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3. Méthodologie de recherche

3.2. Recueil des données : l’analyse de l’activité du professionnel en situation

3.2.2. Situation de formation : l’analyse de pratiques

Nous nous intéressons donc en premier lieu, au déroulement réel d’une séquence d’analyse de pratiques ainsi qu’à l’activité des formateurs. Ces enregistrements vidéo constituent la base principale de notre analyse. Nous indiquons ici comment nous avons procédé pour mener notre investigation concernant les enregistrements vidéo des analyses de pratiques.

Nous avons fixé avec chaque formatrice le jour et l’heure des enregistrements. Les deux se sont déroulés en deuxième partie de matinée à 10h30. Les formatrices ont préféré prévenir elles-mêmes les étudiants en première partie de journée de l’enregistrement. De plus, la séquence d’analyse de pratiques ne débute qu’en deuxième partie de matinée d’un point de vue organisationnel. En effet, cette première partie vise à transmettre des informations aux étudiants concernant l’organisation de la journée à l’IFSI notamment. Cependant, la séquence d’analyse de pratiques animée par la formatrice Brigitte a débuté avant notre arrivée. Donc, nous ne disposons que de l’enregistrement traitant de la deuxième situation. Cela signifie que toute la partie sur la présentation des situations par chaque étudiant ainsi que les consignes n’apparaissent pas dans l’enregistrement. Nous avons choisi de l’étudier malgré tout, car Brigitte rappelle l’ensemble des situations proposées en début de séquence et celle-ci contient des éléments significatifs pour comprendre la conduite de Brigitte. De plus, les questions

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posées par des étudiants en première partie sont reprises en deuxième partie par la formatrice, cela permet de saisir une autre réalité.

Pour l’enregistrement vidéo des séquences d’analyse de pratiques, nous avons installé notre matériel pendant la pause des étudiants et à leur retour, nous leur avons présenté notre travail de recherche et recueilli leur accord pour l’enregistrement vidéo. La prise d’image a été réglée par nos soins. La caméra a été placée dans les deux cas, au fond de la salle de cours, de manière à voir les étudiants et le formateur. La majorité des apprenants étaient visibles seulement deux sont restés en dehors du champ de la caméra et concernent la séance d’analyse de pratiques animée par Brigitte. Cependant, pour ces deux cas, leur activité verbale reste identifiable et nous l’avons donc conservée pour l’analyse ultérieure. Quant à la prise de son, malgré un double enregistrement, certains propos des étudiants sont inaudibles. Par conséquent, nous avons exclu certaines unités sémantiques dans les retranscriptions.

Trois étapes de codage de la séance ont été utilisées pour l’analyse des situations de formation. Celle-ci est centrée sur l’analyse des communications (P. OLRY et N. LANG, 2005). Ces étapes se constituent de la manière suivante:

- Décomposition et codage de chaque séance en phases principales : ce découpage s’opère en fonction des changements d’action ou de communication et à partir du script sur la base des traces écrites et verbales (lors des entretiens). Le script permet de rendre compte des différentes phases du travail soit l’identification des étapes de la tâche en analyse de l’activité.

- Codage et analyse de la durée respective de chacune des phases de la séance : la durée est retranscrite en minutes et en secondes puis calculée en pourcentage. L’analyse de ces derniers met en évidence la durée relative de chaque phase par rapport aux autres. - Le codage des interactions verbales entre formateur et étudiants est estimé en fonction

du tour de parole quel que soit le changement de locuteur et de la durée de prise de parole de chacun. Le statut du tour de parole pendant le discours (si initiateur ou répondant) sera également considéré comme un critère du codage. La référence aux tours de parole permet de saisir l’évolution de fréquence des interactions verbales entre formateur et étudiants au cours des différentes étapes de la séance d’APP, selon qu’ils répondent ou qu’ils questionnent. L’autre critère est l’unité sémantique qui se définit comme toute interaction verbale ayant une signification (un contenu) particulière. Ainsi, un tour de parole peut contenir plusieurs unités sémantiques. Son

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objectif est d’obtenir une vision plus fine quant à la répartition des échanges entre formateur et étudiants selon leur statut d’initiateur ou de répondant, la forme et le contenu des interactions verbales. Afin de renseigner les formes de communications rencontrées lors des séances, chaque unité sémantique a été codée pour rendre compte de la forme du discours de chacun selon les catégories suivantes : les questions, les réponses, les consignes (ne pas juger, respecter l’opinion…), les tensions, les critiques, les oppositions, l’entraide, les interactions sociales, la validation, la clôture de séance d’APP. Enfin pour saisir la signification des propos échangés, le contenu des échanges vise à répondre à la question « de quoi parlent-ils ? ». Plusieurs niveaux de codage peuvent être identifiés.

Nous repérons la posture du formateur, les représentations qu’il a de l’agir dans ce métier, de sa relation avec les étudiants et du modèle d’apprentissage qui organise son activité. Ceci correspond aux théorèmes-en-actes qui organisent son activité et étayent les règles d’action qu’il met en œuvre.

L’objectif est de recueillir le vécu de l’activité pour la comprendre. Pour ce faire, nous avons fait verbaliser le professionnel après l’activité sur la base de l’enregistrement vidéo de la séance afin de saisir le comportement de l’acteur et l’environnement « vu par » l’acteur. Ces auto-confrontations simples se sont réalisées à distance des enregistrements vidéo : une semaine après l’enregistrement vidéo pour Agathe et deux semaines après pour Brigitte. La finalité de chaque entretien, partagée par le chercheur et les deux formatrices est la compréhension de leur activité professionnelle et de ce qui l’organise. Il s’agit de permettre au professionnel, avec les questions du chercheur, de verbaliser ses intentions, les éléments pris en compte pour agir dans la situation vécue. Chaque entretien obéit à la consigne acceptée par chaque formatrice : reconstruire l’activité de l’acteur par interactivité c’est-à-dire par un travail d’élucidation qui revient à l’initiative de l’acteur mais aussi à celle du chercheur. Cela favorise la production de connaissances pour le chercheur mais aussi pour le formateur qui analyse son activité. Le formateur est fortement impliqué puisqu’il a le vouloir et le pouvoir de partager son savoir.

Pour la formatrice Agathe, l’auto-confrontation simple a été menée sur le lieu de travail du chercheur et à sa demande explicite. Les conditions se sont révélées favorables pour cet échange. Pour la formatrice Brigitte, l’auto-confrontation simple s’est déroulée sur son lieu de travail, dans une salle de cours où il faisait chaud nous obligeant à ouvrir les fenêtres. Or cette

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salle donne sur une rue où le trafic est dense et bruyant. Les conditions ont été moins propices à l’échange. De plus, au milieu de l’entretien, une collègue formatrice de Brigitte a interrompu l’échange pour la questionner sur des polycopiés : cela a généré une réaction de colère chez Brigitte. Cet évènement a eu des répercussions sur la qualité de l’échange avec le chercheur. Brigitte avait des contraintes d’horaires et semblait pressée de terminer l’auto- confrontation simple pour honorer l’horaire fixé avec ses collègues.

L’échange entre professionnelles a eu lieu à la demande explicite de Brigitte et l’a formulée au chercheur après l’enregistrement vidéo de la séquence d’APP. Elle a parlé à l’une de ses collègues formatrice puéricultrice de son investissement dans la recherche. Sa collègue a manifesté son intérêt pour le thème de la recherche et a demandé s’il était possible d’assister à l’auto-confrontation simple. Nous avons expliqué à Brigitte que l’auto-confrontation simple se déroule exclusivement entre l’acteur et le chercheur mais que l’échange pouvait être envisagé a posteriori. Brigitte a donc informé sa collègue du jour et de l’heure de l’auto- confrontation simple et cet échange s’est planifié à la suite de l’auto-confrontation. Avant de débuter l’auto-confrontation simple, Brigitte informe le chercheur de la présence d’une deuxième collègue intéressée par le thème. Brigitte a donné son accord car elle connaît bien ses collègues et qu’elle a confiance en elles. À leur arrivée dans la salle de cours, la formatrice puéricultrice demande si l’étudiante cadre qui effectue son stage au sein de l’IFSI peut se joindre à l’échange. Brigitte et le chercheur acceptent sa participation. Après avoir donné des informations sur l’objet de la recherche et ses objectifs, des propos sur l’analyse de pratiques ont été évoqués puis nous avons visualisé l’enregistrement vidéo de la conduite de l’analyse de pratiques. Cet échange vise à repérer les préoccupations des formateurs et leur intention en lien avec l’APP. Un autre objectif s’est ajouté concernant l’activité de Brigitte : les questions de ses collègues l’ont obligé à expliciter davantage ses actions. Ces données sont donc complémentaires aux données recueillies lors de l’auto-confrontation simple. L’interactivité entre professionnelles et chercheur a été posée dès le début de l’échange. Le partage et la confrontation d’autres manières d’agir ont été acceptés par le groupe. Le cadre s’appuie sur les règles de respect et d’anonymat.

Les conditions n’étaient pas optimales dans la salle : les fenêtres ouvertes à cause de la chaleur, le bruit du trafic et la mauvaise qualité du son de la vidéo ont altéré les échanges lors de certains épisodes. Nous avons traité ce matériel avec la méthodologie de l’analyse de contenu afin de repérer les thèmes principaux.

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En plus des enregistrements, nous disposons de traces écrites de la prise de notes de la formatrice Brigitte pendant la séance d’analyse de pratiques, les documents de travail des formateurs sur la conduite de l’analyse de pratiques, la grille d’évaluation de l’analyse de pratiques écrite. Les données recueillies en-dehors de son activité alimenteront les matériaux de la vidéo sur la situation d’enregistrement. Les données recueillies lors des auto- confrontations simples seront articulées au regard de chaque phase de la séquence. Les questions du chercheur apparaissent dans les retranscriptions.

Nous présenterons d’une part, les propos de FA et de FB en situation de formation (APP) avec les étudiants et d’autre part, des traces recueillies en situation de confrontation à sa pratique avec le chercheur et ensuite avec les collègues du formateur B. Nous tenterons d’identifier les buts de l’activité réalisée ainsi que les raisons sous-jacentes à sa pratique. Cela permettra d’identifier s’il existe un écart entre la tâche prescrite par le référentiel de formation et la tâche réelle conduite par le formateur.