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Similitudes planes

Dans le document Michèle Audin GÉOMÉTRIE (Page 98-103)

GÉOMÉTRIE EUCLIDIENNE PLANE

III.3. Similitudes planes

On introduit maintenant des transformations un peu plus générales que les isométries, puisqu’elles englobent aussi les homothéties, les similitudes.

Définition III.3.1. Un endomorphisme f d’un espace vectoriel euclidien est une similitudevectorielle s’il existe un réel strictement positifk, appelé rapportde la similitude, tel que, pour tout vecteur xde E,

f(x)=kx.

On l’a dit, les isométries et les homothéties sont des similitudes (attention, le rapport de similitude de l’homothétie de rapport λ est |λ|). Et d’une certaine façon, c’est tout :

Proposition III.3.2. Soit f une similitude vectorielle de rapport k. Il existe une unique isométrie vectorielle u telle quef =hk◦u.

Démonstration. Comme on a supposé k > 0, l’homothétie hk est inversible. On définit u par u = hk−1 ◦f, de sorte que u est un endomorphisme et préserve la norme.

Notons qu’en particulier les similitudes vectorielles sont bijectives. Il est clair aussi qu’elles forment un groupe.

Une similitude f est dite directe ou indirecte selon que son déterminant est positif ou négatif.

Remarque III.3.3. La définition III.3.1 donnée ici des similitudes a un sens en toute dimension et la proposition III.3.2 est vraie en toute généralité. Pour ce qui va suivre, il faut vraiment se placer dans le cas du plan.

Proposition III.3.4. Toute similitude vectorielle directe est composée d’une homo-thétie de rapport positif et d’une rotation vectorielle. Toute similitude vectorielle indirecte est composée d’une homothétie de rapport positif et d’une réflexion.

Démonstration. C’est une conséquence directe de la liste des isométries vecto-rielles planes une fois qu’on a remarqué que

d´et(hk◦u) =k2d´et(u)

et donc que u est une isométrie positive si et seulement si la similitude f est directe.

Passons maintenant aux similitudes affines. On les définit comme les applica-tions affines(4) ϕ:E → E pour lesquelles il existe un nombre réel positif ktel que, pour tous points M etN d’images M etN, on ait

MN=kM N,

ou, ce qui est équivalent, celles dont l’application linéaire associée est une simi-litude vectorielle. Bien entendu, elles sont bijectives et forment un groupe. De même, il y a des similitudes affines directes et indirectes.

Proposition III.3.5. Une similitude de E qui n’est pas une isométrie a un unique point invariant, appelé centre de la similitude.

(4)En utilisant l’exercice II.5, on voit facilement qu’il n’est pas nécessaire de demander que les applications considérées soient affines.

Démonstration. Soientϕune similitude (qui n’est pas une isométrie) et−→ϕ l’endo-morphisme associé. Comme la similitude vectorielle −→ϕ n’est pas une isométrie, son rapportkn’est pas égal à 1et elle n’a pas la valeur propre 1. On applique la proposition I.3.20 pour conclure que ϕa bien un unique point fixe.

En vectorialisant le plan affine au centre O de la similitude, on voit qu’une similitude directe qui n’est pas une isométrie est composée d’une homothétie de centreO et de rapport ket d’une rotation de centre O.

Si l’angle de la rotation est θ, on note la similitude σO,k,θ. On a évidemment, sikk = 1,

σO,k,θ◦σO,kO′′,kk,θ+θ

pour un certain point O′′, le centre de la similitude composée. La similitude réci-proque d’une similitude s’exprime par la relation

O,k,θ)−1O,k−1,−θ.

Comme pour les rotations, le nombreθ est appeléangle de la similitude.

Le groupe des similitudes directes est donc constitué des similitudes σO,k,θ (en y incluant les rotations ρO,θO,1,θ et les homothéties h(O, k) = σO,k,0) et des translations.

Propriétés des similitudes directes Voici une liste de propriétés des similitudes directes.

(1) Les similitudes directes conservent les angles orientés (puisque c’est le cas pour les homothéties et les déplacements).

(2) Elles envoient une droite Dsur une droite D telle que l’angle(D,D) soit l’angle de la similitude (modulo π).

(3) Une similitude directe de rapport k envoie un cercle de rayon R sur un cercle de rayon kR dont le centre est l’image du centre.

Construction du centre d’une similitude Étant donnés deux couples de points(A, B)et(A, B)(avecA=BetA=B), il existe une unique similitude directe qui envoieAsurA etB surB. En effet, la similitude vectorielle est bien déterminée, son rapport est AB/AB et son angle l’angle(−−→AB,−−→

AB). Si on ajoute le fait queA est l’image deA, on détermine bien une unique similitude directe (affine). Pour faire un peu de géométrie, indiquons maintenant une construction du centre de la similitude directe définie par les deux points distinctsA etB et leurs imagesA etB.

Remarquons d’abord que, si −−→AB = −−→

AB, la similitude en question est une translation. On suppose donc que−−→AB=−−→

AB. Remarquons aussi que si les droites AB et AB sont parallèles, la similitude est une homothétie et son centre est le point d’intersectionAA∩BB.

A

A

B

B O I

Figure 13

Nous pouvons donc supposer que les droites AB et AB se coupent en un point I. Le centreO de notre similitude doit satisfaire

(OA, OA)≡α modπ (α est une mesure de l’angle de la similitude).

Mais le pointI vérifie

(IA, IA) = (AB, AB)≡α mod π.

Donc, O est cocyclique avec I, A et A (sur un cercle C) et il en est de même avec I, B et B (sur un cercle C). Ces deux cercles se coupent en I et en un autre point O (figure 13) qui peut coïncider avecI. Les trianglesOAA etOBB sont semblables (les égalités d’angles indiquées sur la figure 13 se déduisent de la cocyclicité). Donc les trianglesOAB etOAB sont semblables eux aussi (voir par exemple la proposition III.3.7 ci-dessous).

Remarques III.3.6

– Les lecteurs attentifs auront remarqué que j’ai supposé que I = A, A, B etB. Les cas restants sont naturellement laissés en exercice.

– On peut montrer que les cercles C etC sont tangents si et seulement si les droitesAA etBB sont parallèles (exercice).

Utilisation des nombres complexes Comme plus haut, on identifie le plan affine àCà l’aide d’un repère orthonormé.

Les similitudes directes sont les applications de la forme z−−−→az+b.

Le rapport de cette similitude est |a|, son angle est un argument dea.

Cette écriture peut être extrêmement pratique. Donnons par exemple une dé-monstration très courte de l’utile résultat suivant :

Proposition III.3.7. Il existe une similitude directe s de centre A envoyant B sur B et C sur C si et seulement si il existe une similitude directe s de centre A envoyant B sur C etB sur C.

Démonstration. On fixe l’origine au point A. Avec des notations évidentes pour les affixes des points, l’énoncé de la proposition est tout simplement l’équivalence :

b b = c

c ⇐⇒ c b = c

b.

Remarque III.3.8. On peut bien sûr démontrer ce résultat directement, en remar-quant que, siτ est la similitude de centreA qui envoie B surC, on a

s=τ◦s=s◦τ (les similitudes de même centre commutent).

Caractérisation des similitudes Ce sont les seules applications affines qui conservent les angles, comme le montre la proposition suivante.

Proposition III.3.9. Soit P un plan vectoriel euclidien et soit f : P → P une application linéaire qui conserve les angles (resp. qui les renverse). Alors f est une similitude directe (resp. indirecte).

Démonstration. Fixons un vecteur u = 0. On compose f avec une similitude directe et on peut supposer que f(u) = u. Comme f conserve les angles, on a (u, v) = (u, f(v)) pour tout v et donc f(v) = λv (pour un λ > 0 dépendant a

priori de v). Comme d’habitude (voir le « truc » de l’exercice I.16), on conclut quef est une homothétie.

Sif renverse les angles, on la compose avec une réflexion et on applique ce qui précède.

Remarque III.3.10. On peut démontrer un résultat beaucoup plus général : toute bijection de P dans lui-même de classe C1 qui conserve les angles est une simi-litude (c’est un théorème de Liouville sur les fonctions holomorphes, voir l’exer-cice III.71).

Dans le document Michèle Audin GÉOMÉTRIE (Page 98-103)