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Simulations du transport de déchets marins à partir de l’embouchure du

l’embouchure du Rhône et de l’Ebre

De nos jours on observe qu’une proportion importante de déchets marins d’origine terrestre est transportée vers les océans par les grands fleuves. Nous avons ainsi pu montrer que les crues du Var induites par de fortes précipitations étaient effectivement susceptibles d’expliquer en partie les forts échouages rencontrés sur la Côte d’Azur au niveau de la commune d’Antibes (cf section 4.2). Nous pouvons maintenant nous demander qu’elles sont les conséquences de ces rejets sur la distribution en mer de tels déchets. Dans son ensemble, le bassin méditerranéen accueille en fait un nombre relativement restreint de grands fleuves, qui sont représentés dans sa partie occidentale par le Rhône (France) et l’Ebre (Espagne), respectivement caractérisés par des débits moyens de 1700 m3/s et de 426 m3/s6. Jusqu’à aujourd’hui, aucune étude scientifique n’a été entreprise dans le but de quantifier les rejets de ces fleuves, ou d’évaluer leur rôle dans l’accumulation des déchets marins au sein du bassin.

Afin d’évaluer le transport des déchets flottants à partir de l’embouchure de ces deux fleuves, nous avons réalisé deux simulations différentes basées sur l’utilisation des champs de vitesse MED12v75 et du modèle de transport ARIANE. Pour chaque fleuve, un total de 1480 particules7, choisi afin d’avoir un nombre suffisant de trajectoires, est introduit chaque semaine face à l’embouchure et se retrouve advecté, à compter du 1erjanvier 2007, par la circulation de surface. La durée des simulations n’excède pas une année. D’autre part, il est important de noter que l’année 2007 présente la particularité d’avoir un gyre anticyclonique bien développé au Nord des Baléares, qui dure jusqu’à la fin de l’automne, voire le début de l’hiver.

Les résultats de ces expériences Lagrangiennes sont visibles sur les Fig. 4.8 et 4.9 pour différents temps d’advection. La position de chaque particule y est notée par un cercle dont la couleur indique la date d’introduction dans le milieu marin, celle-ci étant de plus en plus tardive au fur et à mesure que l’on passe de couleurs froides à des couleurs chaudes. Intéressons-nous dans un premier temps au Rhône. Les particules qui sont lâchées à son embouchure subissent à partir du printemps un transport rapide vers le Nord des Baléares, où elles se retrouvent en partie piégées durant l’été et l’automne dans un gyre

5. le réseau Natura 2000 est un ensemble de sites naturels européens, terrestres et marins, qui sont identifiés par la rareté et la fragilité des espèces animales et végétales qu’ils abritent. Ces sites tentent de concilier préservation de la nature et préoccupations socio-économiques. Le réseau Natura 2000 comprend en France un total de 1758 sites (source : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie). 6. données issues de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée et Corse

4.4. Simulations du transport de déchets marins à partir de l’embouchure du Rhône et

de l’Ebre 143

Figure 4.8 – Simulation de l’évolution au cours du temps de la répartition des déchets marins lâchés à l’embouchure du Rhône, et réalisée à partir de champs de vitesse MED12v75 ainsi que du modèle de transport ARIANE. L’échelle de couleurs représente la date (en nombre de jours depuis le début de la simulation) d’introduction des particules.

Figure 4.9 – Simulation de l’évolution au cours du temps de la répartition des déchets marins lâchés à l’embouchure de l’Ebre, et réalisée à partir de champs de vitesse MED12v75 ainsi que du modèle de transport ARIANE. Échelle de couleurs identique à celle de la Fig.4.8.

anticyclonique (Fig. 4.8b). D’autres particules bifurquent plus à l’Est et empruntent une branche de recirculation qui les amènent au Nord de la Corse. Suivant la période de l’année, elles peuvent suivre deux chemins distincts, soit en longeant la côte orientale de la Corse et en descendant jusque dans la mer Tyrrhénienne, soit en se dirigeant vers le Nord où elles sont transportées par le Courant Nord vers le Golfe du Lion. Dans ce cas, elles finissent alors par redescendre jusqu’au niveau des Baléares. Il est intéressant de noter qu’une partie des particules piégées dans le gyre anticyclonique présent au Nord des Baléares est ainsi capable d’effectuer un tour complet du sous-bassin Liguro-Provençal en à peu prés 8 mois, et que certaines des particules piégées mettent également plusieurs mois pour s’échapper de cette structure de courant.

A l’échelle d’une année, la Fig. 4.8d montre que les particules provenant du Rhône sont susceptibles d’occuper la majeure partie du bassin occidental, à l’exception de la mer d’Alboran, de l’Est du sous-bassin Algérien et de la mer des Baléares. L’absence relative de particules dans la mer des Baléares semble causée par la présence du gyre anticyclonique au Nord-Est de cette région qui bloque le transport des déchets marins. Ainsi, le Rhône, de par ses rejets, est susceptible de participer à la constitution des grandes zones d’accumulation du Nord-Est des Baléares et du centre de la mer Tyrrhénienne.

L’impact littoral des particules relâchées par le fleuve apparaît extrêmement important à l’Ouest du Golfe du Lion ainsi que sur les côtes catalanes espagnoles. La présence de nombreuses particules à proximité immédiate du littoral y est rapportée durant toute l’année, avec un pic en automne et en hiver (Fig. 4.8c et 4.8d). On observe d’ailleurs durant l’hiver une recrudescence du nombre de particules présentes dans le Golfe du Lion, qui agit alors comme une zone de rétention temporaire. D’autres zones côtières comme les plages de Majorque et de Minorque8, ou le littoral occidental de la Corse et de la Sardaigne, constituent également une destination privilégiée pour les particules provenant du Rhône.

D’un autre côté, l’influence du gyre anticyclonique présent au Nord des Baléares sur les trajectoires adoptées par les particules issues de l’Ebre est encore plus marquée. Ce gyre étant situé face à son embouchure, il a tendance à directement piéger un nombre important de particules et à bloquer leur transport vers l’Est (Fig. 4.9c et 4.9d). On peut également noter la présence temporaire au Nord-Ouest de Majorque (Fig. 4.9b), de début Mai à mi-Août, d’un second gyre, tournant dans le sens cyclonique, qui capture lui aussi un certain nombre de particules. Parallèlement à cela, une proportion importante des particules régulièrement introduites à l’embouchure de l’Ebre se retrouve advectée par un courant côtier longeant le littoral catalan espagnol, et remonte jusqu’à la hauteur du Golfe du Lion. La présence du gyre anticyclonique semble favoriser les échanges de déchets marins entre la côte catalane espagnole et le large (Fig. 4.9d). Le littoral situé au sud de l’embouchure paraît quant à lui moins impacté par le phénomène d’échouage.

A partir de Juin, on observe qu’une partie des particules piégées dans les gyres, ou