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Journée des >?élérans fribourgeois

Dans le document FRIBOURG jlTKfNNES SOIXANTE-CINQUIEME ANNEE (Page 149-157)

de l'occupation des frontières en 1870-1871.

(Fribourg, 17 mai 1931.)

Peut-être se croyaient-ils oubliés les braves qui, il y a 60 ans, répondirent à l'appel de la Patrie pour s'en aller durant le rude hiver de «L'Année terrible», monter la garde, là-bas, aux frontières du Jura. E t pourtant, le pays s'est soiivenu de, cette date de notre histoire, en particulier, du dévouement de ces soldats de 1870-1871.

Les uns après les autres, les cantons ont tenu à fêter leurs « septante». A Fribourg, c'(^st le groupement fribour-geois de. la Fédération patriotique suisse qui eut l'idée heureuse de les rassembler. A son appel, le canton répondit d'un élan unanime, les dons de commerçants généreux affluèrent et, dans un geste qui les honore, Monseigneur Besson, évêque du diocèse de Lausanne, Genève et Fri-bourg, M. Bovet, président du gouvernement, M. von der Weid, c h e t d e la Direction militaire cantonale, M. Roger de Diesbach, colonel-divisionnaire, M. Frédéric de Week, sous-lieutenant en 1870, voulurent bien patronner l'orga-nisation de cette manifestation. C'est ainsi que put avoir lieu cette fête de famille émouvante de patriotisme vibrant autant que de belle simplicité.

Avec une bienveillance toute particulière, Messieurs les Préfets ordonnèrent le • recensement des vétérans de leurs districts, et des membres dévoués de l'Automobile-Club et du Touring-Club, sous la direction de leurs présidents, M. le lieutenant-colonel Perrier et M. le lieutenant-colonel Marro, se chargèrent de leur transport. Ceux-ci étaient encore 175, dont 6 officiers, 20 sous-officiers et 149 soldats.

Sur ce nombre 56 furent malheureusement retenus chez eux par la maladie et 119 répondirent à la gentille et pacifique mobilisation de ^Fribourg.

Le matin du 17 mai 1931, à 10 h., par une radieuse journée de printerùps où le soleil leur faisait fête, ces 119 soldats

- If

Officiers du bataillon 39

.. It. Polett. dont .1 est question dans cet article.

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-A 11 h., en la cathédrale de St-Nicolas, remplie d'une îoule immense, on célébra un office solennel. Un prêtre à l'àme ardente, un grand patriote, M. l'abbé CoUomb, officiait. Des deux côtés du chœur, se tenaient, beaux

•et émouvants, les drapeaux de nos bataillons et les nom-breuses bannières des sociétés de la ville.

Derrière les autorités, un spectacle poignant attirait tous les regards, les ^ bons vieux )> étaient là avec leurs rides,

(Phot. Macherel) Les A'étérans devant l'Hôtel cantonal.

leurs cheveux blancs, comme autant, de. monuments vi-vants de la fidélité au devoir, et ils priaient avec ferveur.

E t quand s'éleva, jouée par la « Musique de Landwehr », la Prière patriotique de Dalcroze, une émotion protonde gagna tout le monde; bien des yeux se mouillèrent et, nous pouvons le dire, jamais peut-être, comme en cette circonstance, la musique ne nous a paru un organe plus pénétrant des sentiments de l'âme.

L'Office terminé, alertes et ingambes pour la plupart, nos vétérans se rendirent en cortège sur la place de l'Hôtel cantonal. Là, dans un discours d'une haute élévation, M. Bovet, président du Conseil d'Etat, s'adressa à eux et les cita en exemple à tout le peuple présent. Puis ce fut

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la cérémonie impressionnante de la remise des médailles:

face au public, assis et alignés, les 119 vétérans, survivants des quelques 2000 hommes qui, en cet hiver glacial de 1870, avaient prêté serment au Drapeau ; vis-à-vis d'eux, sous le casque, leurs fils, leurs successeurs, les {(gris-vert»

de 1918 qui, eux aussi, ont fait leur devoir en des heures tragiques.

Tous ensemble, vivantes images des traditions de

dis-(Pliot. Macherel) H o m m a g e des soldats de 1870 à ceux de 1914.

cipline cjue, jeuiles et vieux, avaient acceptées comme règle de vie au moment du danger.

Après une minute de silence, consacrée à la mémoire des ancêtres, et le dépôt d'une couronne au pied du monu-ment des militaires décédés durant les mobilisations de 1914 à 1918, chaque «soldai de seplànte » reçut des mains d'une gracieuse demoiselle d'honneur la médaille-souvenir, qui, pour beaucoup d'entre eux, était la récompense d'une vie toute de travail, de silencieux dévouement; aussi plus d'une larme coula à ce moment solennel.

Puis, sous une forêt de drapeaux s'inclinant à leur pas-sage, sous les «bravos » d'un peuple sympathique,

enthou-- 21 ~

siaste et reconnaissant, ils partirent pour le restaurant des Merciers, où avait lieu le banquet.

Au cours du dîner, des discours furent prononcés par M. Musy, notre énergique eh aimé conseiller fédéral, qui rendit un hommage vibrant à nos vénérés soldats, M. Von der Weid, conseiller d'Etat, M. le colonel Roger de Diesbach, commandant de la 2™^ division, M. colonel Charles de Meyer, cdt de place, M. Michel, conseiller communal.

( P h o t . Macherel) Chas. R o t z e t t e r ; sgt-major Boschung; sgt Collaud, doyen des v é t é r a n s ;

t a m b o u r Hirsigt ^ ; chas. J a q u e t .

M. le colonel Jacky, de Berne, M. Remy, président du groupement de Fribourg de la Fédération patriotique suis-se, M. l'abbé Collomb, et M. le lieutenant Frédéric de Week, au nom des vétérans.

Ce fut un banquet vraiment fraternel et l'amitié nouée dans le bruit du canon, à la frontière, à la lisière d'une fo-rêt dans un petit poste de sous-officier, aux cantonnements, ou le long des routes neigeuses, donna lieu à de chaude entretiens. Que d'histoires, que de réminiscences évoquées ! Ce fut beau, mieux encore, ce fut touchant !

Le télégramme suivant fut mandé à M™® la générale Herzog, à St-Gall: «Réunis à Fribourg pour commémorer

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-3e 60™'' anniversaire de l'occupation des frontières en 1870-71, les vétérans des troupes fribourgeoises ont l'hon-neur de présenter leurs respectueux hommages à la noble Teuve de leur ancien chef, le grand général Herzog, servi-teur de la Patrie ».

Les absents ne furent point oubliés, la belle médaille d'argent, ornée d'un ruban moiré aux couleurs cantonales,

^vec, à l'avers, un carabinier et un chasseur montant la garde dans un village du Jura, sur le revers, la croix fédé-rale et les dates de 1870-71, leur fut remise, accompagnée d'une lettre par MM. les Préfets.

Le comité eut une pensée spéciale pour deux officiers domiciliés à l'étranger, le lieutenant Poletti, à New-York

et le sous-lieutenant Demierre, à Lyon. Le souvenir destiné

•au lieutenant Poletti, lui parvint par les soins de sa sœur, M™^ Cuony-Poletti, veuve du vénéré et regretté docteur

•Cuony, à Fribourg. Cet hommage rendu à son frère lui alla droit au cœur. G'est, émue et tremblante, qu'elle reçut la médaille-diplôme. Le membre de notre comité chargé de cette mission eut ainsi l'occasiorî d'assister à une émou-vante manifestation d'amour fraternel.

Quant au sous-lieutenant Demierre, c'est entouré delà -colonie suisse de Lyon, qu'il reçut sa distinction des mains de M. Meyer, notre consul.

Voici comment le correspondant à Lyon du Fribourgeois -décrit la soirée organisée en son honneur:

« Une exquise fête de famille réunissait mercredi dernier, au siège de l'Union helvétique de Lyon, une vingtaine de nos compatriotes autour de M. Beat Demierre, fondateur de l'Union et originaire de Montet (Broyé). Agé de 85 ans, M. Demierre avait participé, comme sous-lieutenant dans les troupes fribourgeoises, à l'occupation de nos frontières en 1870. Depuis lors, il s'était établi à Lyon et participa à la fondation de notre importante Société helvétique

lyonnaise et, dès ce moment, il fut le modèle du collabo-rateur dévoué, assidu et modeste. Chaque soir, et actuelle-ment encore, il vient réchauffer son'attacheactuelle-ment au pays natal au siège de l'Union, au contact de ses nombreux com-patriotes et amis et leur donne l'exemple de la fidélité, de la discipline patriotique et de la persévérance collective.

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-«En cette intime et réconfortante soirée, M. Demierre,.

entouré de MM. le consul Meyer, de M, Siegrist, président d'honneur, Petitpierre, président actif, Béguelin, secrétaire, Robadey, ancien président de la Lyre helvétique, tout le personnel dévoué du Consulat de Suisse, de nombreux amis, et des dames jetant une note agréable dans la réunion, recevait de Fribourg la médaille des vétérans des mains du dévoué président de l'Union.

« M. le Consul et M. Petitpierre eurent pour notre com-patriote de touchantes et flatteuses paroles, célébrant l'es-prit de discipline et de dévouement de ce brave vieillard qui fait l'honneur des Fribourgeois en terre étrangère..

M. Robadey, à son tour, remercia chaleureusement M. le consul, le Bureau de l'Union et toute l'assistance, pour l'ex-cellent geste de solidarité et les si belles paroles prononcées-à l'égard de M. Demierre qui, lui aussi, remercia avec émo-tion les personnalités présentes. Dans un langage simple, mais encore clair, il raconta quelques épisodes de cette mémorable campagne, où les troupes fribourgeoises firent, vaillamment leur devoir. E t la soirée fut clôturée digne-ment par la lecture du discours de M. Bovet, président du Conseil d'Etat, prononcé le 17 mai 1931 et par les chants

«Les Bords de la libre Sarine » et l'immortel « Ranz des-vaches ».

« Nous avons à cœur de remercier vivement l'autqrité fribourgeoise qui a mis beaucoup de bienveillance en nous envoyant à Lyon l'insigne et le diplôme, et cela sans retarda Son geste, ainsi que la soirée ont produit le meilleure impres-sion et prouvent que le devoir et le bienfait accomplis trouvent toujours leur récompense tôt ou tard ; de même,^

ces deux gestes nous montrent aussi qu'entre les patriotes de l'intérieur et de l'extérieur de notre chère Patrie, il existe, non seulement un contact permanent, mais l'esprit d'attachement le plus rayonnant envers la Terre natale. »

La fête des vétérans fribourgeois a laissé au coeur de nos anciens, — nous en avons la certitude •—, un lumineux souvenir.

Les nombreuses lettres de remerciement, parvenues dans-la suite au comité, en sont le témoignage éloquent. Que de-grandeur, que de beaux sentiments dans ces missives

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-•quefois simples et naïves. Ah ! les bons vieux papas, les braves gens que nos soldats de 1870 ! Que la Providence daigne nous garder longtemps encore cette cohorte de braves, évocation, de notre glorieux passé, digne exemple du devoir à accomplir.

De la journée du 17 mai 1931 se dégagent trois grandes vertus: fidélité au drapeau, respect de l'armée, service de la Patrie.

Pour que notre chère Suisse continue à progresser dans l'avenir, il faut que notre jeunesse, il faut que « ceux qui montent », cultivent ces vertus et s'inspirent du bel exem-ple de leurs pères.

L'hommage rendu à ces bons serviteurs du pays, aura raffermi les sentiments des jeunes, élevé les cœurs et

sus-«itera en eux, s'il le fallait, les mêmes dévouements, les mêmes sacrifices. . Ls. G.

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