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Chapitre II Imagerie endoscopique panoramique multispectrale : détection,

III.1 Motivations, positionnement et originalités de l’approche

Pour plus de détails, se référer aux parties correspondantes des mémoires des thèses soutenues [Th8, Th11] et des articles [RI14, RI15, RI16, RI18, RN3].

Comme mentionné en B.I.1.2 page 38, l’identification et la caractérisation in vivo non invasive, précise et en temps réel, d’états tissulaires localisés représente un enjeu majeur pour améliorer l’efficacité du diagnostic (guidage biopsique), du traitement chirurgical (aide au ciblage et au contourage) et du suivi individualisé.

Au cours du processus carcinogénique, le tissu pathologique se différencie du tissu sain par de multiples modifications anatomiques, biochimiques et physiologiques à l’échelle cellu-laireet tissulaire [3, 107, 77] avec notamment : une désorganisation de l’architecture tissulaire (multiplication cellulaire anormalement élevée, épaississement de l’épithélium, infiltration des tissus voisins, néo-vascularisation, etc.), un hyper-chromatisme (épaississement et densification de la chromatine5) et un hyper-métabolisme des cellules tumorales (production augmentée de NADH6), une perte de polarité cellulaire (changement d’orientation), une augmentation de la

5. La chromatine est la substance de base des chromosomes qui associe l’ADN et des protéines fibrées impliquées dans le repliement de l’ADN

6. Le NAD, Nicotinamide Adénine Dinucléotide, est une coenzyme d’oxydo-réduction impliquée dans le méta-bolisme énergétique de la cellule (transport d’électrons), se trouvant sous forme réduite (NADH) ou phosphatée (NADPH).

Chapitre III. Spectroscopies optiques in vivo : identification et caractérisation tissulaire

taille des noyaux7, une synthèse anormale des molécules et des modifications des interactions cellulaires (perturbation du transport trans-membranaire et de la perméabilité cellulaire, activité métabolique modifiée).

Ces modifications physico-chimiques, morphologiques, structurelles et fonctionnelles, entraînent des modifications des propriétés optiques globales d’absorption et de diffusion de la lumière dans les tissus, sensibles dès les premiers développement hyperplasiques.

La spectroscopie optique tissulaire, également appelée spectroscopie optique de diagnostic in vivo voire “biopsie optique”, caractérise l’ensemble des méthodes d’acquisition et d’analyse spectrales du rayonnement émis par un tissu in situ, en réponse à une excitation lumineuse adéquate [1]. La propagation de la lumière dans les tissus biologiques entraîne différents phéno-mènes d’interaction. La diffusion élastique (sans changement de longueur d’onde) constitue le phénomène prédominant qui permet à la lumière pénétrant dans le tissu de revenir à la surface après un ou plusieurs changements de direction (diffusion simple ou multiple) et d’être mesurée. La lumière d’excitation peut également être absorbée soit par des chromophores (hémoglobine, mélanine, eau) c’est-à-dire sans ré-émission photonique, soit par des fluorophores (collagène, élastine, NADH, flavines, prophyrines. . . ) qui vont générer une émission de fluorescence à une longueur d’onde supérieure à celle de l’excitation, avant d’être détectée. Par ailleurs, des pro-cessus inélastiques produisant un décalage en longueur d’onde (diffusion Raman) peuvent être exploités. Compte tenu des gammes de longueur d’ondes d’intérêt associées (du proche UV à l’Infra-Rouge), ces techniques sont particulièrement bien adaptées à la caractérisation de tissus biologiques d’épaisseurs limitées tels que les muqueuses et la peau (détection des lésions épithé-liales et sub-épithéépithé-liales). La plupart du temps fibrées, elles sont par ailleurs compatibles avec un usage en endoscopie.

La fluorescence est porteuse d’informations liées à la nature biochimique et à l’activité métabolique du tissu et à ses modifications. Historiquement la première à avoir été mise en œuvre en clinique, la Spectroscopie d’AutoFluorescence (SAF) est aujourd’hui très développée à des fins diagnostiques in vivo en cancérologie [15]. Ses principales applications concernent la cavité buccale, l’oesophage, les bronches, le col de l’utérus, la peau et la vessie. L’exploitation et l’interprétation des résultats passent par des analyses statistiques et empiriques des spectres d’intensité de fluorescence mesurés, dont les caractéristiques spectrales sont modifiées par les contributions intriquées de l’absorption et de la diffusion qui limitent l’extractibilité d’informa-tions biochimiques quantitatives [35]. Différentes approches de modélisation sont actuellement développées pour compenser ces distortions et extraire la fluorescence “intrinsèque” du tissu [6, 29]. Afin d’exploiter les informations complémentaires liées à la localisation et à la concen-tration des divers fluorophores intrinsèques dans les tissus, quelques équipes [98, 46, 124, 122] ont développé des méthodes de spectroscopie à multiple excitations de fluorescence appliquées notamment au col de l’utérus, à la vessie et à la peau. Pour le diagnostic, le principe consiste à rechercher les combinaisons de longueurs d’onde d’excitation qui fournissent les meilleures per-formances de classification des spectres d’émission correspondants ou à analyser les différences entre les matrices d’excitation-émission obtenues pour les différents types de tissus testés.

La Spectroscopie de Diffusion Elastique (SDE), plus récemment exploitée dans le cadre du diagnostic in vivo en clinique, suscite un intérêt croissant [51, 1]. Ses principales applications en cancérologie concernent la classification de tissus sains et pré-cancéreux de l’oesophage, du sein, de la vessie et de la peau. Les diffusions simple et multiple des photons sont porteuses d’informations liées aux caractéristiques morphologiques et structurelles des constituants du tissu dont les propriétés optiques d’absorption et de diffusion façonnent les spectres d’intensité

III.1. Motivations, positionnement et originalités de l’approche rétro-diffusée par ce dernier. L’exploitation des spectres de réflectance diffuse finalement obte-nus passe d’une part, par des analyses statistiques et empiriques des caractéristiques spectrales extraites afin de rechercher des corrélations avec des états pathologiques et d’autre part, par le développement de méthodes analytiques ou statistiques de modélisation du transport de la lumière dans les tissus biologiques pour fournir des informations diagnostiques quantitatives sur leur composition (concentration en hémoglobine ou en mélanine, dimension et densité des noyaux des cellules épithéliales, valeur des coefficients optiques, etc.).

Dans la bande d’intérêt NUV-NIR, l’intensité lumineuse mesurée (spectre ou image) est donc la résultante d’une combinaison de phénomènes complémentaires d’absorption “pure”, d’absorp-tion/émission en fluorescence et de diffusions multiples, dont les contributions varient en fonction de la longueur d’onde. Quelques équipes de recherche ont ainsi montré l’intérêt de combiner plu-sieurs méthodes spectroscopiques, comme la diffusion simple ou multiple et l’autofluorescence, pour augmenter la sensibilité et la spécificité du diagnostic et donc sa fiabilité dans le cadre du diagnostic in vivo en clinique des cancers du col de l’utérus, de la cavité buccale, du sein et de la peau [88, 45, 25, 122]. Les mesures colocalisées spatialement des spectres de fluorescence et de diffusion élastique permettent notamment de corriger les spectres de fluorescence en utilisant l’information apportée par les données de réflectance diffuse ou d’extraire des caractéristiques spectrales supplémentaires et complémentaires en vue de sélectionner une combinaison la plus discriminante possible en regard du problème de classification tissulaire posé.

Nos travaux s’inscrivent dans la continuité des 2 thèses précédemment soutenues au labora-toire dans le domaine de la spectroscopie fibrée en autofluorescence par J.J. Padilla [85] (étude sur les tumeurs cutanées murines chimio-induites) et en diffusion élastique par V. Chalau [Th6]. Ce dernier a développé une maquette compacte de spectroscopie de diffusion élastique résolue spatialement et montré qu’il existe, dans la bande 600–800 nm, des différences significatives entre les spectres de diffusion recueillis in vivo sur la peau saine de rats et sur des tumeurs transplantées sous-cutanées, visibles à l’oeil nu.

Dans le cadre de notre collaboration étroite avec les cliniciens du CAV, les applications visées en cancérologie concernent prioritairement la vessie (en complémentarité avec les travaux menés en imagerie endoscopique sur ce même organe) et la peau. Nous cherchons en particulier à optimiser la sensibilité et la spécificité du diagnostic des états sain, hyperplasiques et dyspla-siques pour ces organes. Pour résoudre ce problème, l’originalité de notre approche réside dans le développement complémentaire de techniques et de méthodes :

– de mesures physiques in vivo permettant la réalisation de systèmes d’instrumentation scien-tifique précis, simples, d’un coût limité et transférables en clinique,

– de traitement et d’analyse des données spectroscopiques pour la caractérisation des para-mètres optiques des tissus (modélisation statistique) et pour la classification diagnostique (approches linéaires et non-linéaires) associée à l’extraction et la sélection de caractéris-tiques spectrales discriminantes,

– de validation expérimentale sur fantômes et sur modèles tumoraux animaux d’intérêt (pré-clinique).

Objectifs des travaux :

– Combiner spatialement les mesures d’autofluorescence (sensibles aux modifications bio-chimiques et structurales du tissu) et de diffusion élastique (sensibles aux modifications anatomiques et architecturales)

– Optimiser la qualité de l’identification diagnostique (approche multi-modalités, résolu-tion spatiale et spectrale)

Chapitre III. Spectroscopies optiques in vivo : identification et caractérisation tissulaire

(méthodes théoriques et expérimentales) pour identifier les propriétés optiques spectrales des tissus (absorption, diffusion et fluorescence intrinsèque)

– Améliorer la sensibilité et la spécificité du diagnostic (extraction de caractéristiques, classification)

– Valider les méthodes (mesures physiques et traitement des données) sur modèles précli-niques en se rapprochant de l’étiologie tumorale humaine pour permettre un transfert clinique optimal

Verrous à lever :

– Aspects métrologiques et technologiques : développement et validation d’une instrumen-tation de spectroscopie multi-modalités résolue spatialement, utilisable in vivo puis en clinique ; mise au point de méthodes de calibrage fiables

– Traitement de données : extraction de caractéristiques spectrales discriminantes pour la classification affinée d’états hyperplasiques et dysplasiques

– Modélisation des interactions lumière-tissus en fluorescence et diffusion multiple pour les milieux multi-couches, et application à l’identification des paramètres optiques de tissus biologiques