• Aucun résultat trouvé

7. Discussion des résultats et interprétation

7.4. La socialisation professionnelle : ses temps forts et son évolution

7.4.1. Selon les professeurs des écoles stagiaires

Dès le tout début de l’année, les professeurs des écoles stagiaires attendent tout de leur école : « Nous avions besoin de tout ». Les questionnaires révèlent que les attentes des jeunes professionnels se portent tout à la fois sur l’aide morale que sur les informations, les conseils tant en pédagogie qu’en gestion de classe, le temps et la disponibilité ou une aide concernant l’organisation. De telles demandes laissent à penser qu’ils sont en réalité perdus devant la multiplicité des tâches à accomplir et qu’ils cherchent avant tout à être rassurés et sécurisés. Un

51 sentiment qui transparaît dans ces commentaires : « Je me suis sentie livrée à moi-même. », « Aujourd’hui je ne saurais pas dire ce qu’il manque, mais il est vrai que cette année est un peu déroutante par moment car nous sommes un peu “ lâchés ” dans la nature. » et dans les multiples demandes qu’ils formulent en réponse à la question 53 du questionnaire.

Leur ressenti évoque des débuts extrêmement difficiles quel que soit leur cursus antérieur (professeurs des écoles stagiaires devant valider une deuxième année de master ou en parcours adapté). L’affectation connue tardivement pour certains, la difficulté à prendre contact avec l’école d’affectation notamment en raison de sa fermeture estivale ne permettent pas de répondre à leurs interrogations et de s’organiser pour aborder la rentrée de façon sereine :

Lorsque nous recevons notre affectation, nous sommes lâchés dans la nature. Nous devons trouver les coordonnés de l'école, pour demander notre niveau (celui indiqué par les syndicats n'était pas le bon), croiser les doigts pour que le/la directeur/directrice réponde (pas évident lorsque nous avons notre affectation en juillet, pendant les vacances scolaires). J'ai eu beaucoup de chance que la directrice soit si disponible. Certains collègues PES sont arrivés le jour de la pré-rentré sans connaître leur niveau. L'accueil des PES devrait être organisé par la fac, ou que sais-je, mais pas au bon vouloir du directeur. Une pré-rentrée à la fac serait également bienvenue bien avant notre prise de poste ! Et pas 1 semaine avant... Concours ne veut pas dire savoir prendre en mains une classe. Les premiers jours sont difficiles, et la fac ne nous aide en rien, alors que nous sommes toujours en formation !

Une brèche dans le dispositif que les syndicats ont bien cernée puisqu’ils en profitent pour aborder les stagiaires et se faire connaître tout en apportant les informations dont ils disposent. Cette première rentrée est génératrice de stress et peut être un véritable choc qui marque durablement. Afin d’atténuer cet état, la qualité de l’accueil réalisé par les équipes est primordiale et principalement basée sur les qualités humaines et relationnelles selon Buhot (2007). Un point de vue qui est retrouvé dans les discours des stagiaires : « Une directrice à l’écoute de nos attentes et de nos peurs. Elle a trouvé les mots pour nous rassurer. », « L’équipe enseignante a été très rassurante et bienveillante. ». Lors de cette journée particulière de pré- rentrée, la préparation de l’accueil, sa formalisation ne semble pas requise car c’est avant tout un accueil convivial réalisé par l’ensemble de l’équipe qui est vu comme chaleureux et rassurant pour les professeurs des écoles stagiaires. Si le premier contact est généralement noué avec la personne du directeur, dès l’accueil, on voit l’émergence de l’intérêt d’une équipe dans son ensemble : « Tous les enseignants étaient présents et ont pris du temps pour répondre à nos questions. En particulier les enseignants de notre cycle pour nous aider à préparer nos premières

52 semaines. ». D’autant plus qu’à ce stade les professeurs des écoles stagiaires manquent de méthode pour effectuer leur métier et que les apports de l’ESPE sont parfois perçus comme arrivés tardivement : « Les conseils (en pédagogie, en gestion de classe) sont arrivés après la prise de poste ce qui est dommage, ils sont arrivés en période 2 surtout, par l’ESPE et dans l’école ». L’enquête réalisée en 2015-2016 révèle que lors de « La semaine de pré-rentrée, il serait important de nous donner les “ armes ” pour commencer une année plus sereine. Des aides au niveau de la préparation, des affichages obligatoires à mettre dans la classe, les progressions, les programmations. ». Un accueil de mauvaise qualité ne permet pas une entrée dans le métier satisfaisante et peut se traduire par des démissions précoces.

Lors de leur intégration commencent à se tisser des relations plus spécifiques. L’équipe dans son ensemble, si elle est soudée et prenant des décisions en collectif, devient un interlocuteur privilégié. Les stagiaires ont alors le sentiment de faire partie de cette équipe et qu’elle les accompagne dans l’entrée dans le métier. Des relations affinitaires se développent avec des collègues en particulier : « En fait ce sont les T2 qui nous ont offert leurs aides pas les anciennes ni la MAT », « Heureusement qu’une collègue bienveillante était là, sur le même niveau de classe… » y compris dans la personne du directeur d’école ou de l’ATSEM. Cependant, les personnes ressources (professeur des écoles maitre formateur présent dans l’école, conseiller pédagogique de circonscription) ne sont que peu exploitées soit parce ce qu’elles apportent une aide redondante avec celle apportée par les tuteurs de l’ESPE, soit parce qu’elles sont méconnues. En revanche, l’intégration est perçue comme plus difficile s’il existe des difficultés relationnelles au sein de l’équipe : « Difficile de s’intégrer dans une école où il n’y a pas “ d’équipe ” entre les professeurs des écoles titulaires, pas de projet mis en place entre les classes de même niveau, cycles ou au sein de l’école. », « Entre individualisme et petits clans déjà constitués depuis longtemps, il n’est pas facile de faire sa place surtout quand on sait qu’on ne restera pas. ». En effet, ils reconnaissent que les apports sont principalement transmis lors des temps de socialisation informels. L’immersion sur le terrain est ainsi plébiscitée par les étudiants alors que l’ESPE leur semble trop théorique et dans l’idéal : ils déclarent, de ce fait, avoir des difficultés à mettre les différents enseignements en cohérence.