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Selon les circonstances d’utilisation de la voix

3. Les variations d’intensité

3.3. Selon les circonstances d’utilisation de la voix

La dose d’intensité à fournir doit s’adapter aux circonstances d’utilisation de la voix. Nous pouvons distinguer plusieurs situations :

- usage professionnel ou non de la voix : professeur, orateur, camelot, représentant de commerce, comédien, chanteur, …

- voix en plein air, au micro, dans la rue ou dans un salon

3.3.1. Usage professionnel de la voix

Certains professionnels sont amenés à utiliser leur voix pendant plusieurs heures consécutives et dans des environnements bruyants comme en plein air ou dans une salle de classe. Les enseignants, les camelots ou représentants de commerce sont dans cette situation. Ces professionnels sont souvent mal informés des risques encourus par une utilisation inadaptée de leur voix et ne sont pas conscients des efforts anormaux qu’ils font alors subir à leur larynx. De plus, ils oublient souvent de respecter les règles élémentaires de repos vocal nécessaires à la récupération des organes phonatoires.

a.

La voix de l’enseignant

Selon Christophe de Sèze26 [16] ORL et phoniatre à Paris, « près de trois-quarts du corps enseignant

montrent ou ont montré au cours de leur carrière des troubles vocaux. » La plus grande majorité souffre d’une dysphonie « dysfonctionnelle » : le larynx est intact alors que c’est la façon de l’utiliser qui est perturbée. La respiration est toujours perturbée et nous savons qu’elle joue un rôle important dans l’intensité. Les enseignants sont également soumis au stress qui représente un facteur aggravant dans les troubles vocaux. La voix représente pour eux un véritable outil de travail qui leur permet de s’imposer et d’affirmer leur autorité devant un auditoire.

Ces risques de mauvaise utilisation de la voix sont augmentés pour les professeurs de sport qui travaillent dans des lieux où les conditions acoustiques sont souvent peu idéales (extérieur, gymnase qui résonne, piscine), avec une ambiance sonore plus importante (cris des élèves, bruits liés aux activités, …). Les professeurs de sport et en particulier ceux des salles de sport ont également tendance à produire des efforts à glotte fermée avec des vocalisations associées.

b. Les orateurs

Les orateurs sont les personnes qui parlent en public. Les commerciaux, vendeurs, camelots, représentants de commerce, démarcheurs, journalistes, conférencier politiques, avocats, font partie des orateurs.

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Cependant, Arlette Osta27 [16] distingue les orateurs « qui parlent sans qu’aucun contradicteur ne vienne

interrompre leur prestation de ceux qui sont amenés à « haranguer » le public dans l’espoir de le convaincre ».

Les premiers ne seraient que rarement porteurs de troubles vocaux contrairement aux seconds.

Les derniers sont soumis à des obligations de résultats et de leur performance va dépendre leur salaire ou leur reconnaissance. Comme les enseignants, les orateurs vont particulièrement risquer de développer des troubles vocaux par malmenage vocal, mécanisme que nous décrirons dans le paragraphe II.1.1.1.

c. Les acteurs et les chanteurs

Les acteurs et les chanteurs professionnels sont amenés à avoir un usage intensif de leur voix. Durant les répétitions et les représentations, ils peuvent utiliser une voix projetée et/ou de forte intensité pendant plusieurs heures. Ils présentent donc des risques similaires aux enseignants et orateurs. En revanche, ces professionnels de la voix connaissent mieux les risques encourus par un mauvais usage de leur appareil phonatoire. Ils appliquent les conseils d’hygiène vocale et protègent mieux leur outil de travail qu’est leur voix.

d. Les choristes

Les choristes sont souvent des personnes qui pratiquent le chant comme loisir et qui ne maîtrisent pas toujours la technique vocale. Les choristes ont quelques fois tendance à « pousser » leur voix pour mieux s’entendre au milieu du chœur. L’intensité est donc souvent forte. Si le larynx n’est pas dans une position de détente, ils risquent un malmenage vocal.

3.3.2.

Selon l’auditoire

Chaque personne adapte également l’intensité de sa voix à son auditoire. L’intensité est plus forte si on s’adresse à un groupe plutôt qu’à une personne seule ou même encore si on s’adresse à soi-même.

3.3.3.

Selon l’environnement

De même, nous allons adapter l’intensité de notre voix à notre environnement direct. L’intensité sera plus forte si nous nous exprimons :

- en plein air, dans la rue plutôt qu’à l’intérieur, dans une pièce fermée. - dans une grande pièce plutôt que dans une petite pièce

- sans micro plutôt qu’avec un micro

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3.3.4. Selon la proxémie

Selon le CNRTL, la proxémie est « une discipline scientifique qui étudie l’organisation signifiante de

l’espace des différentes espèces animales et notamment de l’espèce humaine. » ou en d’autres termes,

l’étude de l’organisation sociale de l’espace entre les individus. Par extension, elle désigne l’étude des positions relatives entre interlocuteurs. En orthophonie, elle concerne essentiellement le contrôle et la régulation de la distance par rapport à autrui. E. T. Hall [10] distingue quatre distances qui comprennent chacune deux modes, un mode proche et un mode éloigné.

Figure 6. Les distances définies par la proxémie

Stéphanie Lantéri28 [43] a étudié dans son mémoire d’orthophonie intitulé, Voix et proxémie, l’altération vocale et les perturbations comportementales associées selon les différentes situations de communication chez les personnes atteintes de pathologies vocales. Nous présentons ci-dessous les caractéristiques des distances définies par E.T. Hall et en particulier, les caractéristiques vocales. En effet, la distance va avoir un impact sur les paramètres acoustiques de l’expression vocale et en particulier sur l’intensité. A partir de

28 LANTERI, 2005

DISTANCE PUBLIQUE DISTANCE SOCIALE DISTANCE PERSONNELLE DISTANCE INTIME 15 cm 40 cm 75 cm 1,25 m 2,10 m 3,60 m 7,50 m

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la distance sociale, la voix est pleine et distincte ce qui signifie que le niveau d’intensité commence à être un peu plus fort que normal.

Distance Description Caractéristiques de la voix

Intime - proche - éloigné

Corps à corps.

Vision précise brouillée.

Rôle mineur de la voix.

Manifestations vocales involontaires. Concept de « bulle », odeurs perçues.

Intimité, famille. Mi-voix. Personnelle - proche - éloigné A portée de gestes. Odeurs perçues.

Voix normale, ton familier. Limite de l’emprise physique sur autrui. Limite du

parfum, regard de pied en cap. Discussions dans la rue, sujets neutres.

Voix normale.

Sociale - proche - éloigné

Négociations impersonnelles, relations professionnelles. Communication sans contact physique. Frontières parfois matérialisées (bureau, guichet, …)

Voix pleine et distincte.

Il est établi par souci de relation hiérarchique ou de tranquillité.

Voix sensiblement plus haute que dans le mode différent.

Publique - proche - éloigné

Rôle social du locuteur.

Equilibre entre le plain-pied et la visibilité. Réunion en cercle fermé, contact prof-élèves.

Voix projetée.

L’interlocuteur est simple récepteur. Ex : hommes politiques, comédiens. Absence de feed-back.

Voix projetée. Tableau 6. Caractéristiques des distances définies par la proxémie

Dans certains cas, le niveau d’intensité associée à la proxémie n’est pas adapté. Nous pouvons par exemple citer le cas de certains enseignants. Souvent les membres de leur famille leur reprochent de parler trop fort comme s’ils étaient face à leur classe alors qu’ils sont à la maison. Ils utilisent dans ce cas un niveau d’intensité correspondant à une distance publique dans leur environnement familial qui nécessiterait d’employer un niveau d’intensité correspondant à une distance intime.

A l’inverse, dans les dysphonies et aphonies psychogènes, les patients utilisent une voix d’intensité faible dans des situations de distance publique. Chez les patients souffrant d’une dysphonie d’origine organique ou fonctionnelle, une des plaintes exprimées sera la perte d’intensité en distance publique.

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