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1.6 Contexte et objectifs de cette thèse

1.6.2 Description de la circulation de surface

1.6.2.1 Schémas de circulation générale

De nos jours, la circulation générale dans le bassin méditerranéen est relativement bien connue puisqu’elle a fait l’objet de nombreux travaux basés sur des observations [Albérola and Millot,2003; Astraldi and Gasparini,1992,1994;Millot,1985,1999;Millot and Taupier-Letage, 2005] ou de la modélisation numérique [Béranger et al.,2005, 2004; Guihou et al., 2013; Lebeaupin Brossier et al., 2011, 2013; Molcard et al., 2002a]. Elle résulte majoritairement de la situation géographique même du bassin ainsi que du climat particulier qui le caractérise. Celui-ci, dit climat "Méditerranéen", est synonyme d’étés chauds et secs, et d’hivers doux et humides, surtout soumis à des précipitations de fortes intensités mais relativement courtes dans le temps [Tchernia, 1978]. En moyenne, il est responsable d’une importante évaporation qui n’est pas compensée par les apports en eau issus des fleuves20 et des précipitations. Le déficit hydrique qui découle de cette situation permet ainsi de considérer la Méditerranée comme un bassin d’évaporation. Malgré cela, la perte du volume d’eau constatée est compensée par les entrées d’eaux Atlantiques au niveau du détroit de Gibraltar. Ce détroit, situé entre l’Espagne et le Maroc, possède à

20. les principaux fleuves qui alimentent la Méditerranée sont le Pô (Italie), le Rhône (France), l’Ebre (Espagne) et le Nil (Egypte)

proprement parler une largeur d’à peine une dizaine de kilomètres et représente l’unique vraie zone d’échange avec des eaux extérieures au bassin [La Violette,1994b], c’est-à-dire avec des eaux d’origine Atlantique.

La circulation générale dans le bassin méditerranéen peut être plus ou moins vue comme un moteur qui transforme les eaux Atlantiques peu salées en eaux denses appelées eaux Méditerranéennes. En surface, cela se traduit par une circulation principale cyclo-nique qui longe les côtes par effet géostrophique (Fig. 1.10). La mer d’Alboran, au nord des côtes marocaines, est le point de départ de cette circulation et constitue la zone la plus énergétique du bassin. Les eaux Atlantiques qui s’y écoulent la traversent d’ouest en est en formant deux gyres21 qui tournent dans le sens anticyclonique de manière quasi-permanente (Fig. 1.11, encart b). Elles s’échappent ensuite de cette région en suivant les côtes africaines, et forment le courant Algérien qui est lui aussi très énergétique. L’insta-bilité de ce courant est d’ailleurs à l’origine de structures dynamiques particulières, telles que des méandres ou des tourbillons, qui favorisent le mélange des eaux Atlantiques avec les eaux plus chaudes et plus salées de la Méditerranée (Fig. 1.11, encart d).

Au niveau du détroit de Sicile, la circulation associée au courant Algérien se divise en plusieurs branches suivant un scénario qui n’a pu être encore clairement défini et qui alimente le débat parmi la communauté scientifique [e.g.Astraldi et al.,2002;Lermusiaux and Robinson,2001;Millot,1999;Molcard et al.,2002b]. Malgré cela, on admet en général que la veine principale issue du courant Algérien se sépare en deux branches distinctes (Fig. 1.10). La première d’entre elles franchit le détroit de Sicile vers le Sud-Est afin de combler le déficit en eau du bassin oriental. Elle traverse ainsi le sous-bassin afro-sicilien22en suivant une dynamique peu marquée en surface, puis pénètre dans le sous-bassin Levantin23, où elle finit par former un courant côtier très puissant le long du littoral égyptien et syrien. On peut noter que les travaux traitant de la circulation dans cette région de la Méditerranée sont plus tardifs que ceux ayant trait à la circulation du bassin occidental, et sont donc moins nombreux. Ils remontent principalement aux efforts du groupe POEM [1992] qui a pu montrer [Robinson and Golnaraghi, 1994] l’importance des processus de différentes échelles dans la circulation générale de cette partie de la Méditerranée. La présence de gyres permanents, semi-permanents ou transitoires a notamment été remarquée au nord du sous-bassin Levantin (Fig.1.11, encart i). Leur position et leur intensité sont fortement variables dans le temps.

La deuxième branche issue du courant Algérien bifurque quant à elle vers le nord de la Sicile et rentre en mer Tyrrhénienne (Fig. 1.10). L’activité méso-échelle de cette région marine est marquée d’une part par la présence en son centre de gyres cycloniques présentant une variabilité interannuelle [Astraldi and Gasparini,1994], et d’autre part par

21. un troisième gyre, plutôt éphémère, est parfois observé entre ces deux structures [Robles et al.,2007] 22. le sous-bassin afro-sicilien est la région de la Méditerranée coincée entre la côte Libyenne au sud, et la Sicile et la Crète au nord

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Figure 1.10 – Circulation générale de surface dans la mer Méditerranée. Adaptation du schéma de [Millot and Taupier-Letage,2005].

Figure 1.11 – Images de Température de Surface de la Mer (SST) illustrant la dynamique à méso-échelle de la circulation Méditerranéenne. Chaque encart correspond à une date et à une échelle de couleur différentes. Les couleurs froides (chaudes) renvoient à des températures de surface basses (élevées). Crédit : Isabelle Taupier-Letage

une structure tourbillonnaire située à l’Est du détroit de Bonifacio24et forcée par le vent. Les eaux provenant du détroit de Sicile restent plutôt cantonnées près de la côte italienne qu’elles remontent jusqu’au niveau de la Corse. La réunion de cette veine de courant, appelée courant Est Corse, et du courant saisonnier Ouest Corse forme alors le Courant Nord, encore appelé Courant Liguro-Provençal [Bethoux et al.,1982]. Ce courant de densité est guidé par la bathymétrie particulière du sous-bassin Liguro-provençal et suit le talus continental. Il s’écoule ainsi d’Est en Ouest jusqu’à l’archipel des Baléares où il se sépare à son tour en deux branches distinctes. Une de ces branches se dirige directement vers le détroit de Gibraltar, tandis que l’autre contourne les Baléares par le nord et forme parfois une branche de recirculation. Finalement, la région située entre les Baléares et la Sardaigne est marquée par des fronts de température et de salinité prononcés qui constituent plus ou moins une barrière entre les sous-bassins Liguro-Provençal et Algérien (Fig. 1.11).