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Société cantonale des tireurs fribourgeois 1831-193r

Dans le document FRIBOURG jlTKfNNES SOIXANTE-CINQUIEME ANNEE (Page 192-200)

Cette société a pu célébrer en 1931 son premier centenaire, puisque sa fondation remonte à l'année 1831. Cent ans, c'est peu de chose pour une société. Mais, si cette société a rendu service au pays, elle est en droit de revendiquer, à l'occasion de cet anniversaire, l'attention de ses membres

€t du public en général pour faire un exameii de conscience, pour se rendre compte et du chemin parcouru et des résul-tats obtenus et pour se tracer un plan de travail pour l'avenir.

L'origine de cette société cantonale de tir ne fut pas quelconque; elle se présente sous un aspect bien particu-lier et, à ce point de vue, elle mérite d'être rappelée à l'oc-casion de ce centenaire. Puis, comme toute œuvre humaine,

«lie connut des périodes de prospérité et des moments oii son activité laissa bien à désirer. y\ujourd'hui, elle se ré-jouit dans notre canton d'une extension jamais atteinte jusqu'ici, puisque dans chaque district elle est représentée par une fédération, groupant ainsi en tout 109 sociétés de tir avec un effectif d'environ 6000 tireurs. Par le crédit dont elle jouit chez nous et partout en Suisse, par le but qu'elle poursuit sans relâche, qui est de « grouper les sociétés de tir du canton, de perfectionner chez leurs sociétaires

' La plus grande partie des renseignements de cet article nous ont été gracieusement fournis par M. G. Corpataux, soUs-archiviste cantonal. Ce dévoué collaborateur a bien voulu compulser, à notre intention, de nom-breux actes officiels ainsi que les procès-verbaux de la Société de tir de la ville de Fribourg. Ce long travail lui a été facilité, en partie, par le fait que les archives de cette société sont déposées aux Archives cantonales. La So-ciété cantonale a décidé d'en faire de même des siennes. Nous profitons de l'occasion pour prier les comités des sociétés de tir du canton d'envoyer aux mêmes Archives cantonales tous leurs protocoles et souvenirs historiques.

En agissant ainsi ils conserveront à la postérité des documents qui pourront revêtir plus tard une grande importance. D' C.

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l'art du tir et de fortifier l'attachement à la patrie suisse », elle constitue un des piliers du patriotisme dans le canton de Fribourg, elle travaille à augmenter les forces défensives de notre armée, et, en cette qualité, elle a bien droit à ce que la chronique de son centenaire figure en bonne place dans les Elrennes fribourgeoises.

PREMIÈRE PÉRIODE : LA FONDATION L'existence des sociétés de tir dans le canton de Fribourg est très ancienne; il est impossible de fixer l'époque de leur apparition, car au début elles se confondaient avec les milices. Selon Bûchi, pour la ville de Fribourg, ces débuts remontent au XIVi"* siècle. Mais toutes ces sociétés, arbalétriers, archers, tireurs de boîtes, etc. menaient une vie indépendante et ne se rencontraient qu'à l'occasion de fêtes de tir. Elles ne paraissent pas avoir été groupées en une fédération. L'initiative d'un pareil groupement remonte à l'année 1831, et elle germa à Bulle, au sein de la société des Carabiniers de cette ville. Les motifs qui gui-dèrent nos fondateurs dans cette détermination sont d'ordre moral et politique I! est probable que les tireurs bullois subirent aussi une influence extérieure. L'idée d'unir en un seul faisceau les tireurs du canton leur vint peut-être de ce qu'ils avaient vu faire ailleurs. En effet, l'année 1824 avait enregistré la fondation de la Société suisse des carabiniers, suivant de près la naissance de la « Société helvétique » et de la Société des étudiants de Zofingue, fondations qui traduisaient le besoin d'un renouveau politique chez beaucoup de citoyens suisses.

Ce fut peu après que l'on vit au sein de quelques cantons se constituer des associations cantonales de tireurs.

L'exemple fut donné en 1825 par le canton de Vaud, car c'est à cette date que fut fondée la « Société vaudoise des Carabiniers». L'année suivante, en 1826; ce fut le tour d'Appenzell, Rh.-Ext. Enfin vint Fribourg, en 1831.

Mais les .motifs qui inspirèrent les fondateurs des sociétés cantonales vaudoise et fribourgeoise, malgré leur voisi-nage, ne furent pas les mêmes. La société vaudoise « avait pour but de seconder les dispositions et le perfectionnement

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-du tir à la carabine par des réunions annuelles, d'offrir aux tireurs des autres cantons de la Confédération la réciprocité d'agréments dont les" Vaudois jouissent chez eux lorsqu'ils vont les visiter, et de faire représenter les tireurs vaudois par une délégation choisie par les socié-taires, lorsqu'il y a des tirages fédéraux et cantonaux » ^.

L'on verra que les motifs invoqués par les tireurs bullois sont d'un ordre bien différent. Alors que la société canto-nale actuelle a banni de ses assemblées toute discussion de nature politique, celle de 1831 avait, au contraire, une tendance et un but essentiellement politiques. Il est vrai de dire que les circonstances de 1831 étaient bien diffé-rentes de celles d'aujourd'hui. L'année 1831 constituait la suite toute naturelle d'une longue série d'années, ca-ractérisées par une situation aussi troublée qu'instable et qui faillit conduire notre pays aux portes de l'abîme. La Suisse d'alors était dans tous les cantons le théâtre de graves événements. Fribourg, moins que tout autre, ne pouvait y échapper. La révolution, du reste toute pacifi-que, de 1830 avait fait naître chez nous bien des aspira-tions. Les districts du Lac et de la Gruyère, qui se disaient prétérités, avaient, les premiers, réclamé l'extension des droits politiques. Aussi, ne faut-il pas être surpris de cons-tater que la Société cantonale des carabiniers fribourgeois vit le jour à Bulle, le 13 juillet 1831, à l'occasion du pre-mier tir cantonal.

Les carabiniers de Bulle fureïit aussi guidés, sans aucun doute, par les événements survenus à cette époque au sein des associations fédérales à tendances patriotiques fondées peu d'années auparavant et dont il a été ques-tion ri-dessus et spécialement au sein de la Société suisse des carabiniers. Ce que l'on n'osait pas dire dans les salles des Conseils ou que l'on ne pouvait exprimer dans

les feuilles publiques que d'une manière voilée, par crainte de la censure, des orateurs populaires le disaient à la Iribune des tirs fédéraux et cantonaux avec beaucoup de franchise. Les carabiniers de Bulle qui avaient fréquenté l'un au l'autre des cincj premiers tirs fédéraux, cnLr'autres

'• Eug. Mottaz, Société vaudoise des carabiniers, etc., 1925.

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-celui de Fribourg en 1829, avaient subi l'influence de ces milieux. Ils voulurent transporter dans le domaine can-tonal ce qui les avait si favorablement impressionnés dans les « Schûtzengemeinde » des tirs fédéraux, dans l'es-poir de réaliser plus facilement leurs aspirations patrioti-ques.

Il est facile de se rendre compte de la mentalité des fon-dateurs de la société cantonale et du but qu'ils poursui-vaient. Les Archives cantonales ont conservé les statuts de cette période, et l'on y trouve aussi quelques décisions du gouvernement cantonal et certaines lettres échangées avec lui. On lit, par exemple, dans le procès-verbal de l'assemblée générale des «Carabiniers de Bulle» de 1831 des phrases comme celle-ci."

« Le but de la réunion de ce jour est la formation d'une société cantonale. A peine l'heure de notre régénération a-t-elle sonné, que toutes les intrigues se sont coalisées pour l'étouffer dans son berceau. C'est aux Carabiniers qu'est confiée la noble tâche de maintenir nos institutions.

Bulle est à peu près le centre du canton... »

Et dans une lettre que cette société écrivait le 5 mai 1831 au Conseil de la Guerre du canton de Fribourg pour solli-citer l'autorisation de faire son grand tirage de juillet 1831, nous lisons:

...« Nous avons cru que dans les temps où nous vivons, il pourrait être salutaire de former une légion d'hommes bien choisis et bien exercés, qui fussent avant tout animés d'un amour sans borne pour l'indépendance de la Patrie et pour les nouvelles institutions de notre canton, sous lesquelles nous avons enfin le bonheur de vivre et qui repousseraient victorieusement un autre 1814. »

Il ne faudrait pas croire que ce programme, cette profes-sion de foi, n'étaient que de vains mots proférés dans un moment d'enthousiasme. Les «Carabiniers de Bulle» et

le comité cantonal prenaient leur rôle bien au sérieux.

Nous en avons des preuves, entr'autres, dans une lettre que ce dernier écrivait le 9 août 1831 au Conseil d'Etat:

« L'ordre public est troublé sur plusieurs points du sol helvétique. La Patrie est menacée. Dans ces conjonctures, la Société cantonale fribourgeoise, fidèle aux engagements

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-pris, vient s'offrir à marcher volontairement pour le sou-tien de nos libertés publiques et de l'honneur national. Or-donnez, monsieur l'Avoyer et messieurs, et tous les carabi-niers du canton de Fribourg se lèveront en masse ! »

Voilà certes un fier et beau langage qui fait honneur à ceux qui le tenaient, mais qui n'eut pas le don d'émou-voir le Conseil d'Etat '-. Cependant, le gouvernement de Fribourg se montra très favorable à la nouvelle société.

C'est ainsi qu'en date du 18 mai 1831, sur rapport du Con-seil de la guerre et ensuite de pétition des « Carabiniers de Bulle», le Conseil d'Etat, «vu les avantages qu'il se promet pour le canton de l'établissement d'une société cantonale de carabiniers, accorde à la cible cantonale un prix d'hon-neur se montant à 100 fr. avec un drapeau aux armoiries du canton » ^. Le 30 juin 1831 le Conseil de la guerre trans-met au Conseil d'Etat une lettre de remercienients, pro-venant des « Carabiniers deBulle», pour le prix d'honneur et

le drapeau décernés par le gouvernement. Elle annonce que la société cantonale sera définitivement constituée le mer-credi 13 courant et manifeste le désir de voir à cette fête des représentants du gouvernement. Le Conseil d'Etat accepta cette invitation et demanda au Conseil de la guerre de désigner deux ou trois membres pour se rendre à Bulle et faire la remise du drapeau. Les délégués devaient offrir en outre, de la part du gouvernement, un vin d'honneur et 50 bouteilles de vin suisse de bonne qualité ^.

M. l'avoyer Diesbach et M. le conseiller Frôhlicher furent délégués à Bulle par le Conseil de Guerre *.

Si le gouvernement se montra bienveillant à la consti-tution d'une société cantonale, l'appel adressé par le co-mité de Bulle trouva des échos sympathiques parmi les tireurs fribourgeois. A ce moment-là et pendant de lon-gues années encore, la société cantonale ne comprenait

' Les années ne calmèrent pas l'ardeur et le zèle patriotiques du comité cantonal. C'est ainsi qu'en 1857, il invita toutes les sociétés de tir du canton à s'organiser, vu les circonstances {affaires de Prusse), en corps militaires.

Cette proposition lut adoptée en bien des endroits.

= A.E.F. Manual du Conseil d'Etat 1831, page 170.

' » Manual du Conseil d'Etat, 1831, page 286.

•• » Protocole du Conseil de la guerre, 1828-31, page 529.

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-que des tireurs isolés. La société de tir de la ville de Fri-bourg fut la première à encourager les fondateurs. - ^ Par ses procès-verbaux, nous savons que chaque sociétaire devait payer une cotisation cantonale annuelle de 10 francs.

Les renseignements sur l'assemblée générale de Bulle et sur la création de la « cantonale » font presque complète-ment défaut. On sait seulecomplète-ment qu'il y eut des jaloux, puisque quelques jours avant la date de l'assemblée et de l'ouverture du tir cantonal, on fit courir le bruit que le choléra avait éclaté à Bulle. Le journal Le Véridique, n" 82 réfute ce bruit. Il y voit « une manœuvre des ennemis de nos nouvelles conslilulions. Ne pouvant calomnier les hom-mes, dit le journal, on calomnie le choléra morbus lui-même, en le rendant responsable des ravages qui n'ont jamais existé que dans l'imagination malade de quelques atrabilaires que notre union et notre patriotisme importu-nent. Il n'existe, à Bulle, d'autre contagion que celle de

l'amour de la patrie et de nos nouvelles institutions ». On sait aussi que le lendemain de la constitution de la « can-tonale » un orage de grêle s'abattit sur la Gruyère. Le

Pré-fet du district, rentrant de Bulle, trouva là route couverte, à quelques pouces de hauteur, de grêlons gros comme des œufs... Le mugissement de la tempête, le ciel en feu, le fraqas du tonnerre offraient un spectacle affreux. A Bulle, à La Tour, des arbres entiers furent rompus et déracinés ; le bâtiment neuf des bains de Montbary ne présentait plus qu'un monceau de ruines !... etc. ^.

Le premier comiié canfona/était composé de MM. Jac-ques Savary, de Fribourg, président de la Confrérie des tireurs de Fribourg, président ; Boniface Glasson, caissier ; Louis Villard, aîné, secrétaire; Jean Michaud capitaine à

•Bulle et Charles Chatoney de Morat, député.

Une des principales préoccupations de la société était l'organisation des tirs cantonaux et la participation des tireurs fribourgeois aux tirs fédéraux et aux autres tirs cantonaux.

Les assemblées générales avaient lieu à l'occasion des tirs cantonaux. A chacun de ces tirs, il y avait une ou

1 Le tVêridiquet n» 86, du 19 VII 1831.

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-plusieurs cibles essentiellement cantonales, du reste bien dotées. L'art. 22 des statuts dit: «Tout sociétaire pourra faire tirer pour lui à la cible cantonale et aux « bonnes cibles )), mais seulement par un autre sociétaire ». Mais on ne pouvait tirer que pour un seul sociétaire et pour son propre compte.

DEUXIÈME PÉRIODE, 1833 à 1892.

Les archives de la Société cantonale, allant de l'an 1831 à 1895, ont disparu. Toutes les recherches effectuées en vue de les retrouver sont restées jusqu'ici sans résiiltat.

C'est pourquoi les renseignements sur l'activité de cette société pendant cette longue périodesonttrès rudimentaires.

Parmi les principaux événements de ces années, il y a lieu de mentionner les tirs cantonaux organisés par elle: Bulle 1831, 1835, 1850, 1873; Fribourg 1832, 1837, 1841, 1848, 1856; Morat 1833, 1843, 1852; Romont 1867. Le drapeau cantonal était toujours confié à la garde de la ville orga-nisatrice du tir cantonal qui le remettait solennellement à l'occasion du prochain tir cantonal.

Revision des statuts cantonaux de 1848. Les événements politiques de 1847 exercèrent certainement une influence sur la société cantonale. Le gouvernement conservateur de 1847 avait, à cause des menées révolutionnaires des sociétés de tir, transformées en corps francs, supprimé les sociétés de tir, et le drapeau cantonal fut caché à Bulle.

Il s'en suivit, en 1848, une revision des statuts. Les nou-veaux statuts, portent la signature de L. Pittet, conseiller d'Etat, comme président, et de H. FoUy, lieutenant de carabiniers, comme secrétaire. Ils diffèrent de ceux de 1831 en plusieurs points et spécialement dans la suppres-sion de l'article prévoyant l'appel du comité cantonal, en.

cas de danger, pour grouper sous les plis du drapeau can-tonal les sociétaires effectifs et pour prendre, de concert avec le gouvernement constitutionnel, l'attitude dictée par les circonstances. La société ne comprend toujours que des tireurs isolés. Depuis 1848 les sociétaires ne peu-vent plus tirer à la cible cantonale qu'en leur propre nom.

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-Le prédécesseur de M. Pittet à la présidence cantonale avait été le D^" Bussard, l'auteur du chant « Les bords de

la libre Sarine ».

Les renseignements qui suivent concernant cette période proviennent des archives de la société des carabiniers de la ville de Fribourg, soit du protocole des séances des tireurs de la ville de Fribourg de 1848-1857, soit de celui de 1857-1879, soit enfin de celui de

1879-1897-1851. La société de Fribourg demande au comité can-tonal de faire toutes les démarches nécessaires en vue d'obtenir pour la ville de Fribourg l'organisation du tir fédéral de 1853, ou tout au moins celui de 1855. Dans les motifs invoqués l'on constate que les préoccupations d'ordre politique n'avaient pas disparu de l'activité des tireurs fribourgeois. Voici du reste le texte de cette de-mande:

« Bien que le lieu de réunion pour le prochain tir fédéral soit à peu près décidé, nous pensons que notre démarche aura pour effet de fixer à Fribourg le tir fédéral de 1855.

D'ici alors nous aurons le temps d'organiser un accueil...

Mais, sans parler des avantages purement matériels que cette fête nationale doit procurer à notre pays, il est une autre considération de la plus haute importance pour notre avenir politique, qui, nous en sommes persuadés, vous fera entrer tout à fait dans nos vues. Vous n'ignorez pas que c'est en 1855 que doit s'opérer le renouvellement intégral de notre pouvoir législatif. Il serait donc plus important qu'il n'apparaît de prime abord, de faire coïncider avec cet acte solennel de notre souveraineté populaire la fête nationale dont il est question', sans parler encore de

l'in-fluence salutaire qu'elle doit exercer sur l'esprit public de nos populations.

1853. La société de Fribourg renouvelle sa démarche auprès du comité cantonal en vue du tir fédéral de 1855.

1855. La demande de Fribourg ne fut pas prise en consi-dération. Les Fribourgeois en furent profondément humi-liés; ils en gardèrent rancune à Soleure qui eut la préfé-rence; ils se tinrent à l'écart de ce tir et renoncèrent à présenter une nouvelle demanda. Voici ce qu'on lit dans le Répertoire des archives des tireurs de la ville de Fribourg.

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