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Chapitre II Imagerie endoscopique panoramique multispectrale : détection,

III.2 Spectroscopie bimodale : instrumentation et validations expérimentales

III.2.1 Situation du problème, applications et objectifs des travaux

Les travaux actuellement publiés sur le développement et l’application de systèmes d’instrumentation scientifique en spectroscopie bimodale d’autofluorescence et de diffusion élastique sont le fait

de quelques équipes principalement aux Etats-Unis [88, 45, 25], au Canada [122] et aux Pays-Bas [28]. Ces systèmes se composent systématiquement de trois parties principales : une sonde à multiple fibres optiques amenée au contact du tissu, un système de source d’excitation générant successivement différents pics d’excitation de fluorescence et une excitation large bande pour la diffusion élastique, et un système d’acquisition spectrométrique, le plus souvent multi-voies pour permettre l’acquisition simultanée de spectres d’intensités recueillis par plusieurs fibres op-tiques de la sonde situées à différentes distances de la fibre d’excitation (résolution spatiale). La spécificité de la configuration instrumentale (géométrie de la sonde fibrée, gamme de longueurs d’onde d’excitation, sensibilité de mesure. . . ) implique le développement et la réalisation de so-lutions dédiées dont les caractéristiques et performances dépendent notamment des technologies disponibles, des organes et des pathologies visés, des besoins de mise en œuvre in vivo voire de transfert clinique ou encore des méthodes de calibrage.

L’une des principales difficultés concerne le développement, la réalisation et le calibrage du système de source multi-excitations. Les solutions implémentées par les équipes précédemment référencées reposent essentiellement sur la combinaison d’une lampe blanche large bande et d’un monochromateur ou bien sur des systèmes plus complexes et plus coûteux combinant par exemple plusieurs excitations LASER.

Le but final de nos travaux en instrumentation est le développement et l’utilisation en clinique d’un système de spectroscopie bimodale en diffusion élastique et multiple excitations de fluores-cence facilement configurable et d’un coût limité (réalisation et maintenance). Nos objectifs ont été fixé en 4 étapes successives :

– 2003–2004 : Exploitation des outils existants et validation sur tissus biologiques ex vivo, définition des contraintes et étude de solutions techniques

III.2. Spectroscopie bimodale : instrumentation et validations expérimentales – 2005–2006 : Développement et évaluation d’une solution bimodale avec mono-excitation

d’autofluorescence, validation in vivo sur modèle tumoral animal,

– 2006–2008 : Développement et évaluation d’une solution bimodale avec multi-excitations d’autofluorescence, validation in vivo sur modèle tumoral animal,

– 2008–2011 : Réalisation d’un outil utilisable en clinique et validation in vivo sur patients

III.2.2 Travaux réalisés et résultats obtenus

III.2.2.1 Développements et réalisations en instrumentation

L’orientation de nos travaux en instrumentation débutés en 2003 s’est fondée sur les dispo-sitifs développés jusque là au CRAN – CAV (au sein du laboratoire Instrumentation Médicale Automatisée en Cancérologie IMAC, sous la responsabilité du Docteur J. Didelon) à savoir : un spectrofluorimètre portable fibré (excitation monochromatique à 410 nm, une voie d’acquisition) et une maquette de spectroscopie de diffusion élastique (2 sources d’excitation à base de Diodes Electro-Luminescentes -DEL-, une voie d’acquisition) (thèse de V. Chalau [Th6]). L’expertise de ces dispositifs a été réalisée grâce à leur mise en œuvre dans le cadre d’une première étude expérimentalemenée en 2004 sur tissus artériels ex vivo [Th2]. Nous avons ainsi pu identifier les contraintes techniques et technologiques posées par le développement d’un nouveau prototype “bimodal” et qui concernent en particulier :

– la colocalisation spatiale (sur le tissu) des excitations de fluorescence et de diffusion élastique, obligeant à injecter dans une seule et même fibre successivement des pics d’in-tensité de quelques nanomètres de largeur centrés sur des longueurs d’onde entre 350 et 450 nm et une lumière à large bande spectrale allant de 350 à 800 nm, tout en conservant une puissance incidente au tissu suffisante,

– la possibilité de capter la lumière rétro-diffusée par le tissu à plusieurs distances (entre 200 et 1700 µm) du lieu d’injection de l’excitation, nécessitant une sonde à multiples fibres optiques,

– l’acquisition simultanée des spectres d’intensités recueillis par les différentes fibres de col-lection et impliquant un dispositif spectrométrique multi-voies suffisamment sensible. Une partie des travaux de thèse d’E. Pery (2004-2005) [Th8] puis de M. Amouroux et G. Diaz (2006-2007) [Th11, Th12] a été consacrée à l’étude, au développement et à la réalisation de différentes solutions méthodologiques et techniques pour chacune des trois parties prin-cipales du dispositif : sonde de mesure fibrée, source multi-excitations et système d’acquisition spectrométrique.

Les caractéristiques techniques de la sonde à multiple fibres optiques (ouverture numérique -ON-, diamètres, nombre, nature des fibres, distances entre les fibres) sont des éléments clés qui influencent l’efficacité de collection des photons et le Rapport Signal sur Bruit (RSB) des mesures et qui dépendent des propriétés optiques du tissu visé et des profondeurs de sondage recherchées [112]. L’augmentation du diamètre des fibres ou des distances inter-fibres permet d’explorer des volumes plus profonds dans les tissus [92, 65]. Par exemple, les petites distances inter-fibres favorisent la collecte de la lumière diffusée une seule fois dans la couche épithéliale8 [14, 66] et l’augmentation de l’ON permet d’accroître l’intensité du signal de fluorescence acquis [93, 90, 127]. Par ailleurs, l’application endoscopique souhaitée implique un diamètre extérieur de sonde n’excédant pas 2 à 3 mm. Au final, la sonde réalisée d’un diamètre de 2 mm possède un maximum de fibres optiques de 200 µm de diamètre (37 au total) afin de disposer d’un grand

8. Par exemple, une distance inter-fibres de 250µm permet de sonder les tissus jusqu’à une profondeur de 100 µm aux longueurs d’onde du visible.

Chapitre III. Spectroscopies optiques in vivo : identification et caractérisation tissulaire

choix de combinaisons de distances inter-fibres (de 0.255 à 1.53 mm) en fonction des tissus. Les fibres à saut d’indice choisies en silice/silice possèdent une bande de transmission en longueur d’onde allant de 200 à 1100 nm, une ON de 0.22 et sont traitées anti-solarisation9 pour leur maintien dans l’UV. La nouvelle sonde est stérilisable et peut suivre le même processus de décontamination que les endoscopes souples.

Comme mentionné ci-avant, pour le système de génération d’excitations multiples en fluorescence et en diffusion élastique, les deux principales approches développées [88, 45, 25, 122, 28] mettent en œuvre des systèmes constitués soit d’une lampe blanche de forte puissance et d’un monochromateur, soit d’une combinaison de LASER (diodes ou à colorants) et d’une lampe blanche. Dans un premier temps, nous avons étudié une solution originale combinant une vingtaine de DEL et diodes LASER (pics d’émission de 380 à 940 nm), mais sur la base des technologies actuelles, l’efficacité d’injection de l’ensemble des faisceaux de ces différentes sources, notamment à l’aide d’un réflecteur spécialement adapté, reste un problème non résolu (cf. [Th8]). Dans un deuxième temps, nous avons donc choisi de développer un système bimodal avec mono-excitation de fluorescence associant une diode LASER à 410 nm (puissance ajustable jusqu’à 40 mW) et une source tungstène-halogène faible puissance 20W (350-2000 nm). Ce système a servi aux études expérimentales sur fantômes [RI15] et sur tissus sains et tumoraux de vessie de rats in vivo menées par E. Pery [Th8]. Dans un troisième temps, nous avons développé une méthode originale de génération d’excitations multiples de fluorescence en associant simplement une lampe Xénon 300W à arc court avec spectre d’émission étendu dans l’UV (350-1000 nm, sans émission d’ozone) et un couple de filtres optiques passe-bas et passe-haut linéairement variables. Le système développé (C++ puis Labview) permet de paramétrer entièrement une séquence d’excitations en fonction des caractéristiques des pics souhaitées (nombre et largeur) et synchronise les déplacements précis de ces filtres avec le système d’acquisition.

Le système d’acquisition doit permettre l’enregistrement simultané de plusieurs spectres (entre 10 et 20) avec une résolution spectrale de quelques nanomètres, une sensibilité suffisante pour mesurer les faibles intensités d’émission d’autofluorescence dans les bandes de longueurs d’onde d’intérêt. Les solutions développées par les principales équipes dans le domaine reposent sur la mise en œuvre d’un spectrographe imageant avec un détecteur CCD intensifié (ICCD). Dans un premier temps, nous avons étudié une solution méthodologique et technique basée sur un spectromètre mono-voie miniature (350 - 850 nm, résolution ≈ 0.3 nm) couplé à un système de déplacement rapide des fibres qui s’est révélée inadaptée à nos besoins en termes de vitesse, de robustesse (pièces mobiles) et de répétabilité (positionnement de chaque fibre). Parallèlement nous avons testé les performances d’une deuxième solution compacte couplant une caméra CCD à multiplication d’électrons (EMCCD) et un objectif de diffraction de la lumière issue de 13 fibres optiques en ligne. Les essais réalisés ont mis en évidence l’existence de problèmes non résolus de “smearing”10, de calibrage, de temps d’acquisition et de sensibilité [Th8]. Finalement, nous avons choisi une solution technique versatile reposant sur un spectromètre imageant de configuration Czerny-Turner (longueur focale 320 mm) avec 3 réseaux de diffraction, une caméra CCD rétro-éclairée (optimisée pour l’UV) et une roue à filtre interne pour couper les différentes excitations de fluorescence rétrodiffusées. Un adaptateur fibré en ligne a été spécialement conçu pour coupler notre sonde à l’entrée du spectromètre. Les détails des systèmes sont données dans [RI15, RI16, RI18] (en intégralité pages 197, 207 et 235).

9. Détérioration irréversible des caractéristiques de transmission de la silice dues aux irradiations UV intenses 10. Traînées verticales dans l’image dues au transfert des charges

III.2. Spectroscopie bimodale : instrumentation et validations expérimentales

III.2.2.2 Calibrages, validation métrologique et pré-traitements

Les éléments les plus récents relatifs à cette partie sont consultables dans [RI18] en page 235 du présent document.

Les spécificités du dispositif instrumental réalisé imposent de développer, de mettre au point et de valider des méthodes expérimentales de calibrage et de caractérisation métrologique adaptées qui concernent :

Le système d’excitation programmable :

– Un calibrage en longueur d’onde de l’excitation lumineuse générée en bout de sonde est effectué pour chaque protocole expérimental. Il consiste en un ajustement précis des positions des filtres linéaires pour obtenir les caractéristiques définies pour chaque pic d’excitation de fluorescence (longueur d’onde centrale, largeur à mi-hauteur). Les tests de répétabilité effectuées ont permis d’obtenir pour ces paramètres des variations inférieures à 0.5%.

– La puissance de chaque excitation de fluorescence est mesurée à chaque début de ma-nipulation. Le dispositif ne permet pas un réglage d’amplitude direct et par ailleurs la puissance lumineuse délivrée par la lampe Xénon diminue au fur et à mesure de son utilisation. De ce fait, dans le cas d’un protocole expérimental long, une mesure de puis-sance (photodiode calibrée) en sortie de sonde est quotidiennement effectuée pour chaque excitation de fluorescence afin de pouvoir tenir compte des variations éventuelles. Le système d’acquisition spectrométrique (sonde et spectrographe) :

– Un calibrage en amplitude est effectué régulièrement en identifiant la réponse spectrale du système. Les différents éléments constitutifs de la chaîne d’acquisition spectromé-trique (fibres, lentilles, miroirs, réseaux de diffraction, détecteur CCD) possèdent chacun leur propre réponse spectrale qui déforme le spectre d’intensité émis par le tissu. L’iden-tification de la réponse spectrale de l’ensemble consiste à injecter la lumière d’une source (tungstène) calibrée en amplitude entre 350 et 800 nm dans chacune des fibres de la sonde, à enregistrer les spectres d’intensité correspondants et à calculer les coefficients de correction à appliquer à chaque intensité en fonction de la longueur d’onde pour retrouver les valeurs de la source de calibrage [23, 25].

– Le calcul des spectres de réflectance diffuse implique l’acquisition des spectres d’intensité de diffusion élastique mesurés sur le tissu et sur un standard diffusant de réponse spectrale uniforme dans la bande 350-800 nm.

– La répétabilité des mesures évaluée sur fantômes nous a permis de valider des variations maximales d’amplitude inférieures à 5%.

Pour pouvoir traiter automatiquement, comparer et interpréter correctement les spectres d’intensités émis par les tissus, les spectres enregistrés (dits “bruts”) doivent être corrigés et débarrassés d’un certain nombre de perturbations. Les pré-traitements essentiels concernent en particulier :

– la suppression de pics parasites de très grande amplitude comparée à celle su signal, étroits (quelques nanomètres de large) et apparaissant de façon aléatoire et très épisodique. – le moyennage de plusieurs spectres bruts acquis à la suite tout en conservant une durée des

mesures compatible avec les contraintes du protocole expérimental.

– le lissage des spectres d’autofluorescence et de réflectance diffuse en fonction de leurs ca-ractéristiques propres (amplitude et largeur des bosses ou creux informatifs).

– l’application des coefficients de correction de la réponse du système (obtenus au cours de l’étape de calibrage expérimental) ce, pour chacune des voies d’acquisition.

Chapitre III. Spectroscopies optiques in vivo : identification et caractérisation tissulaire

– la normalisation des spectres de réflectance diffuse et d’autofluorescence permettant de réduire les variations inter-patients [23].