est sans doute l’ordre juridique le plus élaboré, poussé à sa mesure (ou démesure) extrême »220.

Pour Guy Rocher, le concept d’ordre juridique permet de développer « une problématique plus rigoureuse qu’on ne l’a fait jusqu’à présent de la régulation non étatique ». Il est important de noter pour avoir une idée juste du débat sur le pluralisme juridique que cette remarque a été accompagnée de commentaires sur la thèse de Jean-Guy Belley. Il écrivait que c’est à Jean-Guy Belley « que l’on doit l’analyse la plus détaillée et la plus approfondie des sources et de la problématique du pluralisme juridique »221. Jean-Guy Belley met de l’avant « pour une problématique du pluralisme juridique », l’élaboration d’une définition générique et opératoire du droit et le développement d’une problématique de la centralisation/décentralisation du droit222. En ce qui a trait à cette problématique, il soulève deux questions :

- Quelle est [...] la part respective de l’état et des autres instances de pouvoir dans la régulation des sociétés contemporaines ? [...]

- Quelle est la nature des relations entre les régulations juridiques étatiques et non- étatiques ? [...].223

Guy Rocher constatant que la perspective qu’il adopte pour une sociologie des ordres juridiques et les propositions qu’avance Belley convergent, commente ces propositions de Belley de la manière suivante :

Je crois cependant que les propositions générales de Belley demandent à être précisées et rendues opératoires par la recherche d’une problématique plus rigoureuse qu’on ne l’a

220 Id., p. 138.

221 Id., p. 145.

222 J.-G. BELLEY, préc., note 164, p. 26-51 223 Id., p. 28

fait jusqu’à présent de la régulation non étatique. C’est précisément cette voie qu’ouvre, à mon avis, le recours au concept d’ordre juridique.224

Si la sociologie des ordres juridiques ouvre la voie à « une problématique plus rigoureuse […] de la régulation non étatique », l’apport de la théorie systémique luhmannienne vient enrichir les perspectives d’analyse. Guy Rocher s’inspirant des théories systémiques de Parsons et de Luhmann considère « que tout ordre juridique peut être analysé comme un système social ». Il ajoute : « Ou peut-être mieux tout ordre juridique est un système social »225. Il établissait ce lien

au cours d’une conférence et terminait son développement sur le systémisme par l’appréciation suivante des possibilités qu’offre cette théorie :

Sans aller plus loin dans la théorisation hautement et volontairement abstraite de Luhmann (qui considère que la sociologie a besoin d’une théorie complexe, c'est-à-dire à ses yeux abstraite), je veux seulement souligner que la perspective systémique inspirée de l’œuvre très riche de Luhmann ouvre de multiples voies d’analyse à la fois de la dynamique interne du système juridique en tant que système fermé et de ses rapports multiples et complexes avec son environnement sociétal, en tant que système ouvert.226

b) Le systémisme

Comme le met en lumière Michel Coutu dans un article publié en 1997, « deux paradigmes concurrents, celui de l’action et celui du système, se disputent depuis des décennies le champ des sciences sociales contemporaines ». Il ajoute : « La sociologie du droit n’échappe pas au conflit entre les approches théoriques et méthodologiques se rattachant à l’un ou l’autre de ces concepts, encore que, à l’évidence, le paradigme interactionniste demeure largement dominant »227.

Comme le soulignait Guy Rocher, « [C]’est à Talcott Parsons qu’on doit d’avoir le premier proposé une théorie générale du « système social » en montrant comment la société et ses composantes peuvent être analysées comme des systèmes sociaux ». Il ajoutait : « La thèse

224 G. ROCHER, préc., note 3, p. 146.

225 Guy ROCHER, « Le “regard oblique” du sociologue sur le droit », dans Pierre NOREAU (dir.), Dans le

regard de l'autre, Montréal, Les Éditions Thémis, 2007, p. 57, à la page 66.

226 Id., p. 67

227 Michel COUTU, « Le pluralisme juridique chez Gunther Teubner : La nouvelle guerre des dieux ? »,

parsonienne a été reprise et poussée à un niveau d’abstraction plus élevé et plus radical par le juriste sociologue allemand Niklas Luhmann, dans l’ensemble de son œuvre »228.

Nous n’avons pas l’intention de présenter ici un exposé de la théorie sociologique des systèmes de Parsons et de Luhmann, mais de souligner les aspects de l’approche systémique luhmannienne qui peuvent apporter un éclairage au cours de notre démarche. Une collègue de la Faculté de droit, Martine Valois, a, dans sa thèse de doctorat, présenté un tel exposé229. Nous allons nous en inspirer pour présenter brièvement certains aspects fondamentaux de cette théorie (i). Nous examinerons ensuite le système juridique (ii) et dégagerons quelques éléments d’évaluation (iii).

i) Aspects fondamentaux

Martine Valois souligne ainsi le passage au systémisme luhmannien :

Alors que Parsons définit les sociétés modernes par les systèmes d’action qui les composent, Luhmann a construit sa propre théorie générale des systèmes sociaux sur la base des systèmes de communication. Pour Luhmann en effet le système social est formé de communications utilisant un mode de production autoréférentiel.230

Comme exemple de systèmes sociaux, nous pouvons citer les systèmes juridique, politique et économique; comme nous le verrons plus loin, le droit du travail est un sous-système du système juridique.

Un fondement de cette approche est la distinction système/environnement qui s’opère par la clôture opérationnelle. Le système limite ainsi les dérangements de l’environnement afin de conserver l’équilibre fonctionnel de sa structure interne.

Il est important de comprendre que le système, même s’il est ouvert sur son environnement, maintient par sa clôture cet équilibre fonctionnel; il réduit ainsi la complexité ambiante qu’il gère

228 G. ROCHER, préc., note 225, p. 66

229 Martine VALOIS, Évolution du droit et de la fonction de juger dans la tradition juridique occidentale : une

étude sociohistorique de l'indépendance judiciaire, thèse de doctorat, Montréal, Faculté des études

supérieures, Université de Montréal, 2009, p. 64-88.

à l’intérieur. La différenciation sociale très développée des sociétés occidentales modernes produit un accroissement considérable de la complexité sociale.

Les systèmes sociaux peuvent survivre à condition que la complexité n’excède pas leur capacité de traiter les choix et les informations. Le traitement se fait nécessairement par une sélection interne. Martine Valois écrit à ce sujet :

Si la clôture organisationnelle ne signifie pas isolation, il n’en demeure pas moins que c’est le système qui détermine la nature des interactions qui pourront intervenir avec l’environnement en sélectionnant uniquement les communications pertinentes à ses opérations internes.231

Luhmann identifie également le phénomène de couplage structurel entre les systèmes sociaux. Il s’agit d’un processus de connexion qui modifie la structure systémique.

ii) Le système juridique et le droit du travail

Le droit est appréhendé comme un système autonome de la société. Il se reproduit lui-même et il est autoréférentiel au sens qu’il « produit des significations seulement par référence à des procédures juridiques »232. Pour un autre grand promoteur de cette théorie des systèmes, Gunther Teubner, la globalisation ouvre la voie du pluralisme juridique car « émerge des institutions sociales fragmentées un nouveau droit vivant pour lequel une théorie du pluralisme légal est requise »233. Ce nouveau droit est alimenté par l’auto-reproduction en cours de réseaux globalisés. Teubner, à partir de sa perspective systémique, semble donc partager ce que Jean-Guy Belley appelait, lors d’un séminaire du Centre de recherche interuniversitaire sur la mondialisation et le travail, en novembre 2012, « l’intuition d’une affinité élective entre “mondialisation” et “pluralisme juridique” ».

Teubner ancre, dans la foulée de l’approche de Luhmann, son approche théorique du droit sur le système autoréférentiel plutôt que sur l’institution ou le champ social semi-autonome qui ne

231 Id., p. 82. Il est à noter que la pertinence des informations est évaluée à l’intérieur du système.

232 É. SERVERIN, préc., note 59, p. 28-29. Le terme procédure doit être compris ici dans un sens très large et

serait, à notre avis, remplacé avantageusement par « processus ».

233 Id., p. 30. Gunther TEUBNER, « Global Bukowina : Legal Pluralism in the World-Society », dans

permettrait pas, selon lui, de rendre compte de la production du droit dans les sociétés contemporaines et ne tiendrait pas compte de l’autonomie radicale du système juridique qui se caractérise par sa clôture opérationnelle234.

Les systèmes autoréférentiels se développeraient graduellement en acquérant de plus en plus d’autonomie. Teubner décrit les trois phases de ce développement, de cette « autonomisation » : d’abord ce qu’il appelle le « droit socialement diffus »235 : à ce stade, « les éléments, structures, processus et limites du discours juridique se confondent avec la communication générale de la société, [...] »; il ne s’agit pas de « système juridique au sens strict du terme [...] »236. La seconde phase, celle du « droit partiellement autonome, [...] s’enclenche lorsque le discours juridique commence à définir lui-même ses composantes systémiques et à en faire un usage opérationnel ». La phase du droit autopoïétique, la troisième, sera atteinte « lorsque les composantes systémiques du système juridique s’enchaîneront de manière hypercyclique et réciproque »237. L’auto-constitution des composantes du système induit la clôture autopoïétique.

Dans un développement éclairant, Teubner souligne que les composantes du système commencent à vivre d’une vie autonome :

Elles n’apparaissent plus dès lors comme moyens (juridiques) en vue d’une fin (sociale) mais bien comme une fin en soi [...]. Les règles juridiques deviennent les « sigles » des valeurs sociales qui les ont projetées, mais dont elles commencent à se détacher en même temps. Par conséquent la relation entre le droit et la société connaît un certain

234 Comme le signale Michel Coutu, l’ouverture à l’environnement n’est pas rejetée mais est traitée sur le

mode couplage structurel et établissement de mécanismes de liaison. M. COUTU, préc., note 227, p. 103.

235 Gunther TEUBNER, Le droit, un système autopoïétique, 1ère éd., coll. « Voies du droit », Paris, Presses

universitaires de France, 1993, p. 63.

236 Id., p. 62.

237 Id., p. 61. « Il existe une multitude de termes utilisés par les théoriciens des systèmes pour désigner la

circularité de la production systémique […]. Dans ses écrits, Luhmann fait souvent référence à l’autopoïèse, contrairement à Luhmann pour qui un système est autopoïétique, ou il ne l’est pas. Selon Teubner, l’autopoièse est la dernière phase de l’autoréférence; elle implique non seulement l’autoobservation, l’autodescription et l’autoorganisation du système, mais également l’autoproduction des éléments ». Martine VALOIS, préc., note 229, p. 84 (en note de bas de page). Teubner reprend cette approche d’autonomisation graduelle au sujet des sous-systèmes dans Gunther TEUBNER et Nathalie BOUCQUEY, Droit et réflexivité : l'auto-référence en droit et dans l'organisation, coll. « La Pensée juridique moderne », Paris, Bruxelles, LGDJ, Bruylant, 1996, p. 236.

relâchement. Il peut arriver que le droit ne réfléchisse plus toujours d’une manière adéquate les besoins et valeurs de la société.238 (notre soulignement)

Teubner souligne que ce modèle d’autonomisation est « opportun » pour analyser l’histoire et l’ethnologie du droit et peut-être encore davantage pour des études dans « l’hypothèse d’un concept pluraliste du droit »239. Il apparaît pouvoir accompagner l’histoire du droit du travail dans une perspective pluraliste. En ce qui a trait au droit du travail, Ralf Rogowski et Ton Wilthagen mettent en lumière cette autonomisation graduelle :

The concept of autonomy of labour law refers to structural condition which enable self- reference of communications. From an historical perspective the development of these structures can be described as a gradual process of autonomisation of labour law. The autonomisation can be analysed at the political, the doctrinal as well as the institutional level.240

Le modèle d’autonomisation peut être extrêmement fécond pour rendre compte de la construction de l’autonomie du droit en général et, en particulier, du droit du travail par rapport au système juridique.

Le professeur Ralf Rogowski s’est consacré à l’étude du droit du travail à l’aide de la théorie des systèmes. Examinons maintenant quelques éléments de théorie qu’il a proposés.

Selon Ralf Rogowski, le droit du travail est un sous-système du système juridique. Les relations du travail constituent un autre système social dont les négociations collectives et l’arbitrage font partie. Il souligne à l’aide de l’exemple anglais, l’importance du couplage structurel entre le système juridique et les négociations collectives : « Research has shown that the management of British collective bargaining faced obstacles in establishing viable structures precisely because

238 Id., p. 64-65.

239 Id. p. 61.

240 Ralf ROGOWSKI et Ton WILTHAGEN, « Reflexive Labour Law : An Introduction », dans Ralf

ROGOWSKI et Ton WILTHAGEN (dir.), Reflexive Labour Law Studies in Industrial Relations and

legal support was lacking »241. Nous sommes portés à penser qu’au Québec, l’arbitrage est structurellement couplé au sous-système du droit du travail.

En ce qui a trait à l’autonomie du droit du travail québécois, Michel Coutu souligne que « le droit spécial du travail constitue un droit spécial non seulement sur le plan conceptuel et normatif, mais aussi du point de vue procédural et juridictionnel ». « Ce droit, [dit-il] est avant tout forgé par un ensemble de tribunaux administratifs spécialisés, formés de décideurs experts [...] ». Après avoir rappelé que, « dans la tradition de la common law, ces tribunaux administratifs sont soumis au contrôle judiciaire des Cours supérieures [...] », il fait le constat suivant : « La fermeture autoréférentielle du droit du travail n’est donc pas complète, à la différence de ce que connaît par exemple le droit allemand ». Il précise en note :

En droit allemand, il existe une Cour suprême du travail qui rend les décisions de dernière instance en cette matière (le Bundesarbeitsgerericht) et qui est sur le même rang du point de vue constitutionnel que la Cour suprême en matière civile. On peut dire de ce fait que le droit allemand du travail est structuré de manière pleinement autonome et représente en ce sens un droit authentiquement autoréférentiel.242

Quelle évaluation peut-on faire de ces théories des systèmes ?

iii) Éléments d’évaluation

Dans son article précité de 1997, Michel Coutu soulignait la difficulté « à première vue » de concilier la réalité plurielle du droit avec la « référence au système juridique ». Il suggérait toutefois alors un filon important pour accomplir cette conciliation :

[...] il faudrait alors, à mon point de vue, admettre que tous les phénomènes juridiques ne s’y rattachent pas, qu’il existe une pluralité d’ordres juridiques dont bon nombre, sinon la quasi-totalité, ne se différencient pas du système social global, ou, le cas échéant, du

241 Ralf ROGOWSKI, « Industrial Relations, Labour Conflict Resolution and Reflexive Labour Law », dans

Ralf ROGOWSKI et Ton WILTHAGEN (dir.), Reflexive Labour Law Studies in Industrial Relations and

Employment Regulation Deventer, Kluwer Law and Taxation Publishers, 1994, p. 53-93, à la page 64.

Nous sommes portés à penser qu’au Québec l’arbitrage est structurellement couplé au sous-système du droit du travail.

242 Michel COUTU, « Le droit du travail comme ordre légitime », dans Michel COUTU et Guy ROCHER

sous-système partiel qui les sous-tend, qu’il faille leur attribuer la qualité d’un droit autopoïétique.243

Les phases de développement des systèmes d’autopoïèse dont nous avons donné un aperçu dans la subdivision précédente tracent, il nous semble, la voie de cette conciliation.

Des réserves importantes ont été formulées au sujet de l’aptitude du systémisme à donner accès à la vie du droit. Michel Coutu écrivait à ce sujet :

[...] la perspective systémique s’expose au danger, vu ses présupposés théoriques et en particulier vu la priorité accordée à la communication sur l’action sociale, de ne pas se révéler suffisamment attentive aux valeurs, aux intérêts et à la dynamique de l’interaction