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7. Discussion des résultats et interprétation

7.4. La socialisation professionnelle : ses temps forts et son évolution

7.4.2. Selon l’école d’affectation

Pour diverses raisons, l’accueil de ces stagiaires n’est que peu préparé en amont de leur arrivée : « L’équipe n’était pas au courant que le poste vacant était destiné à des PES. » affirme un professeur stagiaire en commentaire. Mr V., directeur arrivé dans son école en août, n’a pas réalisé le premier contact et il précise : « Au début, je ne me suis pas occupé des stagiaires, j’ai

53 géré pour que cela soit le mieux pour elles mais pas… » car sa propre prise de poste l’a beaucoup absorbé. Pour Mme B., l’ouverture d’une quatrième classe conséquemment à des inscriptions massives au printemps est responsable d’une annonce tardive de l’arrivée de professeurs des écoles qui n’a donc que peu été anticipée « Alors en fait,… les circonstances de…d’accueil de ces deux PES, … c’est fait pour nous d’une manière un peu… au départ un peu compliquée. ». Mr L. quant à lui déclarait : : « Déjà, de rôle, j’en ai pas puisque jamais personne m’a contacté en me disant vous allez avoir des PES. ».

Leur présence est globalement bien vécue par les équipes même si, par les échanges qu’elle suscite, elle peut remettre en cause les représentations de l’activité d’enseignement comme principalement solitaire comme en témoigne Mme B. :

Dans l’équipe, si vous voulez, à cette époque-là, on était trois et il y en avait une avec qui on ne s’entendait pas du tout, du tout… Qui était selon nous, après on est pas objectives, très, très individualiste… Donc déjà ça l’a fait suer de changer de classe,… elle ne voulait pas d’ouverture, Elle voulait… Voilà… Donc, euh, une fois qu’on a dit que en plus c’était des PES, alors là, c’était le pompon qui était… qui est monté très haut.

Elle ajoute ensuite : « Les PES, si vous voulez, lui compliquaient un peu la vie et puis il y a eu une corrélation aussi avec l’ouverture de la quatrième classe qui faisait qu’elle devait partager son ATSEM avec les PES… Alors là, elle a pas supporté. ». Les commentaires de cet étudiant à deux questions différentes témoignent aussi d’une évolution du rôle et des représentations de l’école d’affectation : « Nous avons dû nous “ incruster ” dans la réunion de pré-rentrée sinon elle se faisait sans nous. » puis « Nos collègues viennent plus spontanément vers nous et nous conseillent volontiers. ». L’accueil et l’intégration de professeurs des écoles stagiaires peut ainsi faire évoluer la culture professionnelle enseignante tout comme la culture d’établissement, base d’une dynamique de projet selon Dupriez (2010). Néanmoins, Mme B., directrice d’école, avance le fait que :

Quand on a chaque année une personne nouvelle, on arrive pas à faire de projet sur le long terme… et ça c’est très gênant… Il y a plein de choses qu’on envisage différemment lorsqu’on a sa classe sur plusieurs années… les commandes… On a un objectif à long terme… A la fin, quand on travaille depuis un certain temps avec des collègues, on sait comment on fonctionne après… Forcément, on a pris des habitudes de travail et ça chaque année il faut le recommencer… Donc, même si ça apporte parce que c’est sympa mais… il faut pas que ce soit trop… longtemps.

Il semblerait qu’il faille un équilibre entre le renouveau et le dynamisme créés par la présence de stagiaires au sein des écoles et la stabilité des équipes pour alimenter une démarche de projet.

54 Tout au long du processus d’intégration, les équipes apportent à ces jeunes professionnels une aide étendue en tentant de répondre à la diversité de leurs questions. L’identification à ces jeunes professionnels qu’ils ont été à un moment de leur carrière ou leur propre vécu peuvent être des guides : « Ils ne se positionnent pas en expert de pédagogie non plus, ils se positionnent en gens qui font ce métier là et qui font face aux même difficultés que toi… ». L’empathie peut également être ce qui les motive : « Evidemment qu’on va l’aider… Evidemment… C’est… Ça serait inhumain de laisser tomber quelqu’un qui veut un conseil… Enfin, je veux dire… On fait une profession de toute façon qui est tournée vers l’autre donc… ». L’intégration est là aussi vue comme favorisée par les directeurs si l’équipe est solidaire : « Oui, les autres collègues aussi aident,… l’ensemble de l’équipe… Mais je pense que c’est aussi parce que ici c’est une équipe qui parle beaucoup. Les gens aiment bien être ensemble… C’est plutôt soudé… ». Enfin, ils ont le sentiment que les professeurs des écoles stagiaires ont avant tout le besoin d’être aidés, soutenus moralement : « Elle ne se sentait pas bien donc on essayait de lui remonter le moral comme on peut le faire… », « Je parle souvent avec elle le matin pour la motiver. », « Du coup, elles nous faisaient tellement de mal les deux… à se stresser : on restait le soir… on est resté avec celle qui était dans la salle de jeux en train de se ronger les ongles… C’est dur… On avait beau les rassurer, leur dire mais si ça va aller et tout ça… Il y a une sacrée pression sur le dos des gens. ». En effet, il ressort des questionnaires que la seule aide que les professeurs des écoles stagiaires reçoivent plus qu’ils ne demandent est le soutien moral. Volonté par les équipes de se positionner en décalage par rapport à l’ESPE et d’apporter un « contenu » différent ou sous-évaluation des stagiaires d’une attente finalement peu avouable ? Dans tous les cas, les étudiants sont vus par les directeurs interrogés comme fatigués ou épuisés, sous pression : « Elle était toujours sur le pont, je ne sais pas comment elle a fait pour tenir… Franchement… De sacrées responsabilités sur les épaules et puis, plus la pression du mémoire… Moi je me dis ceux qui restent ce sont ceux qui sont motivés. ». Ils remarquent que certains ont, de plus, du mal à gérer tous les aspects du métier : aspects administratifs, préparation des cours, organisation et gestion de classe…