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Chapitre 2. Les Stratégies Psycho-Educatives

2. Accompagner les personnes avec Autisme, en France

2.2. Modalités d’accompagnement et dispositifs français actuels

2.2.1. La Scolarisation

La loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (n°2005-102 du 11 février 2005) accorde une place importante à la scolarisation des personnes handicapées, enfants et adolescents. Le principe d’obligation éducative, jusque-là en vigueur depuis 1975, est modifié en faveur d’une obligation de scolarisation en milieu ordinaire. L’objectif des législateurs est alors de favoriser une complémentarité des interventions en faveur de l’élève porteur d’un handicap, notamment à travers un Projet Personnalisé de Scolarisation – PPS, élaboré avec sa famille (HAS, 2012). Les situations d’impossibilité de scolarisation en milieu ordinaire sont également prévues par

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Les personnes avec autisme ont des besoins identiques aux autres personnes (loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées).

15 Notons en décembre 2016 le lancement d’un site gouvernemental sur l’autisme, apportant des informations

ciblées, il contribue à la diffusion de l’état actuel des connaissances sur le TSA et sur les recommandations de bonnes pratiques en informant les familles et les professionnels : http://social-sante.gouv.fr/grands-dossiers/l- autisme/

61 la législation (décret n°2009-378 et arrêté du 2 avril 2009) en faveur d’une articulation spécifique entre les structures médico-sociales et l’Education Nationale (HAS, 2012).

La scolarisation est proposée en France sous différentes formes, individuelle ou collective, en milieu ordinaire, à domicile (avec les services d’enseignement à distance du CNED) ou encore dans les unités d’enseignements des établissements spécialisés (du sanitaire ou du médico-social). L’intégration d’un élève avec autisme en milieu ordinaire peut se faire avec ou sans accompagnement spécifique (intervention d’un Accompagnant d’Elève en Situation de Handicap – AESH16, par exemple).

Les enfants porteurs d’autisme peuvent bénéficier de structures et de dispositifs spécifiques (Lemonnier, 2012) tels que : les Services d’Education Spéciale et de Soins à Domicile (SESSAD), les Centres d’Action Médico-Sociale Précoce (CAMSP), les Classes d’Intégration Scolaire (CLIS), les Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire (ULIS) ou encore les Instituts Médico-Educatifs (IME).

Au-delà de l’organisation toujours assez complexe des dispositifs, l’accent est porté sur l’adaptation des moyens pédagogiques de l’Education Nationale. Encore aujourd’hui, ces dispositifs tiennent rarement compte des particularités de fonctionnement identifiées dans l’autisme et peuvent, par méconnaissances, se dresser en obstacle à la scolarisation des élèves avec TSA (Lemonnier, 2012).

Les recommandations de la HAS sont nettement en faveur des interventions éducatives, dans une approche développementale, cognitive et comportementale (HAS, 2012 ; Rogé, 2014). Pour autant, des spécialistes de la scolarisation des personnes avec autisme s’interrogent sur l’absence de l’Education Nationale dans ces recommandations. Des questionnements sont également formulés sur le monopole ressenti du corps médical vis-à-vis de l’approche éducative dans l’autisme, au détriment des enseignants (Philip, 2014a).

Le constat des difficultés à déployer dans les rangs de l’Education Nationale les principes issus des approches recommandées dans l’autisme est fréquent. Les fondamentaux du programme TEACCH et de l’approche ABA sont nécessaires pour enseigner aux élèves avec TSA, les enseignants, spécialisés ou non, devraient pouvoir les intégrer, sans dépendre

16 Les professionnels AESH peuvent préparer un nouveau diplôme d’accompagnant qui a été créé le 29 janvier

2016 par décret, le DEAES (Diplôme d’Etat d’Accompagnant Educatif et Social) qui donne un statut professionnel aux personnes recrutées sur des contrats d’Auxiliaire de Vie Scolaire – AVS, dans l’Education Nationale (

62 de l’intervention dans leurs classes d’autres professionnels, notamment en bénéficiant de formations spécifiques. Cet argumentaire proposé par Philip l’amène à préciser :

…Il est essentiel que l’Education Nationale revienne sur sa représentation péjorative et erronée de ces méthodes (…) il ne s’agit pas, ici, d’imposer quoi que ce soit, il s’agit seulement d’informer et de former, c’est-à-dire de donner les moyens aux enseignants de pouvoir enseigner dans de bonnes conditions (…) une méthode ne s’applique pas aveuglément mais à partir d’une analyse de la situation pédagogique. (2014a, p.151-152).

Ce travail est important dans la mesure où les répercussions sur l’avenir de l’enfant avec autisme, retentissement de la scolarisation sur sa vie d’adulte, ne peuvent être négligées (Philip, 2014a ; Lemonnier, 2012 ; HAS, 2012). L’action de la scolarisation sur l’évolution des personnes avec autisme est aujourd’hui peu étudiée et la littérature relativement restreinte (Philip, 2014b). La place de l’Education Nationale dans l’organisation des dispositifs à mettre en place pour l’autisme est grandissante, comme en témoigne la présence d’un de ses représentants, un membre de l’Inspection Générale de l’Education Nationale (IGEN), dans l’évaluation du 3ème

plan autisme 2013-2017 dans la perspective de l’élaboration du 4ème plan à venir (Compagnon, Petreault & Corlay, 2017). Des dispositifs existent également par ailleurs pour soutenir la généralisation des modalités d’interventions recommandées dans le milieu scolaire (Pry, 2012 ; Bintz, 2013).

Il est difficile de recueillir des chiffres précis sur la scolarisation des enfants avec autisme en France. La revue de littérature de la HAS (2012) serait toutefois en faveur d’une évolution du nombre d’enfants TSA scolarisés en France ces dernières années. Des études récentes contribuent à dresser un état des lieux plus précis de la situation. Ainsi, 20 % des jeunes avec autisme seraient scolarisés en milieu ordinaire, dont une majorité à temps partiel : 27,7 % contre 9,5 % pour les autres handicaps ; scolarisation majoritairement dans l’enseignement pré-élémentaire (47,5 % contre 29,5 %) précisant qu’il y aurait moins de personnes avec autisme à mesure que l’on évolue dans le système éducatif (Philip, 2014b).

Le parcours des élèves avec autisme est identifié comme fréquemment complexe, pour les familles et les personnes TSA, mais également pour les enseignants. La question de la formation est une fois de plus centrale : les enseignants des classes ordinaires sont plus stressés et plus touchés émotionnellement par l’inclusion scolaire d’un enfant avec TSA que les enseignants spécialisés, pouvant s’appuyer sur un socle de formation et des aménagements plus importants (Boujut & Cappe, 2016). Il semblerait que 71 % des enseignants expliquent

63 leurs difficultés par un manque de formation sur l’autisme (Philip, 2014b). Des aspects positifs sont toutefois notables, l’intérêt des enseignants pour l’accompagnement des élèves TSA est fréquent, ils seraient ainsi nombreux à souhaiter s’investir auprès de ces enfants. La difficulté centrale semble relever de la compréhension de la nature de l’autisme et de ses particularités de fonctionnement, sans porter sur les adaptations pédagogiques. Philip rapporte à ce propos que la question des adaptations scolaires n’est pas problématique pour 60 à 69 % des enseignants, et ce même avec les élèves porteurs d’autisme (2014b).

Pour synthèse concernant la scolarisation, malgré une évolution positive de l’inclusion des élèves porteurs d’autisme en France depuis plusieurs années, beaucoup semble rester à faire. La question de la formation des enseignants est centrale et aujourd’hui décrite comme insuffisante pour permettre aux enseignants d’intervenir dans les meilleures conditions et de faciliter la scolarisation des élèves porteurs d’autisme. Cette scolarisation est identifiée comme un facteur essentiel pour mettre en place un maximum d’éléments en faveur de la future vie d’adulte des enfants porteurs d’autisme.